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d'études Types d'intervention Champ

Chapitre 4 : Présentation des résultats

4.2 Contexte de pratique des activités de prostitution

4.2.2 Contexte et normes sociales

4.2.2.3 Sexualité des filles et des garçons

Les jeunes rencontrés, principalement du côté des filles, s'entendent pour établir l'âge au premier rapport sexuel entre 10 et 15 ans pour les filles et 16 et 19 ans pour les garçons.

nombreuses significations qu'on lui attribue. La virginité est pour certains représentative de la bonne éducation reçue des parents, du sérieux de la fille, du respect envers les parents et le futur mari, de la qualité de la fille en tant que future épouse, de la confiance qui sera établie entre les époux et du respect à recevoir de la part du voisinage et de l'entourage. Les propos suivants montrent bien la couleur des propos tenus au sujet de la virginité féminine : « La virginité est une bonne chose, parce qu'une fille trouvée vierge au mariage devient une bonne épouse parce qu'elle a été bien éduquée au village, mais une fille qui a mené une belle vie ne sera jamais vierge au mariage et elle ne pourra pas être correcte » (GDG 17-

19B) et « L'importance de la virginité, c'est d'abord la confiance de ton mari que personne ne pourra ébranler d'autant plus que lui-même il a les preuves en mains. [Pour] les adultes, [...] la virginité leur [est] acquise comme élément fondamental du sérieux de la fille»(GDF17-19_C).

L'importance de la virginité de la jeune fille au mariage, surtout présente chez les générations qui les précèdent, a été contrebalancée par les jeunes rencontrés qui ont convenu qu'elle était de plus en plus délaissée. Admettant sa valeur en termes d'honneur pour la fille et ses parents, ils ont été nombreux à spécifier que cette règle n'était effectivement plus d'actualité. L'extrait suivant illustre de façon juste la transformation de la pratique autrefois largement respectée de la virginité des jeunes filles à celle moins prisée par la jeune génération actuelle :

La virginité est importante, mais actuellement parmi 100 filles tu trouveras peut être 1% ou 0% de filles vierges, avant la fille se mariait sans avoir connu l'homme sexuellement, et c'est le jour du mariage qu'elle découvrait la sexualité et c'est son mari qui la dévirginisait ce qui constituait un grand honneur pour la famille de la fille. [...] les adultes pensent avoir des filles vierges jusqu'au jour de leur mariage (GDF 14-16B).

D'une sexualité traditionnellement réservée pour les filles au cadre du mariage, se dessinent de nouvelles réalités où elles veulent, aux dires de plusieurs des garçons rencontrés, profiter de la vie et de la liberté qu'elles détiennent avant de se marier, évitant ainsi qu'elles soient tentées de l'explorer une fois unies. Les passages suivants illustrent bien cette nouvelle

(GDG 17-19C) et « Souvent ça ne plait pas aux filles [de demeurer vierges jusqu'au mariage] parce que souvent elles disent que si tu ne fais pas ta belle vie une fois mariée tu ne le feras pas, ce qui fait perdre aujourd'hui la virginité à beaucoup de jeunes filles » (GDG 14-16 B).

Les conséquences d'une grossesse conçue hors des règles de l'union maritale sont nombreuses et touchent principalement les filles : renvois ou menaces de renvois de la maison paternelle, tentative des parents de marier les partis en cause, adversité de la famille du garçon dans l'éventualité où il reconnaisse la paternité et bavardages et médisances de l'entourage à l'endroit de la fille, mais aussi de ses parents. Le poids de la communauté sur la fille et ses parents est tel que ces derniers se voient souvent dans l'obligation d'expulser leur fille de la maison, tel que l'expliquent ces jeunes : « Parce que l'entourage dira que tu viens à la Mosquée, ce qui est interdit par le Saint Coran, parce que tu as chez toi ta fille enceinte hors mariage, en général c'est des propos de ce genre qui font que les parents renvoient la fille de la famille » (GDG 17-19B) et « [...] les gens diront « hé la fille d'un tel vient d'avoir une grossesse hors mariage ». Certains parents refusent de garder un tel enfant dans la famille parce que c'est une humiliation pour la famille, une opprobre » (GDF 14-16A). Enfin, pour éviter que l'enfant ne soit étiqueté de bâtard par l'entourage des jeunes filles, comme il arrive très fréquemment selon les jeunes rencontrés, plusieurs d'entre elles décident d'avorter, de tuer l'enfant une fois mis au monde ou de fuir la famille, devenant ainsi bien souvent une « égarée de la rue » (GDF 17-19B).

