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Système linéaire strictement hyperbolique homogène à coefficients constants

5.3 Système linéaire strictement hyperbolique à deux variables (x, t)

5.3.1 Système linéaire strictement hyperbolique homogène à coefficients constants

Définitions

Nous cherchons une fonctionu(x, t), x, t∈Rà valeurs dansRp. solution du système ∂u

∂t +A ∂u

∂x = 0 (5.22)

Compte tenu de l’importance de ces systèmes pour l’étude locale des systèmes hyperboliques géné-raux, nous allons en faire une étude directe, indépendante des résultats antérieurs.

On peut ici calculer analytiquement toutes les solutions du système, ce que nous allons faire. D’après la définition générale (28) on peut poser la définition

Définition 32 Le système (5.22) est unsystème hyperbolique(resp. strictement) si la matriceAest à valeurs propres réelles (resp. distinctes) et diagonalisable.

On noteλk,Uk (resp.Vk), valeurs propres et les vecteurs propres normalisés de la matriceA(resp. At).

Exemples

L’équation des ondes mises sous la forme d’un système du premier ordre (cf. (3.39)) est un sys-tème strictement hyperbolique à coefficients constants. Le syssys-tème (2.4) associé à l’équation de La-place∆u= 0n’est pas hyperbolique, la matriceAest antisymétrique : elle n’a pas de valeurs propres réelles.

Interprétation

On peut interpréter les systèmes hyperboliques comme les systèmes qui admettent “beaucoup” d’ondes planes, i.e. des solutions particulières de la formeu(x, t) =U(x−ωt)oùUest une fonction deRdansRp .

Proposition 42 Le système (5.22) est hyperbolique s’il admet p familles indépendantes d’ondes planes

Preuve

En effet si on reporteu(x, t) =U(x−ωt)dans (5.22) il vient −ωU0(x−ωt) +cAU0(x−ωt) = 0

u(x, t) est une solution siU0 est un vecteur propre deAetω la valeur propre associée.U0(θ)reste proportionnel à un vecteur propre normaliséUkdeA. D’oùU(θ) =ck(t)Uk. Il y a doncnfamilles d’ondes planes

s’il existenvecteurs propres indépendants.

Noter que parmi ces ondes planes on a en particulier les ondes planes harmoniques u(x, t) = expi(x−λkt)Uk

On peut ensuite construire la solution générale comme une superposition d’ondes planes.

Résolution, première manière

On peut retraduire l’idée introduite au paragraphe précédent en termes algébriques : la matriceA est diagonalisable, soitDla matrice diagonale, de diagonaledi,ii, semblable àAetPla matrice formée par les vecteurs propres, on a

A=P1DP de (5.22) on déduit en posantv=P1u ∂v ∂t +P −1AP∂v ∂x = 0 (5.23) et donc ∂v ∂t +D ∂v ∂x = 0 (5.24)

Ce système est découplé puisque la matriceDest diagonale, on en déduitpéquations scalaires aux dérivées partielles sur les composantesvkdev

∂vk(x, t) ∂t +λk

∂vk(x, t) ∂x = 0 et donc (cf. (41)) il existe une fonctionck(τ)telle que

vk(x, t) =ck(x−λkt)

Finalement, on obtient l’expression deu = P v comme superposition d’ondes planes, puisque les colonnes deP sont les vecteurs propresUkdeA

u(x, t) =X k

ck(x−λkt)Uk

Si on supposeu(x,0) =u0(x)connu, les fonctionsck(x)sont les composantes deu0(x)dans la base Uk. En supposant les vecteurs propresUketVkdeAetAtnormalisés4par les conditionshUk, Vki= 1, il vient

ck(x) =hu0(x), Vki d’où le théorème

4Rappelons quehUk, Vli= 0sik6=l: les vecteurs propres d’une matrice et de sa transposée pour des valeurs propres distinctes sont orthogonales

Théorème 26 La solutionu(x, t), avecx∈R, du problème de Cauchy      ∂u ∂t +A ∂u ∂x = 0 u(x,0) =u0(x) (5.25) est u(x, t) =X k hu0(x−λkt), VkiUk

On retrouve la décomposition en ondes planes annoncée au paragraphe précédent. Cette expression montre qu’un signal très localisé se propage à des vitesses finies et que si l’état initial est une fonction u0 à support compact[a, b], cette fonction est décomposée enpondes planes de même support qui seront translatées dans le temps à la vitesseλk; il en résulte au tempstun état qui est la superposition depondes de support translaté[a+λkt, b+λkt], la réunion de ces supports est incluse dans l’inter-valle[a+ minλkt, b+ maxλkt]. On peut considérer que le “signal” initial se propage à une vitesse minimalevm = minλket maximalevM = maxλk, ce qui met en évidence deux “fronts” d’ondes à l’extérieur desquelles l’état est inchangé. Les deux fronts d’ondes sont des droites caractéristiques du système.

