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2. DÉFINITION CONCEPTUELLE DE L’INCUBATION

2.2 Soutien vers l'autonomie

La deuxième caractéristique sous laquelle je regroupe les composantes de l’incubation est la notion de soutien à l'entreprise vers sa complète autonomie. Le soutien prend la forme d’une aide au démarrage de l'entreprise comme levier de survie ou pour accélérer sa croissance (McAdam et McAdam, 2008). Le soutien a pour objectif de mener l’entreprise incubée vers l’autonomie et la viabilité financière.

Par conséquent, le soutien au développement d'une entreprise incubée prend plusieurs formes et ne cesse d'évoluer (Allen et al., 1990; Bruneel et al., 2012; Hackett

et al., 2004; McAdam et al., 2008). De son origine immobilière, le programme d'incubation d'aujourd'hui a su ajouter un éventail complet de services orientés vers le développement de l'entreprise (Allen et al., 1990; European Commission, 2002; Hackett et al., 2004; NBIA, 2014). Par ailleurs, chaque incubateur diffère par son offre de services, la clientèle desservie et la manière de mettre les services en œuvre (Allen et al., 1990; Bergek et al., 2008; NBIA, 2014; USEDA, 2014; Walker et Kalis, 2004). Devant la diversité des formes de soutien vers l’autonomie documentée dans ma revue de la littérature, trois dimensions sont présentées ci-dessous : 1) le soutien au développement des affaires, 2) le soutien au financement, 3) la formation et l'accompagnement plus personnalisé (figure 10).

Figure 10 : Conversations sur le soutien vers l’autonomie de l’incubation

2.2.1 Soutien au développement des affaires

La première dimension est la plus générique et comporte une gamme de services plus diversifiés. Le soutien au développement des affaires prend plusieurs formes et s'articule souvent autour des thèmes du plan d'affaires (Aerts et al., 2007; Bruneel et al., 2012; Cammarata, 2003; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; NBIA, 2014; UKBI, 2014; USEDA, 2014; Walker et al., 2004). La planification initiale, le raffinement du modèle d'affaires, le questionnement sur l'ensemble des composantes du plan d'affaires et les bases du démarrage d'entreprise font partie du soutien de base

offert à l'entrepreneur (Aerts et al., 2007; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014; Walker et al., 2004).

La commercialisation occupe aussi une part importante au soutien de base (Aerts et al., 2007; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014; Vasil, 2003). Aussi, le soutien sur d'autres aspects de l'entreprise est assuré. Ce soutien peut porter sur les aspects légaux (Cammarata, 2003; USEDA, 2014), sur les processus et les normes de fabrication (USEDA, 2014), sur les ressources humaines (Cammarata, 2003; NBIA, 2014; USEDA, 2014) ou sur les aspects comptables (Cammarata, 2003; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014).

En somme, la référence au plan d'affaires permet d'englober les composantes plus générales du soutien au développement des affaires. De ce fait, les bases du démarrage d'une entreprise et la planification des étapes initiales permettent au concept d'évoluer vers un modèle d'affaires viable. Plus récemment, les référents au soutien vers la validation du modèle d’affaires occupent l’espace de soutien au développement des affaires au sein des incubateurs. Ce faisant, le plan d’affaires arrive suivant cette phase de validation, à titre de plan d’exécution du modèle proposé. Lorsque le plan d’exécution s’orchestre, le financement devient rapidement une priorité et constitue donc la deuxième dimension de services de soutien vers l'autonomie. Celle-ci dépasse ainsi le soutien de base du développement des affaires.

2.2.2 Soutien au financement

Le soutien au financement est un des services les plus utiles offerts par un programme d'incubation (Colbert et al., 2010; Knopp, 2012; UKBI, 2014). Une fois que les budgets d'opération et de développement du produit sont établis, la recherche de financement devient le focus de l'entrepreneur incubé. Le soutien au financement se déroule en cinq temps. D'abord, l'identification des besoins est dressée à partir de scénarios réalistes sur le démarrage de l'entreprise et des premières activités de

commercialisation (Cammarata, 2003). Ensuite, les sources potentielles de financement sont identifiées (Aerts et al., 2007; Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010). Les sources de financement varient selon le produit ou le service offert par l'entreprise, sa situation financière au moment du financement et ce que l’entrepreneur espère comme forme de financement (Colbert et al., 2010; Walker et al., 2004). Après, à partir de ces formes et de ces sources, un choix de financiers potentiels doit être fait (Cammarata, 2003; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014).

