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Les transports, un élément déterminant de l’aménagement du territoire

Section 2 : Transport dans la logique d’aménagement du territoire

3. Les transports, un élément déterminant de l’aménagement du territoire

Sur le plan théorique, les travaux des économistes spatiaux, tel que Von Thünen, Weber et Losch, ont montré le rôle majeur des réseaux de transport dans l’organisation de l’espace à travers la répartition des localisations industrielles et la constitution des centres et des régions.

Plus tard, Walter Isard rencontre les théories économiques de la rente foncière où il accorde une place prédominante aux transports, à la responsabilité de ce secteur dans le désenclavement des zones rurales et à l’impact des différents modes de transport sur la densité des agglomérations urbaines.

3.1. Impact des transports sur la localisation des activités

Les transports ont, depuis toujours, joué un rôle dans la localisation des activités et vice-versa.

Alors que l’impact de ces derniers sur la localisation des activités à été récemment intégré en économie géographique, ils sont souvent considérés comme le facteur élémentaire le plus déterminant de la localisation de l’usine. Ceci est moins vrai que ce ne le fut historiquement, mais le transport reste un facteur essentiel de la localisation des biens, des industries (SMITH D M)1.Par conséquent, ils doivent faire partie intégrante du processus de production, car une marchandise est sans utilité tant qu’elle n’a pas atteint son lieu de consommation (BUCHAMAN Estall)2. En effet, tout processus industriel implique l’intervention des transports, d’abord pour réunir en un même endroit les produits et matériaux bruts (matières premières) devants subir une transformation, ensuite pour acheminer les produits finis et semi finis vers les lieux d’utilisation et de consommation. En retour, le coût du transport pèse sur le prix des inputs et outputs de l’industrie, ce qui fait qu’il intervient directement dans le prix de revient final du produit. Ainsi, pour chaque firme, une localisation différente implique automatiquement des coûts de transport différents.

Les théoriciens, notamment les économistes, ont depuis longtemps montré l’importance des transports dans l’économie industrielle. D’ailleurs, la plupart des théories de localisation accordent une très large place aux transports comme facteur déterminant dans le choix de l’implantation géographique des entreprises. Alfred WEBER a été l’auteur de la première théorie générale de la localisation industrielle. Dans son œuvre, il accorde une importance majeure aux transports comme facteur de localisation des unités de production. Pour cet auteur et pour la plupart des théories de localisation fondées sur les coûts, l’entreprise n’a guerre le pouvoir d’influencer directement le prix d’un produit. En revanche, elle peut jouer sur le coût du transport pour obtenir une maximisation de ses profits. Ainsi, pour les       

1 SMITH D M., (1971), « Industrial location », New York, Wiley.

2 BUCHAMAN Estall, (1973), « Industrial activity and economic geographic », Londres.

entreprises, la localisation optimale est celle qui permet de minimiser les coûts de transport en minimisant la distance à franchir. Dans la théorie de August LOSCH1traitant de l’organisation de l’espace économique, le transport apparait également comme un élément important mais moins exclusif de la localisation industrielle.

A l’inverse de ces deux approches, les théories de localisation, fondées sur les effets d’entrainement2, n’accordent plus la primauté au transport mais plutôt à la motricité, à la polarisation, aux économies externes d’agglomération et aux relations interindustrielles.

Cependant, le transport n’est qu’un élément nécessaire à l’efficacité du pôle de croissance dans son rôle de promoteur du développement économique régional (PERROUX).

Avec les progrès techniques, les entreprises industrielles ont souvent le choix entre divers itinéraires grâce aux différents moyens de transport disponibles. La révolution technique intervenue dans le domaine des transports n’a pas seulement apporté la vitesse, les fortes capacités de charges, la sécurité,…, elle a toutefois permis une plus grande et une plus large diffusion spatiale de l’industrie en améliorant l’accessibilité vers toutes les ressources et tous les marchés, et en rendant aussi l’espace plus flexible. Ainsi, grâce à l’évolution des transports, l’industrie a acquis une plus grande liberté dans le choix des implantations géographiques de ses sites. Or, « on ne peut donc parler indifféremment des transport en général. Leur rôle quant aux implantations d’activités est différent »3, et ce selon les différents moyens de transport fluvial, ferroviaire, routier, maritime et aérien.

