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2. DÉFINITION CONCEPTUELLE DE L’INCUBATION

2.1 Temporalité du soutien

La temporalité du soutien est l'essence même du concept d'incubation. En ce sens, le principal objectif d'un programme d'incubation est de mener l'entreprise incubée vers l'autonomie et la viabilité financière, et ce, dans un délai jugé raisonnable (Aernoudt, 2004). De plus, le programme d'incubation dessert lui-même une entreprise, l'incubateur, qui doit assurer un roulement des entreprises incubées sans quoi l'objet du

programme devient purement immobilier (Aernoudt, 2004; Bruneel et al., 2012; Cammarata, 2003; Cammarata et Gerl, 2004; Colbert et al., 2010; Vasil, 2003). À cette fin, trois dimensions forment la caractéristique de temporalité du soutien : la politique d'admission, la politique de sortie et le suivi de la progression (Figure 9).

Figure 9 : Conversations sur la temporalité de l’incubation

2.1.1 Politique d'admission

La politique d'admission est largement documentée dans les écrits professionnels (Aaboen, 2009; Adkins, 2004b; Aerts et al., 2007; Bergek et al., 2008; Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; European Commission, 2002; Grimaldi et al., 2005; Kuratko et al., 1987; Lewis et al., 2011; Lumpkin et Ireland, 1988; Merrifield, 1987; Walker, 2004). Plus spécifiquement, c’est le moyen pour le programme d'incubation de définir ses caractéristiques en lien avec l'objet du programme et d'afficher le positionnement du programme et le type d'entreprises recherché (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Walker, 2004).

La politique d'admission doit mener le gestionnaire du programme et l'entreprise convoitée vers une discussion sur les attentes respectives et une évaluation de la valeur ajoutée de l'adhésion au programme pour les deux parties (Aaboen, 2009; Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Walker, 2004). La politique sert donc à circonscrire les critères d'admission au programme, à afficher les règles du jeu au sein de l'incubateur, à clarifier les attentes et à vérifier si le gestionnaire et l'entrepreneur

peuvent réciproquement servir leur raison d’être mutuelle (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Merrifield, 1987). De plus, la politique d'admission doit à la fois permettre de recruter les bonnes entreprises tout en attirant un nombre suffisant d'entreprises pour la survie du programme (Aaboen, 2009). Dès lors, les critères d'admission varient selon l'objet du programme et le type d'entreprises et d'entrepreneurs convoités (Adkins, 2004b; Bergek et al., 2008; Lewis et al., 2011; Lumpkin et al., 1988). Ces considérations entrent aussi en jeu afin de déterminer le moment de sortie des entreprises.

2.1.2 Politique de sortie

À l'instar de la politique d'admission, ce ne sont pas tous les programmes d'incubation qui adoptent et énoncent une politique de sortie claire et explicite (Bøllingtoft, 2012; Bruneel et al., 2012; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014). Pourtant, la politique de sortie est la composante qui donne au programme d'incubation son sens de temporalité. À cet effet, des entreprises entrent dans le programme, mais doivent aussi, un jour, en sortir. Bien que la période de temps incubée soit un facteur souvent noté de la politique de sortie, le temps demeure un critère parmi d'autres et le facteur temps dépend avant tout de la raison d'être du programme (Cammarata, 2003; Cammarata et al., 2004a; Colbert et al., 2010).

Par conséquent, aucun modèle de politique de sortie n’est applicable à tous les programmes d'incubation (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Grimaldi et al., 2005). Par contre, l'objet de procurer une valeur ajoutée vers l'autonomie et la viabilité des entreprises incubées reste au cœur des politiques de sortie (Bergek et al., 2008; Colbert et al., 2010; Kuratko et al., 1987; Lewis et al., 2011; Vasil, 2003). Ainsi, deux scénarios de sortie sont possibles. Le premier est la sortie souhaitée, soit la graduation des entreprises incubées qui est possible par l'atteinte de critères prédéterminés dans la politique de sortie (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; USEDA, 2014). Pour cela, la graduation optimale requiert un accompagnement de l'entreprise graduée dans ses

efforts de relocalisation et d'intégration dans la communauté (Aernoudt, 2004; Cammarata, 2003; Gerl, 2004a).

Le second scénario concerne plutôt les cas de sorties non espérées qui surviennent avant que l'entreprise incubée parvienne à graduer. Parmi ces situations, l'échec, la non-coopération, le départ volontaire ou la stagnation de l'entreprise incubée sont des cas de sorties non souhaitées (Bøllingtoft, 2012; Colbert et al., 2010; European Commission, 2002; Lewis et al., 2011; Vasil, 2003). Enfin, dans tous les cas, l'application de la politique doit rester flexible et tenir compte de contextes parfois changeants et de l'objet même de l'incubateur (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Lewis et al., 2011). Par conséquent, le suivi de la progression des entreprises incubées devient important.

2.1.3 Suivi de la progression

Le suivi de la progression des entreprises incubées fait le pont entre la politique d'admission et la politique de sortie. En ce sens, il permet de mesurer le développement de l'entreprise entre son état au moment d'entrer dans le programme et celui au moment de sa sortie. Dans le scénario souhaité, la mesure du suivi sert d'indicateur du succès de la progression de l'entreprise vers sa graduation. Dans les scénarios non espérés, la mesure permet de détecter les freins à la progression et de sonner l’alarme devant les cas où la graduation semble inatteignable. Dans les deux cas, le suivi de la progression rappelle à l'entreprise incubée et au gestionnaire du programme que l'incubation est un processus temporaire et que les efforts vers la graduation débutent le premier jour de l'incubation (Colbert et al., 2010).

Plusieurs indicateurs peuvent servir de suivi de la progression. D'abord, le gestionnaire peut faire un suivi à l'aide d'une liste de vérification dressée à partir de thématiques générales du plan d'affaires (Colbert et al., 2010; USEDA, 2014). Ensuite, des interventions plus ciblées permettent au gestionnaire du programme de déceler des

signaux de détresse qui freinent la progression vers la graduation (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Gerl, 2004b). Enfin, le suivi peut aussi concerner la capacité de l’entrepreneur à utiliser les services et les ressources du programme ainsi que sa volonté à participer aux activités du programme (Adkins et al., 2004b; Colbert et al., 2010). Finalement, le suivi de la progression est l'occasion pour le gestionnaire du programme de mesurer ponctuellement l'avancement de l'entreprise vers l'autonomie et la viabilité financière.

En somme, la temporalité du soutien soulève les processus internes liés à l'admission, à la sortie et au suivi de la progression des entreprises incubées. Dans le cadre de mon intervention, l’ACET ne semble pas avoir de politique d’admission clairement définie. De plus, l'amélioration de la sortie des entreprises de l'ACET ainsi que le suivi de la progression sont des enjeux relevés par certains propriétaires de l'intervention. À cet effet, les résultats de recherche soulèvent le souhait d’une meilleure préparation à l'intégration dans le milieu et la consolidation des pratiques de suivi fait aussi partie de la situation problématique relevée par certains financiers. Les pratiques de suivi du soutien vers l'autonomie et la viabilité des entreprises sont justement le propos de la deuxième caractéristique de l'incubation. Cette caractéristique et les dimensions qui la composent sont présentées ci-dessous.