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Les freins et les leviers au développement des EnR en Pays de la Loire

CHAPITRE 4 Situation énergétique : bouquet et consommations énergétiques en Pays de la Loire

4.1. L’offre énergétique

4.1.3. Un potentiel de production locale

La SCIC les 7 vents du Cotentin propose donc, à travers son étude, une série d’alternatives à l’EPR : création d’ALE, actions en terme d’efficacité énergétique et d’économie d’énergie, développement des EnR et R&D dans le renouvelable. Elle dénonce activement le budget consacré à la construction de l’EPR qui pourrait être redistribué plus localement et plus durablement. Voici une synthèse des mesures proposées :

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5.2.1. A l’origine du développement des EnR : les associations d’opposition au nucléaire 265 Bernard Breux, conseiller régional, entretien du 06/12/2006, selon l’Etat des lieux régional.

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Mais quatre milliards d’euros sont déjà engagés début 2009 et cette croissance ne semble pas s’infléchir.

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Tableau n° 7 : Comparaison EPR/EnR

Actions Production

électrique

Emplois créés Coût

(millions d’euros) Création et fonctionnement des Agences

Locales de l’Energie (ALE)

/ 424 330

Maîtrise de l’énergie, efficacité énergétique, dans les secteurs résidentiel, tertiaire et industriel

7.27 TWh 60 1 034

EnR 15.33 TWh 10 356 1 478

R&D dans le renouvelable / Non évalué 309

Ensemble des mesures proposées 22.6 TWh 10 840 3 151 Projet EPR 12 à 13 TWh 250 à 300 3 000 à 3 500

Source : D’après les 7 vents du Cotentin, Un courant alternatif pour le grand ouest, quelles alternatives au réacteur EPR ?, Février 2006

Cette étude s’est intéressée au Grand Ouest qui comprend les régions Pays de la Loire, Basse Normandie, Haute Normandie et Bretagne268. Elle s’appuie sur l’évolution démographique, la situation du parc résidentiel, la conjoncture économique, les consommations et les productions d’énergie globales, par type d’énergie et par secteur ainsi que sur des « expériences EnR » concrètes et menées principalement dans les pays de l’Est.

Partant des propositions de la SCIC et de la comparaison EPR/EnR, il est légitime de s’interroger sur la pertinence de la relance du programme nucléaire. Des solutions plus durables semblent exister. On note qu’avec le budget consacré à l’EPR, orienté différemment, il est envisageable de créer cinquante fois plus d’emplois, répartis équitablement sur le Grand Ouest. La production électrique serait également deux fois supérieure et le territoire pourrait tendre à l’indépendance énergétique. D’une part, les emplois créés grâce aux ALE ont été évalués à l’aide des expériences françaises actuelles (Grenoble, Lyon, Rennes…). Le calcul est établi en fonction du nombre d’habitants. Sachant que le Grand Ouest compte 9.6 millions d’habitants et en considérant une ALE pour 40 000 habitants soit 1 emploi pour 40 000 habitants, l’étude estime que la mise en place d’ALE pourrait créer 240 emplois les deux premières années. Une fois l’activité engagée, elle estime qu’un second emploi pourrait être créé, financé par une intercommunalité par exemple, « ce qui revient à un emploi pour 20 000 habitants », soit la création de 184 emplois supplémentaires. Le coût de cette démarche pour le Grand Ouest est évalué à 330 millions d’euros. Dans le cadre des Certificats d’Economie d’Energie (CEE), les opérateurs d’énergie pourraient apporter leur concours aux intercommunalités.

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D’autre part, pour les 7 vents du Cotentin, la maîtrise de l’énergie dans le Grand Ouest passe par la maîtrise des consommations du secteur résidentiel, tertiaire et industriel (88 % de la consommation électrique provient de ces trois secteurs)269. Par conséquent, 60 emplois supplémentaires pourraient être créés, principalement dans le domaine de l’animation. L’investissement serait assez conséquent : il est évalué à plus d’un milliard d’euros. Pour le secteur résidentiel, l’enjeu central est la rénovation des bâtiments anciens (objectif porté sur 64 000 logements par an, principalement ceux construits avant 1975 et ceux chauffés à l’électricité), la généralisation de la basse consommation pour les constructions neuves (orientation bioclimatique, matériaux adaptés…) et la performance des équipements. Il est envisageable d’atteindre, pour ce secteur, une consommation de l’ordre de 50 KWh/m². Les économies pour le secteur résidentiel du Grand Ouest sont ainsi estimées à 2.8 TWh. Pour le secteur des bâtiments publics, les économies peuvent représenter 15 % de la consommation des collectivités (ADEME) : meilleure gestion communale, éclairage performant. Pour le secteur tertiaire, les économies pourraient générer un emploi de « conseiller énergie » par collectivité. Les économies effectives pourraient atteindre 1 TWh. Pour le secteur industriel, la maîtrise de l’énergie passe par l’optimisation des moteurs et le remplacement des équipements les moins performants. Ces mesures correspondent à une baisse de la consommation de 1.8 TWh sur 20 ans.

