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Le ruissellement, ag ent principal de l’érosion dans le bassin versant de la

Conclusion de la Partie 1

3.1 L’action prédominante du ruissellement, relayée par le vent

3.1.2 Le ruissellement, ag ent principal de l’érosion dans le bassin versant de la

Doubégué

Le ruissellement se produit dans deux cas : lorsqu’il y a saturation du sous-sol et des

sols en eau, et lorsque la battance empêche les infiltrations. Il convient, également, de

distinguer la saturation durable et l’instantanée. La première est peu présente dans la région

de la Doubégué, car elle suppose un engorgement préalable ce qui s’observe rarement en climat à saison contrastée. La seconde prédomine. Elle répond à une structure litée, favorisant l’imperméabilisation des sols. La capacité d’absorption de ces sols est alors trop faible par rapport aux intensités observées en début d’hivernage. Le ruissellement de battance est issu de

l’effet splash occasionnant des phénomènes d’engorgement. Si la durée de l’averse est assez

importante, les zones engorgées vont devenir coalescentes et permettre la mise en place d’un écoulement plus concentré, principal facteur du ravinement.

Le ruissellement est toujours précédé de la formation de plaques d’engorgement. On

peut décomposer la mise en place de cet agent en différentes phases. La phase d’imbibition se segmente en une phase d’infiltration totale et une phase transitoire (flaque). Puis, on observe

la mise en place de ruissellements, liés à l’extension des flaques débordant, qui se rejoignent

en contournant les obstacles. Le ruissellement est lié à la porosité du sol et à la capacité

d’infiltration de l’eau. Dans le domaine nord-soudanien, l’infiltrabilité des sols dépend

essentiellement de l’importance du couvert herbacé (POSS et VALENTIN, 1983). Or, dans

le bassin versant de la Doubégué, les formations dites « naturelles » sont en recul. De plus, jusqu’au milieu du mois d’août, la majorité des sols mis en culture sont peu ou pas protégés. L’infiltration est également liée à l’organisation pédologique interne et aux états de surface, lesquels varient selon la saison, ainsi qu’aux caractéristiques des averses, de l’état

d’humectation du sol, et de la pente. Dans notre secteur, les précipitations sont agressives,

particulièrement en début d’hivernage. L’état de l’humectation s’améliore au fur et à mesure de la mise en place de la saison des pluies. Toutefois, au début de cette dernière, les sols très secs, sur lesquels est souvent observée une croûte de dessiccation, ne sont pas propices à l’infiltration. A l’inverse, la pente en général faible peut favoriser l’infiltration. Cependant,

aux vues de l‘importance des autres facteurs, son action est modérée. L’infitrabilité des sols

de la région peut être par conséquent qualifiée de faible, principalement au début de l’hivernage. Même au cœur de ce dernier, elle demeure minime aux vues de la vitesse des temps de réponse observés entre le début d’une averse et le ruissellement visible sur les versants. Nous développerons cette rapidité des temps de réponse lorsque nous aborderons les questions de turbidité. L’exemple observé à Belcé (le 27/07/2009) est particulièrement illustratif (photos 23, 24, 25 et 26).

Le mode de ruissellement est essentiellement contrôlé par le couvert végétal. Il en existe alors différents types. Le ruissellement en filet ou diffus caractérise un milieu sous

savane « naturelle ». Il est formé de filets d’eau anastomosés de faible intensité, non

hiérarchisés, de formes indécises. Les éléments fins sont pris en charge, et des touffes d’herbes peuvent être déchaussées. Son épaisseur est faible. Il est lent et redistribue les particules fines concentrées à la surface du sol. Il est souvent lié aux pluies de la ZCIT, et à

des pentes faibles. Le ruissellement en nappe est l’étape suivante. Il conduit à une ablation

prend de l’épaisseur et de la vitesse en bas de versants où de nombreuses plaques de sols nus se forment. La végétation joue un rôle en le freinant. Les ruissellements diffus et en nappe sont responsables d’une ablation changeante dans le temps et l’espace qui est insidieuse et sélective.

