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La combinaison de la dispersion chromatique cumulée des deux réseaux sur les trajets optiques signal ou idler, et de l’ouverture numérique limitée de la fibre de collection (cf. figure 8.1) résulte en un filtrage effectif des fréquences détectées. Nous parlons alors de filtres de détection dans le sens où ne sont détectés des photons n’appartenant qu’à une portion réduite du spectre (le reste étant perdu dans l’environnement), large de ∼ 0.5 nm.

Pour régler les fréquences centrales {λs0, λi0} de ces fenêtres de détection, nous jouerons sur la position et l’orientation du miroir et du réseau de diffraction précédant chaque fibre de collection, ces dernières restant fixes. Les optiques de ces deux duos sont équipées de vis micrométriques graduées, nous permettant de relier un jeu de graduations à une fréquence centrale de filtre donnée. Nous disposons ainsi d’une certaine reproductibilité pour nos réglages8.

6. En pratique, un écart minimum de ∼ 20 nm est nécessaire pour réduire suffisamment le bruit de mesure, comme nous l’exposerons en section9.1.

7. Photodiodes SPCM-AQRH-14 de Excelitas Technologies, d’efficacité quantique de 35% et de 49% pour nos longueurs d’onde signal et idler (autour de 916 et 856 nm, respectivement).

8. Le changement des orientations du miroir et réseau par le biais des vis micrométriques ne permet de moduler la fréquence centrale d’un filtre que sur une plage restreinte, d’environ deux nanomètres. Pour sonder une plus grande plage de couples de fréquences, nous devons nécessairement bouger le point de fixation des optiques, et donc perdre la reproductibilité de nos réglages.

8.2. RÉGLAGE DES FILTRES DE DÉTECTION

Si nous sommes libre d’orienter le faisceau injecté dans chaque fibre de collection, encore devons- nous disposer d’une référence de fréquence sur laquelle nous caler. Heureusement, notre source laser présente une grande accordabilité en longueur d’onde.

En effet, la fréquence centrale de pompe ωp0 est directement réglable sur notre laser Titane-Saphir, dont la plage d’accordabilité (700 ∼ 1000 nm) couvre les longueurs d’onde typiques d’émission de nos paires, aux alentours de 850 et 910 nm. Par ailleurs, le spectre est visualisable à l’aide d’un analyseur de spectre optique (OSA), accessible via un miroir amovible (cf. figure 8.1). On peut noter que cette mesure s’effectue en sortie de fibre, de sorte que le spectre obtenu correspond bien à la composition spectrale de la pompe dans la fibre.

Notre procédure de réglage usuelle consiste alors à faire passer par notre fibre microstructurée un faisceau laser à la longueur d’onde visée9, λs0 ou λi0. Le faisceau sortant nous sert alors de référence pour le réglage de la voie de détection correspondante : nous ajustons les positions et orientations du miroir et du réseau de façon à maximiser la transmission dans la fibre de collection.

Pour déterminer la forme spectrale du filtre de détection résultant, nous injectons un spectre large (vis-à-vis de la largeur des filtres), centré en λs0 ou λi0 selon la voie considérée, dans la fibre microstructurée. Sont relevés à l’analyseur spectre optique le spectre en sortie de cette fibre ainsi que celui récupéré en bout de circuit, à la sortie de la fibre de collection du filtre associé. Ces spectres sont ensuite normalisés à partir des puissances moyennes relevées aux même points. Le rapport du spectre normalisé en sortie de fibre de collection à celui en sortie de la fibre microstructurée nous permet ainsi d’obtenir la forme de nos filtres de détection, sur laquelle nous ajustons une gaussienne. Les paramètres d’ajustement nous donnent la longueur d’onde centrale du filtre, sa demi-largeur à1/e et sa transmission au pic. Cet étalonnage est systématiquement opéré après chaque réglage d’un filtre. La méthode de réglage que nous venons de décrire permet de régler les longueurs d’onde centrales des filtres avec une précision de l’ordre de 0.05 nm et ce, de manière reproductible. Toutefois, cette procédure s’avère relativement longue (d’une trentaine de minutes à une heure) et ne permet donc pas de réglages rapprochés dans le temps. Nous verrons alors au chapitre 10 un réglage moins précis mais plus rapide (en décalage du réseau de chaque voie uniquement) que nous avons utilisé pour nos principaux résultats expérimentaux.