Interrogés par ailleurs sur la responsabilité des partenaires sexuels en cas de grossesses ou d'IST, les jeunes ont exprimé des avis différents selon la situation à laquelle ils sont confrontés. Ils sont ainsi nombreux à attribuer à la femme la responsabilité de la grossesse, alors que celle des IST serait plutôt imputable aux deux partenaires. Les propos suivants illustrent bien la façon dont la responsabilité de la grossesse incombe à la femme, tandis que celle liée aux IST est dite partagée entre les partenaires : « En principe si la jeune fille connaît ses jours d'ovulation elle ne doit pas tomber enceinte, mais si tel est le cas, elle est

condom est très bien parce que le condom protège contre les ISTWIH-sida » (GDG 14- 16_D) ou « Ils sont tous deux responsables parce que aucun d'entre eux n'a eu la présence d'esprit de porter le condom » (GDG 14-16_B).

Un autre aspect de la sexualité des jeunes qui se dégage des discussions de groupe, est celui du sexe sous pression, pression qui se présente sous différentes formes. Plusieurs des jeunes rencontrés nous ont dit soit ressentir de la pression émotive pour avoir des relations sexuelles comme l'explique cette jeune fille « [...] quand l'homme te demande des rapports sexuels qui coïncident avec les jours d'ovulation et que tu lui dis ça, il dira que donc « tu ne veux pas avoir un enfant de moi », ainsi de suite jusqu'à ce que tu acceptes » (GDF 14-

16B), soit exercer de la pression ou du moins avoir le droit et la possibilité de le faire tel que le relatent ces garçons : « Même si cela ne plait pas à la femme, l'homme peut la convaincre. Et si la femme refuse d'être convaincue? Il faut toujours insister» (GDG 17- 19_C) ou « Le plus souvent quand tu as une envie sexuelle de la fille qui ne veut pas de toi par exemple tu peux l'obliger et abuser d'elle» (GDG 17-19D). Le recours au maraboutisme et à la magie noire pour forcer les jeunes filles désirées à avoir des rapports sexuels est également mentionné par les garçons comme un moyen d'obtenir les relations convoitées. Le viol comme ultime moyen de se procurer du sexe est enfin énoncé par quelques garçons rencontrés et dont l'essence des propos peut être mesurée par cette citation : « Il y a des hommes aussi qui ne trouvent pas de femmes pour satisfaire leurs besoins sexuels c'est pourquoi ils violent les filles » (GDG 17-19B).

L'âge au premier rapport sexuel étant plus précoce chez les filles que chez les garçons, la virginité féminine au mariage, malgré la valeur et les nombreuses significations qu'on lui attribue toujours, ne semble plus d'actualité selon les jeunes rencontrés. Les générations précédentes entretenant encore aujourd'hui une importance majeure à cette virginité des jeunes filles, les conséquences d'une grossesse conçue hors de l'union maritale sont des plus néfastes pour les jeunes filles concernées, et ce à divers niveaux. La responsabilité des partenaires sexuels en cas de grossesses et d'IST est de son côté unanimement partagée selon la situation présente, alors que le sexe obligé, soit par la force de la part d'inconnus,

soit par la pression émotionnelle de la part du copain, a été à plusieurs reprises mentionnés par les jeunes filles rencontrées.