Dans le cas de l’équation des ondes ces deux vitesses sont de même module et de sens opposé : on “voit” donc deux fronts se propageant à la même vitesse dans les deux sens.

Proposition 43 Une perturbation localisée d’une solution du système (5.22) se propage à des vitesses finies. Les différentes vitesses sont les valeurs propres de la matriceA.

Dans le cas de l’équation des ondes la vitesse de propagation est la “vitesse du son”. Nous verrons que l’existence de deux fronts de propagation est une propriété générale des systèmes hyperboliques5. Par contre ce qui se passe à l’intérieur du front (pour les système à coefficients constants il peut y avoir des zones “calmes”) est plus complexe que dans le cas des équations homogènes à coefficients constants.

Résolution, deuxième manière

Nous allons présenter autrement la méthode d’intégration du système (5.22) du paragraphe pré-cédent, d’une manière qui se généralise plus facilement aux système à coefficients variables. Intro-duisons la définition des caractéristiques, cohérentes avec (30) :

Définition 33 Les droitesxk(t) =λkt+xk(0)sont lescaractéristiques du système(5.22) Ce sont les intégrales du système différentiel trivial :

dx

dt =λk (5.26)

5qui d’ailleurs les caractérise, en un sens à préciser. Les problèmes elliptiques et les systèmes non kovalevskiens ont une vitesse de propagation infinie

SoitVkun vecteur propre de la matriceAt. En multipliant scalairement le système (5.22) parVk, il vient hVk,∂u ∂ti+hVk, A ∂u ∂xi= 0 d’où hVk,∂u ∂ti+hA tVk,∂u ∂xi= 0 et donc puiqueVkest un vecteur propre deAt

hVk,∂u

∂ti+λkhVk, ∂u ∂xi= 0 c’est à dire puisqueVkest constant

∂thVk, ui+λk

∂xhVk, ui= 0

La fonctionfk(x, t) =hVk, u(x, t)iest donc solution de l’équation aux dérivées partielles scalaire ∂fk

∂t +λk ∂fk

∂x = 0

et elle est donc constante sur les droites caractéristiquesxk(t) =λkt.

Proposition 44 Il existe pfonctions deu, fk(u) = hVk, ui, oùVk est un vecteur propre deAtqui sont invariantes sur les droites caractéristiquesxk(t) =λkt+xk(0). Les fonctionsfksont appelées invariants de Riemann.

En conclusion pour intégrer (5.22) on calcule lespfamilles de droites caractéristiques et les invariants de Riemann le long des caractéristiques, d’où l’on peut déduire la solutionu. Supposant connu l’état initialu(x,0)ent= 0pour toutx, il faut donc :

1. construire les caractéristiques passant par un point(x, t), 2. déterminer les invariants de Riemann ent= 0,

3. retrouver le point d’intersection de ces caractéristiques avec l’axet= 0et calculer les invariants en ces points ;

4. on connaît alors la valeur depinvariants en(x, t)ce qui permet de retrouver la valeur deuen résolvant un système linéaire depéquations àpinconnues.

Quelles conditions aux limites peut-on poser ?

Considérons un problème de Cauchy pour l’équation (5.25) posé sur un intervalle[0, L]avec des conditions au bord            ∂u ∂t +A ∂u ∂x = 0 u(x,0) =u0(x) +des conditions en x = 0 etx=L (5.27)

Nous avons vu deux exemples :

−Pourp= 1, si on considère l’équation d’advection (2.13), dont la solution consiste en un transport, on ne peut poser une condition au bord que d’un côté : concrètement on posera une condition du côté de “l’entrée”.

Pourp = 2, dans l’exemple du problème des cordes vibrantes modélisée par l’équation des ondes (2.16) : on peut, et on doit, poser une condition de chaque côté, on poseu1(0, t) =u1(L, t) = 0 qui correspond à une fixation de la corde aux deux bouts.

Nous allons analyser plus précisément la situation dans le problème des ondes sonores.

