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Triangulation de Delaunay

7.5 Maillage

7.5.3 Triangulation de Delaunay

Introduction

Le problème est le suivant : étant donné un ensemble E de points du plan, existe-t-il une tri-angulation “naturelle” du plan s’appuyant sur ces points ? “Naturelle” signifie ici que les triangles ne relient que les nœuds les plus “voisins”. Ce qui renvoie au problème : quel sens mathématique peut on donner à la notion intuitive de “points voisins” ? La notion de “voisinage” de points du plan peut prendre un sens mathématique précis avec la définition des polygones de Voronoï qui ont de nombreuses applications physiques et géométriques8:

Définition 40 Polygones de Voronoï

Étant donné un ensemble E de points du plan, le polygone de Voronoï d’un point M dans E est l’ensemble des points du plan plus proches deM que de tous les autres points deE. Cet ensemble est un polygone convexe9et la réunion de ces polygones réalise une partition du plan.

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La théorie se généralise de façon naturelle en dimension quelconque.

8Nous considérons ici une situation isotrope où la distance euclidienne est bien adaptée, un cadre anisotrope est souvent nécessaire pour définir un maillage optimal du point de vue de la méthode des éléments finis (voir [3]).

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Noter que les bords du polygone de Voronoï d’un pointM sont les médiatrice des segmentsM P, où P est un autre point deE. On définit la relation de voisinage pour des points deEen posant que deux points sont voisins si leurs polygones de Voronoï ont un côté commun. En reliant les nœuds voisins par des segments on construit en général10une triangulation du plan, latriangulation de Delaunay.

Définition 41 Triangulation de Delaunay

Étant donné un ensembleEde points du plan, un triangle de la triangulation de Delaunay est formé de trois points dont les polygones de Voronoï ont un point commun. Si quatre points, ou plus, ont des polygones ayant un point commun, alors ces points sont cocycliques et on découpe arbitrairement en triangles le polygone qu’ils forment.

On en déduit la caractérisation suivante :

Proposition 58 Triangulation de Delaunay

Un triangle appartient à la triangulation de Delaunay si et seulement si l’intérieur du cercle circons-crit à ce triangle ne contient aucun autre point de l’ensembleE.

Preuve

Le point commun à trois polygones de Voronoï basés sur les sommets(M1, M2, M3)d’un triangle de Delaunay est le centre du cercle circonscrit au triangle(M1, M2, M3). Si un pointM4est intérieur au cercle circonscrit à un triangle(M1, M2, M3)de la triangulation de Delaunay, le centre de ce cercle est plus proche deM4que des points(M1, M2, M3). Il ne peut donc pas appartenir aux polygones de Voronoï de(M1, M2, M3), contrairement à l’hypothèse. La réciproque suit le même argument.

Une présentation naturelle de la triangulation de Delaunay

Nous allons redéfinir la triangulation de Delaunay par une autre voie. Il est remarquable que, si les points deE sont sur une sphère (ou, c’est plus intuitif ici, sur une calotte sphérique) et non sur un plan, il existe une triangulation naturelle s’appuyant sur ces points. En effet, tout découpage en triangles sur la sphère est associé à un polyèdre ayant les points deE comme sommet ; or parmi tous ces polyèdres il y a, en particulier, le polyèdre convexe engendré par les points deE. Les faces de ce polyèdre sont en général des triangles (sinon on a quatre points coplanaires, on découpe arbitrairement le quadrilatère qu’ils engendrent) et ces triangles définissent un découpage de la sphère en triangles sphériques.

Les faces de ce polyèdre convexe sont des triangles qui ont la propriété que leur plan laisse tous les autres points deE du même côté. Ce découpage de la sphère jouit clairement de propriétés op-timales (par rapport à la notion de voisinage par exemple, car trois points de la sphère sont d’autant plus proches, que leur plan est éloigné du centre, or le polyèdre convexe est le plus “extérieur” à la sphère de tous ceux qui ont les points deEcomme sommets).

On en déduit l’idée suivante pour définir une triangulation sur la base d’un ensembleE de points du plan :

10Plus précisément : la situation “générale” est qu’un point du plan appartient au plus à trois polygones de Voronoï, sinon cela signifie que les points de base de ces polygones sont cocycliques.

FIG. 7.9 – Passage du plan à la sphère par projection stéréographique.

−on applique les points du plan sur une sphère par projection stéréographique inverse, on obtient ainsi un ensembleE0;

on définit les triangles sphériques associés au polyèdre convexe formé par les points de E0 et le “pôle nord” ;

−on reprojette sur le plan la triangulation qui a été obtenue sur la sphère.

La triangulation ainsi obtenue sur le plan est la triangulation de Delaunay. Cela découle de ce que le cercle circonscrit à un des faces triangulaires du polyèdre convexe construit sur la sphère se pro-jette sur le cercle circonscrit au triangle projeté. La calotte sphérique définit par le premier cercle se projette donc sur l’intérieur du cercle circonscrit à un triangle du maillage du plan. Or cette calotte sphérique ne contient aucun sommet du polyèdre convexe, le cercle circonscrit à un triangle du plan ne contient aucun autre nœud. C’est la propriété caractéristique d’une triangulation de Delaunay de la proposition 58.

La triangulation de Delaunay a plusieurs propriétés d’optimalité, dont l’une est spécialement in-téressante pour la méthode des éléments finis : son plus mauvais triangle (i.e. le plus aplati ) est le meilleur possible, parmi toutes les triangulations construites sur un ensemble donné de points. Il existe plusieurs algorithmes de construction de la triangulation de Delaunay, certains en Nln(N) opérations pour N points ; les plus simples (enN2 opérations) construisent les triangles par récur-rence sur les points deE en considérant les modifications à apporter au maillage quand on ajoute un point, de façon à respecter la propriété caractéristique de la proposition 58. La principale difficulté de la mise en oeuvre est d’éviter un trop grand nombre de tests d’inclusion pour vérifier la propriété caractéristique.

FIG. 7.10 – Une triangulation de Delaunay avec raffinement de maillage. Noter l’utilisation de sous-domaines pour contrôler le maillage (Doc. J.H. Saiac).

FIG. 7.11 – Un maillage adapté à la modélisation d’ondes de chocs sur un écoulement autour d’une aile (Doc. J.H. Saïac).

L’approximation des problèmes

d’évolution

Objectifs

Ce chapitre est une introduction à l’approximation numérique des problèmes d’évolution, ou plus précisément, des problèmes de Cauchy pour des équations aux dérivées partielles. Sans faire une théorie générale nous développons à partir de quelques exemples les principes de l’approximation par la méthode des différences finies et des éléments finis. Nous commençons par présenter des méthodes de discrétisation : un problème d’évolution conduit naturellement, par passage du continu au discret, à une récurrence. Nous verrons ensuite que ces méthodes naturelles conduisent à des approximations qui peuvent être incohérentes : c’est le problème de la stabilité des schémas de récurrence. Le non respect par le schéma de certaines propriétés qualitatives des équations aux dérivées partielles est la cause de ces instabilités que nous analyserons.

8.1 Approximation de problèmes modèles