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Une voracité sans limite camouflant de nombreuses faiblesses

CHAPITRE 2. LA PAIX ENTRE LES DEUX COURONNES COMME LEITMOT

4. OPPORTUNISME ET HYPOCRISIE : L’ESPAGNE COMME ENNEMIE

4.1. La superbe du lion espagnol

4.1.2. Une voracité sans limite camouflant de nombreuses faiblesses

Les Espagnols, de caractère vaniteux et exubérant, font montre de beaucoup d’ambition sur le plan diplomatique. Ils ont le sens de la conquête et de l’exploration mais la plupart des acteurs ou des porte-parole de la Fronde ne présentent pas la chose de cette manière. Ils mettent plutôt l’accent sur leur infinie voracité qui leur fait poursuivre sans cesse leur quête de grandeur en termes de territoires, de

261 Les pressantes exortations de l’Europe aux quatres monarchies Chrestiennes, & autres Etats de

son Empire, pour la paix universelle, & l’union de leurs armes, pour la destruction de l’Empire Ottoman, op. cit., p. 15.

262 Michel De Waele, Réconcilier les Français : la fin des troubles de religion (1589-1598), op. cit.,

p. 129-134; Joseph Pérez, op. cit., p. 228-229; Michel Bareau, « L’univers de la satire anti- espagnole en France de 1590 à 1660 », loc. cit., p. 729.

richesses et de pouvoir. À l’instar du lion, fort et puissant, qui doit se nourrir continuellement pour demeurer le roi, l’Espagne, qui prétend à la monarchie universelle, doit elle aussi se nourrir sans cesse pour gagner en expansion. En effet, pendant la guerre de Trente Ans, les ennemis de l’Espagne et de la dynastie des Habsbourg ont beaucoup exploité ce thème de la monarchie universelle et cela fut employé comme un des principaux motifs pour justifier leur engagement respectif dans le combat contre elles, au nom de la conservation de la liberté de chaque puissance et du maintien de l’équilibre européen263. Il faut également spécifier que

suite à l’assassinat d’Henri III en 1589, Philippe II, qui convoitait déjà la couronne de France, pose la candidature de sa fille Isabelle, elle-même petite-fille d’Henri II, à la tête du royaume, ce qui contribue alors évidemment à alimenter cette représentation de la voracité espagnole264. Au sein des mazarinades, cette ambition transformée

en présomption par la propagande est une préoccupation récurrente. Pour la France, le sentiment de menace à l’égard de l’Espagne est directement proportionnel aux signes que cette dernière exprime quant à sa faim de conquêtes. Cette menace est par ailleurs amplifiée par l’alliance de l’Espagne avec la branche autrichienne de la dynastie des Habsbourg, avec qui elle œuvre incessamment pour rabattre les efforts de la France. Beaucoup de stéréotypes découlent donc de la jalousie française face à la suprématie non seulement de l’Espagne mais également de toute la dynastie des Habsbourg en Europe. La soif de puissance du souverain d’Espagne n’a pas de limites et il faut y mettre un frein « affin que la maison d’Autriche, à qui Charles-Quint a tant donné d’ambition par ses Conquestes, puisse renoncer à la pretention qu’elle a de long-temps, de se faire la maistresse absoluë de tout l’Univers265 ». Encore ici, l’extravagance est déplorée, méprisée. La voracité

de l’Espagne est également associée à celle d’un parasite insatiable : « Sangsuë en peu de temps mourra, De ce que les Roys d’Espagne ont succé de leurs voisins la

263 John Huxtable Elliott, Spain and Its World, 1500-1700: Selected Essays, op. cit., p. 115; Jean-

Pierre Bois, loc. cit., p. 8; Michel Devèze, L’Espagne de Philippe IV (1621-1665) : siècle d’or et de

misère, op. cit., t. 1, p. 163.

264 Joseph Pérez, op. cit., p. 234-235; Rafael Altamira, op. cit., p. 822; Michel De Waele et Félix

Lafrance, loc. cit., p. 40; Richard A. Jackson, op. cit., p. 107.

265Les pressantes exortations de l’Europe aux quatres monarchies Chrestiennes, & autres Etats de

son Empire, pour la paix universelle, & l’union de leurs armes, pour la destruction de l’Empire Ottoman, op. cit., p. 21.

plus grande partie des terres et principautez qu’ils occupent266 ». Le comportement

de l’Espagne est lourd de conséquences sur les autres États d’Europe, puisqu’il les dépouille et les affaiblit.