Par ailleurs, les EnR pourraient être largement développées notamment le bois énergie et le solaire thermique (le chauffage est le premier poste de consommation). L’étude propose, d’une part, le remplacement du chauffage électrique par des poêles à granulés et à bois bûches dans tous les logements le permettant, à savoir 525 000 maisons et 225 000 appartements dans le Grand Ouest. En considérant l’installation de 50 000 équipements par an, environ 3 000 emplois pourraient être créés dans la construction, l’installation et la maintenance des équipements, la production et la distribution du bois énergie (plaquettes, granulés, bûches)270. L’étude mise sur le groupement d’achat des équipements pour favoriser une baisse du coût d’investissement. Si toutes ces actions bois-énergie sont entreprises, l’économie électrique réalisée est évaluée à 3.5 TWh et pourrait dépasser 8 TWh en 2020. Le coût de ce programme est estimé à 670 millions d’euros. Ces données résultent principalement de l’AILE (Association d’Initiative Locale)271qui travaille notamment sur la biomasse en Basse Normandie, Bretagne et Pays de la Loire. Néanmoins, les 7 vents du Cotentin

n’abordent pas les risques sanitaires liés à une utilisation accrue du bois énergie.

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La délicate question des transports n’est pas abordée par l’étude ; l’EPR n’ambitionne pas de répondre à la demande énergétique de ce secteur.

270 Le nombre d’emplois dépend de la provenance du bois énergie : régionale, nationale ou importée. Plus l’approvisionnement est local, plus le nombre d’emplois créé est important.

271 AILE a été créée par l’ADEME Bretagne et des CUMA locales en 1995 dans le cadre du programme européen SAVE. Elle dispose du statut d’ALE. Elle agit dans les domaines des EnR et des économies d’énergie en milieu rural.

L’étude propose aussi le développement du solaire thermique, le Grand Ouest disposant d’un gisement important. En se basant sur le programme Energivie développé en Alsace, elle considère que 4 200 000 m² de capteurs pour 2.1 TWh pourraient être installés à terme, principalement sur les maisons individuelles (3 500 000 m²), à un rythme de 75 000 m² par an. Elle propose de généraliser le solaire thermique à l’ensemble des constructions neuves individuelles et collectives. Le groupement des achats permettra une nouvelle fois des gains en terme d’investissement. L’amortissement d’une installation solaire thermique est d’environ 10 ans. Pour encourager son développement, l’étude propose la mise en place d’un crédit à taux zéro (complémentaire aux crédits d’impôt), associé à une politique forte. Cette dernière pourrait être dotée d’un budget conséquent et imposer, par exemple, la mise en place de Chauffe Eau Solaire Individuel (CESI) pour tout chauffe-eau électrique installé. « En prenant pour hypothèse que le solaire thermique emploie 3.1 personnes par tranche d’activité (fabrication et installation) de 150 000 €, plus 1 personne pour 1000 tep pour la maintenance et l’entretien des capteurs »272, l’étude estime que 1 802 emplois seraient créés sur 15 ans (ces estimations ont été données par le magazine Systèmes Solaires).

Le développement de la cogénération dans l’industrie est également encouragé, à l’exemple des expériences danoise et allemande.

De plus, le Grand Ouest est un important producteur de déchets d’origine animale au niveau national, avec 106 204 ktonnes sur les 249 676 ktonnes produits à l’échelle française. La ressource totale de biogaz est évaluée à 1 133 ktep. En ce sens, la valorisation de la biomasse agricole et des déchets pourraient atteindre une puissance de 500 Kw voire 3 Mw et créer jusqu’à 960 emplois selon l’étude. Cette dernière préconnise la mise en place d’un tarif de rachat du courant par le réseau pour les périodes hors pointe.