Le transport fluvial : La navigation fluviale est relativement lente, elle est donc plus intéressante pour les transports de marchandises très lourdes sur les longues distances.

Lorsque les conditions optimales (techniques, naturelles, financières, etc.) sont réunies, de véritables axes industriels peuvent se constituer.

Le transport ferroviaire : Le chemin de fer a été un facteur inhérent à l’industrialisation de nombreux pays. La grande force des transports ferroviaires sur les moyennes et longues distances intéresse toutes les activités industrielles, puisqu’il est capable de transporter tous les types de marchandises.

Le transport routier : Le transport routier est jugé plus approprié lorsque les tonnages et les distances sont limités. Il est aussi le moyen favorable pour transporter des marchandises fragiles, périssables ou de haute valeur et des industries légères. Mais ceci n’empêche pas

      

1 LOSCH A, (1940), « The economics of location », New Haven, Yale university Press.

2 PERROUX F., (1964), « L’économie du XXème siècle », Paris.

3 MERLIN Pierre, (1991), op cité.

qu’il soit, parfois, le moyen exclusif pour transporter les industries lourdes, lorsqu’il est impossible, dans un territoire donné, de poser d’autres infrastructures que la route.

Le transport maritime : C’est le mode de transport le moins onéreux du fait de son importante capacité de charges et de sa faible consommation énergétique. Il convient beaucoup plus aux industries utilisant d’énormes tonnages de matériaux bruts importés, pour les activités tournées essentiellement vers l’exportation, etc.

Le transport aérien : Les effets du transport aérien sont non négligeables, car les aéroports attirent de plus en plus d’industries (industrie des produits de grande valeur par exemple).

La présence d’une infrastructure de transport constitue un facteur de localisation industrielle.

Celle-ci introduit dans l’espace des effets de polarisation géographique qui se traduisent par l’implantation des activités industrielles. Cependant, ce phénomène engendre aussi une discrimination spatiale dans la mesure où certains territoires deviennent plus attractifs que d’autres.

Au final, le coût de transport peut influencer directement la configuration géographique d’un réseau industriel sur un territoire donné. Un coût de transport relativement élevé incite à réduire la dispersion d’unités industrielles, tandis qu’un prix assez bas à côté des modes de transport développés, contribuent à la forte dispersion de celles-ci.

3.2. Rôle des transports dans le désenclavement des zones rurales (isolées)

Le secteur des transports est chargé d’assurer l’accessibilité des personnes et des marchandises à partir et vers n’importe quel point dans l’espace. Sa fonction est alors le désenclavement des zones fermées et/ou difficilement accessibles. Cette affirmation se résume à travers l’expérience des pays développés, où les transports modernes à savoir les chemins de fer, ont bien accompli cette mission. Ces derniers ont permis la diffusion des produits locaux à l’échelle nationale et internationale, ce qui a rompu l’autarcie locale de l’économie traditionnelle1. Un siècle plus tard, le transport routier, notamment l’automobile, a permis une meilleure posture en zones urbaines que rurales. Celles-ci, de par leur pauvreté et leur isolement restent dépendantes des transports pour les désenclaver.

Le transport ferroviaire assure la liaison entre les villes. Pour desservir les zones rurales par le chemin de fer, elles doivent être peuplées et actives afin d’assurer l’animation de ce service.

Dans le cas contraire, la demande sera insuffisante et par conséquent, le service connaitra un déficit (car la demande ne sera pas suffisante pour amortir les budgets lourds de la mise en place des infrastructures appropriées). De ce fait, la route est parfois le seul moyen qui peut       

1 MERLIN Pierre, (1991), op Cité

assurer la desserte des personnes et des marchandises en zones rurales, et aucun autre mode ne peut la substituer. Une étude britannique a porté sur cette problématique et a révélé que même la marche à pied ne peut se développer en ce genre de zones à causes des trajets souvent importants.