Photos 23 et 24 : Site de Belcé le 27/07/2009 à 12h59

Photo 25 : Site de Belcé le 27/07/2009 à 13h09 Photo 26 : Site de Belcé le 27/07/2009 à 13h17 Clichés : E. Robert, 2009

Les zones de bas de versant sont aussi les lieux d’un ruissellement de type, cette

fois-ci concentré, entraînant la formation de rigoles, de ravines, et de ravins. Les vertisols sont les plus touchés par l’érosion qui se propage vers l’amont des versants à partir des axes

d’écoulement. Ces formes se greffent sur les ruptures de pente. On rencontre une vaste zone,

localisée entre Bagré - village et la Doubégué, constituée de sols bruns eutrophes tropicaux

vertiques et ferruginisés (photo 27) ainsi qu’au sud-ouest de Ounzéogo, et le long de la piste

de Loanga (entre Ounzéogo et Sasséma). Les pistes, comme celle de Loanga, jouent également un rôle en collectant les écoulements concentrés. L’apparition d’un ruissellement concentré élémentaire est aussi favorisée par la texture grossière d’un horizon induré à faible profondeur (photo 28).

Le ruissellement concentré prend différentes formes. Celui en rigole produit une incision temporaire. Ce processus se déroule lors des averses pendant lesquelles l’eau se concentre et se canalise par l’action de la végétation, du microrelief, et des cultures qui sont

des obstacles à l’écoulement. Il faut distinguer les rigoles en anastomose, en parallèles, et

hiérarchisées. Les premières balayent le secteur amont. Les secondes concernent les pentes

défrichements. Les troisièmes sont le témoin d’une augmentation de l’érosion verticale et du passage à une forme en ravine. Il existe également le ruissellement en ravines. La charge solide est plus forte, la vitesse du fluide plus grande. On le rencontre principalement en bas de versants là où le versant laisse la place au bas glacis.

Photo 27 : Ravine entre Bagré village Photo 28 : Horizon induré caractéristique du bassin et la Doubégué (piste de Pata) versant de la Doubégué (secteur aval)

Clichés : E. Robert, 2009

Il convient également de revenir sur le système des ravins. Dans les sols ferrugineux, ils ont souvent un profil en U dans lesquels les argiles assurent la structure massive qui garantit la verticalité de leurs berges. De l’amont vers l’aval, les ravins s’élargissent, les berges diminuent et le flux reprend sous forme de ruissellement en nappe (PRINCIPI, 1992). Dans le bassin versant de la Doubégué, deux secteurs, entre autre, présentent un ravin. Le premier se localise en rive gauche entre Douka et Zaba, et le second en rive droite, le long de la piste reliant Tenkodogo à Ounzéogo, proche de Loanga. Ce dernier est profond d’environ 2 m, pour 4,5 m de large, et plusieurs centaines de mètres de longueur. Nous développerons davantage cette forme d’érosion au cours du chapitre 5 lorsque nous aborderons l’amplification de l’érosion de type linéaire.

Par ailleurs, le ruissellement est différent selon le mode d’occupation du sol. Sous

savane, sur pente faible (de 0,5 % à 3 %), et quel que soit le type de sol (brun vertique ou

ferrugineux), le ruissellement annuel est faible de 0,2 % à 22 %, et l’érosion de 0,03 à

0,93 t/ha/an (MIEETON, 1988). Quant à NEBOIT (1991), il évalue les pertes en terres de 0,02 à 0,4 t/ha/an sous savanes arbustives. Les savanes peuvent donc être qualifiées de

pénéstables. Il s’agit du milieu « naturel » de notre bassin versant. Dans ces conditions, cet

espace serait donc peu soumis à un ruissellement important et à une forte érosion. Mais, ces zones sont restreintes dans le bassin versant de la Doubégué. Lors de l’étude diachronique, nous reviendrons sur ces secteurs qui sont particulièrement bien protégés, et par conséquent peu concernés par les risques de pertes en terre. Ils se localisent principalement dans le secteur sud du bassin versant de la Doubégué. Comme nous le développerons ci-après, les formations de savane représentaient 60 % de cet espace en 1986, et seulement 25 % en 2007.

