• Aucun résultat trouvé

Formulation faible des équations aux dérivées partielles

Pour une introduction aux formulations faibles voir les séances d’exercice 3,4,5. Dans ce para-graphe nous analysons le passage aux formulations faibles de façon plus synthétique.

Nous considérons un problème aux limites pour une équation de Poisson ; soitΩun domaine borné du plan dont le bordΓest la réunion de deux frontièresΓ0etΓ1. Soituune fonction deC2(Ω)solution du problème      −k∆u=f sur Ω u=u0 sur Γ0 −k∂u ∂n =g sur Γ1 (3.14)

oùu0etgsont des fonctions données sur le bord. Multiplions les deux membres de l’équation (3.14) par une fonctionvquelconque, choisie dans un espaceV de fonctions que nous préciserons plus loin ; il vient : ∀v∈V Z −k∆u v dΩ = Z f v dΩ (3.15)

d’où d’après la formule de Stokes : ∀v∈V Z k∇u .∇v dΩ + Z Γ k∂u ∂n v ds= Z f v dΩ (3.16)

Pour justifier l’usage de la formule de Stokes il faut quevait des propriétés suffisantes de dérivabilité, nous choisissons iciV =C1(Ω).

Le terme de bordk∂n∂uvest connu sur la partie du bord notéeΓ1puisque−k∂u

∂n =gsur ce bord. Si on choisit la fonctionvnulle sur le bordΓ0le terme de bord s’annule surΓ0. On noteV0 l’espace des fonctions deV nulles sur la partieΓ0du bord.

Définition 9 Nous appellerons espace defonctions testsl’espaceV0dans lequel on choisit la fonction v. Il vient :        u∈C2(Ω) u=u0 sur Γ0 ∀v∈V Z k∇u .∇v dΩ = Z f v dΩ + Z Γ1 k∂u ∂nv ds (3.17)

On obtient ainsi une premièreformulation variationnelledu problème, dite aussiformulation faible, nous allons montrer qu’elle est équivalente à la formulation initiale.

3.3.1 Équivalence des formulations

Un lemme

Soit V0 un sous-espace de fonctions continues sur un domaine Ω. Définissons la propriété (P) suivante :

Pour tout pointx ∈ Ωet pour tout petit disqueB(x)inclus dans Ωil existe une fonctionv ∈ V0

positive surB(x)et nulle en dehors de ce disque. On a le lemme :

Lemme 2 Si un espace de fonctionsV0 a la propriété (P) et sih∈C(Ω), alors ∀v∈V0

Z

h v dΩ = 0 =⇒h= 0 (3.18) Preuve: sih6= 0, il existe un pointx∈Ωet un petit disqueB(x)tel quehsoit de signe constant sur ce disque (par exemple>0) ; choisissonsv ∈V0positive surB(x)et nulle en dehors de ce disque, alors on ahv >0sur ce disque tandis queR

hv dΩ =R

B(x) hv dΩ = 0, ce qui est contradictoire. ♦

Noter que l’on peut prendre comme fonctions test l’espaceD(Ω)des fonctionsCà support com-pact, voir le paragraphe ci-dessous, mais que si l’on prend l’espace des fonctionsC1d’intégrale nulle surΩla propriété (P) n’est pas vérifiée.

Démonstration de l’équivalence

Il y a dans l’équivalence des formulations (3.14) et (3.17) deux propriétés distinctes : 1. La formulation (3.17) implique l’équation aux dérivées partielles (3.14).

Supposons queusoit solution de (3.17) alors, en appliquant la formule de Stokes, on montre queuest solution de (3.15) pour toute fonctionv ∈ C01(Ω)nulle sur tout le bordΓdeΩ(car alors l’intégrale de bord disparaît). Comme l’espaceC01(Ω)des fonctionC1nulles sur le bord a la propriété (P) on en déduit que−∆u−f = 0.

2. La formulation faible (3.17) implique queuvérifie la condition aux limites−k∂u∂n =gsur le bordΓ1.

Il suffit en effet d’appliquer à nouveau la formule de Stokes à (3.17) mais cette fois pour une fonction v quelconque dans V0, on obtient une intégrale sur Ω qui est nulle puisque u est solution de (3.14) et une intégrale de bordRΓ

1 (−k∂u

∂n−g)vdsqui doit donc être nulle. On en déduit que cela implique que ∂u∂n = 0en utilisant la propriété (P) surC(Γ1).

Choix de l’espace fonctionnel

De la démonstration ci-dessus nous déduisons une règle pour choisir l’espace fonctionnelV0des fonctions tests quand on veut définir une formulation faible :

Proposition 29 (Informelle) Si, dans la construction d’une formulation faible, on prend pour espace de fonctions tests le sous ensemble des fonctions nulles aux points du bord où les valeurs de la fonction sont fixées (condition de Dirichlet) mais quelconques aux points du bord où les conditions portent sur la dérivée (conditions de Neuman) on rend implicite les conditions sur la dérivée.

