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Le secteur de la gouvernance politique et accès au travail

Hypothèse 1 : Le microcrédit favorise la création de marges de manœuvres (des espaces de pouvoir) susceptibles de renforcer des activités génératrices de revenus concourant à

3.3. Le genre dans le contexte guinéen

3.2.5. Le secteur de la gouvernance politique et accès au travail

Les efforts entrepris à différents niveaux n‟ont jusqu‟à présent pas assuré de manière significative la participation des femmes au débat public concernant la gestion des affaires de la société au même titre que les hommes. Bien qu‟on observe, de nos jours, une implication active des femmes aux différentes élections et activités des partis politiques, surtout de par leur militantisme avéré, elles demeurent toutefois marginalisées quant à l‟accès aux postes de responsabilités politiques et administratives.

Les femmes sont peu représentées dans la vie politique. Elles constituent 25% des

députés, moins de 14% des membres du gouvernement32. Dans l‟administration publique, on

dénombre 28 Secrétaires généraux dont 2 femmes ; 7 femmes sur 20 Chefs de cabinets ; 3 femmes inspectrices régionaux sur 8 ; 18 Directrices des ressources humaines contre 58 au total. Dans l‟administration décentralisée, on compte seulement1femme au poste de gouverneur de région contre 7 hommes ; 2 femmes sur 33 Préfets ; 7 femmes sur 304 Sous-préfets ; 6 Sous-Sous-préfets adjointes sur 304 ; aucune femme parmi les 304 Présidents des communes ; 7 femmes-maires sur un effectif de 38. Au niveau des Institutions républicaines, la situation est identique : Assemblée Nationale (25 femmes pour 89 hommes), Cour Suprême (5 femmes pour 35 hommes), Conseil Economique et Social (10 femmes contre 25 hommes), Commission électorale indépendante (5 femmes contre 20 hommes). Le même constant est observé parmi les responsables des institutions d‟enseignement supérieur (1 femme sur un

31Dans la tradition guinéenne, l‟oncle paternel d‟un enfant est considéré comme le père de l‟enfant.

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Cependant, on note des efforts de positionnement et de responsabilisation des femmes à la tête de certains postes administratifs stratégiques tels que le Ministère de l‟économie et des finances, le Conseil économique et social, la Direction Générale du Port autonome de Conakry, le Conseil national de la communication et la Société Navale de Guinée.

115 total de 17) ; de recherche scientifique (28 hommes contre 1 femmes) ; des directeurs préfectoraux de l‟éducation (5 femmes sur 33) ; principaux et proviseurs (46 femmes sur un effectif de 1053) ; Censeurs et directeurs d‟études (13 femmes contre 685 hommes).

Tableau 12 : Proportion des femmes dans les postes de prise de décision et de responsabilité

Poste de décision et de responsabilité Total Femmes

Effectif %

Députés 113 25 23

Membres du gouvernement 37 5 13,51

Cours suprême 40 5 12,5

Conseil économique et social 35 10 28,57

Commission électoral indépendante 25 5 20

Maires 38 7 18,42 Gouverneurs 8 1 12,5 Préfets 33 2 6 Secrétaires généraux 28 2 7 Chefs de cabinets 20 7 35 Inspecteur régionaux 8 3 37,5

Directeurs préfectoraux de l‟éducation 33 5 15

Principaux et proviseurs des collèges et lycées 1053 46 4,36

Censeurs et directeurs d‟études 698 13 1,86

Secrétaires généraux chargés de l‟administration 33 0 0

Secrétaires généraux chargés des collectivités décentralisées 33 0 0 Responsables d‟institutions d‟enseignement supérieur 17 1 5,8

Institutions de recherche scientifique 29 1 3,44

Sous-préfets 304 7 2,30

Sous-préfets adjoints 304 7 2,30

Présidents de communes rurales et urbaines 304 0 0

Directeurs des ressources humaines/services centraux 58 18 31 Directeurs des ressources humaines/services déconcentrés 44 2 4,54

Source : Données actualisées du Rapport de la Guinée sur l'évaluation de la mise en œuvre du Programme d'Action de Beijing+20, 2014

De même, au niveau local et décentralisé, la place des femmes dans les organes locaux de décision est pour ainsi dire inexistante. Les femmes sont très faiblement représentées soit en tant qu‟individus dans les communes urbaines en tant que Maires, soit en tant que membres d‟associations dans des délégations auprès des conseils locaux. Et du fait que ces conseils locaux soient majoritairement masculins, ils prennent peu en compte les besoins des femmes, notamment dans la distribution des terres et l‟accès aux services sociaux.