La demi-largeur à 1/e typique de nos filtres est de 0.3 ∼ 0.4 nm, soit une fenêtre typique de détection large d’environ ∼ 0.5 nm, suffisante pour retracer de manière résolue la structure du spectre d’émission de la fibre (dont la largeur typique est de l’ordre du nanomètre). Les efficacités de détection au pic de ces filtres sont de l’ordre de 8 et 11%, pour signal et idler respectivement, en prenant en compte l’efficacité quantique de nos détecteurs, qui est de 35% à λs0 = 916.6 nm et de 49% à

λi0 = 856.5 nm.

Nous rappelons que dans notre expérience nous positionnons les longueurs d’onde d’émission de nos paires, via le choix de la longueur d’onde de pompe et la connaissance de la courbe d’accord de phase (cf. figure2.4), entre l’émission de deux raies Raman secondaires de l’acétone deutérée [58]. Celles-ci corres- pondent à des décalages de 331 et 410 cm−1, soit des pics d’émissions, pour une pompe à λp0 = 885.55 nm, respectivement à 912 et 919 nm côté signal et 860 et 855 nm côté idler. Les longueur d’onde signal et idler λs0 et λi0 respectant l’accord de phase avec λp0 se positionnent donc bien entre les pics Raman.

La figure8.2retrace l’évolution des comptes de photons, ainsi que celle du gain Raman, en fonction des longueurs d’onde signal et idler sur notre plage spectrale typique de mesure.

9. L’étage de filtrage de la fluorescence est auparavant court-circuité à l’aide de deux miroirs amovibles, afin de pouvoir injecter la longueur d’onde souhaitée dans la fibre.

CHAPITRE 8. EXPÉRIENCE ET RÉGLAGES DE DÉTECTION

(a) Taux d’émission côté idler. (b) Taux d’émission côté signal.

Figure 8.2 – Nombre de photons émis par seconde côté signal et idler, pour une puissance moyenne dans la fibre de 3 mW et avec λp0= 885.55 nm. Le nombre de photons émis par la fibre sont déduits des comptes détectés et des

transmissions dans notre montage. Les traits pleins représentent l’évolution du gain Raman.

Nous observons que les taux de comptes suivent l’évolution du gain Raman. En effet, la pompe étant largement filtrée, et le nombre de paires émises par secondes étant très faible (∼ 800 paires/s, sans prendre en compte les pertes de notre montage), le bruit Raman domine les comptes de photons.

Toutefois, les comptes bruts de photons ne constituent pas les mesures sur lesquelles nous nous appuierons le plus. En effet, le taux de génération de paires sera déduit des mesures de corrélations temporelles entre les coups relevés sur nos deux détecteurs. Puisque le bruit Raman se constitue de photons décorrélés en temps, la mesure de corrélations permettra de faire ressortir le signal utile (les paires) du bruit.

Chapitre 9

Mesures de corrélations en régime de

faibles comptes de photons

9.1

Bruits de mesure en régime de faibles comptes de photons

Il est important de garder en tête que le signal d’intérêt dans nos mesures ne constitue qu’un nombre très faible de photons (∼ 10−5 paires/pulses soit ∼ 800 paires/s). Dans ces conditions, la moindre source de bruit devient rapidement critique, et de nombreuses précautions doivent être prises pour réduire au maximum toutes les sources potentielles. Ces dernières peuvent être classées selon différents critères :

— Leur synchronisme avec les impulsions de pompe. Toute source de bruit synchrone avec les impulsions de pompe le sera aussi avec les paires de photons. Les bruits asynchrones seront moins problématiques du fait que dans le cadre de relevés de corrélations temporelles (présentés dans la section suivante), ceux-ci se répartissent sur tous les délais possibles.

— Leur dépendance à la puissance de pompe. Nous distinguerons les bruits indépendants de la pompe de ceux évoluant linéairement avec la puissance de pompe.

— Leur sélectivité spectrale, c’est-à-dire leur présence sur une partie du spectre optique seulement ou son ensemble. Le point qui nous intéresse particulièrement est bien évidemment la présence ou non de bruit à nos fréquences d’émission signal et idler. Un photon de bruit émis à même fréquence et au même instant qu’un photon de paires en est, en pratique, indistinguable (sauf différence d’état de polarisation) et donc impossible à filtrer.

