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CHAPITRE IV. LA CONSTRUCTION DU RECYCLAGE DANS L’ARSENAL LEGISLATIF : ANALYSE DES POLITIQUES L’ARSENAL LEGISLATIF : ANALYSE DES POLITIQUES

2. LE CADRE FRANÇAIS DU RECYCLAGE DES DECHETS

2.4. STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT DURABLE ET GRENELLE

Suite au Conseil européen de Göteborg en 2001, les Etats membres et donc la France ont pour obligation de mettre en œuvre une Stratégie Nationale pour le Développement Durable (SNDD). Un comité des hauts fonctionnaires du Développement Durable en relation avec le Conseil National du Développement Durable (CNDD), réunissant les représentants de la société civile, vote en juin 2003 la première stratégie pour la période 2003-2008. L’intégration du développement durable est accompagnée d’une batterie d’indicateurs supportant différents axes d’enjeux. On trouve les indicateurs liés aux déchets (quantité de déchets municipaux collectés et production d’ordures ménagères par habitant et PIB) dans l’axe de « production et consommation durables »326. La SNDD est révisée en 2010 pour la période 2010-2013 et sous-titrée « vers une économie verte et équitable ». Ce document renforce les propositions de la stratégie précédente et introduit le concept de « productivité des ressources ». Basé sur une comptabilité de l’ensemble des matières entrant physiquement dans l’économie, il interroge l’efficacité de l’utilisation des ressources matérielles. L’idée sous-jacente est de projeter un « découplage attendu entre la croissance économique et l’impact environnemental associé à

l’utilisation des ressources naturelles et des matières premières »327

. En effet, le constat montre que le besoin matériel connaît une croissance linéaire et n’est pas maitrisé.

Malgré l’avènement du développement durable dès les années 1990, le gouvernement ne prend pas d’initiative législative avant le Grenelle de l’environnement en juillet 2007, qui instaure une procédure participative incluant cinq collèges (État, collectivités territoriales, patronat, syndicats et associations écologistes) et des dispositifs de suivi comme « sans doute

une des grandes nouveautés de cette concertation »328. Dominique Bourg place le Grenelle dans une rupture concrète avec la SNDD : « Avec la Stratégie nationale de développement

durable, adoptée dans la foulée du sommet de Göteborg, on se situait à un fort niveau de généralité : le cadre retenu était national et on mettait en avant des objectifs ambitieux à très long terme sans préciser par quelles dispositions ni par quelles incitations ils allaient être atteints. Avec le Grenelle, on pousse les différentes parties prenantes à définir des mesures

326 http://www.legrenelle-environnement.fr/IMG/CD_SNDD/III -SNDD_2003-2008/2.SNDD_actualisee_le_13_novembre_2006/3_Indicateurs.pdf

327 http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/fiche3 -1-1_cle791626_1_.pdf 328

P. Lascoumes, « Leviers d’action et obstacle à la mise en œuvre d’une politique de

développement soutenable », 2007, Dossier « Le Grenelle de l’environnement », Regards sur

concrètes, cohérentes entre elles, faciles et rapides à mettre en œuvre […] L’esprit du Grenelle se veut plus concret et pragmatique »329. On impulse une organisation en groupe de travail dont doit découler « un plan d’action de quinze à vingt mesures concrètes et

quantifiables »330. Les grands axes du développement durable sont répartis dans les différents groupes de travail portant sur le changement climatique, la biodiversité, la santé, la démocratie participative.

La valorisation des déchets est abordée dans le groupe « Promouvoir des modes de développement écologiques favorables à la compétitivité et à l’emploi » et elle entre dans l’ère de l « économie circulaire » : « l’enjeu économique de la politique environnementale

n’est donc pas de promouvoir une économie désindustrialisée, mais une économie plus sobre en carbone, en énergie et en ressources naturelles non renouvelables, qui fasse notamment plus de place à une économie circulaire, fondée sur la réduction et le recyclage des déchets, et plus généralement sur une utilisation plus efficace des ressources »331. Les lignes directrices sont les mêmes (réduction-recyclage, utilisation efficace des ressources), mais le cadre conceptuel est différent en s’intégrant à un objectif plus générique de promotion d’une économie sobre en consommation de ressources et d’un rebouclage de ces flux de ressources, d’où l’idée d’économie circulaire. Cette expression s’est diffusée significativement grâce à la Chine. En effet, l’Empire du Milieu s’est réapproprié les expériences européennes et américaines d’écologie industrielle et a voté une loi sur l’économie circulaire en 2008 « qui

cherche à couvrir l’ensemble des problèmes environnementaux ; toutefois, les points forts de ce projet de loi concernent plus les pourcentages de recyclage à atteindre » 332. Pourquoi la Chine s’est-elle lancée dans cette démarche malgré l’a priori négatif à l’égard de son mode de développement ? Notamment parce que ce pays « ne peut ni arrêter sa croissance