Ce troisième temps du soutien au financement consiste à encadrer l'entrepreneur dans sa compréhension des intérêts et des enjeux des financiers ciblés (Cammarata, 2003). Ainsi, les critères de financement, les conditions, les sommes disponibles et les moments de déboursés sont analysés (Colbert et al., 2010). L'introduction aux financiers ciblés devient ensuite le quatrième temps du soutien au financement. Il s'agit en fait de l'accès aux réseaux de financiers de l’incubateur, lequel service est attendu des entreprises incubées (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014; UKBI, 2014; Walker et al., 2004). Finalement, le dernier temps du soutien au financement est consacré à préparer l'entrepreneur afin qu'il présente la proposition d'investissement avec assurance et qu’il se fasse convaincant sur le potentiel de son entreprise (Colbert et al., 2010; USEDA, 2014).

Enfin, les étapes de soutien au financement ne se déploient pas linéairement et diffèrent selon chaque entrepreneur et le moment où il devient opportun. Par conséquent, un accompagnement personnalisé est requis, ce qui est le propos de la dernière dimension de services de soutien vers l'autonomie.

2.2.3 Formation et accompagnement plus personnalisés

Cette troisième dimension rassemble les services moins génériques qui ne sont pas au menu de tous les programmes d'incubation. Ainsi, ces services sont offerts pour répondre à un besoin sectoriel ou particulier des entrepreneurs et s’affichent parfois

comme caractère distinctif du programme (Colbert et al., 2010; Walker et al., 2004). Ces formes de soutien sont présentées ci-dessous.

2.2.3.1 Formation

La formation offerte dans le cadre des programmes d'incubation peut être générale ou plus personnalisée (Colbert et al., 2010; European Commission, 2002). Dans le premier cas, la formation est composée de thèmes plus fondamentaux entourant l’identification de l’opportunité, le développement des affaires et le démarrage d'une entreprise (Aaboen, 2009; Colbert et al., 2010). Cette formation s'adresse aux entrepreneurs incubés naissants, mais peut aussi être offerte lors d'une phase de pré- incubation (Colbert et al., 2010; European Commission, 2002; Walker et al., 2004). La formation sert de vitrine pour le programme d’incubation au sein de la communauté et peut intéresser des clients potentiels à l'incubation en plus de générer des revenus supplémentaires (Colbert et al., 2010; Knopp, 2012).

La formation plus personnalisée, quant à elle, est construite à partir des entreprises présentes au sein de l'incubateur et porte sur les sujets les plus demandés (European Commission, 2002). Parmi ces derniers, il y a : le développement de compétences d'affaires, la gestion de la propriété intellectuelle, le transfert technologique, la gestion des flux monétaires, l'étude de marché, la commercialisation de technologies, le recrutement, l'embauche et l'évaluation du personnel, la logistique de distribution, l'éthique en affaires, l'exportation, le commerce électronique et les médias sociaux (Aaboen, 2009; Aerts et al., 2007; Colbert et al., 2010; European Commission, 2002; Knopp, 2012; USEDA, 2014; Walker et al., 2004).

La formation plus personnalisée prend la forme de sessions en classe, d'ateliers, de séminaires ou de webinaires en ligne (Colbert et al., 2010; Walker et al., 2004). De plus, elle peut être ponctuelle et offerte une seule fois ou s'offrir lors de séances hebdomadaires ou mensuelles (Ibid.). Enfin, comme pour l’ACET, elle peut faire partie

d'un curriculum académique où des crédits sont octroyés dans le cadre d'un programme reconnu. Par ailleurs, dans bien des cas, les besoins à combler sont plutôt spécifiques à un entrepreneur incubé. Par conséquent, l'accompagnement personnalisé devient un moyen d'intervention plus approprié.