Les femmes souffrent également de ségrégation professionnelle et se retrouvent principalement dans les secteurs de main-d‟œuvre à faible salaire et sans qualification. En violation de l‟article 18 de la Constitution guinéenne, l‟accès des femmes à l‟emploi n‟est pas égal à celui des hommes, si bien qu‟elles sont surreprésentées dans le secteur informel qui ne

116 fournit aucune protection sociale. Et même à propos de ce secteur, on retrouve le plus souvent les femmes au bas de l‟échelle (vente des produits alimentaires, confection de vêtement, artisanat, coiffure, restauration). Ce secteur ne bénéficiant d‟aucune réglementation juridique, ni de protection sociale, fait que les femmes sont exposées à beaucoup de risques, notamment l‟insuffisance de capitaux pour exercer pleinement leurs activités, la faiblesse de structuration du secteur qui les rendent plus vulnérables et le faible niveau de scolarisation (FMI/MEF, 2013).

Contrairement aux hommes, les femmes continuent d‟être sous représentées dans la sphère publique et politique et aux postes de décision. En 2013 par exemple, seuls 40% des fonctionnaires de l‟Etat sont des femmes. Deux tiers d‟entre elles se situent à des échelons subalternes (hiérarchies C et B), et le tiers restant dans la hiérarchie A. Les femmes représentent seulement 11% dans le secteur de la Police et 15% dans la gendarmerie. Ce taux est beaucoup plus faible au sein de l‟armée avec 5,9%. Il est à noter que les femmes au sein des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) sont quasiment absentes de la haute hiérarchie (FMI/MEF, 2013). Le tableau ci-dessous récapitule les principaux indicateurs relatifs aux disparités de genre dans les cinq (5) secteurs-clés susmentionnés :

Tableau 13 : Principales disparités de genre dans 5 domaines sectoriels

Domaine Ecarts entre Femmes et Hommes Source

1. Economie

1.1 Economie (production et marchés)

Emploi secteur formel privé (dirigeants) Emploi secteur formel public

Emploi secteur informel urbain Part des employés salariés Inactivité

Sous-emploi global

Sous-emploi secteur informel Taux du chômage 13% de femmes / 87% d‟hommes 40% de femmes/ 60% d‟hommes 85,8 % de femmes/73,1 % d‟hommes 12,2% de femmes/34,8% d‟hommes 52,7 % de femmes/47,3% d‟hommes 47,2 % de femmes/28,1% d‟hommes 95% de femmes/84% d‟hommes 13% femmes/18% hommes APIP, 2015 MASPFE, 2013 ESETD, 2012

1.2 Economie des ménages

Activités agricoles non rémunérées Recherche bois de chauffe

Recherche de l‟eau Faire la cuisine Faire le marché

Autres travaux ménagers

80% de femmes sont des aides agricoles 45,5 % de femmes 73,5 5 de femmes 68,8 % de femmes 52 % de femmes /14, 1% d‟hommes 77 % de femmes/24,6% d‟hommes DRSP III, 2013 RNDH 1997 EIBC 1995 2. Education

Sans Niveau d‟instruction Taux d‟analphabétisme Enseignement primaire Taux brut de scolarisation Taux brut d‟achèvement Taux brut d‟abandon Effectif corps enseignant Enseignant secondaire

67% des femmes/40% des hommes 76% de femmes/45% d‟hommes 75,5% de filles/90% de garçons 44% de filles/56% de garçons 40 % de filles/30 % de garçons 30% de femmes/70 d‟hommes EDS-MICS 2012 EDS-MICS 2012 MEPUA, 2014 MEPUA, 2015

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Taux brut de scolarisation collège Taux brut de scolarisation lycée Effectif corps enseignant Enseignement technique et FP Inscription

Enseignant supérieur et RS Inscription

Effectif corps enseignant

34,3% de filles /56,7% de garçons 21% de filles/39/8% de garçons 5,7% de femmes/94,3% d‟hommes 46,2% de filles /56,8% de garçons 28,8% de filles/71,2% de garçons 2,3% de femmes/97,7% d‟hommes MEPUA, 2014 METFP, 2012 MESRS, 2014 3. Santé et sida