Ondes sonores dans un tuyau : analyse des conditions aux limites

Considérons le problème des (petites) vibrations d’un gaz qui s’écoule dans un tuyau avec une vitesse moyenne u >¯ 0 et une masse volumique moyenneρ0. Le modèle s’obtient en linéarisant l’équation de l’écoulement d’un gaz parfait autour deu¯etρ0 et en négligeant les termes petits sous l’hypothèse |(u−u| |¯¯ u|. Il s’écrit, en fonction de la vitesse u et la masse volumique ρ, après élimination de la pression                      ∂ρ ∂t + ¯u ∂ρ ∂x +ρ0( ∂u ∂x) = 0 ∂u ∂t + ¯u ∂u ∂x+ c2 ρ0 ∂ρ ∂x = 0 +des conditions initiales

+des conditions en x = 0 etx=L

(5.28)

où la constantec2 est définie par l’équation d’étatp=p(ρ)et vautc2=p00).

On peut donner une expression de la solution de ce problème par développement en séries de Fourier, mais l’expression obtenue ne met pas en évidence certaines propriétés remarquables de la solution. Par rapport au problème (5.25), oùxvarie sur toutR, la difficulté vient des conditions aux limites. Localement, la méthode des caractéristiques convient, mais quand les caractéristiques, ou les ondes planes, rencontrent les bords il faut adapter la méthode.

La matrice du système est

A= 0 ρ0 c2 ρ0 0 + ¯u Id qui a pour valeurs propresu¯±c, on en déduit la proposition

Proposition 45 Le système d’équations aux dérivées partielles (5.28) est strictement hyperbolique. Les valeurs propres de la matrice du système sontu¯±c.

Sic >u¯l’écoulement est ditsubsoniqueet il y a une droite caractéristiquexk(t) =λkt+xk(0)dans chaque sens.

Sic <u¯l’écoulement est ditsupersoniqueet toutes les caractéristiques vont vers “l’aval”, i.e. dans le sens de l’écoulement.

A une caractéristiquexk(t) =λkt+xk(0)est associée une onde planevk(x−λkt)Uk, on peut donc remplacer, dans la discussion informelle qui suit, le mot “caractéristique” par “onde plane”. On dit qu’une caractéristique va vers “l’aval” si la fonctionxk(t)est croissante, sinon on dit qu’elle va vers “l’amont”. En un point(x, t)avec 0 < x < Lla détermination de la solution en fonction de l’état antérieur enτ < tse fait sans problème : si la vitesse est subsonique il faut remonter (dans le temps) une caractéristique dans chaque sens (une caractéristique vient de l’amont et l’autre vient de l’aval de l’écoulement) sinon, si la vitesse est supersonique, il faut remonter deux caractéristiques qui viennent l’amont : dans les deux cas en “remontant dans le temps” ces deux caractéristiques on trouve des va-leurs connues des deux invariants de Riemann, ce qui permet de déterminer la solution. La différence étant qu’en écoulement supersonique la solution en un tempstne dépend que de l’amont.

Quand on est sur un bord :

−Enx = 0si la vitesseu¯est subsonique une caractéristique arrive sur ce point et une autre en part ; un seul invariant de Riemann est donc connu par les instants antérieurs, il faut une seule condi-tion supplémentaire pour déterminer complètement la solucondi-tion : on peut fixeruouρ.

−Enx = 0si la vitesseu¯est supersonique, deux caractéristiques partent de ce point, la valeur de la solution ne dépend pas des temps antérieurs, il faut fixer deux conditions pour la déterminer, on peut fixeruetρ.

−En x = L si la vitesse est subsonique une caractéristique arrive sur ce point et une autre en part ; un seul invariant de Riemann est donc connu par les instants antérieurs, il faut une condition supplémentaire pour déterminer la solution : on peut fixeruouρ.

−Enx =Lsi la vitesseu¯est supersonique deux caractéristiques arrivent sur ce point, la valeur de la solution est fixée par les temps antérieurs, on ne peut pas fixer de conditions suruetρ.

Cas général : analyse des conditions aux limites

Supposons que la matriceAaqvaleurs propres positives etp−qvaleurs propres négatives et que les conditions imposées au bord sont toutes des conditions linéaires. Considérons la décomposition en ondes planes (cf. 5.25).

Au point 0 à un temps t “arrivent”, i.e. provenant des temps τ < t, q ondes planes vk(x, t) = ck(x −λkt) correspondant aux λk négatif. Les valeurs de ces fonctions vk ne peuvent donc être fixées, elle sont déterminées par les valeurs antérieures de la solution. Mais pour déterminer lesp−q ondes planes qui partent il faut fixerp−qconditions qui d’ailleurs ne peuvent pas être complètement arbitraires ( nous laisserons de côté ce problème...).

