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La responsabilité de l’État pour la commission de l’agression, fait internationalement illicite

L’AGRESSION : FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE OU CRIME INTERNATIONAL DE L’ÉTAT ?

B. La responsabilité de l’État pour la commission de l’agression, fait internationalement illicite

Tout comportement étatique considéré comme fait internationalement illicite engage, en droit international, la responsabilité de l’État auteur du fait455. Selon les professeurs A. Pellet et P.

450 Pour les commentaires des dispositions du Traité de l’Union Africaine sur l’interdiction de l’agression, lire van STEENBERGHE (R.), « Le Pacte de non-agression et de défense commune de l’Union Africaine : entre unilatéralisme et responsabilité collective », RGDIP, 2009, n°1, pp. 125-146

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Ce qui est important car permet de toucher même les États qui ne sont pas par exemple membres de l’ONU. « L’instrument coutumier est le vecteur désigné de la norme universelle. La coutume est, en effet, supposée jaillir de

la pratique généralisée des représentants attitrés de la société internationale que sont les États ou de la conscience des impératifs de la vie collective dont ils sont les interprètes exclusifs ». SALAH (M. M.), « Interrogations sur

l’évolution du droit international pénal », art. précité, pp. 737-738, v. aussi arrêt Nicaragua, précité, p. 103 §195

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Il faut rappeler que la source de l’obligation violée n’est pas importante : elle peut être coutumière, conventionnelle ou autre. Selon l’article 12 du Projet de la CDI de 2001 « [i]l y a violation d’une obligation

internationale par un État lorsqu’un fait dudit État n’est pas conforme à ce qui est requis de lui en vertu de cette obligation, quelle que soit l’origine ou la nature de celle-ci ». V. aussi sur cette question, Ann CDI, 1979, vol. II,

partie 2, p. 98 (« Chapitre III Responsabilité des États… 2. Portée du projet »), CIJ, Projet Gabcikovo-Nagymaros, Rec. 1997, p. 54, §§ 38 et 47

453Ann CDI, 1978, vol. I, p. 236 (intervention de M. Ago), Ann CDI, 1996, vol. I, p. 74, précité

454V. pour les circonstances excluant l’illicéité dans les articles adoptés par la CDI en 2001 les articles 20 à 27 v. aussi sur cette question, PELLET (A.), « Remarques sur une révolution inachevée », art. précité, p. 14, article 21 du Projet de la CDI de 2001, v. aussi Ann CDI, 1980, vol. I, pp. 174 et s. (intervention de M. Riphagen), Ann CDI, 1978, vol. II, partie 1, p. 72 («’Force majeure’ et ‘cas fortuit’ en tant que circonstances excluant l'illicéité: pratique des

États, jurisprudence internationale et doctrine Étude établie par le Secrétariat … f) Caractère général de l'exception de force majeure »), Ann CDI, 2001, vol. II, partie 2, p. 78 (« Article 21. – Légitime défense …Commentaire »),

CORTEN (O.), Le droit contre la guerre, op. cit., p. 610

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Ann CDI, 1973, vol. II, p. 175 (« Remarques d’ordre général relatives au projet d’articles (sur la responsbailité des États)… c) Économie du projet »). La responsabilité est « l’ensemble des relations juridiques nouvelles auxquelles, dans les différentes hypothèses, un fait internationalement illicite d’un État peut donner naissance. » Ann CDI, 1971, vol. II, partie 1, p. 213 (« Le fait internationalement illicite de l'État, source de responsabilité internationale »), v. aussi Ann CDI, 1973, vol. II, p. 178, précité, DUPUY (P. M.), « Le fait générateur de la

Daillier, « [t]out ordre juridique suppose que les sujets de droit engagent leur responsabilité

lorsque leurs comportements portent atteinte aux droits et intérêts des autres sujets de droit »456. Autrement dit, la responsabilité des États est un mécanisme essentiel et nécessaire de régulation des rapports mutuels entre États. Pour certains auteurs, la responsabilité de l’État, en droit international classique, s’analyse exclusivement comme l’obligation de réparer les dommages commis à la suite d’un fait illicite457 et s’apparente, dès lors, à une responsabilité de type civil. Cette affirmation n’est pas partagée par tous, notamment par le professeur Alain Pellet, qui pense que la responsabilité internationale pour fait illicite ne se limite pas à l’obligation de réparer458 et ne saurait être assimilée aux catégories du droit interne. D’autres ont envisagé la responsabilité pour fait internationalement illicite à travers la sanction459. Mais, ce qu’il faut noter, c’est que la responsabilité internationale de l’État « n’est ni civile, ni pénale, mais sui generis, propre au droit

international »460.