Ainsi, le facteur expliquant les ruissellements plus importants et l’accroissement des

cette évolution seront détaillés plus précisément : extension des superficies cultivées et des pâturages, coupe de bois de chauffe, etc.

Lors d’une mise en culture, le type de sol influe également sur le ruissellement. Des sols ferrugineux peu épais présentent un ruissellement plus limité que les sols gravillonnaires : 36,5 % contre 40 % (MIETTON, 1988). Toutefois, sur parcelle, le coefficient de ruissellement diminue au bout d’un an de repos, et sur les sols nus, le

ruissellement est encore plus important : 47 % (MIETTON, 1988). L’érosion varie aussi selon

le type de sol. Ce dernier joue également un rôle lors de la reconquête végétale. Elle sera plus lente en présence de sols gravillonnaires que de sols vertiques. Les sols ferrugineux sont dans une position intermédiaire.

Dans le bassin versant de la Doubégué, les ruissellements sont importants durant le

mois d’août, qui connaît le maximum mensuel (245 mm en moyenne) et le plus grand

nombre de jour de pluies. Des fortes intensités pluviométriques se combinent à une humidité préalable importante. En effet, au cours du mois de juillet (176 mm en moyenne), les sols se sont peu à peu gorgés d’eau. De plus, comme nous l’avons déjà évoqué, les parcelles mises en culture sont encore peu protégées durant le mois d’août. Le couvert végétal joue alors uniquement un rôle dans les secteurs non cultivés. Ainsi, les sols dégradés produiront les ruissellements les plus importants, suivi des sols gravillonnaires mis en culture, puis les sols ferrugineux cultivés, et les sols bruns eutrophes à tendance vertique (Tab. 9).

L’étude des parcelles cultivées doit également prendre en compte l’érodabilité du sol, la

perméabilité, les techniques culturales, et le type de culture (cf. 3.2 et Chapitre 4). A titre d’exemple, l’arachide, la plus couvrante à cette époque de l’année est synonyme d’une meilleure protection des sols.

Type de sols Erosion (t/ha/an)

Sols nus 35

Sols gravillonnaires cultivés 13 à 35

Sols ferrugineux cultivés 11 à 21

Tab. 9 : Erosion selon le type de sols Source : d’après Mietton, 1988

Par ailleurs, l’érosion du sol par l’intermédiaire de l’agent hydrique ne porte pas

uniquement sur la perte de la couche arable. Il faut également tenir compte de ses impacts sur la levée des plantes, leur croissance et leurs rendements. La perte d’éléments nutritifs du sol peut affecter ces derniers. En bas des pentes, le dépôt du matériel érodé en amont peut retarder l’émergence de la semence, enterrer les jeunes pousses et nécessiter un deuxième semis.

L’autre ressource essentielle affectée par le ruissellement est l’eau des cours d’eau. En effet, le ruissellement peut être un facteur de pollution des eaux, puisque les eaux de ruissellement sont vectrices de matières en suspension et d’éléments originaires des activités agricoles (produits phytosanitaires, azote, etc.) (cf. Partie 3). Avec la charge en suspension, circulent les charges organiques (danger pour l’oxygène nécessaire à la faune conséquence de l’eutrophisation), et les apports de phosphore fixés sur les particules minérales (engrais

Pour conclure cette sous-partie, il est important de rappeler succinctement les

conséquences multiples et négatives de l’augmentation du ruissellement :

- un déficit de recharge des nappes phréatiques,

- l’érosion de sols cultivés ou peu couverts,

- l’augmentation du débit instantané des cours d’eau, l’érosion des berges et la

formation de crues dévastatrices,

- la contamination des cours d’eau par les matières en suspension et les substances

qu’elles adsorbent, la stérilisation du lit mineur par les particules fines, la

diminution de la diversité halieutique (dans le lac de Bagré),

- la contamination des nappes alluviales à travers des substrats très filtrants.

Toutefois, bien que l’agent hydrique soit le facteur premier de l’érosion des sols dans le bassin versant de la Doubégué, il ne faut pas omettre de présenter ses relais occasionnels que sont les agents thermiques et éoliens.