économique, ni poursuivre la voie empruntée par les pays développés à savoir polluer d’abord et traiter ensuite. […] Pour réaliser un décollage pacifique, elle a besoin de dissocier la croissance économique et ses retombées de la croissance des flux de matières et

329 D. Bourg, « Le Grenelle ou la consécration politique de la préoccupation environnementale », 2007, Dossier « Le Grenelle de l’environnement », Regards sur l’actualité, no 338, p. 60.

330 Dossier de presse, Lancement du Grenelle, 06/07/2007, available on <http://w ww.legrenelle-environnement.fr/IMG/pdf/Dossier_de_presse_grenelle.pdf>

331

Rapport Groupe 6, 27/09/2007, available on <http://www.legrenelle -environnement.fr/IMG/pdf/G6_Synthese_Rapport.pdf>

d’énergie »333

. Le déploiement de cette stratégie politique en Chine a eu un grand écho du fait de nombreuses mesures législatives et des initiatives opérationnelles (projets à l’échelle nationale, de parcs industriels et de villes334) à tel point que le gouvernement chinois apparaît comme un précurseur dans ce domaine.

D’autre part, un intergroupe dédié à la question des déchets est constitué alors qu’un seul autre intergroupe est créé pour la question des OGM, ce qui témoigne de l’attention particulière du Ministère et des attentes législatives qui en découlent à l’heure où la directive-cadre déchet est en négociation. Selon le groupe, l’action doit se dérouler à tous les stades de la gestion des déchets accompagnés par des objectifs chiffrés, aussi bien à l’amont - l’incitation de la prévention et du recyclage des acteurs producteurs - qu’à l’aval visant l’amélioration de la valorisation et du traitement. « Réorienter l'ensemble de la gestion des

déchets vers ces grandes priorités nécessite une politique renforcée, concrétisée par des mesures prioritaires et par la définition d’un nouvel ensemble d’objectifs opérationnels correspondants à ces mesures »335. Un panel de moyens d’intervention est ainsi mobilisable : taxes locales336 et nationales337, incitations financières sur les produits éco-conçus, harmonisation de la sensibilisation au tri, et planification territoriale. En parallèle, des mesures transverses sont proposées concernant l’observation et l’évaluation statistique, des programmes de recherche, le rôle de la planification, et l’information et sensibilisation du plus grand nombre.

La mise en œuvre de ces orientations politiques est traduite dans un Plan d'actions 2009-2012 publié par le Ministère de l’Environnement en septembre 2009 qui sera suivie par le Conseil National des Déchets relancé à cet effet. Il s’agit à l’aide de ce plan de définir une politique volontariste de gestion des déchets qui « vise à faire de la France un des piliers de la société

européenne de recyclage »338 en articulant orientations du Grenelle et future transposition de la directive-cadre. Les principes d’action restent dans la lignée du Grenelle : de l’amont à

333

X. Fan, D. Bourg, S. Erkman, L'économie circulaire en Chine. Vers une prise en compte de

l'environnement dans le système économique chinois ? , Novembre 2006, Futuribles n° 324.

334

J.-C. Levy, L’économie circulaire : l’urgence écologique ?, 2010, Ed. Presses de l’école nationale des Ponts et Chaussées (ENPC), 176p, pp 53-96.

335 Rapport Intergroupe Déchets, 2007, disponible sur <http://www.legrenelle -environnement.fr/spip.php?article203>

336 Il s’agit de la Taxe d’Enlèvement d’Ordures Ménagères, la Redevance d’Enlèvement d’Ordures Ménagères, la Redevance incitative.

