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On constate une abondance de Parasitica beaucoup plus éle-vée dans la parcelle Biophyto que dans la parcelle Témoin. En effet, la moyenne des prélèvements sur la parcelle Biophyto est de 198 individus, alors qu’elle est seulement de 20 sur la parcelle Témoin (Figure 5). Soit une abondance dix fois plus importante de parasitoïdes sur la parcelle Biophyto que sur la parcelle Témoin.

Figure 5 Abondance des Parasitica piégés dans les tentes

Malaise sur les parcelles Biophyto et Témoin.

Discussion

‚ RAPPEL DES RÉSULTATS

Sur 12 espèces végétales, quatre espèces se distinguent des autres : l’Alysse maritime, la Bourrache officinale, le Souci of-ficinal et le Sarrasin. Le fait qu’elles aient suffisamment fleuri montre qu’elles sont adaptées aux conditions pédoclimatiques réunionnaises, contrairement aux autres espèces qui ont plus de difficultés à pousser et à fleurir. Ces quatre plantes attirent de nombreux auxiliaires de culture, mais aussi des insectes

Abondanc e de par asit oïdes 250 200 150 100 50 Biophyto Témoin

pouvant servir de proies alternatives pour ces derniers, comme les hétéroptères et les homoptères, lorsque les populations de ravageurs diminuent. Ces espèces n’attirent pas les ravageurs du manguier, condition indispensable pour faire partie d’une bande fleurie. D’après les résultats d’abondance d’arthropo-des, l’Alysse maritime attire significativement plus d’auxiliaires que la Bourrache et le Souci, mais pas significativement plus que le Sarrasin (Figure 2). D’après Chaney (1992), l’Alysse peut attirer plus de 200 insectes bénéfiques. De plus, Fiedler et Landis (2007) soutiennent que l’Alysse maritime, mais aussi le Sarrasin, sont très attractifs pour les ennemis naturels des ravageurs. Nos résultats de diversité montrent quant à eux un plus grand nombre de familles d’hyménoptères sur l’Alysse que sur les trois autres plantes (Figure 2). L’analyse spatiale de la deuxième partie de notre étude montre le caractère com-plémentaire des quatre espèces végétales suivies (Figure 4). ‚ DIFFICULTÉS ET LIMITES DE L’ÉTUDE

Pour mesurer l’attractivité des arthropodes par des espèces végétales, de nombreuses données ont dû être exclues. Le fait qu’il s’agisse d’une expérimentation inédite en milieu tropical, peut expliquer que certains résultats ne soient pas exploitables. De plus, l’exclusion des données issues de l’exploitation 3 et de la bande fleurie 2 de l’exploitation 1 est notamment due à des facteurs environnementaux, comme le passage de cyclones en 2013 causant des dégâts sur les bandes fleuries, la cha-leur excessive (températures supérieures à 30 °C) et la forte pluviométrie à cette période de l’année (venant les assécher ou les inonder). Des problèmes de gestion de l’irrigation des bandes fleuries, qui doit être plus abondante que celle du verger puisqu’ils n’ont pas les mêmes besoins, ont également engen-dré des difficultés. De plus, le climat à cette période de l’année favorise la croissance des adventices adaptées aux conditions environnementales, comme le fataque (Megathrysus maximus J. ; Poaceae) envahissant plus rapidement les bandes fleuries malgré un désherbage régulier. Cela peut expliquer le fait que certaines espèces ont moins bien levé ou se sont moins bien développées. De plus, de nombreux arthropodes ont été piégés lors des prélèvements, demandant un important travail de tri et de détermination ainsi que des compétences entomologiques conséquentes. De ce fait, de nombreux insectes n’ont pas pu être déterminés jusqu’à l’espèce. De plus, certains arthropodes, notamment les plus petits, étaient plus difficiles à conserver que d’autres, comme les araignées souvent en trop mauvais état pour être identifiées. Un certain nombre d’arthropodes n’a donc pas pu être comptabilisé dans les effectifs.

‚ RECHERCHES À VENIR

Un premier axe de recherche porte sur l’intégration d’espèces végétales fleuries endémiques dans la liste des plantes qui pourront être utilisées en milieu producteur. Maintenant que les méthodologies d’observation des interactions plantes-in-sectes ont été mises au point, il y a lieu d’identifier les plantes locales d’intérêt. Un premier inventaire des connaissances sur ces plantes locales, sur la base d’une enquête et d’une

revue bibliographique, peut être envisagé. Ensuite, les ob-servations sur les interactions de ces plantes avec les com-munautés d’arthropodes pourront être effectuées.

