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Soutenir l’inclusion des travailleuses du sexe en leur offrant un point d’ancrage

Chapitre 6. Interprétation des résultats

6.1 Processus transformateurs et zones de tension : quels apprentissages pour les pratiques

6.1.3 Soutenir l’inclusion des travailleuses du sexe en leur offrant un point d’ancrage

Le troisième processus qui traduit les pratiques du Projet L.U.N.E. renvoie au fait de soutenir l’inclusion des TDS. Il est possible d’établir certains parallèles entre ce processus et les spécificités des pratiques d’empowerment répertoriées au chapitre 1.

Tel que soulevé au chapitre 1, le Projet L.U.N.E. ne repose pas sur une définition préconçue du travail du sexe, s’appuyant plutôt sur la parole des participantes pour circonscrire les réalités qui y sont propres (UNAIDS, 2012). Les pratiques du Projet L.U.N.E impliquent une attitude de non-jugement (Labbé et al., 2013), incluant le respect de la décision d'exercer le travail du sexe (Schaffauser, 2014). Ainsi, le Projet L.U.N.E. est en faveur de la décriminalisation des activités reliées au travail du sexe, ce que les répondantes associent au fait d’être inclusif à l’égard des TDS. Le processus d’inclusion se traduit par une attitude d’ouverture à l’égard des TDS, en continuité avec le processus de valorisation qui implique une remise en question des perceptions négatives et des préjugés à l’égard du travail du sexe (Begum, 2006 ; Thiboutot, 2006). Bien que le processus d’inclusion soit lié à l’expérience de valorisation, les résultats de cette étude suggèrent d’appréhender ce processus comme distinct, puisqu’il permet de faire le point sur certaines pratiques spécifiques qui contribuent à l’empowerment des TDS. En effet, les répondantes illustrent l’importance de s’appuyer sur des principes d’accueil et d’acceptation inconditionnelle dans une perspective d’intervention auprès d’une population désaffiliée et stigmatisée. De même, cette étude identifie l’appartenance à un groupe comme un élément clé de la trajectoire des participantes qui prennent part aux pratiques d’empowerment.

Comme l’indiquent les écrits et les résultats de ce mémoire, cette volonté d’être inclusif à l’égard des TDS se bute toutefois à des obstacles. Malgré une préoccupation à l’effet de respecter la « marginalité » des TDS, le Projet L.U.N.E. doit composer avec un certain nombre de normes externes, prescrites notamment par les partenaires. Le chapitre 1 fait également mention de contraintes imposées par les collaborateurs, en les interprétant comme des rapports de pouvoir, considérant que ces restrictions portent atteinte à la participation et au pouvoir décisionnel des TDS. Les auteurs évoquent ainsi les critères de financement qui impliquent une position explicite contre la « prostitution » (Kerrigan et al., 2015), ou encore les exigences en termes de résultats et de monitoring qui obligent à accorder beaucoup de temps à la reddition de compte (Cornish et Gosh, 2007 ; Cornish et al., 2012). D’autres auteurs soulèvent le peu de financement octroyé aux organisations qui mettent en œuvre des pratiques d’empowerment (Schwartlander et al., 2011). Dans ce mémoire, les répondantes font aussi référence aux exigences imposées par les partenaires, mais elles examinent cet enjeu davantage sous l’angle de contraintes normatives qui contrastent avec la « marginalité » des TDS et qui peuvent faire obstacle à l’inclusion de femmes plus désaffiliées. Par exemple, lorsque le Projet L.U.N.E. privilégie un fonctionnement plus formel (pauses moins fréquentes, procédures administratives) dans le cadre de ses collaborations avec des partenaires, certaines TDS peinent à participer pleinement, surtout si elles vivent des difficultés (absence d’horaire fixe, consommation). Cette zone de tension apparaît particulièrement enrichissante pour comprendre les défis reliés à la mise en œuvre des pratiques d’empowerment auprès d’une population désaffiliée.