2.2.3.2 Accompagnement personnalisé

Au même titre que pour la formation, l'accompagnement personnalisé de l'entrepreneur peut prendre plusieurs formes et être offert en groupe ou sur une base individuelle. Plus spécifiquement, trois formes d'accompagnement personnalisées sont relevées ci-dessous : le comité consultatif, le mentorat et le coaching.

Comité consultatif

Ce comité est formé par le gestionnaire de l’incubateur et se compose d'un groupe d'experts de différents domaines pertinents au développement de l'entreprise (Walker et al., 2004). Ce comité agit souvent comme substitut initial au conseil d'administration (Colbert et al., 2010). Moins formel que ce dernier, il procure une aide immédiate et plus ponctuelle aux défis de démarrage et de croissance de l'entrepreneur. Le comité est ainsi formé d'entrepreneurs et de gestionnaires seniors qui peuvent être appelés à jouer plusieurs rôles. À cet effet, le comité cadre les actions de l'entrepreneur et aide à la prise de décisions stratégiques (Colbert et al., 2010; Walker et al., 2004).

De plus, ce groupe d'experts peut ouvrir son réseau au bénéfice de l'entreprise. Ainsi, fournisseurs, clients potentiels, financiers et autres parties prenantes stratégiques au développement s'ajoutent au réseau de l'entrepreneur (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; European Commission, 2002; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; USEDA, 2014; Walker et al., 2004). Par ailleurs, lorsque l'accompagnement doit être plus personnalisé, le mentorat devient une forme plus adaptée au besoin de l'entrepreneur (St-Jean, 2008).

Mentorat

Les références au mentorat, en accompagnement de l'entrepreneur, sont abondantes, car il est au menu des services de plusieurs programmes d'incubation (Cammarata, 2003; Colbert et al., 2010; European Commission, 2002; Klofsten et Öberg, 2012; Knopp, 2012; Lewis et al., 2011; St-Jean, 2008, 2011; USEDA, 2014; Waters, McCabe, Kiellerup et Kiellerup, 2002; Walker et al., 2004). Selon des écrits professionnels, le mentorat consiste en une forme d'accompagnement personnalisé au besoin de l'entrepreneur afin de développer chez lui les qualités et les compétences nécessaires pour le développement de sa personne et de son entreprise (Colbert et al., 2010; St-Jean, 2008; Walker et al., 2004).

Le mentor porte souvent le profil d'un individu qui a réussi en affaires et qui possède une expérience pertinente pour le soutien et le développement de l'entrepreneur (St-Jean, 2008; Walker et al., 2004). Son apport peut être spécifique à un secteur d'activités ou à un aspect plus précis de la croissance de l'entreprise (Colbert et al., 2010). L'apport d'informations techniques sur le développement d'un produit, les conseils sur l'ouverture de nouveaux marchés ou sur la gestion des ressources humaines ou sur la manière de concilier le travail et la famille sont des exemples d'intervention du mentor (Ibid.).

En somme, l'entrepreneur mentoré peut bénéficier de conseils personnalisés pratiques sur à peu près tous les aspects du développement de l'entreprise et de son rôle de gestionnaire (St-Jean, 2008). À la différence du comité consultatif, l'intervention survient dans une relation d’un à un. C’est justement devant la popularité de ce type d'intervention que le coaching est devenu un mode d’accompagnement offert par les incubateurs.