Un deuxième axe de recherche porte sur l’élaboration d’un mélange de fleurs. En effet, l’insertion de bandes fleuries dans les agroécosystèmes peut se faire de deux manières: à l’aide d’une seule espèce ou d’un mélange d’espèces vé-gétales. Cependant, le choix d’un mélange plurispécifique n’élargit pas nécessairement les ressources pour les insectes cibles. Ces derniers vont préférentiellement sélectionner une espèce particulière, malgré la présence d’alternatives (Pontin et al., 2006 ; Carreck & Williams, 1997). De plus, lorsqu’un mélange plurispécifique est implanté, il est im-portant de diminuer les phénomènes de compétition entre plantes et d’augmenter ceux de facilitation. Les facteurs induisant une compétition peuvent être l’espace, la lumière, l’eau ou encore les nutriments. Par exemple pour optimiser l’arrangement foliaire et limiter la compétition pour la lu-mière, Trenbath (1974) propose de sélectionner, en mélange plurispécifique, une espèce de taille importante présentant des feuilles dressées et une espèce de taille réduite avec des feuilles prostrées. Dans le choix des espèces à semer, il est aussi déterminant de prendre en compte la durée de floraison et la longévité des espèces sélectionnées au sein d’un mélange floristique (Pfiffner & Wyss, 2004).

Un troisième axe de recherche concerne l’étude des carac-téristiques de la plante intervenant dans l’attractivité des arthropodes. En effet, une espèce florale peut avoir un intérêt entomologique par plusieurs aspects : son attractivité (Kopta et al., 2012 ; Fitzerald & Solomon, 2004 ; Fiedler & Landis, 2007a), sa capacité à améliorer la fécondité (Winkler et al., 2009 ; Baggen & Gurr, 1998 ; Baggen et al., 1999) ou la survie de l’espèce cible (Baggen & Gurr, 1998). Cette dernière est no-tamment liée à la disponibilité en nourriture (supplémentaire et / ou complémentaire) et en sites de ponte et / ou d’hiverna-tion (Pumariño et al., 2012 ; Pfiffner & Wyss, 2004). Une bande fleurie apporte aussi un refuge en cas de perturbations et un microclimat intéressant pour les insectes (Pfiffner & Wyss, 2004). En lutte biologique, il peut aussi être intéressant de cibler des espèces florales qui tendent à réduire la durée de développement larvaire des parasitoïdes (Begum et al., 2006). À ce jour, seul un nombre limité de plantes a déjà été testé (Fiedler & Landis, 2007b ; Pfiffner & Wyss, 2004; Landis et al., 2000). Certaines grandes tendances se démarquent néan-moins : la diversité spécifique des parasitoïdes est plus élevée sur les Apiaceae et les Asteraceae (Tooker & Hanks, 2000) et l’abondance des auxiliaires augmente avec la superficie de la surface florale (Fiedler & Landis, 2007b). Les espèces florales indigènes présentent aussi généralement des abondances en auxiliaires des cultures plus élevées que les espèces florales non-indigènes (Isaacs et al., 2009).

Un quatrième axe de recherche porte sur la conception et la mise en place d’aménagements spatiaux (forme, disposition, etc…), dans ou autour de l’agrosystème, de dispositifs fleuris. Ils pourraient en effet influencer les communautés d’auxi-liaires des cultures à différentes échelles spatiales (Landis

et al., 2000). Bugg et Waddington (1994) préconisent de se-mer des couverts de compositions floristiques différentes sur différentes bandes pour diversifier les phénologies et les ressources pour les ravageurs et les auxiliaires des cultures. Idéalement, les habitats naturels et semi-naturels doivent être connectés (Pfiffner & Wyss, 2004). Les bandes fleuries peuvent être disposées en bordure ou au sein d’une parcelle (Pfiffner & Wyss, 2004).

‚ APPLICATIONS POSSIBLES

Alors que l’insertion de bandes fleuries peut se faire dans un cadre purement esthétique (agrotourisme) elle peut se faire dans l’optique de favoriser les arthropodes utiles (lutte biologique de conservation). Par exemple, une fois les auxi-liaires bien identifiés, une série d’études pourrait avoir pour objectifs de rechercher une ou des plantes les favorisant. Les Cecidomyidae ravageurs du manguier et leurs auxiliaires pourraient faire l’objet d’une telle étude. Sur l’île, un

para-sitoïde est bien connu pour avoir des cécidomyies comme hôtes : Chrysonotomyia pulcherrina (Chalcidoidea : Eulophi-dae). Cependant, sont présents sur l’île d’autres parasitoïdes de cécidomyies tels que des Platygastridae (Platygaster sp. et Fidobia sp., Muru et Delvare 2014, données non publiées) et d’autres Eulophidae spp. (Aprostocetus ootetrastichus, Muru et Delvare 2014, données non publiées). Dans la même perspective, Ceranisus sp. (Chalcidoidea : Eulophidae) est un parasitoïde de thrips présent à La Réunion (Muru et Delvare 2014, données non publiées). Une fois l’hôte de ce parasitoïde bien défini, il serait possible d’envisager un moyen d’augmen-ter son action en introduisant des bandes fleuries.

Ces deux exemples nécessiteraient cependant une batterie d’études visant à étudier la compatibilité entre les parasitoïdes et les plantes. On notera que dans tous les cas d’implantation d’une bande fleurie il est important d’étudier la compatibilité entre la plante et le ravageur contre lequel on lutte afin d’éviter un effet inverse non attendu.

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Questions / Réponses

„J.-N. Aubertot : Les causes de non levée de certaines espèces végétales dans les bandes enherbées ont-elles été identifiées ?

J.-P. Deguine : Des critères de bonne/mauvaise levée sont