• Aucun résultat trouvé

Endogamie professionnelle : alliance avec les collègues

Rappelons que le Concile de Trente, malgré le principe du libre choix, a imposé (sous la pression des souverains) que le consentement des parents sur les enfants mineurs (moins de 25 ans), soit une condition indispensable à la validité des mariages. Dans le mariage réside donc une convention officieuse entre deux familles. Thomas Calvo illustre, pour Guadalajara, ce fait par un exemple presque caricatural : José de Padilla Dávila formule une promesse de mariage devant notaire au nom de son neveu de 11 ans…189 Quel constat pour le milieu des letrados, illustré par les conseillers de Castille étudiés par J. Fayard ?

« Il existe une tendance à l’endogamie professionnelle, puisque 20% des premières alliances et la moitié des secondes se font dans le milieu de la haute administration. Cette tendance s’explique par le souci d’utiliser le mariage comme moyen d’ascension au sein de la carrière administrative et de bénéficier de grâces royales. Mais plus qu’une tendance à l’endogamie professionnelle, ce qu’il convient de souligner, c’est la tendance à l’endogamie par catégorie nobiliaire. Le monde de l’administration ne forme pas un milieu social homogène. (…) La tendance à l’endogamie n’a rien qui puisse surprendre dans cette société méditerranéenne qui, dans son ensemble, depuis la fin du XVIe siècle, refuse la mobilité, après la généralisation des statuts de pureté de sang. »190

Ainsi, dans notre milieu des infra-letrados, la famille originelle a logiquement orienté ses alliances vers d’autres membres du Conseil des Indes. Premièrement, le mariage de

187 DEDIEU, cours cité 188 DEDIEU, op.cit, p. 52

189 CALVO, op.cit., 1992 p. 242. Voir aussi, VILLAFUERTE GARCÍA María Lourdes, « Padres e hijos.

Voluntades en conflicto (México, siglo XVII) », in Familia y poder en Nueva España, INAH, México D.F., 1991, p. 133-155

doña Angela Fernández de Madrigal avec Juan Díez de la Calle, commis du Conseil des Indes. Deuxièmement, le mariage de Juan II Díez de la Calle avec la fille d’un commis du Secrétariat du Pérou, Juan de Cebericha. Troisièmement, le mariage d’Ana Maria Fernández de Madrigal avec Don Alonso Muñiz, fils du comptable du Conseil des Indes. Enfin, elle a su se refermer avec le mariage de Francisco II Fernández de Madrigal avec sa nièce doña Catalina.

Reproduction socioprofessionnelle et mainmise sur les secrétariats du Conseil des Indes

La reproduction professionnelle est forte dans les secrétariats du Conseil de Indes y compris dans ces offices non soumis à la vénalité comme souvent en Castille. Or par le gendre ou le fils, on constate, dans le parcours familial des Fernández de Madrigal, une véritable succession dans les mêmes charges. Ainsi, Juan Fernández de la Madrigal plafonne au rang de premier commis avec le titre honorifique de secrétaire du roi ; son successeur direct est son gendre Juan Díez de la Calle qui arrive au même niveau en une vingtaine d’années ; enfin, son fils cadet, Francisco, sans formation supplémentaire, passa les échelons plus rapidement et termina conseiller des Indes. Il est clair que c’est l’accumulation des années de service du père et du fils qui permirent à ce dernier d’atteindre les sommets de l’État. Il aura fallu une génération pour rompre la barrière qui sépare le monde des commis de celui des lettrés191. Le rôle de la famille s’explique par

divers facteurs :

• Le fonctionnement même de l’institution : l’absence de lieu de formation professionnelle pour les commis royaux autre part que dans les bureaux de l’administration elle-même conduisait à un apprentissage ad hoc dans l’environnement familial.

• La stratégie familiale, appuyée sur des activités qui facilitent l’accumulation d’un capital symbolique, fondées sur la transmission d’un savoir-faire et de réseaux de relations plus que sur la transmission de biens matériels192. L’héritage immatériel joue en effet un rôle crucial dans l’(auto-)valorisation que l’on retrouve dans les relations de mérites ou dans les suppliques adressées au roi193.

191 CALVO, op.cit., 1992, p. 276

192 Conclusions similaires pour les familles marchandes. Cf. SCHAPIRA, op. cit.

193 LEVI Giovanni, L’éredita immateriale. Carriera di un esorcista nel Piamente del seicento, Turin, Einaudi,

• En somme, « la famille constitue un champ privilégié d’action sociale et un recours préférentiel pour la mise en place d’institutions non familiales. »194 Autrement dit, la famille joue un rôle dans le recrutement dans l’administration, dans l’octroi d’habits, dans la création de réseaux d’informateurs. Elle sert le gouvernement.

La succession aux mêmes charges et les alliances matrimoniales permettent à notre famille de cumuler simultanément quatre membres vers 1650 dans la même institution. A cette date, les postes de premier commis des deux secrétariats du Conseil des Indes sont aux mains de Juan Díez de la Calle et de son beau frère, Francisco Fernández de Madrigal. Dans les années 1680, il reste encore quatre membres de la famille au Conseil des Indes. Cependant, au XVIIIe siècle, aucune trace ne subsiste.

Tableau 1 : Chronologie de la présence des membres de la famille Fernández-Díez dans les deux secrétariats du Conseil des Indes

1620 1630 1640 1650 1660 1670 1680 Juan Fernández de Madrigal <1575 1632 O.E./ O.S./O.M Juan Díez de la

Calle 1624 1632 O.E. O.S. 1647 O.M. 1662 Juan de Cebericha 1636 1652 O.S. Francisco Fernández de Madrigal 1640 1649 O.E. O.S. 1655 O.M. 1674 1682 S. C. 1685 Juan II Díez de la Calle 1652 1706 O.T./O.S./O.M. Jeronimo Fernández de Madrigal 1658 1674 O.T. 1679 O.S. 1706 O.M Luis Francisco de Madrigal 1676 1679 O.E.. 1691 O.T. Juan Ambrosio Díez de la Calle y Madrigal 1 7 0 2 Oficial Francisco Antonio Fernández de Madrigal 1 7 2 0

Secrétariat du Pérou Secrétariat de la Nouvelle Espagne

O.E. : Oficial entretenido ; O.T. : Oficial tercero ; O.S.: Oficial segundo ; O.M. : Oficial Mayor ; S. : Secrétaire ; C : Conseiller

Outline

Documents relatifs