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Sortir de l’impasse en créant de nouveaux identifiants ? Les enjeux du déploiement d’un train-ID et d’un path-ID

çabilité en question

4.3.2 Sortir de l’impasse en créant de nouveaux identifiants ? Les enjeux du déploiement d’un train-ID et d’un path-ID

La STI TAF « définit les informations requises, qui doivent être échangées entre les dif- férents partenaires impliqués dans une chaîne de transport, et permet la mise en place d’un processus normalisé et obligatoire d’échange de données » (Commission européenne, 2014, p.356). Dans ce cadre, un certain nombre de messages doivent être formalisés pour couvrir l’ensemble des relations entre gestionnaires d’infrastructure et entreprises ferro- viaires. Le rapport final des réflexions engagées par le TAF TSI working group 10 préconise la création de deux identifiants principaux, indispensables dans la plupart des messages prévus par la STI TAF :

— un train-ID qui serait créé par l’entreprise ferroviaire23 au moment où elle com-

mence à envisager la circulation d’un train,

— un path-ID qui serait créé par le gestionnaire d’infrastructure au moment où il commence à tracer un sillon, que ce soit en réponse à une demande formalisée par un client ou une construction a priori (cas des sillons-catalogue).

Ces deux identifiants seraient donc initiés sur des horizons plus ou moins éloignés de la phase opérationnelle et valables jusqu’à leur désactivation après utilisation ou par suppression de l’objet. Chaque objet commencerait son existence en étant « baptisé » d’un identifiant unique et indépendant du numéro de sillon/train actuel qui continuerait néanmoins à être utilisé en phase opérationnelle pour des raisons pratiques de com- patibilité avec les systèmes existants. La figure 4.10 montre comment le gestionnaire d’infrastructure pourrait faire le lien entre le(s) numéro(s) de train envisagé(s) en phase de planification (PTN), le(s) numéro(s) de train effectivement actif(s) en phase opérationnelle (OTN) à chaque date où l’identifiant du sillon (path-ID) est actif.

Une structure standardisée, composée de 24 à 32 caractères, est proposée pour assurer l’unicité de chaque identifiant. Cet ensemble permettrait de repérer sans ambiguïté :

— le type d’objet (« TR » pour train et « PA » pour sillon),

— l’entreprise ferroviaire à l’origine de la demande (quatre lettres),

— éventuellement la variante qui s’applique (deux caractères). L’encadré 4.2 fournit des éléments de cadrage sur le référencement actuel d’une variante.

— le service annuel concerné (quatre chiffres de l’année).

Un élément central composé de douze caractères, librement déterminé par le créateur de l’objet, complèterait le dispositif. Un sillon comme un train étant en outre caractérisés en phase de planification par un régime spécifique (compris entre 1 et 365 jours par an), les path-ID et train-ID seraient, en phase opérationnelle, individualisés par un suffixe (date de circulation) permettant de distinguer le « train planifié » de chaque train lui étant affilié mais ayant sa propre réalité opérationnelle jour après jour. L’ajout de ce suffixe marquerait le passage de la phase de planification à la phase opérationnelle.

23. ou entreprise ferroviaire principale dans le cas d’un transport impliquant plusieurs entreprises fer- roviaires

Figure 4.10 – Train-ID, Path-ID et numéro de train : proposition de matrice de passage –Source : TAF TSI working group 10 (2011)

Par rapport à la situation actuelle, l’identification de deux trains circulant sous le même numéro deux jours différents serait possible en toute circonstance. Aujourd’hui, quand aucun aléa ne vient perturber la progression des trains, la date de départ du train permet de reconstituer aisément la succession de trains dotés d’un même numéro selon la logique du premier parti, premier arrivé. Or, il n’est pas rare pour le fret qu’un train puisse être stoppé pendant plusieurs jours et en conséquence, ne pas pouvoir repartir avant qu’un autre portant le même numéro circule (scénario 5, supra). Un tel scénario est susceptible de se présenter pour un trafic régulier où chaque jour, un train doté du même numéro circule. Pourquoi cette configuration est-elle problématique ? En distendant le lien entre sillon et train, ces aléas mettent le gestionnaire d’infrastructure dans une situation où il ne peut que partiellement appréhender l’ampleur des retards qui touchent les trains de fret qui circulent sur son réseau. Le gestionnaire d’infrastructure a une vision uniquement orientée « sillon » alors que beaucoup de ressorts de la qualité attendue par ses clients et les clients finaux relèvent de l’objet « train ». Nous développons ces ressorts dans le chapitre 5.

La mise en œuvre d’un train-ID et d’un path-ID constituerait ainsi un moyen de faire face à tous les changements pouvant conduire à la disjonction partielle ou complète des liens envisagés en phase de planification entre sillon et train et ce, sans perte d’informations. Outre la fluidité des échanges entre partenaires qui constitue la raison d’être de la STI TAF, l’idée sous-jacente portée par le TAF TSI working group 10 est

également d’assurer une fluidité des rapports entre les objets eux-mêmes (sillons et trains) à tout moment du processus. Cette idée est particulièrement intéressante pour le fret, activité pour laquelle des changements multiples et tardifs sont susceptibles d’intervenir. Pour tester les identifiants qu’il propose, le groupe de travail détaille un certain nombre de scénarios commerciaux. Plusieurs mettent en évidence une rupture du lien entre train-ID et path-ID au cours du temps, justifiant une identification indépendante des objets sillon et train.