Coaching

La popularité grandissante du coaching en a fait une profession et un mode de communication qui touchent plusieurs domaines d'activités (Whitworth, Kimsey-

House, Kimsey-House et Sandahl, 2011). Les intervenants en milieu scolaire, les parents, les professeurs, les politiciens, les conseillers, les consultants, les chefs d'organisations et les employés ont recours à cette forme de soutien qui met en relation une personne qui aide, le coach, et une personne qui reçoit l'aide, le coaché (Ibid.). Plus spécifiquement au contexte organisationnel, le coach peut être une ressource interne ou externe de l'organisation qui aide sur le plan de la carrière, du développement de compétences spécifiques, de l'aide au changement organisationnel, de la productivité, de la résolution de problèmes, de l'aide technique, du développement stratégique et de la mesure de performance (Aaboen, 2009; Crompton, Smyrnios et Bi, 2012; Duc, 2007; Keller, 2008; Klofsten et al., 2012; Kutzhanova, Lyons et Lichtenstein, 2009; Levesque, O’Neill, Nelson et Dumas, 2005; Luecke, 2004).

Or, la popularité de la pratique de coaching s’est bien infiltrée dans le domaine entrepreneurial alors que de plus en plus d'entrepreneurs recherchent ce type d’intervention (Klofsten et al., 2012; Kutzhanova et al., 2009). L'évolution des programmes d'incubation mène la nouvelle génération d'incubateurs vers une offre de services de coaching (Aaboen, 2009; Bergek et al., 2008; Bruneel et al., 2012; Hansen et al., 2000). Le coach accompagne donc l'entrepreneur sur des aspects comme : le développement des affaires, la gestion, le marketing, le financement, l'ouverture de marchés, le recrutement et la gestion du personnel (Aaboen, 2009; Bergek et al., 2008; Karimaa, 2012). À cette aide, le coach ajoute aussi un soutien personnel et individualisé à partir des besoins de l'entrepreneur dans le contexte spécifique de son projet d'entreprise (Kutzhanova et al., 2009; Luecke, 2004).

Ultimement, le coach transmet un savoir et un savoir-faire et met en place les mécanismes nécessaires pour mesurer la progression de l'entrepreneur (Anonyme, 2014; Crompton et al., 2012; Klofsten et al., 2012; Kutzhanova et al., 2009; Richez, 2009). Par contre, le contexte se prête plus souvent à une intervention plutôt axée sur le savoir-être de l'entrepreneur lorsque celui-ci traverse des périodes de doutes sur lui- même et sur son projet d'entreprise.

Dans tous les cas, le coach observe, discute avec le coaché, fixe des objectifs, structure le processus d'intervention et assure un suivi (Klofsten et al., 2012; Luecke, 2004). Ce faisant, une relation s'orchestre autour de rencontres planifiées et de mesures de la progression vers le résultat attendu (Crompton et al., 2012; Klofsten et al., 2012). Finalement, les concepts de coach et de mentor sont souvent interchangeables dans les écrits professionnels et les fonctions spécifiques de l'un et de l'autre dépendent de l'incubateur qui en fait la description.

En somme, le regroupement proposé des moyens mis en œuvre au soutien vers l'autonomie des entreprises m’éveille à certains questionnements plus spécifiques à l’intervention. L'ACET offre un soutien au développement des affaires ainsi qu'un soutien au financement aux entreprises sélectionnées. Par contre, il n'est pas clair pour moi, à ce stade-ci, comment se déploient ces formes de soutien sur le plan des opérations. Par ailleurs, la formation et l'accompagnement plus personnalisé font aussi partie de l'offre de soutien de l'ACET.

Sur le plan de la formation, des enjeux et des défis importants ont été soulevés par l'UdeS pour qui la formation créditée est une condition de son investissement dans l'ACET. Sur le plan de l'accompagnement, le coaching est bien présent et constitue un élément souhaité par les fondateurs et gestionnaires actuels de l'ACET. Toutefois, ce type d'accompagnement pose des défis sur le plan de la consolidation et de l'uniformisation des pratiques d'intervention actuelles des coachs ainsi que sur le suivi de la progression des entrepreneurs. Enfin, la présence de comités consultatifs ainsi que celle de mentors auprès des entrepreneurs ne semblent pas faire partie des pratiques actuelles de l'ACET.

Par ailleurs, le soutien vers l’autonomie nécessite des ressources humaines pour subvenir aux besoins plus généraux et spécifiques des entreprises. Ces ressources sont un aspect de l'environnement contrôlé présenté ci-dessous comme dernière caractéristique de ma définition de l'incubation.