6.1.4 Favoriser la collectivisation en rassemblant les travailleuses du sexe

Le quatrième processus qui traduit les pratiques d’empowerment du Projet L.U.N.E. se rapporte à la collectivisation. Comme mentionné au chapitre 1, le Projet L.U.N.E. œuvre à la collectivisation des expériences (Hwang, 2007), en favorisant l’adhésion à une identité partagée, ainsi qu’en renforçant la cohésion interne et la solidarité au sein de la collectivité des TDS (Kerrigan et al., 2015 ; Mathieu, 2003). La mise sur pied de lieux de rencontre est reconnue dans les écrits et dans ce mémoire comme contribuant au processus de collectivisation (Hwang, 2007 ; Laliberté et Saint-Jean, 2006 ; Mensah, 2010 ; Thiboutot, 2006). En cohérence avec cette préoccupation, le Projet L.U.N.E. privilégie une approche d’intervention de groupe. Par exemple, les projets sont portés par des comités de travail. De plus, l’organisme organise des événements et des activités qui permettent de réunir régulièrement les TDS (Hwang, 2007 ; Laliberté et Saint-Jean, 2006 ; Mensah, 2010 ; Thiboutot, 2006). Enfin, le Projet L.U.N.E. cherche à créer des alliances avec des organisations de TDS qui ont une mission similaire à la sienne (Kerrigan et al., 2015).

Tel qu’énoncé dans cette étude, la création d’un espace de partage par le biais du Projet L.U.N.E. peut initier une prise de conscience chez les participantes à l’effet qu’elles partagent des préoccupations, favorisant une compréhension plus collective des réalités des TDS. De même, le fait d’avoir quelqu'un à qui se rattacher (un « modèle TDS ») permet de susciter l'espoir chez les participantes. Ces dernières en viennent à prendre exemple sur les autres pour s’affirmer et s’affranchir, incarnant l’expérience de conscientisation vécue à travers les pratiques d’empowerment. En ce sens, les résultats de ce mémoire appuient le propos de Freire (1997), selon lequel l’accès à un groupe de référence et la construction d’un dialogue avec les personnes qui en font partie favorisent le processus de conscientisation (cité dans Lemay, 2007).

Alors que le chapitre 1 souligne l’importance de favoriser le développement de solidarités (Kerrigan et al., 2015 ; Mathieu, 2003 ; Mensah, 2010), les résultats de mémoire sont révélateurs quant à l’apport significatif de la formation de réseaux d’entraide dans une perspective d’empowerment. La création de liens de solidarité et d’amitié au sein du Projet L.U.N.E. a répercussions significatives sur les participantes, qui apprennent à faire confiance, tout en se faisant de nouvelles amies. Certaines retombées relevées dans ce mémoire sont également soulevées dans la recension des écrits, dont l’identification de préoccupations communes et le développement de solidarités (Hwang, 2007 ; Jana et al., 2004 ; Labbé et al., 2013 ; Laliberté et Saint-Jean, 2006 ; Mensah, 2010 ; O'Brien, 2009 ; Thiboutot, 2006).

Bien que la communauté soit un point d’ancrage pour la mobilisation (Labbé et al., 2013 ; Mensah, 2010), les écrits et les résultats de cette étude indiquent qu’il y a des enjeux reliés à la construction de l’identité collective des TDS. L’une des zones de tension recensées dans ce mémoire renvoie au passage du « je » au « nous », illustrant le défi associé à la collectivisation dans le cadre des pratiques d’empowerment dédiées aux TDS.

Selon Mathieu (2003), le caractère concurrentiel de l’industrie du sexe fragilise la cohésion sociale en créant de la rivalité entre les différents types de TDS. Dans le même sens, cette étude révèle que les participantes du Projet L.U.N.E. ont parfois vécu des conflits entre elles préalablement à leur implication, ce qui affecte l’établissement d’un climat de confiance. Mensah (2010) indique quant à elle que la communauté des TDS inclut des réalités très variées, ce qui peut faire obstacle à l’édification d’une identité partagée. En continuité, les répondantes de ce mémoire soulèvent la difficulté d’adopter des positions collectives au Projet L.U.N.E., puisque l’organisme réunit des TDS qui ont des expériences et des postures différentes en lien avec le travail du sexe. Tout comme Mensah (2006c), les répondantes réitèrent l’importance de la mixité afin de faire valoir la diversité des réalités et d’assurer que chacune des TDS se sente représentée. Ce mémoire recense néanmoins des enjeux qui ne sont pas discutés dans les écrits existants. D’abord, cette étude soulève la difficulté de mettre les TDS en contact, puisque certaines se montrent craintives à l’idée de fréquenter quotidiennement des paires actives dans l’industrie du sexe ou qui « consomment ». Parallèlement, les répondantes précisent que le contrôle juridique de la vente de services sexuels peut conduire à disperser les lieux de rassemblement pour TDS. Ce mémoire témoigne également de la difficulté d’entretenir les liens entre les organisations de TDS, en raison de barrières financières ou géographiques. Enfin, ce mémoire nous éclaire sur la tension entre le bénéfice individuel et collectif dans le cadre des pratiques d’empowerment, soit le défi de mobiliser les TDS dans un projet collectif, lorsque leur implication peut avoir des conséquences individuelles par la suite (exemple : être étiquetée comme TDS auprès de son entourage).