Dans les pays en voie de développement (souvent à prédominance rurale), les pouvoirs publics accordent une priorité au secteur des transports en matière d’investissement du fait du rôle qu’on lui prête dans le développement économique. Mais les objectifs à atteindre doivent d’abord s’exprimer en termes d’accessibilité, ce qui impose une forte connectivité des réseaux de transport et une priorité au développement et à l’amélioration des transports collectifs.

Dans le cas contraire, le secteur ne contribuera qu’au renforcement des inégalités régionales.

Nous constatons alors que, dans ces pays, les préoccupations d’aménagement du territoire viennent après les investissements lourds et coûteux, ce qui engendre de graves déséquilibres et les éloigne du développement harmonieux entre urbain et rural.

3.3. Rôle des transports dans la croissance urbaine

Beaucoup d’études théoriques et empiriques ont traité de la relation entre les transports et la croissance urbaine à travers l’impact des infrastructures de transport sur la formation des valeurs foncières, sur les formes de développement urbain et sur les comportements quotidiens des individus.

Contrairement aux économistes classiques, tels que Smith et Ricardo, qui ne se sont pas intéressés à la valeur foncière en milieu urbain, le néo-classique Alfred Marshall1 a introduit la notion d’utilité du sol urbain. Les théories de la rente foncière urbaine ont montré que, pour faire baisser les valeurs foncières dans une agglomération, il faut agir sur les moyens de transport en les développant et en les améliorant. Mais au niveau local, lorsque la desserte d’un quartier est améliorée, celui-ci devient plus attractif et entraine alors une hausse des prix du foncier. En ce qui concerne les activités, les effets peuvent aussi être importants. Ils sont plutôt liés à l’usage de l’espace qui va accueillir une nouvelle infrastructure de transport capable de le modifier, de le transformer et/ou de lui créer une nouvelle image.

En bref, les effets des infrastructures de transport sur les activités ne sont pas automatiques.

D’après Offner2, ces effets sont plus importants lorsqu’il y a un effet de « congruence », en d’autres termes, c’est lorsqu’une nouvelle infrastructure s’inscrit dans une logique de transformation sociale, économique et urbaine de l’espace desservi.

      

1 MARSHALL Alfred, (1890), « Principles of land economics », Londres.

2 Offner Jean-Marc., (1980), « L’évolution des investissements de transport : effet ou congruence?», Dans Greco

« transport et espace », rencontre de recherche.

Le secteur des transports peut ainsi conduire le développement ou la transformation de l’espace urbain mais à condition qu’il soit inséré dans le cadre d’une planification globale en combinant cet ensemble d’actions :

- Etudier avec précision les nouveaux tracés des infrastructures - Harmoniser la planification spatiale et celle des transports

- Associer la population et ses forces économiques (services et équipements)

- Lancer des études (projets) pour faciliter l’adaptation de la population à la nouvelle situation.

En outre, les différents moyens de transport ont des effets différents sur le tissu urbain. Les transports en commun favorisent une urbanisation dense, polarisé et linéaire autour des stations des nouvelles lignes de transport du fait de leur grande capacité et du gain de temps en allant vers le centre. En revanche, une desserte par automobile entraine une urbanisation étendue et beaucoup plus vaste que celle des transports en commun. Celle-ci favorise un habitat dispersé et à faible densité mais sur une plus vaste surface qui se traduit par le phénomène de périurbanisation. A l’inverse des transports en commun qui ont un effet centralisateur, les routes et autoroutes ont plutôt un effet décentralisateur.

En général, les transports constituent un moyen important dans l’orientation de la croissance urbaine, et ce à travers :

- Le choix du moyen de transport dominant,

- La cohérence entre les politiques d’urbanisme et le choix des axes à desservir

- La cohérence entre les politiques d’urbanisme et le choix d’implantation des stations ou des échangeurs

- Et enfin, à travers un système de tarification adéquat.

On constate que chaque territoire a ses propres spécificités avantageuses soient-elles ou contraignantes. Une fois mises en exergue, il faut s’adapter à ces contraintes tout en exploitant les potentialités de celui-ci. C’est donc le défi à relever pour stimuler le développement par le secteur des transports.

Section 3 : L’étendue du développement local généré par le secteur des

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