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Une végétation « naturelle » savanicole qui tend à disparaître sous

Planche photos 1 : Reliefs résiduels et champs de boules dans le bassin versant de la Doubégué

1.4 Une végétation « naturelle » savanicole qui tend à disparaître sous

l’action anthropique

La végétation « naturelle » du Burkina Faso a fait l’objet de nombreuses études. Les

travaux de GUINKO (1984) constituent une référence de bonne facture. Par ailleurs, ses travaux en coopération avec FONTES, portant sur la cartographie de la végétation et de l’occupation du sol, sont une source d’information utile sur la diversité biologique. La végétation « naturelle » de la région est alors la savane arborée avec quelques arbres, arbustes, herbes, remplacée, le long des cours d’eau, par les forêts galerie. La savane a souvent fait l’objet de débat afin de savoir si son origine tenait du rôle de la géomorphologie et de la

répartition des substrats (COLE, 1986), ou de l’impact de l’homme. Il nous semble que ce

savane peut être décrite comme « une formation végétale permanente diffuse qui incorpore des arbres et des graminées vivaces ou annuelles, sous un climat tropical à saisons

contrastées et parcourue régulièrement par les feux » (SCHULTZ et POMEL, 1994). Les

savanes sont, bien souvent, le résultat d’actions anthropiques réalisées depuis des millénaires.

Il s’agit, alors, de savanes secondaires. Le bassin du Nakambé est soumis à une forte

dégradation due aux effets conjugués du climat (sécheresse) et des activités anthropiques. Ainsi, cette région appartient au groupe Soudan caractérisé par les savanes et les forêts claires sèches (feu, arboriculture, culture du mil et du manioc) ; et plus précisément à une sous - zone de savane à Parkia, Butyrospermum, et Terminalia (MAIRE et al. 1994).

1.4.1 Un secteur de transition entre les forêts guinéennes et les savanes herbeuses

Il s’agit d’une zone de transition, où l’on rencontre des lambeaux de forêts, des

savanes à graminées, et des forêts galeries (Anogeissum sp, Combretum sp, Khaya sp,

Diospyros sp, Mitragyna sp). Cette région appartient au secteur phytogéographique soudanien

septentrional où domine la savane. Il s’agit d’une «formation végétale tropicale, plutôt

fermée, fondamentalement constituée d’herbes hautes et dures, parmi lesquelles dominent les

graminées à rhizome : Aristida, Imperata Pennisetum (herbe à éléphant). L’odeur en est forte

et épicée » (DEMANGEOT, 1976). Le secteur d’étude se situe dans la zone des savanes

arborées et arbustives, que l’on rencontre principalement sur les pentes et les glacis.

GUINKO et FONTES distinguent, alors, deux types de savanes arborées et arbustives (Fig. 16).

Fig. 16 : Carte biogéographique (domaine nord-soudanien) du secteur de Tenkodogo et de Bagré

Source : Fontès et Guinko, 1995

Les premières sont composées d’Anogeissus leiocarpus, de Butyrospermum parkii, de Lannea sp, etc. Le couvert ligneux est assez dense. Ces espèces se rencontrent sur des sols ferrugineux peu évolués et sur des lithosols à cuirasses. Ce sont des secteurs peu cultivés. Quant aux secondes, elles comprennent des Combretum sp., des Anogeissus leiocarpus, des

milieux perturbés. Les sols sont majoritairement pauvres, peu profonds, et gravillonnaires (lithosols sur cuirasse ferrugineuse associés à des sols ferrugineux remaniés ou à des sols hydromorphes). Ce second type comporte une occupation du sol plus importante (cultures en vallées, parc à karité)

Les savanes arbustives (photos a et b de la Planche photos 3) sont la formation végétale la plus représentée dans le bassin versant de la Doubégué, bien que très éparpillées. Ce type de savane est constitué d’espèces végétales culminant entre 4 et 7 m ayant un enracinement puissant (possibilité d’atteindre la nappe d’eau en profondeur), un tronc épais et noueux, et une écorce épaisse, souvent scoriacée (résistance aux feux et à la sécheresse). Ce sont essentiellement des espèces de rejet de souches à forte capacité de résistantes aux coupes multiples opérées par les populations pour les besoins domestiques : Acacia dudyenio, Acacia

gourmanensis, Lannea acida, Combretum glutinosum. Ce dernier, à titre d’exemple, est un arbuste buissonnant de 8 à 12 m de hauteur, dont la floraison s’effectue en saison sèche. Il est utilisé en pharmacopée, pour les teintures, le bois de construction de charbon, de feu, ou

encore comme outil. L’Acacia seyal est, quant à lui, utilisé pour la gomme ; et c’est un

ligneux à production fourragère très appréciée.

