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Le cas de l’éolien : des retombées fiscales intéressantes pour les communes

Un projet éolien a des retombées locales fortes en terme de gouvernance et de retombées économiques. D’une part, un projet fédère les acteurs locaux (élus, employés municipaux, techniciens, habitants invités aux réunions publiques…). En effet, malgré quelques réticences qui peuvent naître à l’annonce d’un projet, l’implantation d’éoliennes résulte d’une réflexion

collective et concertée. Elle constitue donc une réelle opportunité pour la collectivité en terme de gouvernance. D’autre part, en terme de retombées économiques, la filière éolienne est créatrice d’emplois : interventions des entreprises locales aux différents stades d’un projet, entretien des installations, développement du tourisme... Elle est également financièrement rentable : vente de l’électricité produite, taxe professionnelle, taxe foncière et location du terrain d’implantation. A titre d’exemple, mais sous certaines réserves (chaque cas étant particulier), l’ADEME estime que pour 1 MW éolien installé, le propriétaire du parc doit payer environ 500 000 € et l’Etat 900 000 €. Un MW éolien coûte ainsi près d’1.4 million d’euros. En terme de recettes annuelles, 6 000 € environ sont perçus par la commune ou la communauté de communes d’accueil (taxe professionnelle). De plus, le loyer du terrain d’implantation s’élève de 1 500 à 3 000 € par an et par MW. Enfin, le prix de rachat du courant produit est assuré pendant 15 ans. En ce sens, un projet permet de redynamiser les espaces ruraux en déclin (manne financière, création d’emplois locaux...). Le coût d’un projet éolien est par ailleurs transparent, contrairement aux coûts des énergies fossiles et du nucléaire. Enfin, le démantèlement d’un parc n’a pas d’impact sur l’environnement, pas de conséquence sur le milieu. Il n’entraîne donc aucun coût indirect lié à la dépollution du site par exemple.

Malgré ces avantages économiques, sociaux et environnementaux, des associations d’opposition se sont constituées à l’encontre de certains projets. Les controverses de l’éolien sont généralement liées à des considérations paysagères247 et à l’intermittence de la production, parfois à des divergences politiques, des « guerres de clochers ». Pour Scheer (2007) « on a si peu conscience de la hiérarchie des dangers qu’on oublie fréquemment de faire la différence entre les petites atteintes réversibles aux paysages et de grands risques irréversibles pour l’environnement »248.

Selon les propos de Scheer (2007), si les EnR se généralisaient, « les gens seraient débarrassés des soucis liés à la hausse du prix de l’énergie, l’air des villes serait plus propre, le nombre de malades diminuerait »249. Nous avons montré que les collectivités pouvaient, en effet, trouver plusieurs avantages à développer les EnR et à maîtriser leurs consommations. Ils sont d’ordre environnementaux, économiques et sociaux. Trois changements majeurs sont cependant nécessaires : 1) révision complète des politiques et des pratiques qui perpétuent la croissance de la

247 Une histoire originale, assez surprenante, a affecté la commune de Domptail-en-l’Air (Meurthe-et-Moselle) en septembre 2008. Suite à l’annonce d’un projet éolien d’une puissance de 36 MW (soit 16 aérogénérateurs), les 60 habitants de la commune ont décidé de mettre leur maison en vente pour des raisons visuelles, également financières (dévaluation des maisons ?). Un des habitants de Domptail-en-l’Air considère qu’ « avant d’aller casser la quiétude des campagnes, on peut commencer par équiper les zones industrielles » (AFP, 2/09/2008).

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consommation, 2) augmentation rapide et drastique de l’efficacité énergétique, 3) développement radical des EnR.

