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Stratégies d’accès aux interviewés

4. Le contexte suisse

5.4. L’enquête Transition de l’école à l’emploi (TREE)

5.5.5. Stratégies d’accès aux interviewés

Dans cette étude, nous avons utilisé des stratégies d’accès directes aux potentiels participants, par une communication directe, sans intermédiaire, entre le chercheur et le potentiel interviewé, ou indirectes, par l’intermédiaire d’une personne relai, d’un informateur clé, d’une institution, organisation, association ou médias (Blanchet & Gotman, 2010, p. 52–56). Nos communications à propos de ce travail de doctorat et sur la recherche générale dans lequel il s’inscrit (Projet de recherche sur la transition vers la vie adulte au sein du nccr LIVES) ont été tantôt ciblées directement vers les potentiels participants, tantôt vers les parents des potentiels participants147 et tantôt vers la communauté kosovare et albanophone en Suisse, dans les cantons de Genève et Vaud. Notons que la recherche des potentiels participant au sein de cette thèse (comme beaucoup d’autres parties de ce travail) est tributaire de l’étude générale dans laquelle il s’inscrit. Ainsi, nous bénéficions, et dans une bien moindre mesure nous pâtissons, du design méthodologique et du terrain du projet de recherche principal.

Les stratégies d’accès direct aux potentiels participants sont au nombre de trois.

Premièrement, nous avons utilisé les réseaux des membres de l’équipe de travail du projet de recherche principal afin de rentrer en contact avec des potentiels participants. Cette stratégie s’est avérée être rapide et peu couteuse mais sa portée est limitée par le nombre restreint de potentiels participants au sein des réseaux sociaux des membres du projet.

Deuxièmement, nous avons discuté avec plusieurs jeunes lors d’évènements liés à la communauté albanophone dans les cantons de Genève et Vaud (par exemple lors de fêtes culturelles, lors de la fête de l’indépendance, à des stands d’associations d’étudiants, etc.) (voir Annexe 4 à la page

147 L’échantillonnage au sein du projet de recherche principal est quelque peu différent de celui utilisé pour cette étude. L’objectif est d’obtenir des binômes participants, soit un jeune et un de ses parents. D’où la mise en place de communications destinées aux parents. Ainsi, nous avons trouvé des jeunes participants en contactant dans un premier temps un des parents.

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388). Notre présence lors de ce type d’évènement est primordiale afin de pouvoir rentrer en contact direct avec des potentiels participants mais aussi afin de rencontrer certains acteurs clés (acteurs associatifs, travailleurs sociaux et membres de la communauté), afin de prendre part à des discussions autour d’enjeux sociaux, culturels et économiques relatifs à la communauté, afin d’observer et de comprendre certaines pratiques culturelles et symboliques. Lors de ces rencontres, nous avons aussi posé ou distribué quelques affiches et flyers informatifs à propos de cette recherche (voir Annexe 5 à la page 389).

Troisièmement, notre principal objectif était aussi de rencontrer les jeunes là où ils se trouvent

« virtuellement » et grâces aux moyens de communications qu’ils utilisent. Nous avons ainsi utilisé Facebook comme moyen de recherche d’éventuels participants et de communication. Sur ce réseau social, certains personnes participantes à des groupes d’intérêt concernent la communauté Kosovare ou albanaise en Suisse148 ont montré leur intérêt.

En plus des stratégies d’accès direct aux participants, nous avons utilisé quatre stratégies d’accès indirect. Un grand travail de réseau a été effectué avec les associations, médias et institutions albanophones afin d’obtenir des contacts de potentiels participants. Nous avons contacté plus de 20 associations, médias et institutions dans les cantons de Genève et Vaud (voir Annexe 8 à la page 391).

Il a été fondamental de passer par des associations, médias et institutions de tout type (aussi bien culturelles, politiques, étudiantes, sportives que religieuses) cela afin d’obtenir un maximum de diversité culturelle, socio-économique, de localisation spatiale et de réseaux sociaux au sein des participants. En plus de la demande de contact, nous avons collé des affiches, utilisé leur mailing list afin de communiquer directement auprès des membres des associations, dans les deux langues, albanais et français, à propos de la recherche, avons publié des annonces au sein de médias albanophones, etc. L’objectif secondaire des communications destinées à la communauté kosovare et albanophone est donc aussi de se faire connaître à travers les associations et groupes, d’informer à propos de l’étude et donc de tenter de réduire la méfiance de cette communauté envers nous. En effet, diverses études se sont confrontées à la méfiance des communautés migrantes (par exemple l’étude VLV ou Bolzman, 1992). Ces méfiances sont d’autant plus fortes lorsque les communautés sont discriminées et dévalorisées au sein de la société suisse et/ou, pour certains, lorsqu’ils ont vécu en Suisse sans statut légal.