De par l’envergure de ses ambitions, l’Espagne se trouve continuellement en confrontation avec les autres peuples qui doivent se défendre. La vanité, l’orgueil et le stéréotype du fanfaron reviennent ici dans cette mazarinade anti-espagnole où ces caractéristiques sont mises en relation avec les prétentions à la monarchie universelle :

L’Orgueil de l’Espagne et le dessein superbe de son temairaire et pernicieux Conseil, n’ayant pas un moindre object à sa vanité que la Monarchie universelle, ne considere tous les peuples de la Terre que comme ses ennemis. Tous les Rois et les prince du monde, qui de leurs puissances veritables, bornent la sienne imaginaire, sont des obstacles qu’elle considere avecques fureur; sa gravité audacieuse fronce le sourcil, et regarde de travers, toutes les forces qui confondent ses vastes pensées. D’une posture qu’on ne peut nommer qu’Espagnolle, et d’une mine fanfaronne autant que chagrine, elle souffle sur le bout de son espée comme pour enlever des orages, des foudres, et des tempestes, contre toutes les nations de l’Univers : et si elle disposoit du tonnerre qui gronde dans la rue, il n’y auroit plus au monde que de ses sujects267.

L’attaque est ici dirigée explicitement vers le Conseil, constitué du monarque Philippe IV ainsi que de son entourage, chargé des relations avec les puissances étrangères. Les reproches ne s’adressent donc pas à l’ensemble du peuple espagnol268. Cet extrait cité illustre très bien le concept d’inversion des valeurs dont

il fut déjà question dans l’introduction, c’est-à-dire que l’ambition et la témérité sont transformées par l’auteur en vanité, en orgueil et en une sorte de mégalomanie.

266Jacques Mengau, op. cit., p. 15.

267L’Espagne demandant la paix aux pieds de la maieste royalle, et du parlement, op. cit., p. 1. 268 Si auparavant Philippe II avait été présenté comme un tyran vis-à-vis de ses propres sujets qui en

étaient ses victimes, ce thème du monarque espagnol qui fait souffrir les peuples sous son autorité est présent en arrière-fond, mais il ne prend pas une place prépondérante au sein des mazarinades que nous avons étudiées.

L’objectif est d’entacher la fameuse gloire espagnole269 et de dépeindre l’adversaire

comme celui qui se croit tout permis et tout puissant mais qui doit ravaler ses envies de grandeur puisque d’autres États sont en mesure de placer des obstacles sur son chemin. En ce sens, la puissance des Espagnols est méprisée, voire reconnue comme inexistante, au point d’être traitée d’ « imaginaire ». Cette manière de nier le pouvoir de l’adversaire semble être en apparence un rejet de l’Autre, mais dans les faits, il s’agit de l’instrumentalisation de l’Autre pour servir les intérêts de chacun des partis.

Plusieurs auteurs de mazarinades mettent de l’avant le fait que sur la scène européenne et même outre-mer, l’Espagne n’a pas les moyens de servir à juste titre sa convoitise illimitée. Certes, les Espagnols forment une nation puissante qui a longtemps réussi à maintenir sa suprématie en Europe, mais ils sont désormais en déclin, notamment sur le plan militaire et ne peuvent plus se prétendre tout puissants. Plusieurs pamphlets qui traitent de l’Espagne en lien avec la Fronde mettent en évidence ce décalage entre la supposée fiction dans laquelle se vautre l’administration de Philippe IV et la réalité. L’épuisement des troupes espagnoles et leur perte de vitesse270 s’avèrent être les arguments principalement avancés pour

défendre ce point de vue, ce qui, partant, montre que les Français ne sont pas sans ressources face à cet ennemi dont la chute a débuté. L’auteur d’une mazarinade de 1649 affirme que les trois éléments que Charles Quint, au XVIe siècle, disait être les

trois nerfs de la guerre, à savoir les finances, les vivres et les soldats, font défaut aux Espagnols, ce qui positionne favorablement la France face à son ennemi271.