6.1.5 Agir sur les rapports de pouvoir pour faciliter la participation

Le cinquième processus propre aux pratiques d’empowerment du Projet L.U.N.E. se traduit par le fait d’agir sur les rapports de pouvoir pour faciliter la participation des TDS.

Selon les répondantes de ce mémoire, le fait d’offrir un soutien aux TDS (transport, nourriture, compensation financière, accompagnement psychosocial) permet d’agir sur les rapports de pouvoir en atténuant les obstacles à la participation, compte tenu des besoins de base non répondus des TDS. De la même façon, Mathieu (2003) mentionne que les pratiques d’empowerment impliquent de rééquilibrer les inégalités de ressources entre TDS et non-TDS. Il ne s’agit donc pas seulement de redonner le pouvoir dans les espaces décisionnels ou opérationnels, mais bien de s’assurer que les TDS aient les moyens d’y participer pleinement. Dans un autre ordre d’idée, cette étude révèle que le processus de participation se déploie également par le fait de laisser la place aux TDS. Comme mentionné au chapitre 1, le Projet L.U.N.E. développe ses pratiques selon les priorités ciblées par les TDS (Bates et Berg, 2014 ; Mensah, 2006c), de manière à ce que ces dernières prennent part à la mise en oeuvre des services qui leur sont dédiés (Cornish et Gosh, 2007 ; Jana et al., 2004). Cette pratique concorde avec l’un des postulats de Ninacs (2003), qui note que l’empowerment

implique une collaboration avec les personnes concernées par l’intervention. L’une des stratégies d’intervention en ce sens consiste à redonner la parole aux TDS, à accueillir leurs expériences comme étant vraies, à légitimer leurs connaissances et leurs compétences, ainsi qu’à contribuer à ce qu’elles acquièrent une voix (Lemay, 2007). L’importance que les intervenantes jouent un rôle d’accompagnement et de soutien dans une approche d’empowerment – plutôt que de leadership – est à la fois soulevée dans ce mémoire et dans la recension des écrits (Lemay, 2007 ; Simon, 1994).

Une autre dimension du processus de participation relevée dans cette étude et au chapitre 1 concerne l’établissement de rapports égalitaires (Mathieu, 2003). En effet, le Projet L.U.N.E. appuie ses pratiques sur une approche de croisement des savoirs, selon laquelle chaque expertise (expérientielle, clinique, universitaire) apparaît légitime et équivalente (Mathieu, 2003 ; Schaffauser, 2014). Dans le même sens, la recension des écrits souligne l’importance de revoir le partage du pouvoir entre intervenants et usagers, de façon à tenir compte de l’expertise professionnelle et expérientielle (Clark, 1989, cité dans Le Bossé, 1996). À ce sujet, Lemay (2007) précise que la relation égalitaire est une notion clé pour orienter les échanges entre acteurs dans une perspective d’empowerment, d’autant plus que les rapports de pouvoir au sein de la relation d’aide sont souvent occultés. En réponse à cette préoccupation, ce mémoire innove en proposant de redonner du pouvoir à travers la relation d’intervention, en privilégiant des rapports plus informels et en favorisant la réciprocité dans le partage de vécu.