Le Projet de la CDI de 2001 sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite impose trois obligations principales à l’État responsable du fait internationalement illicite :

« - le devoir de l’État responsable d’exécuter l’obligation violée (article 29);- l’obligation responsabilité », art. précité, p. 25, PELLET (A), « Remarques sur une révolution inachevée », art. précité, p. 11, D’ARGENT (P.), Les réparations de guerre, op. cit., pp. 669 et s., FORTEAU (M.), Droit de la sécurité collective,

op. cit., pp. 37 et s.

456 PELLET (A.) et DAILLIER (P.), DIP, op. cit., p. 762

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Ann CDI, 1976, vol. II, partie 2, p. 70 (« CHAPITRE III Violation d’une obligation internationale

Commentaire »), A/RES/56/83, 28 janvier 2002, Annexe, art. 1. V. aussi sur ce sujet, D’ARGENT (P.), Les réparations de guerre, op. cit., p. 449, PELLET (A.), « Remarques sur une révolution inachevée », art. précité, p. 11,

D’ARGENT (P.), « La réparation des dommages de guerre », art. précité, pp. 262 et s.

458« .... En réalité, l’État responsable n’est pas seulement tenu de réparer les conséquences dommageables de son

comportement : outre qu’il doit aussi y mettre fin et, le cas échéant, donner des garanties de non-répétition, il s’expose également à des réactions licites de la part de la ou des victimes. En ce sens, la responsabilité internationale s’apparente alors, quoique d’assez loin, à la responsabilité pénale par cet aspect punitif. » PELLET

(A.), « Remarques sur une révolution inachevée », art. précité, p. 22 . V. aussi PELLET (A.) et DAILLIER (P.), DIP,

op. cit., p. 164, PELLET (A.), « Les articles de la CDI sur la responsabilité de l’État », art. précité, p. 3

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V. Ann CDI, 1970, vol. II, p. 194 (« Chapitre premier Règles générales I. — Le fait illicite international en tant

que source de responsabilité »), Ann CDI, 1976, vol. II, partie 2, p. 70, précité. Le droit de la responsabilité

internationale a été pendant longtemps essentiellement d’ordre « coutumier ». V. art. 1er, A/RES/42/22, 18 novembre 1987, Déclaration sur le renforcement de l’efficacité du principe de non- recours à la force ; art. 1er, A/RES/56/83 du 28 janvier 2002, contenant le Projet d’articles de la CDI sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite de 2001 ; A/RES/25/2625 du 24 octobre 1970, contenant la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des NU, 1er principe ; art. 5 § 2, rés. 3314 (XXIX) sur la définition de l’agression ; D’ARGENT (P.), Les

réparations de guerre, op. cit., p. 455. Cette caractéristique a été atténuée avec le projet de la CDI sur la

responsabilité.

460 PELLET (A.), « Les articles de la CDI sur la responsabilité de l’État », art. précité, p. 11, v. aussi DUPUY (P. M.), « Le fait générateur de la responsabilité », art. précité, p. 59, les opinions de Sir Vallat et M. Thiam sur cette question in Ann CDI, 1980, vol. I, pp. 78 et 79, SPINEDI (M.), « La responsabilité de l'État pour ‘crime’: une responsabilité pénale ? », art. précité, p. 113

de mettre fin au fait internationalement illicite et ‘d’offrir des assurances et des garanties de non-répétition appropriées si les circonstances l’exigent’(article 30) ; et –‘celle de réparer intégralement le préjudice causé par le fait internationalement illicite’ (article 31) »461.

Est ajoutée à ces obligations la réparation qui comprend l’indemnisation (article 36) qui peut faire l’objet d’une évaluation financière, la restitution (article 35) et la satisfaction (article 37)462.

L’agression, fait internationalement illicite, va engager la responsabilité de l’État à qui est attribué le fait agressif en l’obligeant à la restitution des territoires annexés ou de tous les biens volés ou spoliés pendant l’agression. L’État coupable d’agression doit aussi réparer tous les dommages découlant de son acte agressif, s’engager à mettre fin à l’agression à ne pas la répéter. Ces obligations (réparation, restitution, cessation463 du fait illicite…) ont été imposées souvent à l’État agresseur. Le traité de Versailles condamne l’Allemagne à des réparations : « l’Allemagne

devra s’acquitter,… de prestations anticipées d’un montant de 20 milliards de marks-or… ». On

peut également mentionner les obligations de réparation d’indemnisation, de restitution des territoires annexés et l’obligation de s’engager à ne plus recourir à l’agression, imposées à l’Allemagne à qui est attribuée l’agression au lendemain de la seconde guerre mondiale464. Ces mesures, bien que portant encore, comme l’a noté P. D’Argent, « pour partie l’empreinte d’une

