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Mong / La folie juvénile

Dans le document Le Livre des Transformations (Page 27-34)

En haut KEN L'IMMOBILISATION, LA MONTAGNE En bas K'AN L'INSONDABLE, L'EAU

L'idée de la jeunesse et de la folie est suggérée de deux manières dans ce signe. Le trigramme supérieur, Ken, a pour figure une montagne, et le tri-gramme inférieur, K'an, a pour image l'eau. La source qui sort du pied de la

montagne est le symbole de la jeunesse sans expérience. L'attribut du signe supérieur est l'immobilité, celui du signe inférieur, le danger. S'arrêter plein de perplexité devant un dangereux abîme est également un symbole de la folie juvénile. Mais les deux trigrammes renferment également la voie qui permet de surmonter les folies juvéniles : l'eau est quelque chose qui conti-nue nécessairement de couler. Lorsque la source jaillit, elle ne sait pas tout d'abord où elle veut aller. Mais, par son écoulement incessant, elle remplit les endroits profonds qui font obstacle à son progrès ; le succès est alors ob-tenu.

Le jugement

LA FOLIE JUVÉNILE possède la réussite.

Ce n'est pas moi qui recherche le jeune fou, c'est le jeune fou qui me recherche.

Au premier oracle, j'informe.

S'il interroge deux, trois fois, c'est de l'importunité.

S'il est importun, je n'informe pas.

La persévérance est avantageuse.

Chez un être jeune, la folie n'est pas quelque chose de mauvais. Elle peut malgré tout lui réussir. Il faut seulement trouver un maître expérimenté et observer à son égard l'attitude convenable. Cela veut dire avant tout que le jeune homme doit avoir lui-même conscience de son manque d'expérience et rechercher un maître. Seuls cette humilité et cet intérêt garantissent l'exis-tence de l'ouverture d'esprit indispensable qui s'exprime dans la respec-tueuse acceptation d'un maître.

C'est pourquoi le maître doit attendre paisiblement qu'on le recherche.

Il ne doit pas s'offrir de lui-même : ce n'est qu'ainsi que l'enseignement por-tera ses fruits en temps opportun et de la manière convenable.

La réponse donnée par le maître aux questions du disciple doit être claire et précise comme celle que souhaite obtenir un consultant de l'oracle.

Elle doit alors être reçue comme résolution du doute et comme décision. Des questions supplémentaires provoquées par la méfiance ou le manque de ré-flexion ne servent qu'à importuner le maître. Le mieux sera de garder le si-lence à leur sujet, de même que l'oracle ne donne qu'une réponse et refuse de se laisser tenter par des questions nées du doute.

Lorsqu'à cela s'ajoute une persévérance qui ne se relâche pas avant qu'on se soit assimilé les différents points l'un après l'autre, une belle réus-site est assurée. Ainsi le conseil de l'hexagramme s'adresse au maître comme à l'élève.

L'image

Au pied de la montagne jaillit une source : image de la JEUNESSE.

Ainsi l'homme noble cultive son caractère en étant profond dans tous ses actes.

La source parvient à couler et à triompher de l'immobilité en remplis-sant tous les creux qui se rencontrent sur son chemin. De même la voie à suivre pour le développement du caractère est la profondeur, le sérieux qui ne néglige rien, mais, comme l'eau, comble toutes les lacunes progressive-ment et sans relâche, et poursuit ainsi sa marche en avant.

Les traits

Six au commencement signifie : Pour faire évoluer l'insensé

il est avantageux d'imposer une discipline.

On doit ôter les entraves.

Continuer d'agir ainsi apporte l'humiliation.

Au commencement de l'éducation est la loi. La jeunesse est tentée, dans son inexpérience, de tout prendre d'abord avec insouciance, comme un jeu. Il faut lui montrer le sérieux de la vie. Une certaine manière de se prendre en mains, la contrainte d'une ferme discipline est bonne. Qui joue avec la vie ne parvient jamais à rien. Mais la discipline ne doit pas dégénérer en dressage. Un dressage continuel donne un résultat humiliant et paralyse la force de l'homme.

O Neuf à la deuxième place signifie :

Supporter avec douceur les insensés procure la fortune.

Savoir prendre les femmes procure la fortune.

Le fils est devenu apte à prendre en charge la maison.

L'oracle désigne ici un homme qui n'a pas de pouvoir extérieur, mais possède la force spirituelle nécessaire pour porter la responsabilité qui lui incombe. Il est doté de la supériorité et de la robustesse intérieures qui le rendent capable de supporter les lacunes de la folie humaine. La même dis-position vaut dans les relations avec les femmes en tant que sexe plus faible.

Il faut savoir les prendre et avoir des égards pour elles en leur témoignant une certaine indulgence chevaleresque. Ce n'est qu'en unissant la force inté-rieure et la réserve extéinté-rieure que l'on pourra assumer la responsabilité de conduire un grand organisme social avec un réel succès.

Six à la troisième place signifie :

Tu ne dois pas prendre une jeune fille qui, voyant un homme d'airain,

ne demeure pas maîtresse d'elle-même.