337

Notamment la Taxe Générale sur les Activités Polluantes. 338 MEEDDM, le Plan d’actions déchets, 09/09/2009

l’aval en passant par des logiques de matériaux ou de produits. La législation vient confirmer ces engagements avec :

- La Loi de Finances pour 2009

- La Loi de programmation du 8 août 2009 "mise en œuvre du Grenelle de l'Environnement" (Grenelle I),

- La loi Projet de loi "Engagement national pour l'environnement" (Grenelle II),

LOI DE FINANCES 2009

Cette première avancée permet de fixer les évolutions de la Taxe Générale sur les Activités Polluantes (TGAP)339 : l’augmentation de la taxe sur l’enfouissement et la création d’une taxe à l’incinération. Cet instrument économique est prépondérant car il rend ces traitements finaux moins avantageux financièrement. De plus, la Loi de Finances 2009 renforce le budget « déchet » de l’ADEME qui devient clairement le bras armé des volets techniques et incitatifs du Grenelle comme le montre l’augmentation de ses moyens sur la période 2009-2011. Ainsi, la hausse de la TGAP – qui représente une charge supplémentaire pour les collectivités – renflouera le budget de l’ADEME par un mécanisme financier.

Tableau 12: Evolution du budget de l'ADEME (Source : ADEME)

Le Ministère de l’Environnement confie à l’ADEME un rôle prépondérant au regard de ce budget. Ainsi, l’agence a pour missions d’animer et soutenir la recherche (notamment en Sciences Humaines et Sociales et pour le développement d’éco-technologies appliquées aux déchets), d’apporter une assistance technique au montage des nouvelles filières de déchets, d’accompagner les filières existantes, et de fournir un soutien technique et financier aux opérations locales (dispositifs d’aide aux entreprises et collectivités concernant les axes prévention et recyclage).

339

Le Fonds de Modernisation de la Gestion des Déchets (cf. loi de 1992) a été supprimé en 1999 au profit de la Taxe Générale sur les Activités Polluantes (TGAP) perçue par le Trésor Public.

Budget total Déchets 2008 2009 2010 2011

Budget total Déchets estimé (AE) 55 M€ 105 M€ 212 M€ 259 M€

LOI DE PROGRAMMATION DU 8 AOUT 2009 "MISE EN ŒUVRE DU GRENELLE DE L'ENVIRONNEMENT" (GRENELLE I)

La loi Grenelle I décline en programmes les engagements du Grenelle de l’Environnement et par l’intermédiaire d’objectifs chiffrés concernant la réduction des déchets à la source, le recyclage matière et organique et la réduction des quantités incinérées et stockées :

- Réduction des ordures ménagères et assimilées de 7% par habitant pendant les 5 prochaines années

- Passage à 35 % (2012) puis à 45 % (2015) des déchets ménagers et assimilés orientés vers le recyclage matière ou organique (pour les emballages, passage de 60 % en 2006 à 75 % en 2012 et pour les déchets d’entreprise (hors BTP, agriculture, industrie agro-alimentaire et activités spécifiques), passage de 68 % en 2006 à 75 % en 2012)

- Diminution de 15 % à l’horizon 2012 des quantités incinérées et stockées.

Ainsi, la réduction de la production des déchets et l’augmentation du recyclage permettront de préserver les ressources naturelles ainsi que les centres d’élimination car le risque de pénurie d’exutoires devient de plus en plus important. En outre, le recyclage s’inscrit dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre car il « aide à lutter contre le changement

climatique (économie grâce au recyclage de 15 Mt de CO2 en 2005) »340 tout comme la valorisation énergétique. Il est à noter que ces objectifs sont complètement cohérents avec les objectifs de la directive-cadre (notamment celui du recyclage de 50 % des déchets ménagers en volume à l’horizon 2020).

LA LOI « GRENELLE II », OU LOI N° 2010-788 DU 12 JUILLET 2010 PORTANT ENGAGEMENT NATIONAL POUR L'ENVIRONNEMENT (ENE)

Si la loi Grenelle I programme, la loi Grenelle II applique et territorialise ce pourquoi elle cristallise de fortes attentes : « Si des avancées institutionnelles ont certes été réalisées et que

certaines améliorations sont pressenties, par exemple en matière d’efficacité énergétique des logements, le Grenelle se doit de rattraper un retard important et d’installer davantage de cohérence entre les discours et les faits. Au final, le processus de territorialisation du Grenelle apparaît comme l’étape probante qui permettra de constater, d’ici cinq à dix ans, les résultats tangibles des politiques contemporaines »341. Concernant le suivi des objectifs à