Au pointLc’est le contraire, p−q ondes planes arrivent etq ondes planes partent, on doit fixerq conditions.

En conclusion, on obtient la proposition

Proposition 46 Le nombre de conditions aux limites que l’on doit fixer en chaque point du bord est égal au nombre de caractéristiques “entrantes” en ce point.

Noter que nous avons laissé de côté le cas particulier des valeurs propres nulles, correspondant aux caractéristiques parallèles au bord.

Principe énergétique

Dans ce paragraphe nous présentons un autre point de vue, global cette fois, pour analyser les problèmes hyperboliques : la conservation de grandeurs “globales”. Considérons un système à coef-ficients constants. SupposonsAsymétrique6.

Si le domaine estR

Considérons le problème de Cauchy, posé surR

             ∂u ∂t +A ∂u ∂x = 0 u(x,0) =u0(x) lim x→±∞u(x, t) = 0 (5.29)

Nous avons vu (cf. théorème 22) que l’opérateur ∂x est antisymétrique pour le produit scalaire de L2(R)quand cet opérateur agit sur l’espace des fonctions nulles au bord, ici à l’infini. On en déduit l’antisymétrie de l’opérateurA∂x pour le produit scalaire deL2(R)p quand cet opérateur agit sur l’espace des fonctions vectorielles nulles à l’infini. Montrons ce résultat directement

hA∂u ∂x, vi= X i,j Z R ai,j ∂uj ∂xvidx Appliquons la formule d’intégration par parties à chaque intégrale, il vient

hA∂u ∂x, vi= Z R X i,j ai,j ∂vi ∂xujdx (5.30) et donc hA∂u ∂x, vi=−hA ∂v ∂x, ui

Proposition 47 Le problème (5.27) est “conservatif ” en ce sens que, une perturbation de la solution δu, à support compact, vérifie

Z

R

kδu(x, t)k22dx=Cte preuve:

En multipliant scalairement l’équation (5.27) paru, le produit scalaire est celui deL2(R)p que nous notons comme celui deRp, autrement dit

hu, vi=

Z

R

hu(x), v(x)idx

6

Ce qui est toujours vrai après un changement de variables quand la matrice du système est diagonalisable : il suffit de se placer dans la base qui diagonaliseA, la matrice est diagonale donc symétrique pour le produit scalaire canonique de cette base !

il vient

h∂u

∂t, ui+hA ∂u

∂x, ui= 0 et donc puisque l’opérateurA∂u∂x est antisymétrique surL2(R)p

hA∂u ∂x, ui= 0 d’où d dt( 1 2hu, ui) =h ∂u ∂t, ui= 0 d’où le résultat. ♦

Si le domaine est borné

Le résultat peut être différent sur un intervalle borné [0, L], calculons la variation dans le temps de l’intégrale d dt( 1 2hu, ui) =h ∂u ∂t, ui= X i,j Z L 0 ai,j∂uj ∂xuidx (5.31)

Appliquons la formule d’intégration par parties à chaque intégrale, il vient hA∂u ∂x, vi= Z L 0 X i,j ai,j∂vi ∂xujdx+ [ X i,j ai,jviuj]L0 (5.32) et donc d dt( 1 2hu, ui) = Z L 0 X i,j ai,j ∂ui ∂xujdx+ [ X i,j ai,juiuj]L0 (5.33) Et donc en additionnant (5.31) et (5.33) : d dthu, ui= [ X i,j ai,juiuj]L0 (5.34)

Si on applique ce résultat de conservation à une perturbation localisée, le crochet est nul tant que la perturbation n’a pas atteint les bords de l’intervalle. “L’énergie” de la perturbation reste donc conser-vée pour des temps petits. Ensuite tout dépend des conditions aux limites : dans certains cas le “cro-chet” peut être toujours nul, dans d’autres cas le crochet peut être dissipatif ou faire entrer de l’énergie. Lorsque l’énergie est conservée on en déduit l’unicité de la solution (car la différence de deux so-lutions de (5.22) est une solution de (5.22) nulle ent= 0, donc toujours nulle puisqueRL

0 ku(x, t)k2 2dx= 0). Et surtout on en déduit la stabilité, en normeL2, de la solution vis à vis d’une perturbationδu(x,0) initiale, puisque Z L 0 kδu(x, t)k22dx= Z L 0 kδu(x,0)k22dx