Rien n'est avantageux.

Un homme faible, inexpérimenté qui fait des efforts pour s'élever ou-blie facilement sa propre individualité quand il voit à un niveau supérieur une personnalité puissante qu'il imite servilement. Il ressemble à une jeune fille qui s'abandonne lorsqu'elle rencontre un homme fort. Il convient de ne pas encourager un mode d'approche si servile : l'attitude inverse ne serait bonne ni pour le jeune homme ni pour l'éducateur. Une jeune fille doit à sa

dignité d'attendre d'être demandée en mariage. Dans les deux cas, il est in-digne de s'offrir et il n'est pas bon d'accueillir favorablement une telle offre.

Six à la quatrième place signifie :

Une folie juvénile limitée apporte l'humiliation.

Dans la folie juvénile, l'attitude qui laisse le moins d'espoir consiste à se prendre dans des réseaux d'imaginations vides. Plus on s'obstine dans de telles imaginations étrangères à la réalité, plus on s'attire à coup sûr des humiliations.

En face de ce dérèglement limité, le maître n'aura souvent d'autre res-source que de l'abandonner à lui-même pour un temps et de ne pas lui épargner l'humiliation qui s'ensuivra. Telle est bien des fois l'unique voie de salut.

O Six à la cinquième place signifie : La folie puérile apporte la fortune.

Un homme expérimenté qui recherche l'instruction d'une manière en-fantine et dépourvue de prétention agit correctement, car quiconque, libre de toute arrogance, se place sous l'autorité d'un maître sera certainement favo-risé.

Neuf en haut signifie :

Lorsqu'on châtie la folie, il n'est pas avantageux de commettre des excès de pouvoir.

La seule chose avantageuse est d'écarter les excès de pouvoir.

Il arrive qu'un insensé incorrigible doive être châtié. Celui qui ne veut pas écouter devra en tâter. Punir ainsi quelqu'un est tout autre chose que de le secouer en commençant. Mais le châtiment ne doit pas être infligé sous le coup de la colère : on le limitera en veillant objectivement à éviter les excès injustifiés. La punition n'est pas à elle-même sa propre fin ; son but est de servir à instaurer un comportement conforme à l'ordre.

Ce conseil s'applique aussi bien à l'éducation qu'aux mesures qu'un gouvernement est amené à prendre contre une population qui s'est rendue coupable d'excès. L'intervention de l'autorité doit toujours demeurer préven-tive et avoir pour but unique l'instauration de la sécurité et de la paix pu-bliques.

5. Su / L'attente (la nutrition)

En haut K'AN L'INSONDABLE, L'EAU En bas K'IEN LE CRÉATEUR, LE CIEL

Tous les êtres ont besoin de la nourriture d'en haut. Mais les aliments sont administrés en leur temps, qu'il faut attendre. L'hexagramme montre les nuages dans le ciel répandant la pluie qui réjouit tout ce qui croît et pourvoit l'homme de nourriture et de boisson. Cette pluie viendra à son heure. On ne peut la faire venir de force, mais il faut l'attendre. La pensée de l'attente est en outre suggérée par les propriétés de chacun des trigrammes : au-dedans, force ; devant, danger (96). Face au danger, la force ne se préci-pite pas mais sait attendre, tandis que la faiblesse tombe dans l'agitation et n'a pas la patience d'attendre.

96 Le trigramme supérieur est considéré comme étant devant, et le trigramme inférieur comme étant derrière. Voir Livre II. (Note de la traduction anglaise.)

Le jugement L'ATTENTE.

Si tu es sincère, tu possèdes lumière et réussite.

La persévérance apporte la fortune.

Il est avantageux de traverser les grandes eaux.

L'attente n'est pas un espoir vide. Elle a la certitude intérieure d'at-teindre son but. Seule cette certitude intérieure donne la lumière qui conduit à la réussite. Celle-ci mène à la persévérance qui apporte la fortune et con-fère la force de traverser les grandes eaux.

Le consultant a devant lui un danger qui doit être surmonté. La fai-blesse et l'impatience sont impuissantes. Seul celui qui est fort viendra à bout de son destin, car il peut tenir ferme jusqu'à la fin grâce à son assu-rance intérieure. Cette force se révèle dans une sincérité inflexible. Ce n'est que lorsque l'homme est capable de regarder les choses telles qu'elles sont, sans illusion ni duperie à l'égard de lui-même, qu'il se dégage des événe-ments une lumière grâce à laquelle on peut discerner la voie du succès. Une telle connaissance doit être suivie d'une action résolue et persévérante, car c'est seulement lorsque l'homme affronte résolument son destin qu'il peut en venir à bout. On peut alors traverser les grandes eaux, c'est-à-dire prendre la décision qui s'impose et tenir tête au danger.

L'image

« Des nuages montent dans le ciel : image de L'ATTENTE.

Ainsi l'homme noble mange et boit ; il est joyeux et de bonne humeur ».

Quand les nuages montent dans le ciel, c'est le signe qu'il va pleuvoir.