Beaucoup de collectivités se disent aujourd’hui favorables aux EnR mais peu agissent concrétement. Il existe une grande différence entre la parole et les actes. Pour Scheer (2007), « le véritable problème des EnR n’est ni vraiment technologique, ni économique : il est politique et intellectuel »250. 250 p. 82

Conclusion

Il semble qu’entre 1990 et 2004, les émissions françaises de GES, tous secteurs confondus, aient diminué de 0.8 %. Cette baisse s’explique par les contraintes imposées aux industries et aux entreprises (réglementations, système d’échange des quotas…). Les autres secteurs, particulièrement le résidentiel et les transports, ont vu leurs émissions augmenter. Le secteur des transports reste le secteur le plus préoccupant car sa consommation a été multipliée par deux entre 1973 et 2004 (Radanne, 2005) et ses émissions de GES ont cru de 21 % entre 1990 et 2001 (Papon, 2007). A partir de 2004, les émissions de CO2, tous secteurs confondus, repartent à la hausse (+ 0.2 % en 2004, + 0.3 % en 2005) et la consommation suit la même courbe. En outre, l’intensité énergétique des équipements s’est améliorée mais les usages se sont multipliés venant contrecarrer ces améliorations. Pour Radanne (2005), « si les efforts d’économies d’énergie – engagés après les chocs pétroliers –

avaient été poursuivis avec plus de constance, nous serions déjà dans une société à contenu énergétique stable, mais parvenant à nourrir une croissance de près de 2 % par an »251. En effet, les efforts d’économie engagés à l’heure des crises pétrolières n’ont pas été poursuivis et depuis 1985 (contre choc pétrolier), les économies d’énergie et les EnR ne sont plus des préoccupations majeures car l’énergie conventionnelle reste peu chère252. L’instauration d’une taxe sur l’ensemble des émissions permettrait de répartir les efforts de réduction. Mais la culture politique française place depuis toujours la question des économies d’énergie et des EnR au second plan et lui consacre des crédits insuffisants.

Depuis les années 1990, les politiques mises en place par la France restent donc assez timides en terme de développement des EnR, d’économie d’énergie et de baisse des GES. La POPE de 2005 reprend pourtant l’idée de Facteur 4 qui interroge les pays industrialisés sur une division par quatre de leurs émissions à l’horizon 2050 et qui correspond à une réduction de 3 % des émissions françaises chaque année. L’ADEME, la MIES et la DIACT travaillent, par ailleurs, sur ces questions. Mais force est de constater que les enjeux climatiques et énergétiques, bien que fortement médiatisés, ne sont pas au cœur de la politique française253. Pour Radanne (2005), « les choix énergétiques doivent être clairement cadrés par des priorités morales et politiques, et faire l’objet

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Pour que la consommation diminue, le prix de l’énergie devrait refléter les paramètres directs et indirects de la consommation. Il prend en compte le facteur « travail » alors qu’il devrait s’intéresser au facteur « prélèvement des ressources » puisque les dégradations environnementales engendrent des coûts.

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Pour Corinne Lepage, Présidente de CAP21, « la question climatique reste une question très accessoire dans le débat politique, la hausse du prix du baril présentant pour la classe politique dirigeante un enjeu bien plus considérable » (2006, p. 87).

d’un processus démocratique qui construise l’adhésion »254. Mais l’absence de débat sur l’énergie, le manque de reconnaissance des associations et de la société civile par le gouvernement, ont conduit à un désengagement des citoyens pour ces questions. L’absence d’ambition de la politique énergétique française s’explique principalement par les lobbies nucléaires, pétroliers et agricoles. Nous avons enfin mis en évidence l’importance des enjeux et la complexité des éléments à prendre en compte pour conduire une politique énergétique locale cohérente. Pour parvenir à un continuum énergie-climat qui s’inscrive dans la durée, les collectivités ont à franchir certains obstacles. Le temps court des mandats et la sectorisation des actions sont les principaux enjeux et ils questionnent la gouvernance. Pour favoriser la transversalité des actions et la concertation, les collectivités peuvent s’appuyer sur une gamme d’outils comme le Contrat ATEnEE, le PLU, le SCOT. Nous avons montré qu’une démarche énergétique logique suit un cheminement assez précis : il passe par la sensibilisation des différents acteurs, la mise en place d’actions exemplaires, la réalisation d’un diagnostic territorial qui donnera lieu à la définition d’objectifs. Nous avons pu apprécier les avantages des EnR et de l’efficacité énergétique pour les collectivités, aussi bien en terme d’image, que d’amélioration de la qualité de vie des administrés, de retombées économiques que de contribution aux engagements internationaux.

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