La micro cogénération dans le résidentiel, à l’exemple de la Grande Bretagne, pourrait être encouragée à condition de diminuer les coûts d’investissement.

L’étude s’appuie aussi sur le développement de l’éolien. En effet, le potentiel régional du littoral Atlantique est loin d’être négligeable : « Le Grand Ouest représente à lui seul près de 45 % du potentiel

[éolien] français »273. En revanche, le développement de la filière semble assez limité en raison de l’absence de fabricants français d’éolienne de forte puissance, des lourdeurs de l’administration et de l’absence d’objectifs nationaux clairs (malgré la création des ZDE qui doivent favoriser la concertation). Par ailleurs, les projets sont généralement portés par des entreprises privées, et par conséquent les collectivités et les populations locales n’en n’ont pas la maîtrise. Enfin, l’étude souligne que le couloir de la ligne THT lié au projet EPR diminue de 30 % le potentiel de développement éolien de la Manche et

272

Les 7 vents du Cotentin, 2006, p.82

273

ralenti les projets en Mayenne. La ligne THT se situe en effet sur une zone favorable à l’éolien (potentiel physique, distance aux habitations, etc.). D’après les 7 vents du Cotentin, en considérant une forte croissance de la filière, 2 950 aérogénérateurs pourraient être installés dans le Grand Ouest d’ici 2020, soit une puissance de 14 Mw pour une production de 11.8 Twh. La concertation et l’accélération des procédures administratives pourraient être favorisées par les ALE qui prendraient en charge la coordination des projets. L’implication financière des intercommunalités favoriserait l’acceptation des populations. Il faudrait cependant soutenir financièrement les collectivités, un parc éolien demandant un investissement conséquent. Le programme proposé par cette étude est évalué à 22 millions d’euros (étude de faisabilité, soutien aux projets…) et 4 544 emplois au moins pourraient être créés (maintenance, construction, bureau d’études…).

Enfin, l’étude mise sur le développement de la filière photovoltaïque, à l’exemple de Chambéry : « pour la réalisation d’une centrale de 100 Kw (1 010 m²), un investissement de 450 000 euros TTC (ajouté à 80 000 euros de coûts annexes) a été nécessaire. La production prévue s’élève à 120 000 Kwh par an. La réalisation de la centrale a nécessité 3 mois de travail à 4 personnes et 6 mois pour les études préalables. La maintenance étant assez réduite, on l’évalue à un emploi à mi-temps par centrale de ce type »274. L’étude estime, compte tenu des problèmes d’intermittence, que l’énergie photovoltaïque est plus adaptée aux bâtiments tertiaires. Elle limite donc son programme, dans un premier temps, aux quatre Conseils régionaux et aux 14 Conseils généraux et estime qu’un investissement de 9.5 millions d’euros pourrait produire 106 000 Kwh (temps de retour sur investissement de 15 à 30 ans grâce au tarif de rachat de l’électricité produite). Ces projets pourraient employer près de 50 personnes. Après 2020, si l’ensemble des communes s’engagent dans une démarche d’économie d’énergie, il sera possible de généraliser les projets. La possibilité d’installer 428 240 m² de capteurs pour une production de 0.045 Twh est alors envisageable.

L’investissement du programme de développement des EnR (bois énergie, solaire, éolien…) est estimé à 1.478 milliards d’euros ; 10 356 emplois pourraient être pérennisés.

Enfin, l’étude soulève la nécessité d’un appui plus important à la recherche et au développement des piles à combustible, de l’éolien (off-shore et hydroliennes) et de l’énergie des océans (houlomotrice et marémotrice). Le nombre d’emplois créés n’a pas pu être évalué. En revanche, l’investissement prévu dépasse les 300 millions d’euros. Pour disposer d’une telle somme, l’étude préconise une réorientation importante du budget « énergie » de la France.

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Les 7 vents du Cotentin souligne que ces propositions doivent être accompagnées d’une animation et d’une sensibilisation fortes, dirigées vers l’ensemble des acteurs. Cette étude n’a pas été contestée, ni par EDF, ni par le gouvernement.

En Pays de la Loire, certains espaces sont concernés par une fragilité du réseau de transport électrique liée au déficit de production de la région (carte n° 11). Les propositions des

7 vents du Cotentin ne pourraient-elles pas résoudre en partie ce problème ?