Il ne reste alors plus rien à faire que d'attendre que la pluie tombe. Il en est de même dans la vie quand un destin se prépare. Lorsque les temps ne sont pas encore accomplis, on ne doit pas se mettre en souci et s'efforcer de fa-çonner l'avenir par son activité et son intervention propres, mais il convient de rassembler paisiblement ses forces en mangeant et en buvant, pour ce qui est du corps, et en étant de bonne humeur, pour ce qui concerne l'esprit.

Le destin vient de lui-même et alors on est prêt.

Les traits

Neuf au commencement signifie : Attente dans le pré.

Il est avantageux de demeurer dans ce qui dure.

Pas de blâme.

Le danger est encore loin. On attend encore sur le sol uni. Les condi-tions sont encore simples. Il y a seulement quelque chose dans l'air, qui va venir. Il convient alors de conserver la régularité de la vie, tant que cela de-meure possible. Ce n'est qu'ainsi que l'on se garde de tout gaspillage préma-turé des forces et que l'on demeure libre de toute tache et de toute faute qui constitueraient un affaiblissement pour plus tard.

Neuf à la deuxième place signifie : Attente sur le sable.

Il y a un peu de bavardage.

La fin apporte la bonne fortune.

Le danger s'approche peu à peu. Le sable est près de la rive du fleuve, lequel symbolise le danger. Des désagréments commencent à se manifester. En un tel moment, il naît facilement un malaise général où les gens se rejettent mutuellement la faute. Celui qui demeure alors dans un état d'abandon (97) parviendra à ce qu'à la fin tout aille bien pour lui. Tous les médisants fini-ront par se taire si on ne leur fait pas le plaisir de leur répliquer par des pro-pos offensants.

97 WILHELM utilise ici le terme de "gelassen" "abandonné "pour caractériser" l'attitude par-faite de l'homme qui a renoncé à sa volonté propre et s'en remet entièrement à la volonté du Ciel (N. d. T.).

Neuf à la troisième place signifie : L'attente dans la vase

provoque l'arrivée de l'ennemi.

La vase, qui est déjà imprégnée de l'eau du fleuve, n'est pas un endroit favorable pour attendre. Au lieu de rassembler ses forces pour traverser l'eau d'un seul coup, on a fait une tentative prématurée dont l'élan n'a pas mené plus loin que la vase. Une situation si fâcheuse attire l'ennemi de l'extérieur,

qui, naturellement, l'exploite. Ce n'est qu'avec du sérieux et de la prudence qu'il est possible de se mettre à l'abri de tout dommage.

Six à la quatrième place signifie : Attente dans le sang. Sors du trou.

La situation est extrêmement dangereuse. Elle est devenue de la plus grande gravité : c'est une question de vie ou de mort. Il faut s'attendre d'un moment à l'autre à une effusion de sang. On ne peut ni avancer, ni reculer.

Toute retraite est coupée, comme si l'on était dans un trou. Il n'est alors que de tenir bon et de laisser le destin suivre son cours. Ce calme, qui empêche le dommage de s'aggraver encore par une action personnelle, est le seul moyen de sortir du trou périlleux.

O Neuf à la cinquième place signifie : Attente avec du vin et de la nourriture.

La persévérance apporte la fortune.

Même au milieu du danger, il est des moments de répit quand les choses vont relativement bien. Si l'on possède la force intérieure convenable, on exploitera les intervalles de calme pour se fortifier en vue d'un nouveau combat. On peut jouir du moment, sans pour autant se laisser détourner de son but, car la persévérance est nécessaire pour demeurer vainqueur.

Il en est de même dans la vie publique. On ne peut tout atteindre d'un seul coup. La suprême sagesse consiste à accorder au peuple des moments de récréation qui ravivent la joie au travail nécessaire pour mener l'ouvrage à bien. Ici se trouve caché le secret de l'hexagramme tout entier. Celui-ci se distingue de l'hexagramme : "l'obstacle" (n° 39) en ce qu'ici, tandis que l'on attend, on est sûr de son fait et, par suite, on ne se laisse pas dérober la paix que procure la joie intérieure.

Six en haut signifie : On tombe dans le trou.

Trois hôtes surviennent, qui n'étaient pas invités.

Honore-les, ainsi la fortune viendra à la fin.

L'attente est terminée : le danger ne se laisse plus écarter. On tombe dans le trou et il faut se résoudre à l'inévitable. Tout semble alors avoir été vain. Mais c'est précisément dans cet état de détresse que survient un tour-nant imprévu. Sans que l'on ait agi personnellement, il se produit une inter-vention extérieure dont on peut tout d'abord se demander ce qu'elle signifie, si elle vise à la délivrance ou à la destruction. Il convient alors de conserver la mobilité intérieure : l'attitude juste n'est pas de se retrancher en soi-même et d'opposer un refus dans un geste de bravade, mais de saluer avec respect ce nouveau tour des événements. Ainsi l'on finit par sortir du danger et tout va bien. Même les changements heureux se présentent souvent sous une forme qui paraît étrange au premier abord.

Dans le document Le Livre des Transformations (Page 27-34)