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Dans la très grande majorité des cas, le mode de production biologique permet d’augmenter la biodiversité, en raison de pratiques spécifiques à l’AB et de combinaison de pratiques favorables. Dans de rares cas, ils sont négatifs et associés à la fréquence des interventions (traitements ou travail du sol). Dans certains cas, ils sont nuls en raison d’un continuum de pratiques moins spécifiques de l’AB et de l’importance pré-dominante de la diversité des habitats notamment à l’échelle des paysages.

Améliorer la gestion de la biodiversité dans les agroéco-systèmes biologiques supposent donc de minimiser les fréquences des interventions pour maximiser les proces-sus naturels. La diversification des agroécosystèmes et l’écologisation des pratiques n’est possible que par une (re) conception importante des agroécosystèmes actuels. Or il n’existe pas de système unique mais une diversité de so-lutions à proposer pour une diversité d’agroécosystèmes, y compris en AB. D’où un besoin important en innovation technique notamment pour proposer au « gestionnaire des agroécosystèmes » des outils de gestion et des systèmes d’information adaptables aux conditions locales : méthodes de suivi de la biodiversité, appui technique personnalisé, etc. et ainsi reconcevoir les systèmes existants. Les premiers gestionnaires de cette biodiversité étant les agriculteurs, il s’agit de proposer des outils qui leur soient accessibles et adaptés à leurs contraintes. Le projet BioBio présenté par Sarthou et al. (2013) a ainsi abouti à la proposition de 23 indicateurs qui sont à la fois scientifiquement valides et opérationnels. Ils estiment d’ailleurs que l’évaluation sur la base de ces indicateurs sur 10 000 exploitations chaque année coûterait 0,25 % seulement du budget du premier pilier de la PAC (Politique Agricole Commune).

Longtemps considérée dans les parcelles ou les systèmes, les échelles d’analyse s’adaptent à l’étendue des processus, et pose aujourd’hui les questions de distribution spatiale des surfaces en AB pour optimiser ces services (Gabriel et al., 2010). La gestion des agroécosystèmes se pose alors à une échelle élargie et suppose une gestion collective des pratiques à l’échelle de (micro) territoires. À ce niveau, il semble incontournable d’associer les agriculteurs et les acteurs du territoire pour développer des stratégies à moyen et long terme, et ce même si la complexité du problème s’en trouve sensiblement augmentée.

Enfin, nous avons illustré dans notre dernière partie les dimensions économiques et politiques posées par la ques-tion de la biodiversité. Les changements de pratiques et la reconception des agroécosystèmes et des territoires sup-posent de lever de nombreux verrous sociotechniques aux niveaux des politiques publiques, des régimes alimentaires et de l’organisation des filières, de l’innovation et de la re-cherche-développement pour accompagner ces change-ments et concilier agriculture et biodiversité.

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Questions / Réponses

„J.-N. Aubertot : Est-il pertinent, efficient, de « compar-timenter » les actions de recherche par « mode de pro-duction » (exemple AB versus conventionnel) ? La réponse est certainement différente selon que l’on considère la re-cherche biotechnique et la rere-cherche SHS.

S. Penvern : 1) Il y a un intérêt de recherches dédiées à des

questions spécifiques à l’AB y compris en sciences biotech-niques (exemple alternatives aux antibiotiques en élevage, sélection de variétés).

2) Il y a aussi un besoin d’élargir le spectre des pratiques et modes de production pour l’ensemble des recherches. 3) Je ne suis pas sûre que les recherches en « convention-nel » soient toutes transposables aux conditions de l’AB. Là aussi, il y a un besoin de vérifier la gamme de validité des résultats à l’AB pour gagner en « efficacité ».

> Approches innovantes pour appréhender la complexité

des agroécosystèmes : contribution à l’amélioration

des services de régulation des stress biotiques

J.-N. AUBERTOT1

jean-noel.aubertot@toulouse.inra.fr

Résumé

Les performances agronomiques et environnementales des agroécosystèmes dépendent d’un ensemble complexe d’interactions entre le ou les peuplement(s) cultivé(s), le pédoclimat, les actions anthropiques, et le reste de la bio-cénose, et ce, à l’échelle de la parcelle cultivée et du terri-toire. Il est donc nécessaire de recourir à la modélisation afin d’appréhender ces hauts niveaux de complexité pour aider à la conception de systèmes de culture, notamment pour favoriser les régulations des stress biotiques. Cette communication propose i) une représentation synoptique du fonctionnement des agroécosystèmes ; ii) une réflexion méthodologique sur la manière de mieux prendre en compte la complexité des agroécosystèmes pour développer des stra-tégies de gestion agroécologique des stress biotiques ; et iii) d’illustrer différentes approches de modélisation permettant d’appréhender des niveaux de complexité différents pour aider à proposer des modes de gestion intégrés et durables des agroécosystèmes.

Mots-clés : Gestion agroécologique des bioagresseurs,

contrôle cultural, modélisation, système de culture, enne-mis des cultures

Introduction

L’agriculture du 21ème siècle devra produire plus, assurer le développement économique et social de différentes régions du monde, tout en préservant l’environnement. Afin d’atteindre ce triple objectif, la maîtrise des stress biotiques responsables de pertes de récolte (quantitatives et qualitatives), tout en limitant l’utilisation des pesticides, est certainement l’un des premiers leviers à considérer. Les objectifs de cette commu-nication sont de i) proposer une représentation conceptuelle simple, mais opérationnelle, du fonctionnement d’un système complexe : l’agroécosystème ; ii) présenter une réflexion sur le renouvellement des méthodes pour permettre la maîtrise des stress biotiques dans les agroécosystèmes tout en limitant le recours aux pesticides ; iii) illustrer cette réflexion par trois approches de modélisation innovantes.