Premièrement, la combinaison de la guerre avec les Pays-Bas et de la guerre de Trente Ans, additionnée de la guerre franco-espagnole qui se pérennise, se fait ressentir en Espagne, où les fonds s’épuisent. Il faut savoir que dès les années

269 Françoise Richer-Rossi, « La vision de l’Espagne d’Andrea Navagero ambassadeur vénitien

auprès de Charles Quint (1524). Lieux communs et discours politique », dans François Delpech,

L’imaginaire du territoire en Espagne et au Portugal (XVIe-XVIIe siècles), op. cit., p. 6.

270 Michel Devèze, op. cit., t. 2, p. 549-551; Anne Dulphy, op. cit., p. 203.

271L’Espagne affligée et en trouble, de voir la France paisible, & exempte du naufrage, où elle pensoit

1575-1580, l’Espagne amorce son déclin, que ce soit au sein même de la péninsule ibérique ou bien par rapport à ses possessions en Amérique; une grave crise économique se met alors en place. L’exploitation des ressources métallurgiques en provenance d’outre-mer, du Mexique ou du Pérou par exemple, perd de la vitesse et les populations de ces « Indes272 » sont de plus en plus autosuffisantes, ce qui

désavantage financièrement l’Espagne. À l’interne, le phénomène d’inflation des prix des produits espagnols entraîne l’accroissement de l’importation étrangère. L’industrie du textile, qui était auparavant au centre de la vie économique du royaume, souffre de l’effondrement de la demande273. Finalement, l’Espagne vit une

crise démographique qui entraîne par conséquent une chute considérable des recettes fiscales274. L’ensemble de tous ces paramètres ont en conséquence poussé

plusieurs contemporains des événements, espagnols eux-mêmes, ainsi que beaucoup d’historiens par la suite à parler d’une réelle « décadence espagnole » au XVIIe siècle275. Les Français connaissent cette situation et ils ne sont pas sans savoir

le prix de tant d’années d’affrontements pour l’Espagne. Les espérances qu’ils nourrissent quant au manque de moyens financiers de leurs opposants sont perceptibles au sein de la propagande :

… qu’encore qu’ils ayent en des Indes quinze cens trente millions d’or, selon la supputation qu’ils ont autrefois faite, & semble qu’il y a tousiours eu beaucoup plus chez nous que chez eux, à qui neantmoins il en faut bien dauantage qu’à nous, tant à cause de la grande estendue de leurs terres, que leur separation rend presque toutes frontieres, que pour la

272 Selon Pierre Vilar, le renversement de sa situation économique, qui avait été très prospère dans

la majeure partie du XVIe siècle, amena l’Espagne à prendre conscience qu’elle était elle-même

devenue « les Indes de l’étranger ». Voir Pierre Vilar, « Les Primitifs espagnols de la pensée économique », dans Maxime Chevalier, Robert Ricard et Noël Salomon, dir., Mélanges offerts à

Marcel Bataillon, tome 64 bis, Bordeaux, Féret, 1962, p. 272-273.

273 Joseph Pérez, op. cit., p. 330-337; Michel Devèze, op. cit., t. 2, p. 546-552; Anne Dulphy, op. cit.,

p. 210-218.

274 Si, du milieu du XVe siècle à la fin du XVIe, l’Espagne a vécu une période de croissance

démographique importante, au XVIIe siècle, la réalité est toute autre; les épidémies de peste

successives apparaissent au premier rang des coupables de la chute considérable de la population, suivies par le marasme économique qui entraîne une décroissance du taux global de natalité. Voir Joseph Pérez, op. cit., p. 319-320.

275 Certains intellectuels de l’époque, surnommés arbitristas, réfléchissent à la manière d’améliorer

la situation et proposent des projets de réforme des finances de l’État pour ralentir voire empêcher cette chute, mais en vain. Voir Joseph Pérez, op. cit., p. 320, 334-337; Michel Devèze, L’Espagne de Philippe IV (1621-1665) :siècle d’or et de misère, op. cit., t. 2, p. 546-549.

diuerse liaison de leurs entreprises, qui les obligent à des frais dautant plus grands, qu’ils font presque toutes choses avec plus d’or que de fer276.

Cet extrait témoigne peut-être aussi de la jalousie de la France à l’égard des possessions espagnoles sur le globe et des ressources naturelles qu’elles pouvaient fournir à l’adversaire.