En gardant en tête ces caractéristiques, nous pouvons distinguer plusieurs sources de bruit et présenter les moyens mis en œuvre pour les limiter :

Les dark counts Nos détecteurs n’étant pas parfaits, toute mesure sera entâchée de faux positifs, i.e. de comptes mesurés en absence de photons incidents, d’origine thermique. Pour nos détecteurs, le niveau de dark counts est d’environ 60 coups par seconde1, ce qui constitue une limite basse du bruit de comptage. Par nature, les dark counts sont totalement décorrélés du reste de l’expérience : ils sont asynchrones avec la pompe et leur niveau de compte est totalement indépendant de sa puissance. En outre, nous les mesurons quelle que soit les fréquences de réglage de nos filtres.

Par ailleurs, les dark counts ne peuvent être réduits sans refroidir nos détecteurs. Or cette contrainte technique ne se justifie pas ici puisque leurs niveaux de comptes associés est suffisamment faible pour que ce bruit ne soit pas la limitation principale dans nos mesures.

1. Le niveau de dark count étant inhérent aux détecteurs, il peut être relevé en déconnectant les fibres de collection et en bouchant les ergots de connection du boîtier de détection.

9.1. BRUITS DE MESURE EN RÉGIME DE FAIBLES COMPTES DE PHOTONS

Les photons de l’environnement Toute source de lumière présente dans la pièce d’expérience (lumières, écrans, voyants) émet des photons susceptibles d’être détectés, qui sont donc indépendants de la pompe et détectables quel que soit la fréquence de réglage (puisqu’ils ne passent pas par le chemin optique du montage).

Néanmoins il est relativement aisé de limiter leur influence : d’une part en effectuant nos expériences dans le noir complet, d’autre part en réduisant matériellement le nombre de photons de l’environne- ment atteignant les détecteurs. Les photons signal et idler sont séparément collectés dans des fibres reliées au boîtier de détection. C’est donc au niveau de la collection de la lumière (côté signal comme idler) que nous limitons les photons de l’environnement : en interposant un filtre RG665 coupant la lumière de longueur d’onde inférieure à 665 nm, et en plaçant l’ensemble des optiques de collection sous une boîte opaque dont la seule ouverture laisse entrer les faisceaux diffractés (représentée par le rectangle gris dans la figure8.1). Par ailleurs, les photons de l’environnement sont encore susceptibles de se coupler directement dans les fibres de collection, aussi utilisons-nous des fibres à double gaine de protection. En prenant ces précautions, le bruit issu des photons de l’environnement devient négligeable2 vis-à-vis des dark count.

Les photons de fluorescence Notre laser pulsé se base sur le pompage continu d’un cristal de Titane-Saphir. Or les ions Ti3+ peuvent naturellement se désexciter par fluorescence vers leur niveau fondamental. Les photons émis se répartissent sur une plage spectrale allant de 600 à 1000 nm et ne sont pas synchrones avec les impulsions délivrées par le laser. Cependant, ils suivent le même parcours optique et passent par les mêmes étages d’atténuation, de sorte que le signal de fluorescence est proportionnel à la puissance de pompe injectée. Si la fluorescence du laser est faible vis-à-vis de la puissance à longueur d’onde de pompe (∼ 80 dB d’écart), elle constitue néanmoins un niveau de bruit préjudiciable pour nos mesures.

Le filtrage de la fluorescence est exécuté très tôt dans notre montage par passage sur un réseau de diffraction (cf. figure8.1) en configuration de quasi-Littrow. Nous obtenons ainsi une diminution de 50 dB du fond de fluorescence dont le taux de comptes associé au niveau des détecteurs est négligeable.

Les photons de pompes diffusés Les imperfections de nos réseaux impliquent nécessairement qu’une petite partie des photons de pompe soient diffusés suivant le trajet optique de nos photons de paires. Si cette proportion est faible, le nombre initial de photons de pompes est tellement important (109 photons de pompes contre 10−5 paires par impulsion) que ce bruit de diffusion est un problème majeur dans notre expérience. Les photons diffusés sont naturellement synchrones avec les impulsions et en quantité proportionnelle à la puissance de pompe injectée.