Différents auteurs s’intéressent aux rapports de pouvoir entre les TDS et les autres acteurs (féministes, bailleurs de fonds, intervenantes), en indiquant que le soutien offert peut affecter le processus d’empowerment. Dans le même ordre d’idée, les répondantes de cette étude font mention du regard infantilisant que les partenaires peuvent porter aux TDS, ce qui peut conduire à invalider les efforts du Projet L.U.N.E. en vue d’instaurer des relations égalitaires. En écho au chapitre 1 qui traite des rapports de pouvoir exercés par les féministes abolitionnistes à l’égard des TDS, les répondantes de cette étude stipulent que la posture néo-abolitionniste porte atteinte à la légitimité et à l’agentivité de ces dernières (Kerrigan et al., 2015 ; Mensah, 2010 ; Toupin, 2009). Toutefois, ce mémoire s’intéresse surtout aux rapports entre TDS et intervenantes, alors qu’une zone de tension identifiée renvoie spécifiquement à la difficulté d’assurer un partage de pouvoir équitable entre les participantes et les alliées du Projet L.U.N.E. Ainsi, les résultats révèlent que les participantes ont tendance à se fier sur les alliées pour construire leur opinion ou prendre leurs décisions, particulièrement lorsqu’elles ont l’impression d’avoir moins d’expertise dans un domaine donné. Cette observation rejoint le constat de Mathieu (2003), qui note que la présence de professionnelles au sein des organisations de TDS peut induire des rapports de pouvoir inégaux, puisque l’expertise des TDS apparait subordonnée à celle des professionnelles dans certains contextes. Parallèlement, ce mémoire nous

éclaire sur le phénomène inverse, alors qu’une mise en garde est émise quant au « surempowerment », c’est- à-dire lorsque des TDS reprennent « trop de pouvoir » et qu’elles en viennent à « écraser les autres ». Ces observations illustrent la nature délicate de l’équilibre à atteindre dans une perspective de partage de pouvoir. Tel que souligné au chapitre 1, il y a différentes manières d’entrevoir le pouvoir dans une perspective d’empowerment, ce qui pose des défis propres à la mise en œuvre des pratiques (Cornish, 2006 ; Lemay, 2007). En continuité, les répondantes de ce mémoire remarquent que le Projet L.U.N.E. rencontre des défis reliés à l’application des pratiques d’empowerment. C’est ainsi que les répondantes se questionnent sur la nature du pouvoir à partager (décisionnel, opérationnel, relationnel, etc.) et sur la place qui devrait être accordée aux TDS et aux alliées dans une perspective d’empowerment. Plusieurs répondantes font un rapprochement entre l’approche d’empowerment et le modèle d’autogestion, présupposant qu’un « vrai par et pour » impliquerait que le Projet L.U.N.E. soit exclusivement formé de TDS, sans intervenantes. En contrepartie, plusieurs répondantes soulèvent l’apport non négligeable des alliées, qui apportent au Projet L.U.N.E. une expertise et une crédibilité. Ces préoccupations illustrent la nature complexe du partage de pouvoir. Cette tension est relevée par différents auteurs qui distinguent des conceptions divergentes de l’empowerment. Selon ces auteurs, certaines définitions impliquent d’augmenter le pouvoir des participantes en diminuant celui des intervenantes, alors que d’autres ne renvoient pas à une diminution du pouvoir des intervenantes, mais plutôt à une redéfinition du pouvoir de chacun (Cornish, 2006 ; Swift et Levin, 1987).

6.1.6 Intervenir pour améliorer les conditions de vie

Le sixième processus qui caractérise les pratiques du Projet L.U.N.E. réfère au fait d’intervenir pour améliorer les conditions de vie des TDS. Ce processus peut être mis en parallèle avec certains traits des pratiques d’empowerment relevés au chapitre 1.

Les pratiques de reconnaissance et de défense de droits s’articulent de façon semblable dans les écrits et dans les résultats de ce mémoire. Comme présenté au chapitre 1, le Projet L.U.N.E. milite publiquement pour la défense de droits des TDS (Bates et Berg, 2014 ; Jayasree, 2004 ; Kerrigan et al., 2015 ; Mensah, 2010). Ainsi, l’organisme planifie des présentations, des représentations (médias, réseaux sociaux) et des activités thématiques (journée internationale contre la violence faite aux TDS), tout en luttant pour la décriminalisation des activités associées au travail du sexe (Bates et Berg, 2014 ; Jayasree, 2004 ; Kerrigan et al., 2015 ; Mathieu, 2003 ; Mensah, 2010 ; Schaffauser, 2014). De même, le Projet L.U.N.E. informe les participantes de leurs droits et des lois régissant le travail du sexe (Cornish, 2006 ; Hwang, 2007 ; Mensah, 2010 ; Monnet, 2006b ; Schaffauser, 2014). Selon les répondantes de cette étude, la défense des droits s’inscrit toutefois dans un mouvement plus global pour l’amélioration des conditions de vie, alors que l’organisme cherche également à mieux répondre aux besoins des TDS, tout en favorisant l’accès à un revenu décent.