3.3.2 Formulation au sens des distributions

Prenons comme espace de fonctions test l’espace D(Ω)des fonctions C à support compact. Appliquons deux fois la formule de Stokes à (3.17), les différentes intégrales de bord sont toutes nulles et l’on obtient :

∀v∈D(Ω) Z −u∆v dΩ = Z f v dΩ (3.19)

Cette formulation faible est la formulation au sens des distributions de l’équation (3.14). Pour une fonction deux fois dérivables, cette formulation équivaut à l’équation aux dérivées partielles initiale. Mais dans cette formulation les dérivées de l’inconnueun’apparaissent plus, ce qui autorise à poser un problème sur des fonctionsua priori très irrégulières (en fait il suffit queusoit intégrable). Nous allons en voir ci-dessous l’intérêt.

3.3.3 Utilisation des formulations faibles

Dans la formulation faible (3.17) du problème de Poisson n’apparaissent que les dérivées pre-mières de u, et dans la formulation au sens des distributions aucune dérivée n’est utilisée. Toute solution régulière de l’équation de Poisson est une solution des formulations faibles par construction. En sens inverse on montre que pour des données assez régulières (i.e. par exemplef ∈C1(Ω)) toute solution continue des formulations faibles est régulière. Ce qui montre l’équivalence des formulations

dans les situations où elles sont simultanément définies.

L’intérêt des formulations faibles, en plus de l’utilisation numérique étudiée aux séances 2,3,4, est qu’elles gardent un sens dans des situations plus générales, qui fait que l’on doit les considérer comme des extensions des formulations usuelles. Ainsi la formulation (3.17) garde un sens quand le coeffi-cient de conductivitékest constant par morceaux surΩ(elle équivaut à vérifier l’équation (3.14) sur chaque morceau et à ajouter sur les frontières une condition de raccord qui est la continuité des flux normaux) tandis que la formulation au sens des distributions (3.19) garde un sens lorsque l’on fait tendre la fonctionf (physiquement c’est une densité) vers une charge ponctuelle (L(v)définit alors une distribution de Dirac) alors même que la formulation usuelle (3.14) n’a pas alors de sens. Nous avons vu que les formulations faibles permettent de définir les approximations du problème par la méthode des éléments finis. De manière très générale (mais pas toujours pertinente !) elles per-mettent de définir des approximations : il suffit de choisir un sous espace de dimension finie N de fonctions qui peuvent approcher la solution, et de poserN équations dans ce sous-espace en écrivant la formulation faible pourN fonctionsv = wi, i = 1, ..., N d’une base de ce sous-espace. C’est la méthode dite deRitz Galerkin. Cette description très générale n’assure cependant pas la cohérence du procédé, c’est à dire la convergence de l’approximation quand on fait tendre la dimension du sous-espace vers l’infini.

3.3.4 Interprétation des formulations faibles

Nous avons présenté les formulations faibles dans les séances d’exercice à partir de leur signifi-cation mécanique : elles représentent diverses formes du principe des travaux virtuels. On peut en donner d’autres interprétations très générales.

Considérons la formulation (3.15) en prenant pour fonction testvune fonction positive et d’inté-grale égale à1, on a :

∀v∈V

Z

(−k∆u−f)v dΩ = 0 (3.20) que l’on peut interprêter en considérant que les conditions d’équilibre ou de conservation locale −k∆u−f = 0sont vérifiées en moyenne pondérée parv. En particulier sivest une des fonctions de basewid’une approximation par éléments finis de (3.14) on voit que les équations construites dans l’approximation traduisent une moyenne locale des équations ponctuelles d’équilibre ou de conserva-tion .

Considérons la formulation (3.17) et posons

     a(u, v) = Z k∇u .∇v dΩ L(v) = Z f v dΩ (3.21) le problème s’écrit : ∀v∈V0, a(u, v) =L(v) (3.22)

La forme bilinéairea(u, v)est symétrique définie positive et elle définit donc un produit scalaire sur l’espaceV0tandis queL(v)définit une forme linéaire sur cet espace. On obtient ainsi une interpréta-tion géométrique du problème : la soluinterpréta-tionuest le vecteur deV0 qui représente la forme linéaireL à l’aide du produit scalairea(u, v). Sur un espace de dimension finie on sait que toute forme linéaire peut être ainsi représentée ; en dimension infinie ce résultat reste vrai dans un espace de Hilbert pour des formes linéaires continues. MaisV0 n’est pas un espace complet pour la norme déduite du pro-duit scalairea(u, v). Cela complique singulièrement le raisonnement car il faut introduire l’espace de Sobolev H01, complété de V0 pour la normepa(u, u) (voir chap. 6), dont l’utilisation pose de nombreux problèmes techniques, mais c’est cependant ainsi que l’on obtient le cadre le plus général pour l’étude mathématique des équations aux dérivées partielles de type elliptique. Les formulations faibles permettent donc de démontrer les résultats mathématiques d’existence et d’unicité de la so-lution du problème, voir au chapitre 6 plus de détails sur la théorie mathématique de l’existence des solutions.

Enfin les formulations faibles sont des conséquences directes des principes énergétiques quand ceux-ci existent, comme nous le verrons ci-dessous.