La disposition principale pour réduire le taux de comptes de photons de pompe diffusés, présentée en section 8.1, consiste à utiliser deux réseaux de diffraction en série. Par ailleurs nos fibres de collection seront monomodes : leur cœur de taille réduite (9 µm de diamètre) limite la collection de photons diffusés hors axe optique. Le taux de comptes dus à la diffusion de la pompe3 est de l’ordre de ∼ 100 coups/s. Enfin, nous noterons qu’en configuration croisée (les paires sont émises sur l’axe neutre perpen- diculaire à celui de la pompe) la pompe est efficacement coupée dès la sortie de fibre par le polariseur4.

2. En coupant le laser de pompe, nous observons que nos taux de comptes se retrouvent au niveau de ceux des

dark count. Or les photons de l’environnement constituent la seule autre source de bruit indépendante de la pompe.

3. L’estimation de ce taux peut être réalisée en désaxant le faisceau injecté dans une fibre de collection. En supposant que la diffusion est la même dans toutes les directions de l’espace, nous ne relevons plus que la diffusion de la pompe, à laquelle s’ajoute les dark count et photons de l’environnement que nous pouvons retrancher à la mesure.

4. Nous rappelons néanmoins que l’une des conséquences du remplissage de la fibre par notre liquide (cf. sous-section 2.3.3) est un maintien de polarisation partiel par notre fibre : une faible part du faisceau de pompe passera toujours le polariseur de sortie.

CHAPITRE 9. MESURES DE CORRÉLATIONS EN RÉGIME DE FAIBLES COMPTES DE PHOTONS

Les photons Raman Le bruit issu de la diffusion Raman spontanée est généré spontanément au niveau de notre fibre d’étude5. Issu de l’interaction entre la pompe et le milieu de propagation, le bruit Raman est proportionnel à la puissance de pompe et donc maximum au niveau des impulsions, de sorte qu’on puisse le considérer synchrone à la pompe.

Sa sélectivité spectrale dépend du milieu, ce qui constitua la motivation principale pour l’élaboration de l’architecture de notre source. Nous rappelons que la raie principale du spectre de gain Raman de l’acétone deutérée se trouve hors de notre bande de transmission, tandis que les fréquences de génération de nos paires se trouvent entre deux raies Raman secondaires. L’intérêt de l’architecture de fibre à cœur liquide fut démontré par la mise en évidence d’une réduction du bruit Raman de trois ordres de grandeur vis-à-vis d’une fibre à cœur de silice [58,52]. Néanmoins, les raies Raman se modélisant par des lorentziennes, le recouvrement des deux raies Raman adjacentes introduira toujours un bruit Raman résiduel (cf. figures 8.2). Le bruit de fond Raman est de l’ordre de plusieurs milliers de coups/s, et dépend de la fréquence de réglage de nos filtres (d’autant plus fort que nous nous rapprochons du maximum d’une des raies Raman).

Les photons désappariés Du fait des pertes dans notre montage, inhérentes aux imperfections des optiques comme aux limites de nos détecteurs, le long d’un canal de collection (signal ou idler), seul un faible pourcentage des photons émis par notre fibre d’étude est effectivement détecté. Ainsi, pour une large part des paires émises, seul un des deux photons de paire sera effectivement décompté. Avec des efficacités totales de détection d’environ 10% sur chaque voie, et un taux de génération de l’ordre de 800 paires par secondes, le nombre de coups sur une voie provenant de photons désappariés est d’approximativement 70 coups par secondes. Si ce bruit reste donc très faible, il n’est toutefois pas filtrable spectralement, et de plus synchrone avec la pompe et évoluant quadratiquement avec la puissance dans la fibre.

Les photons désappariés sont alors distinguables des photons appariés uniquement via des relevés de corrélations temporelles entre les coups sur les voies signal et idler.

L’ensemble de ces bruits se retrouvent dans nos comptes de photons mais, au vu de leurs proportions respectives, la diffusion Raman reste notre source majeure de bruit.

Forts d’une vision complète des sources de bruit potentielles, nous présentons dans la suite le principe de nos mesures de corrélations temporelles et la manière dont les différents bruits s’y traduisent.