Deuxièmement, la question du ravitaillement en denrées est également signalée. En opposition au royaume de France où les terres sont apparemment beaucoup plus fertiles, le sol d’Espagne est décrit comme désertique et stérile, ne pouvant pas répondre aux besoins alimentaires du peuple et des gens d’armes. En effet, depuis le dernier quart du XVIe siècle, l’Espagne vit une récession agricole

importante, entraînant plusieurs conséquences. Dans les plaines des régions de la Castille, de l’Estrémadure et de l’Andalousie, les précipitations sont irrégulières et les sols arides et propices à l’érosion. En Galicie où il pleut davantage, le taux d’acidité du sol fait obstacle à de bonnes récoltes. En 1609, l’expulsion des Morisques qui jouaient un rôle important sur le plan de la culture agricole, principalement dans la région de Valence, participe également au déclin des rendements de la terre. Cette région passe alors de florissante à désertique. Un mouvement considérable d’exode rural apparaît; la crise de subsistance entraîne errance et misère277. Le vieux stéréotype des raves, principal légume accessible aux

Espagnols étant donné le contexte, figure au sein de quelques mazarinades278, à

l’instar de plusieurs gravures satiriques de l’époque. Cela montre une autre faiblesse de l’ennemi, le dépeignant comme miséreux et inapte à pourvoir à ses propres besoins.

Il est fait mention, troisièmement, des troupes armées du roi d’Espagne en Flandres comme ailleurs qui sont composées en majeure partie de mercenaires

276 Ibid., p. 8.

277 Anne Dulphy, op. cit., p. 214-215; John Lynch, op. cit., p. 201-210; Michel Devèze, op. cit., t. 1,

p. 267, Joseph Pérez, op. cit., p. 331-332.

278 Voir notamment L’Espagne affligée et en trouble, de voir la France paisible, & exempte du

puisque les soldats espagnols sont trop peu nombreux et qu’ils ne s’enrôlent que sous la contrainte, contrairement aux hommes français qui s’engagent beaucoup plus volontairement pour combattre pour leur roi279. Par opposition, le soldat français

est beaucoup plus fort, brave et digne de confiance que son homologue espagnol :

La Monarchie universelle n’a plus gueres de force en son ame : Elle en a ralenti l’ardeur pour en avoir plus contre nous : Elle juge pourtant bien il y a desja longtemps que toute sa force n’est pas suffisante pour assouvir son désir, elle voit par les pertes qu’elle a faittes qu’il fait mauvais s’éprouver contre de justes et de vigoureux combattants : Elle sçait assez qu’elle difference se rencontre entre ces fanfarons et nos gens d’armes : Entre ses vains enfans et nos Généreux280.

Dans la réalité, il est vrai que le déclin démographique de l’Espagne ne permet plus un recrutement national suffisant dans les armées, contrairement à la meilleure conjoncture que la péninsule avait connue au XVIe siècle sur ce plan. Il est

également exact d’affirmer que le recours aux mercenaires et aux entrepreneurs de guerre étrangers est un phénomène considérable dans l’Espagne du XVIIe siècle,

mais cela est alors un fait généralisé en Europe. Par exemple, en France, le roi trouve plus simple d’employer des étrangers plutôt que les nobles de son propre royaume, car cela lui apparait moins menaçant pour sa souveraineté281. En ce qui a

trait à l’enrôlement des hommes dans les armées en Espagne, le royaume souffre en effet d’une crise du volontariat. Bien que les effectifs des armées au service de l’Espagne, constituées d’abord des fameux et fidèles tercios puis de nombreuses troupes italiennes, wallones et allemandes, subissent une croissance au cours du XVIIe siècle, un désintéressement des Espagnols face à la carrière militaire se fait

sentir. Notamment, les nobles délaissent de plus en plus leur antique obligation militaire pour s’orienter vers les charges gouvernementales au sein de l’administration, et ce, à partir du règne du roi Philippe III. Une des solutions

279 Lettre du roy, au Parlement de Paris : Escrite de Saumur le 22. Feurier 1652. sur les affaires

presentes, op. cit., p. 4; L’Espagne affligée et en trouble, de voir la France paisible, & exempte du naufrage, où elle pensoit que que nos derniers troubles la devoit faire abimer, op. cit., p. 9.