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PELLET (A.), « Les articles de la CDI sur la responsabilité de l’État », art. précité, p. 7, DUPUY (P. M.), « Le fait générateur de la responsabilité », art. précité, p. 92. V. aussi sur ce sujet, D’ARGENT (P.), Les réparations de

guerre, op. cit., pp. 662 et s., FORTEAU (M.), Le droit de la sécurité collective, op. cit., pp. 41 et 42

462 « Le principe essentiel, qui découle de la notion même d’acte illicite et qui semble se dégager de la pratique

internationale, notamment de la jurisprudence des tribunaux arbitraux, est que la réparation doit, autant que possible, effacer toutes les conséquences de l’acte illicite et rétablir l’état qui aurait vraisemblablement existé si ledit acte n’avait pas été commis. Restitution en nature ou, si elle n’est pas possible, paiement d’une somme correspondant à la valeur qu’aurait la restitution en nature. » C’est le principe de la restitution in integrum. V. les

articles 31§1, 39 du projet de la CDI de 2001 in Ann CDI, 2001, pp. 242-246, affaire Usine de Chorzów, arrêt,

précité, pp. 21 et 47, Ann CDI, 1980, vol. I, p. 89 (intervention de M. Riphagen), Ann CDI, 1993, vol. II, partie 2, p.

60 (« Article 6. — Cessation du comportement illicite… Commentaire »), CRAWFORD (J.), BODEAU (P.), PEEL (J.), « La seconde lecture du projet d’articles sur la responsabilité des États », art. précité, p. 923, Affaire Réclamations britanniques pour dommages survenus dans la zone espagnole du Maroc, 1er mai 1925, RSA, II, p. 641, Sentence arbitrale du 14 septembre 1872 dans l’affaire dite de l’Alabama (États-Unis c. RU), Affaire LaGrand (Allemagne c. États-Unis d’Amérique), fond, arrêt CIJ, 2001, § 48, Nicaragua, précité, p. 149, §§ 13-14 ; Affaire relative au mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo c. Belgique), fond, arrêt, CIJ, Rec. 2002, p. 28, § 76, ALLAND (D.), DIP, op. cit., p. 419, COTTEREAU (G.), « De la responsabilité de l’Iraq selon la résolution 687 », art. précité, pp. 112 et s.

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Comme l’a noté Arangio-Riuz, la cessation « ne constitue pas une forme de réparation, mais une obligation

découlant de la conjonction d’un comportement illicite en cours et de l’action normative de la règle primaire à laquelle le comportement illicite contrevient. » Ann CDI, 1993, vol. II, partie 2, p. 60

464 V. sur ce sujet, DINSTEIN (Y.), War, Aggression and Self-Defence, op. cit., pp. 107, 109 à 110, COTTEREAU (G.), « De la responsabilité de l’Iraq selon la résolution 687 », art. précité, pp. 112 et s.

certaine logique de domination du vainqueur »465et prises alors que la question de l’illicéité ou l’illégalité de l’agression n’avait pas été de façon véritable établie, ont permis d’engager la responsabilité de l’Allemagne.

Cependant, l’agression constitue non seulement un fait internationalement illicite qui engage la responsabilité de l’État selon les modalités indiquées ci-dessus, mais cette responsabilité peut aussi être engagée sur la base du Chapitre VII de la Charte selon des moyens retenus par le Conseil de sécurité à qui revient le droit, en vertu de l’article 39 de la Charte, de constater et de prendre les mesures nécessaires en cas d’agression. Il faut ainsi distinguer la responsabilité, qui peut découler de l’agression en tant que fait internationalement illicite en vertu du Projet de la CDI sur la responsabilité des États de 2001 (ici la responsabilité est envisagée comme une relation juridique466), des responsabilités pour actes d’agression, actes prohibés par la Charte, et, pour lesquels, le Conseil, sur la base du Chapitre VII, peut engager la responsabilité des États467. Pour ces raisons, certains sont parvenus à la conclusion que l’agression avait « un

statut particulier »468 ou emportait quant au domaine de la responsabilité, un régime dérogatoire au droit commun de la responsabilité internationale469. Ce qu’il faut surtout dire, c’est que l’agression fait naître toutes les conséquences juridiques liées à la responsabilité en tant que fait internationalement illicite, mais également « et de surcroît tous les droits et obligations prévus

dans la Charte des Nations Unies ou en découlant »470. On comprend dès lors qu’à une époque, la CDI, dans ses travaux sur la responsabilité des États, ait voulu faire un article distinct sur l’agression471. Ceci confirme bien l’idée selon laquelle l’agression se trouve au milieu de deux

