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3.1 Propriétés des opérateurs linéaires aux dérivées partielles

3.1.3 Symétrie

Nous allons mettre en évidence une propriété fondamentale pour la compréhension des équations aux dérivées partielles : la symétrie ou l’antisymétrie des opérateurs sur des espaces de fonctions nulles à l’infini ou nulles sur le bord d’un domaine.

Antisymétrie de l’opérateur ∂x

i

Les propriétés des opérateurs aux dérivées partielles dépendent des espace de fonctions sur les-quels on les fait opérer ou de leur domaine de définition. On considère ici que les opérateurs agissent

surL2(Rn), avec pour domaineD(Rn), l’espace des fonctionsCà support compact surRn, ou sur l’espaceL2(Ω)avec pour domaineV0, ce que nous choisissons pour fixer les idées. Notons

hu, vi=

Z

uv dΩ le produit scalaire deL2(Ω).

La formule d’intégration par parties dans un domaine borné (cf (1.1))

Z ∂u ∂xi v dΩ = Z u ∂v ∂xi dΩ + Z ∂Ω u v nid∂Ω (3.1) exprime l’antisymétrie de l’opérateur ∂x∂u

i ... au terme de “bord” près. On voit que le terme de bord s’annule siuetvsont dans des espaces de fonctions nulles sur le bord, . On peut réécrire (3.1), pour u, v∈V0, sous la forme h∂u ∂xi , vi=−hu, ∂v ∂xi i (3.2) L’opérateur ∂x

i est antisymétrique surV0 pour le produit scalaire deL2(Ω). Il en est donc de même de toute combinaisonP

i ai∂x

i à coefficients constants de ces opérateurs, c’est à dire des opérateurs du premier ordre à coefficients constants. D’où la proposition

Proposition 22 L’opérateur ∂x

i est antisymétrique sur V0 pour le produit scalaire deL2(Ω). Il en est de même des opérateurs du premier ordre à coefficients constants.

Remarque: Une variante de cette propriété est bien connue dans le formalisme de la mécanique quan-tique : l’opérateuri∂x

i est hermitien sur l’espace complexeL2(Rn)avec pour domaine de définition les fonctionsC1nulles à l’infini.

Symétrie des opérateurs du second ordre

Le produit de deux opérateurs antisymétriques qui commutent est symétrique, donc les opérateurs du second ordre ∂x2

i∂xj sont symétriques et il en est de même de leurs combinaisons, c’est à dire des opérateurs linéaires homogènes du second ordre à coefficients constants. Vérifions directement cette assertion, la formule de Stokes (1.2) nous donne en utilisant l’écriture synthétique (21)

hP(D)(u), vi= Z ∇.(A∇u)v dΩ =− Z hA∇u,∇vidΩ + Z Γ (A∇u)nv dΓ (3.3) Le terme de bord est nul comme les fonctions u, v (noter que c’est encore vrai si(A∇u)n = 0). Définissons la forme bilinéaire

a(u, v) = Z hA∇u,∇vidΩ Il vient hP(D)(u), vi=−a(u, v)

La symétrie de l’opérateur résulte de la symétrie de la formea(u, v). Plutôt que d’avoir un signe “−” devant la forme bilinéaire, on préfère le mettre devant l’opérateur

Proposition 23 Un opérateur linéaire du second ordre homogène et à coefficients constants P(D)(u) =−∇.(A∇u)

est symétrique surV0pour le produit scalaire deL2(Ω). La forme bilinéaire symétrique associée est a(u, v) =hP(D)(u), vi=

Z

hA∇u,∇vidΩ Le laplacien∆est un opérateur symétrique, avec

a(u, v) =

Z

h∇u,∇vidΩ ainsi que l’opérateur des ondes

2 ∂t2 −c2∆ aveca(u, v) =R ∂u ∂t ∂v

∂t −c2h∇u,∇vidΩ, mais le premier est en outre défini positif1contrairement au second.

Cette propriété de symétrie s’étend à d’autres espaces de fonctions quand les fonctions vérifient certaines conditions aux limites sur des domaines bornés (voir chapitre 4).

Calcul du transposé

Ce paragraphe peut être laissé de côté en première lecture. La formule d’intégration par parties permet de calculer le transposé d’un opérateur aux dérivées partielles, nous allons présenter deux exemples classiques.

1)SoitV un champ de vecteurC1 dans un domaineΩde bordΓet V0={u∈C1(Ω)/ u= 0six∈Γ} Considérons surL2(Ω), l’opérateur

L(u) =∇.(uV) de domaineV0. On a hL(u), vi= Z ∇.(uV)v dΩ

De la formule d’intégration par parties on déduit la formule de Stokes (cf. (1.2))

Z ∇.Φv dΩ =− Z Φ.∇v dΩ + Z Γ Φnv d∂Ω (3.4)

Appliquons (3.4) en remplaçantΦparu~V

Z ∇.(uV)v dΩ =− Z uV .∇v dΩ + Z ∂Ω uv Vnd∂Ω 1

Le terme de bord est nul commeu (mais on pourrait aussi supposerVnnul et avoir uquelconque) donc hL(u), vi= Z ∇.(uV)v dΩ =− Z uV .∇v dΩ =hu, Lt(v)i Il vient

Proposition 24 L’opérateur Lt(v) = −V .∇v opérant sur les fonctions C1 est le transposé de l’opérateurL(u) =∇.(uV)opérant sur les fonctionsC1nulles sur le bord.

Cette formule nous servira pour l’étude de l’équation de convection-diffusion.