280L’Espagne demandant la paix aux pieds de la majeste royalle, et du parlement, op. cit., p. 2-3. 281 Il en fut question précédemment, à la page 30.

envisagée, mais non suffisante, est alors le recrutement, par l’usage de la force, entre autres d’individus jugés oisifs ou hors-la-loi282. Une fois de plus, cela ne doit

pas occulter la sombre réalité du côté des Français où les effectifs ne cessent de grimper tout au long du XVIIe siècle mais où cependant les techniques de racolage,

les divers actes de violence et même les enlèvements dont les recruteurs font usage ont pour conséquence de créer une soldatesque incompétente, totalement désintéressée et prompte à la désertion. Les problèmes de recrutement sur le plan militaire ne semblent donc pas avoir été moins considérables en France que du côté de l’ennemi espagnol283.

Un autre pamphlet met l’accent sur les dissensions au sein de cette « vaste monarchie agrégative284 » que représentent l’Espagne et ses possessions. Les

révoltes de Catalogne, du Portugal et de Naples285 sont les principaux exemples des

déchirures que subit l’Espagne en son sein et qui participent à la pousser à l’essoufflement. L’Espagne n’est pas toute puissante puisque les relations que son gouvernement central de Castille entretient avec certains territoires sous son

282 Geoffrey Parker, La guerre de Trente Ans, op. cit., p. 288-295.

283 Guy Rowlands, The Dynastic State and the Army under Louis XIV : Royal Service and Private

Interest, 1661-1701, Cambridge, Cambridge University Press, 2002, p. 207-209, 257-258; Lucien

Bély, Yves-Marie Bercé, Jean Meyer et René Quatrefages, Guerre et paix dans l’Europe du XVIIe

siècle, vol. 2, Paris, SEDES, 1991, p. 13-17; Michel Devèze, L’Espagne de Philippe IV (1621- 1665), tome 2, Paris, SEDES, 1971, p. 550-551; David Parrott, Richelieu's Army : War, Government, and Society in France, 1624-1642, Cambridge, Cambridge University Press, 2001,

p. 292; Lucien Bély, Jean Bérenger et André Corvisier, Guerre et paix dans l’Europe du XVIIe

siècle, vol. 1, Paris, SEDES,1991, p. 29.

284 Cécile Becdelièvre, « Alain Hugon. Au service du Roi Catholique, “honorables ambassadeurs” et

“divins espions” : représentation diplomatique et service secret dans les relations hispano- françaises de 1598 à 1635 », Bibliothèque de l'école des chartes, 165, 2 (2007), p. 547. L’ensemble des possessions espagnoles était appelé « Monarquia Universal Española » et elle était composée de deux piliers, soit « les Indes », c’est-à-dire leurs possessions en Amérique, puis « les Espagnes ». Voir Michel Devèze, op. cit., t. 2, p. 437.

285 La définition des événements napolitains à la fin des années 1640 n’est pas clairement établie,

puisque les termes « révolte » et « révolution » sont tous deux employés pour y faire référence. Le terme « révolte » est le plus souvent employé dans l’historiographie récente, mais Alain Hugon parle plutôt d’un « palimpseste révolutionnaire », un mouvement insurrectionnel issue de Naples mais se déployant beaucoup plus largement dans les douze provinces du royaume puis enfin au sein d’une vague révolutionnaire beaucoup plus large, à l’échelle européenne. Au fil des événements, la révolte initiale menée par le fameux Masaniello aurait changé de forme pour acquérir une structure réellement révolutionnaire, qui n’aurait cependant pas duré, de par la forte répression de l’Espagne. Voir Alain Hugon, Naples insurgée, 1647-1648. De l’événement à la

autorité ne sont pas harmonieuses et cela cause par conséquent beaucoup de soucis à la couronne espagnole. Cette représentation des difficultés de l’Espagne quant au fait de refreiner les révoltes en son sein est corroborée par une pièce des archives diplomatiques françaises286. Il s’agit des instructions du gouvernement

d’Anne d’Autriche adressées au sieur de Vautorte, conseiller ordinaire du roi en ses conseils :

… si nous avons quelques brouilleries dans le Royaume, les Etats du roi d’Espagne n’en sont pas exempts, que nous savons nos maux et ceux dudit Roi, avec cette différence pourtant qu’il n’est pas en son pouvoir, comme en celui du Roi à l’égard de Paris, d’apaiser les nouvelles