Le Projet L.U.N.E. agit sur différents plans pour améliorer les conditions de santé des TDS (Bates et Berg, 2014 ; Kerrigan et al., 2015). Par exemple, tel qu’indiqué dans la recension des écrits, le Projet L.U.N.E. distribue du matériel d’hygiène (Chattopadhyay et McKaig, 2004 ; Mathieu, 2003 ; Mensah, 2010). Toutefois, les stratégies de prévention de l’organisme diffèrent quelque peu de celles décrites dans les écrits existants. En effet, plutôt que d’être principalement axées sur la santé et la prévention des ITSS, les pratiques du Projet L.U.N.E. s’inscrivent dans une perspective plus globale visant à couvrir différentes sphères de besoins des TDS (logement, alimentation, santé, sécurité). Cette divergence s’explique notamment du fait que les écrits actuels concernent des pratiques d’empowerment dans des pays dits émergents, où la prévalence du VIH/Sida est plus élevée qu’au Canada (exemples : Afrique du Sud, Kenya, Inde). Le Projet L.U.N.E. cherche également à faciliter l’accès aux services ou à ajuster ceux-ci afin qu’ils répondent mieux aux besoins des TDS (Hwang, 2007). C’est ainsi que l’implantation d’un drop-in a permis d’offrir aux TDS un lieu où elles pouvaient dormir en sécurité, tout en ayant accès à des services connexes : denrées alimentaires, vêtements, casiers, douche et laveuse. Parallèlement, le fait que les services du Projet L.U.N.E. soient réfléchis et conçus par les participantes a permis d’identifier certaines pratiques novatrices. Par exemple, le « caring » apporte une couleur toute particulière à l’intervention au drop-in, alors que les paires-aidantes interviennent en prenant soin des femmes désaffiliées ou en leur apportant de petites attentions.

Enfin, le Projet L.U.N.E. cherche à favoriser l’accès à un revenu décent pour les TDS, en leur offrant un salaire ou une compensation financière. Cette particularité de l’intervention permet d’ailleurs de situer le revenu comme un élément clé dans une perspective d’empowerment. Au final, le processus d’amélioration des conditions de vie rejoint le postulat de Ninacs (2003) selon lequel les pratiques d’empowerment doivent viser à la fois les individus et leur environnement.

6.1.7 Renforcer les connaissances et les compétences

Le septième processus relevé dans ce mémoire se rapporte au renforcement des capacités des TDS, alors que cette étude suggère d’appréhender le processus d’apprentissage comme une expérience de transformation distincte au sein des pratiques d’empowerment.

Bien que la recension des écrits mentionne que le développement du pouvoir d’agir implique de consolider l’expertise des TDS (Labbé et al., 2013 ; Mathieu, 2003 ; O'Brien, 2009), les écrits fournissent peu de détails sur le processus d’apprentissage. Ce mémoire relève néanmoins divers mécanismes par lesquels le Projet L.U.N.E. contribue au renforcement des savoirs. En plus d’offrir des formations, le Projet L.U.N.E. permet aux TDS de réaliser différentes tâches et responsabilités au sein de l’organisme. De plus, ce mémoire apparaît enrichissant pour circonscrire certaines pratiques qui s’inscrivent dans une perspective d’empowerment. En effet, le Projet L.U.N.E. amène les participantes à déployer les compétences qu’elles souhaitent mettre de

l’avant, en fonction de leurs intérêts. De même, l’organisme fournit un espace de formation adapté, où les TDS ont l’occasion d’apprendre à leur rythme, en bénéficiant du soutien des intervenantes au besoin. Dans cette optique, il ne s’agit pas seulement de rendre le savoir accessible, mais surtout d’ajuster les modalités de transfert de connaissances pour que les TDS bénéficient du processus d’apprentissage. Cette dernière observation montre toute la pertinence d’être à l’écoute des capacités des TDS, afin de s’assurer que le processus d’apprentissage soit approprié au regard des réalités personnelles des participantes. Par la suite, les participantes peuvent en venir à transmettre leurs propres connaissances et compétences.

6.2 Interactionnisme symbolique : redéfinition de l’identité