465 D’ARGENT (P.), Les réparations de guerre en droit international public, op. cit., p. 435

466FORTEAU (M.), Le droit de la sécurité collective, op. cit., p. 41

467

V. ASCENSIO (H.), L’autorité de chose décidée en droit, op. cit., p. 422, FORTEAU (M.), Le droit de la sécurité

collective, op. cit., pp. 453 et s., Ibid., pp. 587 et s., v. aussi Ann CDI, 1996, vol. I, p. 25 (Responsabilité des États

Huitième rapport du Rapporteur spécial M. Arangio-Riuz)

468Ann CDI, 1984, vol. I, p. 321 (intervention de M. Balanda)

« En vertu des pouvoirs et des responsabilités conférés au Conseil de sécurité dans le cadre du Chapitre VII de la

Charte des Nations Unies, l'agression relève… d'une catégorie particulière. » Ann CDI, 1994, vol. I, p. 100, précité

469D’ARGENT (P.), Les réparations de guerre en droit international public, op. cit., p. 440 V. aussi sur ce sujet, CORTEN (O.) et DUBUISSON (F.), « Opération ‘ liberté immuable’», art. précité, p. 68

470Ann CDI, 1984, vol. I, p. 266 (« Article 16 » intervention de M. Riphagen). Il s’agit par exemple de l’obligation de

ne pas prêter assistance à l’agresseur, v. article 2 (5) de la Charte des Nations Unies.

471

« Le Rapporteur spécial incline à considérer que les droits et obligations en droit international relèvent de trois

régimes concentriques : tout d'abord, le régime de l'agression et de la légitime défense, qui forme le cercle extérieur; ensuite, les régimes relatifs aux autres faits internationalement illicites et aux réactions qu'ils engendrent ; enfin, un régime de prévention et de compensation relatif aux activités non interdites par le droit international. » Ann CDI,

types de droit : le droit de la responsabilité internationale et le droit de la sécurité collective472. Il est important de remarquer que, très souvent, les mesures adoptées par le Conseil peuvent se rapprocher des modalités de responsabilité envisagées dans le cadre du droit de la responsabilité473, ce qui montre bien, comme le relève le professeur M. Forteau, une « proximité

de fait »474 ou une influence mutuelle des deux types de règles475. Par exemple, en ce qui concerne l’agression de l’Irak par le Koweït (même s’il ne le nomme pas ainsi), le Conseil de sécurité condamne l’Irak dans sa résolution 660 du 2 août 1990, le déclare responsable et lui demande de se retirer immédiatement du Koweït (obligation de mettre fin au fait internationalement illicite), de restituer les biens du Koweït saisis476, d’indemniser et de réparer intégralement les préjudices causés au Koweït et aux koweïtiens, aux personnes et aux États étrangers477.

Il ressort en définitive du droit et de la pratique, que toute agression emporte pour l’auteur les obligations de cesser l’agression, de réparer les conséquences dommageables tant à l’égard de l’État agressé qu’à l’égard des personnes physiques et autres entités qui ont été victimes de l’agression. Cependant, en vertu du droit de la Charte ou du droit de la sécurité collective, d’autres obligations constituant davantage des sanctions478 peuvent s’y adjoindre. On peut souligner, par exemple, l’obligation de désarmer479. Il ne semble pas faux de dire en reprenant les

472

Pour M. Riphagen, « [l]e régime de la responsabilité des États en cas d'agression est très spécial, et étroitement

lié à l'existence de l'ONU et de sa charte. » Ann CDI, 1981, vol. I, p. 198 (« Responsabilité des États… Contenu, formes et degrés de la responsabilité internationale …Projets d’articles présentés par le Rapporteur Spécial … Articles 4 et 5 »), v. aussi Ann CDI, 1994, vol. I, p. 100 (intervention de M. Crawford). Cette thèse n’est cependant

pas partagée par tous. V. l’opinion de M. Barzegov in Ann CDI, 1990, vol. I, p. 17

Sur plus de précision sur les deux notions « le droit de la responsabilité internationale et le droit de la sécurité

collective », v. FORTEAU (M.), Le droit de la sécurité collective, op. cit., pp. 36 et s., v. aussi Ibid., pp. 367 et s.