340

ADEME, Regard sur le Grenelle, 09/2008. 341

V. Lacroix, E. Zaccaï, Quarante ans de politique environnementale en France : Evolution,

atteindre, l’ADEME a déjà mis en place une enquête qui satisfera ces exigences auprès des collectivités (EPCI et communes indépendantes de plus de 1000 habitants) concernant la collecte et le traitement des déchets ménagers et assimilés. Concernant les moyens à mettre en place, la loi Grenelle II propose de renforcer plusieurs dispositifs bien connus :

- La planification territoriale

A partir de 2005342, le transfert des compétences de l’Etat vers le Conseil Général, prévu depuis 1996343, est effectif pour le plan de gestion des déchets ménagers. Le rôle du Conseil Général est en outre renforcé avec la généralisation d’un volet de prévention (Programme de prévention) et d’objectifs de recyclage. Les enjeux sont liés aux performances de collectes et aux capacités d’élimination très variables selon les départements. Des efforts sont à fournir concernant les modes de transport alternatifs à favoriser (voie fluviale ou ferrée). Le rôle des Conseils Généraux est aussi affirmé car ils ont l’obligation d’élaborer des plans départementaux de gestion des déchets issus du BTP opposables au tiers : « Ces plans

permettent de développer la bonne gestion de ces déchets et notamment d'accroître leur recyclage et leur valorisation, en identifiant les besoins d'exutoires (sites de stockage de déchets inertes) et en définissant et incitant à l'organisation d'un réseau cohérent sur le territoire de collecte, de tri, de regroupement et de valorisation de ces déchets »344. Par ailleurs, les collectivités sont encouragées à développer une redevance incitative (redevance d’enlèvement des ordures ménagères dont le montant varie en fonction de l’utilisation effective du service par l’usager) et la collecte des « biodéchets » (c’est à dire les déchets organiques de restauration ou du commerce et de la distribution).

- Le renforcement des filières dédiées

Si les déchets issus des chantiers du BTP sont endigués dans la planification départementale, ils sont aussi encadrés par le renforcement de la responsabilité des producteurs, à savoir les maîtres d’ouvrage qui doivent rendre des comptes sur la valorisation de leurs déchets de déconstruction. En outre, des filières de récupération et traitement spécifiques seront créées concernant les Déchets d’Activité de Soins à Risque Infectieux (DASRI), les déchets dangereux diffus et les déchets d’ameublement. D’autres filières déjà existantes seront renforcées : les consignes de tri harmonisées du côté des emballages en impliquant la grande

342

Selon la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. 343

Selon le décret n° 96-1008 du 18 novembre 1996 344 ADEME, Regard sur le Grenelle 2, 05/2009

distribution, l’obligation de recyclage des papiers étendus aux grandes entreprises, la prise en compte de la vente à distance pour les Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques (DEEE), et une taxe pour alimenter la filière des pneus. Ainsi, le cadre des filières à responsabilité élargie du producteur (REP) se voit confirmer et remodeler, ce dont nous parlerons plus précisément dans le chapitre suivant.

BILAN DE LA CONSTRUCTION EUROPEENNE ET FRANÇAISE DU RECYCLAGE

Ce chapitre a montré la construction politique européenne et française de la question du recyclage des déchets. L’échelle européenne apparaît comme un cadre incitatif donnant les fondements, les principes, les orientations pour la définition des politiques dans les Etats. La construction conjointe des politiques européennes et françaises répondent à des enjeux par des dispositifs pour la construction réglementaire du recyclage. Le tableau ci-dessous montre quatre points importants à relever afin d’analyser la mise en œuvre d’une traduction des enjeux vers des dispositions réglementaires :

Tableau 13: Des enjeux aux dispositifs : la construction réglementaire du recyclage

Enjeux Dispositifs

Années 1970 Années 1990 Années 2000

Définition et statut du déchet

Cohérence

communautaire mais définition nationale

Statut européen Sortir certains déchets de ce statut pour favoriser le commerce des matières recyclées Risque de pénurie de ressources Promotion de la prévention et du recyclage

Promotion des « matières premières secondaires »

Entrée dans l’économie circulaire Objectif de recyclage Territorialisation des politiques Schémas départementaux et Collecte et élimination des déchets par les communes.

Planification

départementale pour les déchets ménagers et régionale pour les déchets industriels spéciaux.