Taux de mortalité maternelle Taux de mortalité infantile Taux de fécondité

Utilisation contraceptifs (jeunes) Taux de prévalence nationale Sida % infection du Sida par genre

Personnel soignant (avec une faible représentation du personnel féminin au niveau décisionnel)

724 décès pour 100 000 naissances 67 décès sur 1 000 enfants

5,1 enfants par femme

26,4% de filles/33,6% de garçons 1,7%

2,1 % de femmes/1,2% d‟hommes 4 Aides de santé pour 2.000 habitants (51% de femmes/49% d‟hommes) Pour 10.000 habitants, on dénombre : 1,4 infirmier 0,5 sages-femmes 0,16 techniciens de laboratoire 1,8 médecin (spécialistes) 1,3 médecin (généralistes) EDS-MICS, 2012 CNLS/ESCOMB, 201233. PNDS 2015 Ŕ 2024, mars 2015 4. Droit

Inégalité de droits dans l‟arsenal juridique Inégalités de faits dans la société qui ne permettent pas aux femmes de jouir de leur intégrité physique et de leurs droits fondamentaux

Discrimination envers les femmes

Certains articles

Insuffisance d‟application des textes Pesanteurs socioculturelles

Mariages précoces et forcés (3 filles sur 5 avant 18 ans)

Excision : 97% malgré la loi de 2010 Domination masculine, divorces, répudiation, polygamie, violences basées sur le genre (VBG),

Code civil, code du travail, code foncier et domanial, code pénal, conventions internationales EDS 2012 MASPFE, 2011 FNUAP, Enquêtes VBG 5. Participation politique Gouvernement Assemblée nationale Cour suprême CES CNC CENI Gouverneurs Préfets Sous-préfets

Délégués spéciaux dans les conseils locaux

Forces de l‟ordre Police

Gendarmerie

7femmes ministres/26 hommes 25 femmes/89 hommes 5 femmes/35 hommes 10 femmes/25 hommes 1 femme/8 hommes 5 femmes/20 hommes 1 femme/7 hommes 2 femmes/31 hommes 7 femmes/297 hommes

2 femmes/128 présidents de délégations spéciales 11% de femmes 15% de femmes MASPFE, 2013 (rapport national Beijing +2020) et données 2016 MATAP, 2015 DRSP III, 2013

Source : Banque Mondiale, 2016

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Conseil National de Lutte contre le Sida/CNLS (2012), Enquête nationale de surveillance comportementale et biologique (ESCOMB) auprès des groupes à haut risque d‟infection par le VIH en Guinée.

118 Conclusion partielle

Le genre est devenu de nos jours le mot-clé des institutions de développement pour cerner les rôles, les attitudes et les valeurs que l‟on considère comme appropriés à un sexe ou à l‟autre afin de promouvoir l‟égalité entre les sexes.

En Guinée, en dépit de la ratification de nombreux instruments juridiques internationaux relatifs à l‟affirmation de l‟égalité entre l‟homme et la femme, on observe aujourd‟hui encore des disparités importantes au détriment des femmes : malgré leur porte implication dans la réalisation des activités agricoles, elles ont un faible accès aux ressources productives (terres, crédit, bétail, etc.) ; contrairement aux hommes, elles sont moins représentées dans la sphère publique et politique et aux postes de décision ; dans le domaine de l‟éducation, les taux d‟achèvement et de redoublement restent encore très défavorables aux filles ; de même, les femmes sont majoritairement analphabètes ; sur le plan sanitaire, les taux de mortalité maternelle et d‟infection au VIH/SIDA restent encore élevés….

Ces inégalités constituent à la fois des obstacles à la réalisation de l‟égalité des sexes et l‟autonomisation des femmes. Elles sont aussi à la base de la situation de pauvreté particulière dans laquelle vit une large majorité de femmes guinéennes. C‟est dans ce contexte que certaines d‟entre elles, contractent des prêts auprès des structures de microfinance pour initier, renforcer les activités génératrices de revenus ou encore pour satisfaire aux besoins de consommation.

