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Tsie / La limitation

Dans le document Le Livre des Transformations (Page 184-187)

En haut K'AN L'INSONDABLE, L'EAU En bas TOUEI LE JOYEUX, LE LAC

Le lac occupe un espace limité. Quand il reçoit davantage d'eau, il dé-borde. C'est pourquoi on doit lui assigner des limites. L'image représente l'eau en bas et l'eau en haut, avec, entre les deux, le firmament comme li-mite.

Le mot chinois pour exprimer la limitation désigne proprement les noeuds qui partagent une tige de bambou. Dans la vie courante, le même mot désigne l'économie qui se fixe des limites précises pour ses dépenses.

Dans la vie morale, ce sont les limites rigoureuses que l'homme noble impose à ses actes et qui sont celles de la loyauté et du désintéressement.

Le jugement

LIMITATION. Succès.

On ne doit pas pratiquer avec persévérance la limitation amère.

Les limites sont pénibles, mais elles conduisent à la réussite. En éco-nomisant dans la vie courante, on se prépare à affronter les moments de pé-nurie. En faisant retraite, on s'épargne l'humiliation. Des limites sont égale-ment indispensables à l'harmonie des conditions de l'univers. La nature a des limites précises pour l'été et pour l'hiver, pour le jour et pour la nuit, et ce sont ces limites qui donnent son sens à l'année. De même, l'économie, en fixant des limites précises aux dépenses, assure la conservation des biens et empêche que les hommes ne subissent des dommages.

Toutefois, il est nécessaire d'observer la mesure jusque dans la limita-tion. Si l'on voulait imposer des limites trop sévères à sa propre nature, elle en souffrirait. Si l'on voulait pousser trop loin les limitations imposées aux autres, ils se révolteraient. C'est pourquoi, même dans la limitation, des li-mites sont nécessaires.

L'image

Au-dessus du lac est l'eau : image de la LIMITATION.

Ainsi l'homme noble crée le nombre et la mesure et recherche ce que sont la vertu et la conduite correcte.

Le lac est quelque chose de fini ; l'eau est inépuisable. Le lac ne peut contenir qu'une quantité déterminée de l'eau infinie. C'est en cela que réside sa propriété. C'est aussi en établissant et en traçant des limites dans la vie que l'individu acquiert sa signification. C'est pourquoi il s'agit ici de fixer très clairement ces limites qui sont comme la colonne vertébrale de la moralité.

Des possibilités illimitées ne sont pas ce qui convient à l'homme. Sa vie ne ferait alors que se fondre dans l'indéfini. Pour devenir fort, il a besoin des limites librement établies que constitue le devoir. Ce n'est qu'en s'entourant de limites et en se fixant librement pour répondre au commandement du de-voir que l'individu acquiert sa signification en tant qu'esprit libre.

Les traits

Neuf au commencement signifie :

Ne pas sortir de la porte et de la cour est sans blâme.

Il arrive souvent que l'on veuille entreprendre quelque chose, mais que l'on se trouve placé devant des limitations insurmontables. Il importe de bien voir le point où l'on doit s'arrêter. Si nous comprenons bien cela et ne sor-tons pas des limites qui nous sont imposées, nous amassons en nous une force qui nous rend capables d'agir énergiquement lorsque le temps en est venu. La discrétion est d'une importance capitale pour la préparation des entreprises importantes :

Confucius dit à ce sujet : "Là où naît le désordre, les mots sont les de-grés qui y mènent. Si le prince n'est pas discret, il perd son serviteur. Si le serviteur n'est pas discret, il perd la vie. Si les choses en germe sont traitées sans discrétion, cela nuit à leur achèvement. C'est pourquoi l'homme noble veille à demeurer discret et ne sort pas."

Neuf à la deuxième place signifie :

Ne pas sortir de la, porte et de la cour apporte l'infortune.

Lorsque le temps d'agir est venu, il faut le saisir promptement. Tout d'abord l'eau s'amasse dans un lac sans s'en écouler, mais, quand le lac est rempli, elle se fraye sûrement un chemin. Il en va de même dans la vie hu-maine. Il est excellent d'hésiter tant que le moment d'agir n'est pas encore venu, mais pas plus longtemps. Quand les obstacles ont été écartés de telle sorte que l'action soit rendue possible, l'hésitation anxieuse est une faute qui amène à coup sûr l'infortune, parce qu'on a manqué l'occasion.

Six à la troisième place signifie :

Celui qui ne connaît pas de limitation aura à se lamenter.

Pas de blâme.

Quand on ne songe qu'au plaisir et à la jouissance, on perd facilement le sentiment des limitations nécessaires. Mais lorsqu'on s'abandonne à la dissipation, on aura à en éprouver les conséquences mêlées de regret. On ne doit pas vouloir chercher à rejeter la faute sur les autres. C'est seulement en examinant ses propres manquements que, grâce à des expériences désa-gréables, on deviendra exempt de fautes.

Six à la quatrième place signifie : Limitation satisfaite. Succès.

Toute limitation a sa valeur. Mais lorsque cette limitation exige un ef-fort persistant, elle est liée à une trop grande dépense d'énergie. Si par contre la limitation est quelque chose de naturel, comme par exemple la pro-priété qu'à l'eau de couler vers le bas, cela conduit nécessairement au suc-cès, parce qu'une telle attitude signifie une économie de force. L'énergie qui, autrement, s'épuise en un vain combat avec l'objet, profite intégralement à l'affaire dont on s'occupe, et le succès ne peut pas ne pas venir.

O Neuf à la cinquième place signifie : Limitation douce apporte la fortune.

Aller apporte l'estime.

La limitation, pour être efficace, doit être réalisée de la manière conve-nable. Si l'on se contente de vouloir imposer des limitations aux autres et que l'on veut y échapper soi-même, ces limitations seront toujours ressenties amèrement et feront naître de l'opposition. Si, par contre, un homme placé à un poste d'autorité commence par se limiter lui-même, exige peu de ses gens et obtient un résultat avec d'humbles moyens, il parvient ainsi à la fortune.

Là où un tel exemple agit, il provoque de l'émulation, si bien que tout ce qu'on entreprend doit réussir.

Six en haut signifie :

Limitation amère : la persévérance apporte l'infortune.

Le remords disparaît.

Quand on s'impose des limites trop sévères, les hommes ne les sup-portent pas. Plus on applique cette sévérité avec logique, plus cela est mau-vais, car, à la longue, une réaction est inévitable. Ainsi également le corps torturé s'insurge lorsqu'on suit la voie d'un ascétisme trop sévère. Mais, bien que cette sévérité impitoyable ne soit pas à utiliser durablement et de façon normale, il peut y avoir des moments où elle constitue l'unique moyen de se préserver de la faute et du remords. Ce sont les situations où l'absence de pitié à l'égard de soi-même est le seul moyen de sauver son âme qui, sans cela, tomberait dans l'indécision et la tentation.

Dans le document Le Livre des Transformations (Page 184-187)