Source : D’après RTE Pays de la Loire Réalisation : Vaché I., 2008 Carte n° 11 : Les zones de fragilité électrique dans la région Pays de la Loire

La fragilité électrique touche particulièrement le Sud des Pays de la Loire : la Vendée principalement, le Sud et l’Ouest de la Loire Atlantique, le Sud du Maine et Loire et la Mayenne. En 1998, le CESR a déjà mis en lumière les risques d’approvisionnement électrique ; aujourd’hui, la situation est sensiblement la même. L’identification de ces zones de fragilité électrique permet d’anticiper et de questionner les solutions à plus ou moins long terme. Elles ont pour principale origine la sécurité d’alimentation et la performance du système. Une grande

partie de la Vendée est concernée par ces deux problèmes alors que les autres espaces représentés sur la carte n° 11 ne souffrent que d’une fragilité d’alimentation. Pour la Région, « cette fragilité structurelle est caractérisée principalement par l’insuffisance de la capacité de transport et par la congestion du réseau. Il est à noter que ce constat est établi dans la logique d’une croissance de la demande électrique et d’un mode de production fortement centralisé […]. Des simulations ont montré que des actions fortes de maîtrise de l’énergie pouvaient éventuellement avoir un impact à moyen terme sur cette cartographie des zones fragilisées »275. Le Conseil régional souhaite ainsi encourager la maîtrise des consommations. Il désire également développer la production décentralisée d’électricité ainsi que les « centrales thermiques d’appoint de technologie innovante telle que le cycle combiné gaz »276. Cette dernière technologie semble très réactive pour répondre aux pics ponctuels de consommation et le site de Cordemais se prête bien à un projet de ce type par la présence du terminal méthanier277. Au regard de l’augmentation du prix des matières premières, l’utilisation du charbon n’est pas écartée malgré sa pollution et l’estuaire de la Loire bénéficie d’infrastructures d’approvisionnement adaptées. Pour répondre à cette fragilité électrique, RTE envisageait d’étendre le réseau à haute tension, mais de vives oppositions locales l’ont poussé à revoir ses choix. RTE souhaite donc, dans un premier temps, renforcer les installations existantes.

L’efficacité énergétique et les EnR pourraient-elles limiter le développement des réseaux de distribution à l’origine de controverses ? En ce sens, une approche territoriale par zones géographiques interroge la gouvernance énergétique : ne peut-on pas envisager de grands projets d’EnR, fermes éoliennes ou solaires, dans les zones fragilisées comme en Rhône-Alpes (Mor, 2008) ?

Par conséquent, la région Pays de la Loire dispose de gaz, de charbon et de pétrole et le département de la Loire Atlantique possède les principales infrastructures de production. Cependant, la production électrique est limitée et la région dépend fortement des régions voisines par un réseau de lignes à haute et à très haute tension (qui font l’objet de controverses). Des solutions de production locale semblent exister. En 2004, les EnR sont encore peu développées mais nous pouvons imaginer des projets dans les zones de fragilité électrique. Qu’en est-il de la structure de la consommation régionale ?

275

Bernard Breux, conseiller régional, entretien du 06/12/2006, selon l’Etat des lieux régional.

276

Ibidem

277 Un projet est actuellement développé par GDF. La mise en service de la centrale électrique, d’une puissance de 430 Mw, est prévu fin 2009. Le coût de construction est évalué à 250 millions d’euros.

4.2. La demande

Il est très difficile d’identifier précisément les postes de consommation, surtout la hauteur de ces consommations. Les données sont parfois inexistantes, surtout anciennes et confidentielles, d’autres sont payantes, certaines font référence à des ratios nationaux. Un important travail de terrain est à mener pour réaliser un diagnostic précis mais il est lourd à effectuer compte tenu de la diversité des acteurs à contacter. Seules quelques collectivités ont réalisé des bilans énergétiques de leur territoire à l’exemple de Nantes, Angers et du Pays du Mans. Nous avons personnellement réalisé le diagnostic du Pays du Mans, dans le cadre du contrat ATEnEE (Vaché, 2005). Ce diagnostic s’est appuyé majoritairement sur des ratios nationaux et régionaux de consommation, ce qui est regrettable, exception faite des bâtiments publics. Ces limites doivent nuancer et relativiser les données ci-après communiquées.

Nous allons présenter l’organisation de la consommation énergétique régionale puis les perspectives d’évolution. Les données sont issues en grande partie d’une publication de la DRIRE, d’octobre 2005278.

4.2.1. Une consommation énergétique sans grande différence avec la moyenne