Encadré 4.2 – Qu’est-ce qu’une variante ?

La moindre différence par rapport à un sillon de référence (changement de la minute de départ, de la minute d’arrivée, de la voie empruntée sur une partie de l’itinéraire. . .) est à l’origine de la création d’une variante dans l’outil THOR. Une variante correspond à une « déclinaison » d’un sillon-type.

Elle est indiquée par un chiffre ou une lettre entre crochets après le numéro du sillon

de référence. Pour reprendre l’exemple de la section 4.2.1, si le train no41214/15

fait l’objet de onze variantes, onze fiches de tracé sont produites dans THOR. Elles sont référencées comme suit : 41214/15, 41214/15[1], 41214/15[2] . . . 41214/15[9] et

41214/15[a]. a

Il est à noter que la variante se différencie de la version : plusieurs variantes peuvent coexister au cours d’un service annuel alors qu’une version plus récente d’une fiche de tracé « écrase » les versions précédentes qui sont alors caduques. Le jour de la circulation, le train est identifié seulement sous le numéro 41214/15 puisque pour un jour donné, une seule variante s’applique. Chaque variante a un régime d’application.

a. Lorsque ce référencement est épuisé, un nouveau numéro de train est attribué. On a alors pour un même sillon, deux numéros différents.

Nous nous intéressons à ceux qui se réfèrent à l’idée de réappariement train/sillon (train shifting). Soit un exemple théorique : une entreprise ferroviaire souhaite utiliser un sillon différent de celui initialement envisagé (S1) pour faire circuler un train (T1) pendant une partie du service annuel. Les identifiants de ces deux objets sont notés respectivement : PA1 et TR1. Deux solutions sont envisageables :

1. elle utilise un sillon déjà existant (S2).

(a) Soit S2 a déjà été alloué à l’entreprise ferroviaire en vue de faire circuler un autre train (T2) qui a, par exemple, été annulé. Elle est libre de l’utiliser pour faire circuler T1, sous réserve que les caractéristiques de T1 lui permettent d’utiliser S2. Si c’est le cas, PA2 est alors rattaché à TR1 pour la période demandée. Ainsi, TR1 est associé à deux path-ID au cours du service annuel : PA1 et PA2. (b) Soit le gestionnaire d’infrastructure puise S2 dans son catalogue et attribue ce sillon à l’entreprise ferroviaire. PA2 est alors rattaché à TR1. TR1 est associé à deux path-ID : PA1 et PA2.

2. T1 a des caractéristiques particulières. L’entreprise ferroviaire demande un nou- veau sillon ad hoc. Concrètement, le gestionnaire d’infrastructure trace et met à disposition ce nouveau sillon (S3). TR1 est associé, en plus de PA1, à un nouveau path-ID (PA3), créé pour l’occasion.

Un exemple concret est développé au chapitre 6 (sous-section 6.3.6).

Cela signifie donc qu’un train-ID peut être associé à plusieurs path-ID et qu’inverse- ment un path-ID est susceptible d’être associé à plusieurs train-ID au cours du temps. La non-utilisation d’un sillon par le train pour lequel il a été demandé initialement ne désactive pas son path-ID. Du point de vue du gestionnaire d’infrastructure, ce système irait dans le sens d’un meilleur taux d’utilisation de sa production, les sillons qui ne sont pas utilisés par une entreprise ferroviaire pouvant, le cas échéant, être réutilisés sans perte de traçabilité. La création de ces identifiants représente ainsi un vecteur très prometteur de pilotage de la production de chaque acteur. Il ne faut néanmoins ni sous-estimer la complexité de manipulation de tels identifiants (24 à 32 caractères quand même !), ni l’investissement financier qu’une telle transformation représente (ce qui explique que le plan de déploiement ait été revu en 2013), ni la concrétisation de certaines initiatives communes en matière de systèmes d’information qui participent déjà d’une communica- tion plus aisée (par exemple, celles du groupe UIC RAILDATA qui regroupe les grandes entreprises ferroviaires de fret en Europe ou celles de RNE).

Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons cherché à expliciter les liens existant entre sillon et train. Longtemps et encore souvent perçus comme indissociables (et donc confondus), ils méritent d’être appréhendés comme deux produits à part entière pour au moins deux raisons :

— le mouvement de réforme européen a conduit à ce qu’aujourd’hui, les rôles de producteur de sillons, de demandeur de sillons et de producteur de trains soient endossés par des entités différentes,

— le calendrier qui encadre les demandes de sillons et s’étend jusqu’à la circulation des trains ouvre la voie à des ajustements voire des remises en cause des liens qui les unissent.

Pour le marché du fret, ces deux raisons ont une résonance toute particulière dans la mesure où il s’agit d’une activité qui met en jeu des réseaux d’acteurs complexes et dont la temporalité spécifique requiert de la flexibilité de la part du gestionnaire d’infrastructure. Dans ce cadre, un des enjeux de l’identification distincte du sillon et du train est la traçabilité de ces deux produits aux trajectoires entremêlées. Nous aurons l’occasion de voir au chapitre 6 au travers de deux études de cas que cette traçabilité est effectivement incomplète. Plus largement, ce détour, un peu formel mais nous semble-t-il indispensable, autour des relations entre sillon et train nous a permis d’introduire l’idée que le sillon est « une ressource à habiller » pour les entreprises ferroviaires. Dans le chapitre 5, nous allons approfondir les implications de cette idée du point de vue de la qualité des sillons.

À la recherche du temps perdu

ou les

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