Nous avons provoqué ce que l’on appelle communément un effet « boule de neige », c’est-à-dire que nous utilisons le réseau des participants. Cependant, certaines conditions sont nécessaires afin que l’effet « boule de neige » se produise et porte ses fruits comme par exemple la clarté de l’information et la création d’une relation de confiance. Par exemple, il est fondamental d’expliquer qu’on ne va pas embêter et insister de trop auprès des proches. Dans notre cas, nous disons que nous allons présenter l’étude à son ami, puis ensuite nous allons lui demander s’il serait intéressé de participer. Lorsque nous contactons une connaissance d’un participant pour lui présenter l’étude, nous insistons dès le début sur le nom de son ami. Cela permet de nous différencier directement des enquêtes classiques (téléphoniques et par écrit) ainsi que des sollicitations commerciales dont font l’objet les familles albanophones. Nous avons également mis en place des incentives sous forme d’un

148 Voici un liste non exhaustive des groupes de la communauté albanaise en Suisse et Suisse romande observés pendant l’année 2013: « Association des tudiants Albanais de Genève », environ 400 membres ; « Shqiptaret e Gjeneves - Albanais à Genève », environ 350 membres ; « Aeaul » (Association des étudiants albanais de l’Université de Lausanne), environ 150 membres ; « Université populaire albanaise », environ 550 membres ;

« Rinia contact », environ 550 membres ; « Albanais à Genève / Shqipëtarët në Gjenevë », environ 50 membres, etc.

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bon cadeau d’une valeur de 20 francs (dans des commerces adaptés aux jeunes du type habillement, électronique et musique) pour remercier les participants et afin d’augmenter nos chances d’obtenir d’autres contacts. Ces incentives sont donnés à la fin de la participation et leur existence n’est pas dévoilée avant la fin de la participation. Ainsi, nous évitons les biais d’échantillonnage induits par l’évocation d’une contrepartie lors de la recherche de participants.

Un des objectifs de l’étude principale est d’interviewer un certain nombre de « binômes », soit un jeune descendant d’immigrés albanophones d’ex-Yougoslavie et un des deux parents albanophone immigré d’un pays de l’ex-Yougoslavie dans le but d’observer les relations intergénérationnelles. Afin de réaliser des entretiens avec les parents, en leur laissant la possibilité de choisir la langue de l’interview (albanais ou français), nous avons engagé quatre enquêteurs et enquêtrices albanophones.

Ces enquêteurs et enquêtrices ont utilisé dans un premier temps leurs réseaux sociaux dans le but de trouver des « binômes » participants. Puis, ils ont aussi contacté quelques associations et publié des annonces sur Facebook en albanais et en français. Leur travail a porté ses fruits, nous avons bénéficié de la recherche de « binômes » et interviewé à chaque fois les jeunes de chaque binôme

« participant ». Cependant, nous avons pu observer certaines limites relatives aux stratégies d’accès directes et indirectes mises en place. Par exemple, nous avons remarqué que nous avions peu de jeunes non diplômés du post-obligatoire ou ayant vécu des périodes de décrochages au sein des participants alors que les statistiques disponibles montrent une part plus élevée. Ainsi, il semblerait que les jeunes qui échouent ou qui rencontrent de grandes difficultés lors du parcours scolaire (mais aussi dans d’autres dimensions de la vie) participent moins volontiers à ce type d’étude. Au contraire, les jeunes qui fréquentent un niveau de formation du niveau tertiaire participent bien volontiers. Les objectifs d’échantillonnage sont donc plus faciles à combler pour les jeunes de niveau tertiaire par rapport aux jeunes de niveau secondaire. Afin de tenter de palier à ce genre de limites méthodologiques, nous avons donc dû mettre en place une dernière stratégie d’accès indirecte.