473 Le professeur Forteau qualifie cette situation comme étant un « unicum », Ibid., p. 596

474 Ibid.., p. 45, v. aussi Ibid, pp. 372 et s., les cas où l’attitude du Conseil peut être contraire au droit de la responsabilité. Ibid., pp. 596 et s. V. aussi Ann CDI, 1996, vol. II, partie 1, p. 7 (« C. – Aspects institutionnels du

régime juridique des ‘crimes’ … 1. Objections de lege lata »)

475 FORTEAU (M.), Le droit de la sécurité collective, op. cit., pp. 179 et s.

476 V. rés. 687 du CS du 3 avril 1991, 674 du 29 octobre 1990, Doc. du président du CS, S/22361 du 19 mars 1991. V. aussi sur ce sujet, DINSTEIN (Y.), War, Aggression and Self-Defence, op. cit., pp. 110 et 111

477

Une commission d’indemnisation sera créée par le Conseil de sécurité dans la rés. 692 du 20 mai 1991 (UNCC : United Nations Compensation Commission). V. sur la mise en œuvre de la responsabilité de l’Irak par le Conseil de sécurité et sur une critique de la mission et des actions de cette commission, FORTEAU (M.), Droit de la sécurité

collective, op. cit., pp. 597 et s., COTTEREAU (G.), « De la responsabilité de l’Iraq selon la résolution 687 », art.

précité, pp. 108-112, Ann CDI, 1995, vol. II, partie 1, pp. 12 et 13 (« B. – Les conséquences spéciales ou

supplémentaires des crimes internationaux des États… 3. Conséquences instrumentales »)

478 On « … devra distinguer entre les faits qui ne comportent qu'une obligation de réparer et ceux qui ont des

conséquences plus graves et entraînent, par exemple, des sanctions, comme les actes d'agression… ». Ann CDI,

1974, vol. I, p. 6, précité

termes utilisés par M. Riphagen que le régime de responsabilité, en ce qui concerne l’agression, est spécial480. Ce constat semble partagé par le professeur Forteau qui ajoute qu’il est difficile de réaliser une association parfaite entre le corps de règles du droit de la sécurité collective et celui du droit de la responsabilité, ceci en raison des exigences contradictoires qui s’imposent aux États membres du Conseil de sécurité lorsqu’ils connaissent des situations telles l’agression481.

La conception de l’agression comme fait internationalement illicite de l’État n’a pas été longtemps été mise en avant en droit international. En effet, eu égard à la gravité de cet acte et aux importantes conséquences que cet acte a ou peut avoir sur la scène internationale et de sa capacité à saper « les fondements du droit international »482, l’agression a été assez vite classée dans la catégorie de crimes et même de « crime des crimes ». L’agression a, de ce fait, été envisagée par la CDI et par de nombreuses générations d’auteurs comme le crime international de l’État.

§II. L’agression : crime international de l’État

Concevoir l’agression comme crime international de l’État483 comporte l’idée que le ou les actes d’agression sont un ou des actes commis par un ou plusieurs États et que ce ou ces actes d’agression « menacent les intérêts fondamentaux » de la communauté internationale. Il est intéressant de présenter les origines de cette notion et d’analyser son contenu (A) avant de voir ensuite qu’une telle conception n’a pas eu de véritables conséquences (B).

Rappelons aussi que des obligations pèsent aussi sur les États tiers : l’obligation par exemple de ne pas reconnaître. Après l’annexion du Koweït, le CS a invité les États à ne pas reconnaître les effets juridiques de cette annexion. V. les rés. du CS : 661 du 6 août 1990, 662 du 9 août 1990 et 670 du 25 septembre 1990. V. aussi Ann CDI, 1993, vol. II, partie 1, p. 57 (« B.- Les problèmes d'en éventuel ‘régime spécial’ de responsabilité pour les crimes … 6. Le

problème de l’ ‘obligation de réagir’ des États lésés »)

480 Ann CDI, 1981, vol. I, p. 198, précité. V. également sur ce sujet, FORTEAU (M.), Droit de la sécurité collective,

op. cit., pp. 616 et s. et v. aussi les conclusions que le professeur P-M. Dupuy tire de la responsabilité de l’Irak pour

agression in « Après la guerre du Golfe », RGDIP, 1991, n°3, pp. 634 et s.

481

FORTEAU (M.), Droit de la sécurité collective, op. cit., p. 630

482 Ann CDI, 1971, vol. I, p. 392 (intervention de M. El-Erian in ‘Examen d'ensemble du droit international’ (A/CN.4/245).)

483 Sur la notion de crime international, lire GOUNELLE (M.), « Quelques remarques sur la notion de ‘crime international’ et sur l’évolution de la responsabilité internationale de l’État », Mél. REUTER, précité, pp. 315-326