• Aucun résultat trouvé

13.2 Spectres d’émission pour des profils transverses réalistes

13.2.3 Simulations de spectres de fibres typiques

Notre modèle d’une fibre décrite par morceaux à variation linéaire du zéro de dispersion, associé à sa distribution aléatoire suivant des paramètres de fibres réelles, nous donne à présent les moyens de simuler des profils typiques de fibres et leurs spectres d’émission de paires.

Nous commençons par simuler la variation du zéro de dispersion sur une fibre longue de plusieurs centaines de mètres, dont nous extrayons une section de dix mètres9 de laquelle nous présentons le profil en décalage du zéro de dispersion dans la figure 13.4. La distance entre deux points de la simulation est fixé à un centimètre, de façon à disposer d’une résolution suffisante vis-à-vis de la longueur de corrélation (Lc ' 0.8 m), sans trop rallonger nos temps de calcul. Hormis le profil

transverse, tout les autres paramètres utilisés dans ces simulations correspondent à notre fibre de référence (cf. Table 2.1).

Figure 13.4 – Distribution simulée du décalage du zéro de dispersion sur dix mètres de fibre.

Nous pouvons en premier lieu observer que d’une section de fibre de 1 m à l’autre, le décalage moyen du zéro de dispersion peut varier de quelques nanomètres. Ainsi, même entre des morceaux de fibres tirées d’une même bobine (et donc d’un même tirage de fibre), nous pouvons observer un décalage global de la courbe de dispersion. Nous rappelons que dans notre cas les résultats des mesures de dispersion, initialement faites sur un autre morceau de fibre, ont dû être recalés de +3.5 nm (cf. sous-section 2.1.1) pour correspondre à nos longueurs d’onde moyennes d’émission. Il est donc nécessaire d’être particulièrement prudent lors du passage d’un morceau de fibre à l’autre, et de garder en tête que la courbe de dispersion (et donc la position du zéro de dispersion et des longueurs d’onde d’émission) peut notablement différer entre eux10.

Nous noterons sur la figure13.4 que le décalage du zéro de dispersion ne dépasse pas les 4 nm en absolu (tendance qui se retrouve sur les centaines de mètres de fibre initialement simulés), soit une variation de l’ordre de 0.45 % vis-à-vis de notre référence à 899.5 nm, ce qui correspond à une variation maximale de ±6.3 nm et ±5.6 nm pour λs0 et λi0, respectivement.

Or comme nous l’avons-vu en sous-section11.2.2, pour une fibre à profil linéaire, un décalage de 0.01 % du zéro de dispersion est le seuil à partir duquel une différence notable s’observe avec le cas uniforme, tandis qu’au delà de 0.1 % le spectre s’étale sur plusieurs nanomètres de large et voit son amplitude au pic décroître de plus d’un ordre de grandeur. L’amplitude des fluctuations que nous observons sur la figure 13.4 indiquent donc clairement que l’approximation de l’uniformité n’est pas applicable pour des longueurs de fibre typiques.

9. Ceci correspond à la longueur typique des bobines de fibres fournies par NKT Photonics, notre fibre d’étude (d’environ un mètre) étant issue de l’une d’elles.

10. Nous soulignons toutefois que certaines sections d’un mètre dans la simulation sont pratiquement linéaires (par exemple celle allant de 0 à 1 mètre ou de 4 à 5 mètres dans la figure13.4), ce qui justifie d’autant plus l’intérêt de notre modèle par morceaux linéaires.

CHAPITRE 13. ÉTUDE DE PROFILS TRANSVERSES RÉALISTES POUR LES FIBRES

Pour comparer directement nos simulations à notre fibre nous découpons le profil de la figure13.4

en tronçons d’un mètre de long, correspondant à la longueur de notre fibre d’étude. Nous représentons en figure13.5 trois profils différents de fibres et leurs spectres d’émission de paires associés.

Nous notons en premier lieu une grande variabilité d’une fibre à l’autre, avec des spectres très chaotiques. La longueur de corrélation des fluctuations de taille transverse étant plus courte que la longueur de la fibre, nous retrouvons des variations rapides de diamètre et donc du zéro de dispersion dans les profils tracés. Celles-ci peuvent être en moyenne proche de 0, comme c’est le cas pour les fibres A ou C (cf. figures13.5a et13.5c), toutefois le spectre final résulte de l’interférence de termes de phase qui, de manière générale, ne se compensent pas mutuellement.

L’importance de cet effet d’interférences est souligné, d’une part par l’étalement des spectres sur plus de 10 nanomètres de large, soit plus du double que ce que nous avons pu obtenir dans notre simulation d’une fibre de profil linéaire (cf. figure11.2) ; d’autre part par des amplitudes maximum des spectres deux fois plus faibles pour ces fibres aléatoires que pour la linéaire (F = 0.1 au maximum ici). Cette constatation s’explique du fait que nous observons ici des non-uniformités un ordre de grandeur plus importante (avec ∆λZDW pouvant atteindre plusieurs nanomètres) que pour la non-uniformité

de la fibre linéaire simulée (∆λZDW = ±0.5 nm).