119 DEUXIEME PARTIE : LES IMF ET DIVERSIFICATION DES ACTIVITES ECONOMIQUES DES FEMMES

Les stratégies d‟intervention des IMF se démarquent, à plusieurs égards, de celles des banques commerciales opérant en Guinée. Leur originalité résulte des réponses qu‟elles apportent aux besoins des agents économiques pauvres écartés des circuits financiers formels.

Au départ, les premières IMF apportaient des ressources financières à de petites exploitations ou microentreprises en besoin de financement et situées dans les zones rurales et/ou périurbaines. Par la suite, leurs servcies ont été étendus à la valorisation du capital humain (formation et information). La fanalité, c‟est pour aider les microentreprises à surmonter les obstacles liés au maintien et à l‟expansion de leurs activités (Doumbouya, 2008).

Pour ce faire, les IMF ont adopté un mode opératoire fondé sur une stratégie de proximité afin d‟être constamment à l'écoute des client(e)s et d‟opérer un suivi. Celle- ci met en place des mécanismes d‟implication des client(e)s à la gestion des IMF et aux grandes décisions. Cette optique oriente les actions et créée un ensemble économique interactif, relativement solidaire et productif, dans lequel les appuis institutionnels viennent dynamiser le potentiel productif sous (ou mal)-utilisé (Doumbouya, 2008).

En Haute Guinée, les IMF accordent généralement aux femmes quatre types de microcrédits : le crédit commercial, le crédit d‟investissement, le crédit agricole et le crédit social.

Le crédit commercial est destiné aux micro-entrepreneures ayant des fonds de roulement de faible montant et souhaitant augmenter leur chiffre d‟affaires pour financer le cycle d‟exploitation des activités génératrices de revenus. En général, ce sont des commerçantes (grossistes/demi grossistes et détaillantes) qui ont le plus recours à ce type de microcrédit.

Le crédit d‟investissement est une ligne de crédit orientée pour le financement des activités qui nécessitent l‟acquisition d‟équipements de production ou de transformation en faveur des agriculteurs, des artisans, des producteurs, des petites et moyennes entreprises (PME) et des petites et moyennes industries (PMI). C‟est par exemple le cas des groupements de transformatrices de karité qui utilisent le microcrédit pour acheter des moulins.

Le crédit social octroyé consiste à financer des besoins sociaux (achat de biens de consommation, organisation de cérémonies de baptême, soins de santé, mariage, financement

120 de la scolarité, voyages, équipement de la maison etc.) pour améliorer le bien-être des clientes.

Le crédit agricole est destiné au financement des cultures saisonnières (riz, mil, arachide) ou celles de contre saison (aubergine, piment, oignon, tomate, chou…). Il sert aussi à l‟achat d‟intrants agricoles (herbicide, engrais, produits phytosanitaires, pesticides, herbicides…).

L‟octroi de ces microcrédits obéit à des conditions d‟éligibilité spécifiques notamment la solvabilité et la crédibilité des clientes.

Afin de comprendre l‟apport de la microfinance, trois secteurs d‟activités ont fait l‟objet d‟étude dans le cadre de cette thèse : le commerce, l‟artisanat et l‟agriculture. Nous nous focaliserons sur des études de cas et des comptes d‟exploitations pour démontrer comment la microfinance permet aux femmes de renforcer/diversifier leurs activités. Nous étudierons également des situations qui se soldent par le surendettement.

121 CHAPITRE 4 : PERCEPTIONS DES FEMMES SUR LES IMF EN HAUTE GUINEE Introduction

Ce chapitre traite des interactions entre les femmes et les IMF. Pour appréhender cette dialectique, dans un premier temps, nous présentons les différentes structures de microfinance qui accompagnent les femmes dans l‟amélioration de leurs conditions de vie. Ensuite, la forme de collaboration entre les femmes et les IMF est mise en relief. Pour ce faire, il est important de déterminer le profil des femmes bénéficiaires, la nature de leurs besoins économiques et sociaux, de préciser les motivations qui sous-tendent leur adhésion et leur éligibilité et les barrières auxquelles elles font face.

L‟analyse des interactions mettra, par ailleurs, en lumière l‟articulation entre les pratiques financières informelles et la microfinance, notamment leur complémentarité. Nous verrons, enfin, le rôle de l‟épargne à travers les tontines dans le remboursement du microcrédit et, inversement, celui des revenus issus des activités financées par les IMF dans l‟alimentation des circuits financiers informels.

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