Programmes territoriaux de prévention

Plan départemental de gestion des déchets du BTP Recours à la responsabilité des producteurs Responsabilité du détenteur Instauration du principe de responsabilité

Renforcement des filières à responsabilité élargie du producteur

Concernant la définition du déchet, les politiques européennes et françaises s’empêtrent dans cette question depuis 1975. Tout d’abord, la question de la cohérence communautaire est très importante, notamment afin d’éviter les problèmes de concurrence entre Etats. Cependant, le législateur est incapable de trancher et laisse les Etats agrémenter cette première définition du déchet par leurs propres dispositions particulières. Dans les années 1990, l’Union Européenne veut répondre à cette défaillance et instaure ses exigences. Cela n’empêche pas les cas particuliers de se multiplier et ces incertitudes font dire à Philippe Billet dans une description juridique de la problématique, que « la mise au rebut est juridiquement impossible »345. Ce cadre plus stricte permet néanmoins dans les années 2000 d’envisager de sortir certains produits de ce statut de déchets afin de favoriser le commerce des matières recyclées en Europe.

L’entrée dans l’ère de l’économie circulaire dans les années 2000 permet de souligner l’enjeu du rebouclage des flux de matières et d’énergie, après avoir fait la promotion du recyclage avec la directive de 1975, puis des matières recyclées avec la directive de 1991. L’objectif affiché est celui de se diriger vers une société européenne et française du recyclage, c'est-à-dire une société, qui dans l’ensemble de ses sphères (celles des citoyens, des entreprises, et des collectivités, etc.), serait sobre dans sa consommation de ressources et zélée dans la réutilisation de ces dites ressources. De plus, la directive de 2008 ajoute des objectifs chiffrés de recyclage, ce qui permet de donner une cible opérationnelle à un discours. Cette mise à l’agenda politique de l’économie circulaire ne déplaira pas à Dominique Bourg car, selon lui, « c’est une bêtise de penser que cela peut se mettre en place sans une politique publique »346.

La territorialisation des politiques a largement évolué depuis 1975. Dans un premier temps, il s’agissait pour l’Etat de réaliser un diagnostic de la problématique « déchets ménagers » sur les départements et d’élaborer un document directeur pour cinq ou dix ans dans le but de moderniser la gestion des déchets par les collectivités. Puis, en 1992, le Préfet de département doit organiser une consultation avec les acteurs locaux (Représentants des communes et de leurs groupements, professionnels concernés et associations agréées de protection de l'environnement) en plus des services de l’Etat pour élaborer sa politique territoriale. De plus, un autre plan de gestion des déchets - concernant les déchets industriels spéciaux - à l’échelle

345

P. Billet, Le déchet, du label au statut, Considé rations juridiques sur un abandon , p109, dans J.-C. Beaune (sous la dr. de), Le déchet, le rebut, le rien , 1999, Éditions Champ Vallon, 232p. 346 Citation de D. Bourg, dans Terra Eco, Une planète 100% recyclable, 08/2007.

des régions est élaboré par le Préfet de région. La seconde génération des plans de gestion des déchets ménagers débute à partir des années 2000, le plus souvent élaboré par les Conseils Généraux, depuis le transfert des compétences de l’Etat prévu depuis 1996. Cet outil est devenu incontournable et la question du recyclage s’y aborde systématiquement, notamment en termes d’objectifs chiffrés. Enfin, la planification départementale, initialement prévu seulement pour la gestion des déchets ménagers, s’est étendue aux déchets du BTP et à la prévention des déchets, ce qui renforce d’autant plus son rôle.

Le recours à la responsabilité élargie des producteurs (REP) est progressivement devenu inévitable dans les politiques européennes et françaises de la gestion des déchets. Si dans les années 1970, le principe de « responsabilité du détenteur » fut le premier cité, il s’est transformé en « responsabilité du producteur », ce qui implique la chaine en aval. A partir des années 1990 et surtout depuis les années 2000, les filières de gestion de déchets se construisent en suivant ce principe. Ce chapitre n’a pas abordé l’étendue de l’application de ce dernier, qui mérite une analyse particulière dans la mesure où les DEEE font l’objet de l’application de ce principe. Le chapitre suivant questionnera donc la mise en œuvre de la REP.

CHAPITRE V. LA RESPONSABILITE ELARGIE DU