En définitive, au cours des 25 dernières années, la savane arbustive s’est étendue au détriment principalement de la savane arborée, mais également de celle boisée, des forêts galeries et des formations ripicoles, essentiellement sous l’impact anthropique combiné à la péjoration climatique (cf. chapitre 4).

La savane arborée est alors en régression. Elle se situe à la suite des savanes boisées et des forêts galeries entre le lac et le front de culture en rive droite, et le lac et les réserves

foncières en rive gauche. Elle comprend quelques arbres utiles à l’homme comme :

- le Butyrospermum paradoxum subsp parkii : le karité (photo a de la Planche

photos 2) est une espèce agroforestière à valeur économique très exploitée et utilisée pour le bois de chauffage, de charbon, le latex, et la noix de karité. Sa graine donne naissance au beurre de karité et a des usages multiples (pharmacopée, cosmétique, alimentation, etc.) ;

- le Parkia biglobosa : le néré (photo b de la Planche photos 2) est maintenu dans

les parcs agroforestiers dans la tradition Mossi et Bissa (fétiche). Il a une valeur

économique, c’est une plante médicinale remarquable, un aliment de complément

(noix, graine, fruit) et est utilisé comme insecticide dans la fabrication des crépis ;

- le Tamarindus indica : le tamarinier (photo c de la Planche photos 2) est cultivé

pour ses fruits (« dattes de l’Inde ») et pour ses valeurs socioculturelle ;

- le Faidherbia albida (syn. Acacia albida) (photo d de la Planche photos 2) : le

balazan est un arbre de grande taille, conservé sur les champs. Il est résistant à la sécheresse, perd ses feuilles en début de saison des pluies, et reverdir pendant la saison sèche offrant alors son ombre et un excellent fourrage aux troupeaux. S’alimentant dans les nappes phréatiques, il ne concurrence donc pas les cultures.

Il fixe l’azote de l’air par le biais de bactéries (rhizobium) enfouies sous terres

dans des nodules fixés sur le chevelu racinaire (DREYFUS in VINCENT, 1990) ; on observe alors le transfert d’importantes quantités d’azote vers ses feuilles. Sa

litière améliore donc le sol (structure homogène, meilleure cohésion, augmentation de la capacité d’échange en cation (CEC), de l’azote, de l’oxyde de calcium, et de l’oxyde de magnésium) (SCHULTZ et POMEL, 1994). Avant la période coloniale, cet arbre était emblématique du paysage Bissa ; les causes de sa destruction sont l’extension de la culture d’arachide, le surpâturage, et son utilisation comme bois d’œuvre. Fournissant du bois, son tanin, ses fruits et ses feuilles sont également utilisés dans la pharmacopée traditionnelle ;

- le Ceiba pentandra : le fromager ou kapokier (photo e de la planche photos 2) est

un bois sacré, moyennement utilisé ;

- le Lannea microcarpa : le raisinier (photo f de la planche photos 2), dont la

floraison s’effectue en fin de saison sèche, est utilisé comme bois de construction,

de feu, de charbon, mais aussi en menuiserie, comme teinture, et pour la réalisation de cordage. Il a également une valeur coutumière (masque) ;

- le Ficus granpholocarpa : le figuier,

- l’Acacia senegalensis : le gommier blanc ou encore « werek » (en wolof), gomme

arabique,

- et certaines variétés de Combretum, de Terminalia, de Disopyros, de Mytragyna,

etc.

Enfin, il est intéressant de noter qu’en 1988, selon MIETTON, la région d’étude présentait

encore une formation ligneuse, haute claire : savane arborée à Parkia biglobosa et à

Butyrospermum paradoxum.

La savane boisée a, quant à elle, quasiment disparu sous l’action de la pression humaine. Néanmoins, bien qu’une immense partie ait été ennoyée ou remplacée par des activités humaines, les berges du Nakambé, celles de ses principaux émissaires et des

affluents du lac (comme la Doubégué) portent encore des reliquats de forêts galeries16 et des

formations ripicoles. Ces dernières demeurent plus importantes sur la rive droite de la retenue, et surtout en aval du barrage (photo 3).

Photo 3 : Vue de la forêt ripicole de la Doubégué (second plan) Cliché : E. Robert, 2009

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