2)Considérons dans ce paragraphe un champ de vecteursu(x) = (..., ui(x1, x2, x3), ...)tet une fonction scalairev(x1, x2, x3), définie sur un domaineΩ. Considérons la divergence “∇.” comme un opérateur deL2(Ω)3 dansL2(Ω)de domaineC1(Ω)et le gradient “∇” comme un opérateur de L2(Ω) dansL2(Ω)3 de domaine V0. Si u ∈ C1(Ω)et v ∈ V0 la formule (3.4) a bien un sens et l’intégrale de bord est nulle

Z ∇. u v dΩ =− Z u∇v dΩ + Z Γ unv dΓ (3.5) d’où Z u∇v dΩ =− Z ∇. u v dΩ (3.6)

La formule (3.6) exprime que le transposé du gradient, opérant sur les fonctionsC1nulles sur le bord, est l’opposé de la divergence opérant sur les champs de vecteursC1.

Nous aurions pu aussi considérer des champs de vecteurs tels queun est nul sur le bord (donc tan-gents au bord) et des fonctions quelconques : la formule (3.5) exprime alors que le transposé de la divergence, opérant sur les champs de vecteursC1 tangents au bord d’un domaine, est l’opposé du gradient opérant sur les fonctionsC1. Elle s’applique par exemple au système d’équations de Stokes (chapitre 2) qui modélise des fluides incompressibles et montre que l’opérateur aux dérivées partielles dans ce système est symétrique. Il vient :

Proposition 25 Le transposé de l’opérateurL(u) = ∇uopérant sur les fonctionsC1 nulles sur le bord est l’opérateurLt(v) =−∇. vopérant sur les champs de vecteursC1.

Le transposé de l’opérateurL(v) =∇. vopérant sur les champs de vecteursC1 tangents au bord est l’opérateurLt(u) =−∇uopérant sur les fonctionsC1.

Noter que on retrouve la symétrie de l’opérateur homogène du second ordre (23) car P(D)(u) =−∇.(A∇u) =∇tA∇

Forme canonique des opérateurs linéaires du second ordre

Considérons un opérateur linéaire du second ordre général P(D)(u) =X

i,j

ai,j(x)uxixj+X j

Noter que l’on peut supposerai,j =aj,idu fait queuxixj =uxjxi. NotonsA(x)la matrice symétrique de coefficientai,j(x)On vérifie en développant la divergence que

P(D)(u) =∇.(A(x)∇u) + 2hV(x),∇ui+c(x)u où nous avons posé2βj(x) =bj−P

i ∂ai,j

∂xi et nous avons notéV(x) = (β1, ..., βn)t. Or nous avons vu (24) que le transposé de l’opérateurL(u) =hV(x),∇uiest l’opérateurLt(u) =−∇.(V(x)u); décomposons donc l’opérateurL(u)en sa partie symétrique

L(u) +Lt(u) =hV(x),∇ui − ∇. V(x)u) et antisymétrique

L(u)−Lt(u) = (hV(x),∇ui+∇.(V(x)u)) Or

∇.(V(x)u) =∇. V(x)u+hV(x),∇ui d’où

L(u) +Lt(u) =−∇. V(x)u Il vient

P(D)(u) =∇.(A(x)∇u)− ∇. V(x)u+ (hV(x),∇ui+∇.(V(x)u)) +c(x)u ou encore

P(D)(u) =∇.(A(x)∇u) +γ(x)u+ (hV(x),∇ui+∇.(V(x)u))

où on a poséγ(x) = (c(x)− ∇. V(x)). Considérons que l’opérateurP(D)opère surL2(Ω)avec pour domaineV0. On vérifie que :

−l’opérateur

P(D)S(u) =∇.(A(x)∇u) +γ(x)u est symétrique, car en appliquant la formule de Stokes (3.4)

hP(D)S(u), vi= Z ∇.(A(x)∇u)v dΩ + Z γ(x)uv dΩ =− Z hA(x)∇u, vidΩ + Z γ(x)uv dΩ et cette expression est symétrique enuetv(cette propriété reste vraie dans des espaces plus généraux queV0).

−l’opérateur

P(D)A(u) =hV(x),∇ui+∇.(V u) est antisymétrique par construction. La forme bilinéaire associée s’écrit hP(D)A(u), vi= Z (hV(x),∇ui+∇.(V(x)u))v dΩ = Z ∇.(V(x)u))v− ∇.(V(x)v))u dΩ en utilisant la formule de Stokes (3.4) pour transformer le premier terme, le terme de bordRΓV(x).~nuvds étant nul (noter que le résultat reste vrai siV(x).~n= 0aux point du bord oùu, vsont non nuls). La forme est clairement antisymétrique.

Nous préférons changer2Aen−Aet énoncer le théorème :

2Cela permet d’énoncer le résultat suivant : siAest définie positive l’opérateur−∇.(A(x)∇uest défini positif ; pour le mathématicien il faut toujours positiver.

Théorème 10 Un opérateur linéaire aux dérivées partielles quelconque peut s’écrire sous la forme canonique

P(D)(u) = (−∇.(A(x)∇u) +γ(x)u) + (hV(x),∇ui+∇.(V(x)u)

où A(x) est une matrice symétrique et V(x) un champ de vecteurs. Sur l’espace V0 des fonctions de C1(Ω)nulles sur le bordΓle premier opérateur est symétrique et associé à la forme bilinéaire symétrique

a(u, v) =−

Z

hA(x)∇u,∇vidΩ +

Z

γ(x)uv dΩ et le deuxième antisymétrique associé à la forme bilinéaire

b(u, v) =

Z

∇.(V(x)u))v− ∇.(V(x)v))u dΩ

Nous verrons que cette forme canonique est bien préférable à la forme développée : elle permet de donner un sens physique à l’équation et elle permet de définir de façon cohérente des approximations conservant ces propriétés de symétrie.