On peut également relever sur les spectres tracés en figures13.5 que les oscillations des spectres se montrent plus faibles pour des longueurs d’onde se rapprochant du zéro de dispersion (899.5 nm). On retrouve ici l’effet, dans l’expression du désaccord de phase décalé (13.4), de pondération du terme rendant compte de la non-uniformité (∆ωZDW) par la différence des vitesses de groupe (d∆k ' 2β(1)(ωp0) − β

(1)

s) − β(1)(ωi) en première approximation) : ωp0 est proche de ωZDW,

et plus ωs et ωi s’en rapprochent, plus d∆k sera faible et l’effet de la non-uniformité moindre.

Au vu de l’ordre de grandeur des fluctuations de la position du zéro de dispersion obtenues (0.3%), plus grande d’un ordre de grandeur que ce que nous avons utilisé en sous-section 11.2.3

(∆λZDW = ±0.5 nm soit environ ±0.05%) pour mettre en évidence la non-réciprocité du spectre

induite par la non-uniformité, nous nous attendons ici à une très forte différenciation du spectre selon le sens de propagation.

Nous traçons en figure13.6le spectre émis pour une fibre aléatoire, cette fois-ci intégré sur nos filtres de détection suivant la méthode décrite en sous-section 7.4.1, et ce pour les deux sens de propagation.

Comme attendu, les spectres se montrent complètement différents entre les deux sens de propa- gation. Au point que même l’usage de filtres, solution déjà évoquée en section 12.2pour limiter la dégradation de la visibilité des paires du fait de la non-réciprocité, se révélerait ici pratiquement inutile.

Au vu de ces simulations, pour une fibre à cristal photonique fabriquée de façon à être uniforme, nous voyons que des fluctuations de taille transverse résiduelles, propres aux imperfections du processus de tirage, subsistent. Vis-à-vis de la génération de paires de photons, particulièrement sensible aux fluctuations d’accord de phase et donc de diamètre de la fibre, l’amplitude de ces fluctuations et les distances caractéristiques sur lesquelles elles s’étalent sont extrêmement préjudiciables au spectre d’émission. Non seulement ce dernier voit son amplitude au pic fortement décroître vis-à-vis d’une fibre parfaitement uniforme, mais il s’étale sur des plages de fréquences pouvant atteindre plusieurs nanomètres voire des dizaines de nanomètres.

De plus, pour une structure et des paramètres de fibre fixés, il est a priori impossible de prédire à l’avance le spectre d’émission d’une section de fibre sans connaître le profil exact suivi par son diamètre sur sa longueur. Puisque nous ne disposons pas de l’information nécessaire sur le profil de notre fibre, nous ne sommes pas en mesure de simuler son spectre associé. Nous noterons tou- tefois que nous retrouvons le même ordre de grandeur de taux d’émission de paires que pour nos résultats expérimentaux (cf. figure 10.1), soit plusieurs dizaines de paires émises par seconde par la fibre, contre les centaines de paires émises par seconde dans le cas purement uniforme (cf. figure7.4).

13.2. SPECTRES D’ÉMISSION POUR DES PROFILS TRANSVERSES RÉALISTES

(a) Spectre de la fibre A : premier mètre de la section en figure13.4.

(b) Spectre de la fibre B : morceau entre 2 et 3 mètres de la section en figure 13.4.

(c) Spectre de la fibre C : morceau entre 4 et 5 mètres de la section en figure 13.4.

Figure 13.5 – Terme F suivant la conservation de l’énergie pour des fibres longues d’un mètre. En encarts les profils transverses bruités des fibres, en terme de décalage de la longueur de dispersion nulle.

CHAPITRE 13. ÉTUDE DE PROFILS TRANSVERSES RÉALISTES POUR LES FIBRES

Figure 13.6 – Spectre d’émission de paires pour une fibre dont le diamètre est affecté d’un bruit aléatoire, pour les deux sens de propagation.

Enfin, le profil des fibres étant généralement dominé par des fluctuations aléatoires, leurs spectres se montrent nécessairement non-réciproques vis-à-vis de la direction de propagation, comme nous pouvons le voir en figure 13.6. Ceci menant à une forte dégradation de la qualité de l’intrication en polarisation des paires dans une boucle Sagnac.

En définitive, le modèle de la non-uniformité présenté ici rend non seulement compte de l’aspect du spectre d’émission expérimental que nous avons obtenu, en remettant en cause l’hypothèse communément admise de l’uniformité, mais met également en évidence la non-réciprocité résultante du spectre d’émission.

Néanmoins, sur ce dernier point, une solution peut être trouvée. En apposant intentionnellement, dès la fabrication de la fibre, une non-uniformité, symétrique vis-à-vis du sens de propagation, et de plus forte amplitude que les fluctuations aléatoires inhérentes à la fabrication, il est possible de retrouver une réciprocité dans le profil d’émission.

13.3

Émission réciproque dans une fibre de profil transverse symé-