Nous avons contacté donc plusieurs acteurs clés qui travaillent quotidiennement avec la population qui nous intéresse, et plus particulièrement avec les jeunes qui participent peu à ce type d’étude, les jeunes en rupture de formation scolaire, sans certification du post-obligatoire ou ayant rencontré de grandes difficultés tout au long ou à un moment donné de leurs parcours.149 Nous sommes ainsi allés sur le terrain avec deux travailleurs sociaux hors murs dans les communes d’Onex, Lancy et Bernex à Genève. Lors de ces sorties, nous avons rencontré plusieurs jeunes potentiels participants. Nous avons été introduits par les acteurs clés et avons obtenu plusieurs contacts et promesses d’entretiens. Malheureusement, peu ont concrètement abouti. Nous avons néanmoins pu échanger avec certains jeunes qui ne désiraient pas participer formellement à un entretien. Ces échanges nous ont permis de capter quelques difficultés rencontrées et quelques parties des parcours de formations des jeunes en rupture. Nous avons aussi contacté des professionnels (responsables d’équipes et cadres des institutions) de l’orientation dans les cantons de Genève et Vaud afin de pouvoir réaliser de l’observation participante ou afin de pouvoir rencontrer certains jeunes.

Malheureusement, cette dernière démarche n’a pas abouti. Nous n’avons pas obtenu l’autorisation de concrétiser ces rencontres.

149 Nous avons remarqué qu’au sein des participants, peu se retrouvaient dans des situations difficiles (problèmes dans le parcours de formation, dans la vie de famille, dans la vie sentimentale, précarité économique, etc.) lors de l’entretien. Nous avons quelques cas où les personnes ont vécu des moments difficiles, mais la grande majorité a dépassé ces problèmes. Ainsi, nous en déduisons que ceux qui rencontrent des problèmes lors de la réalisation des entretiens refusent presque systématiquement de participer.

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Au final, nous remarquons que les différents moyens d’accès à notre population sont complémentaires (voir Tableau 7). L’accès par les réseaux sociaux semble moins porter ses fruits mais il est moins coûteux en temps et en argent (il n’a d’ailleurs pas été utilisé de façon systématique).

D’autres moyens, par exemple l’utilisation des associations, institutions et médias ainsi que le développement d’un effet « boule de neige » permettent de trouver plus de participants mais demandent un investissement en temps bien plus important. L’accès aux jeunes par les parents (grâce au réseau de l’enquêteur albanophone) fonctionne bien mais requiert un certain financement de l’enquêtrice ainsi qu’une prise en compte des limites inhérentes à ce type de recherche de participants.

Finalement, notons que les accès indirects à la population (à l’exception de l’accès par les travailleurs sociaux) produisent un biais dans l’échantillon étant donné que les intermédiaires (aussi bien les associations, les participants ou les parents) ont tendance à sélectionner les potentiels participants qui réussissent et qui portent en eux une image positive, celle de la réussite scolaire, professionnelle et/ou sociale, qui représentent un idéal-type de ce qu’est une bonne intégration au sein de la société de résidence. Ainsi, l’accès par les travailleurs sociaux et professionnels de l’orientation est fondamental malgré le fait qu’il n’ait pas donné lieu à beaucoup de participation car celui-ci a tout de même permis de rencontrer et de discuter de manière informelle avec les jeunes qui rencontrent des difficultés d’insertion dans la formation post-obligatoire et dans l’emploi, qui tend à ne pas participer à ce type d’étude et à ne pas être « désigné » comme de potentiels participants.

Tableau 7 : Mode de prise de contact avec les interviewés selon le genre, le canton et le niveau de formation.

La mise en place de plusieurs stratégies complémentaires d’accès aux participants a permis d’atteindre l’objectif d’échantillonnage (pour le total d’entretiens et pour chaque configuration), et même de le dépasser (voir Tableau 8). Nous avons réalisé au total 50 entretiens avec 24 femmes et 26 hommes répartis équitablement entre les deux cantons (25 dans chaque canton). Les participants sont âgés entre 18 et 28 ans lors de leur participation à l’entretien (soit un peu plus de 22 ans en moyenne).

Il s’est donc écoulé entre 3 et 12 ans depuis la fin de la scolarité obligatoire (en moyenne 6,7 années).

Nous obtenons davantage d’entretiens réalisés auprès de jeunes ayant un niveau de formation

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