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Bernardo de Aparicio apparaît comme témoin dans plusieurs documents à Madrid au XVIIe siècle. Il est vecino de la capitale, notaire du roi (escribano del rey) et représentant à la cour (agente de negocios) auprès du Conseil des Indes. Il défend les intérêts de ses clients indianos comme le curé de la cathédrale de Porto Rico, Cristobal Bautista López100.

Ainsi, un document officiel (sur papier timbré), écrit de sa main, témoigne de la mort de Juan Díez de la Calle :

« Moi Bernardo de Aparicio notaire du Roi notre Seigneur et vecino de cette ville de Madrid je certifie et donne foi que le 15 juin de l’an 1662, je vis mort le Sieur Juan Díez de la Calle secrétaire de Sa Majesté et premier commis du Secrétariat du Conseil Royal des Indes de la partie de la Nouvelle Espagne, et que je me suis trouvé présent à son enterrement au couvent de Notre Dame des Grâces de cette cour et je le certifie par la présente, à la demande de don Juan Diez de la Calle son

98 MARTÍNEZ MILLAN José & VISCEGLIA Maria Antonia (dirs.), La monarquía de Felipe III : la Casa del Rey,

Madrid, Mapfre- Instituto de Cultura, 2008, vol. 1, p. 134-135 « La corte representó, por excelencia, el lugar

en que se hacía política, en un momento en que el ejercicio de la política no estaba institucionalizado en las funciones, sino, más bien, en las personas que identificaban las funciones (…). Pero también, la corte era el lugar privilegiado en que se producía y se transmitía cultura, en que se tendía a concentrar el máximo de conocimientos en todos los campos (…). Ahora bien, tanto la política como la cultura se transmitían a través de las relaciones personales, no institucionales (redes clientares, relaciones de patronazgo, etc.). »

99 B.N.M., Ms 1147, f. 20

100 Ibid. et MEDRANO HERRERO Pío, “Diego de Torres y Vargas. Los puntos sobre las íes”, FOCUS, n°IV-1,

fils, à Madrid, le 12 avril 1663 = je le signe témoin de vérité. Bernardo de Aparicio. »101

Voici un personnage dans l’orbite madrilène de notre officier. Nous disposons d’une de ses lettres rédigée à Madrid et destinée à un inconnu à Santo Domingo : une première partie assez longue date du 30 octobre 1656, suit un ajout du 15 décembre 1656102. Elle a vraisemblablement été interceptée par la marine anglaise car elle se trouve dans une collection de documents appartenant à John Thurloe (1616-1668). Ce dernier était secré- taire du Conseil d’État anglais, véritable directeur des services secrets de Cromwell qui, en 1656, fut nommé chef du post office et devint maître dans l’interception de courriers.

Quel est le contenu de cette missive ? Après avoir fait état de la situation en Jamaïque (et de la menace anglaise), l’expéditeur effectue une sorte de compte-rendu de l’évolution des places vacantes et de différentes affaires concernant une longue série de personnages dont Juan Díez de la Calle. La liste des noms cités est impressionnante et nous n’avons pas pu tous les identifier :

Gonzalo de Herrera (alcalde de Carthagène), Gabriel de Castellanos (capitaine du navire la Nuestra Señora de Aránzazu, Jesús, María y José enregistré à Santo Domingo en 1655103), don Geronimo de Aliaga (échevin regidor de Santo Domingo), Pedro de la Rosa (?), don Joseph Martinez (un officier du secrétariat de Nouvelle Espagne s’appelle José Martinez de Grimaldo), Juan Baptista de Olivares (chantre de la cathédrale de Santo Domingo), Damian del Castillo (premier huissier

alguazil du Saint Office de Santo Domingo, échevin regidor de Santo Domingo et

maître de camp), Cristobal de Santiago (aide du sergent-major du préside de Santo Domingo104), don Luis Garavita (encomendero au Venezuela), Gabriel de Rojas

Valle Figueroa (capitaine du préside de Santo Domingo105). Diego Franco de Quero106 (chevalier de Santiago, gouverneur de Santo Domingo), don Alonso de

101 A.G.I., Contaduria, 205, R.2, L.5 « Yo bernardo de Aparicio escribano del Rey nuestro Señor y vecino

desta villa de Madrid certifico y doy fee que en quince de Junio del año passado de mill y seiscientos y sesenta y dos vi muerto al Señor Juan Díez de la Calle secretario que fue de su Magestad y official mayor de la Secretaria del Real Consejo de las Indias de la parte de Nueva España y me halle presente a su entierro en el combento de nuestra señora de las mercedes desta corte y para que dello conste de pedimiento de Don Juan Díez de la Calle su hixo. Doy el presente en Madrid a Doçe dias del mes de Abril de mill y seiscientos y sesenta y tres años = lo signe testimonio de verdad. Bernardo de Aparicio »

102 BIRCH Thomas (éd.), A collection of the State Papers of John Thurloe, volume 5: May 1656 - January

1657, London, 1742, p. 684-697. Disponible sur http://www.british-history.ac.uk/report.aspx?compid=55566

(consulté le 6 avril 2009)

103 A.G.I., Contratación, 2454

104 A.G.I., Indif. Gen., 2077, N. 299, Licence de passage aux Indes de 1638 105 A.G.I., Indif. Gen., 114, N. 51, Relation de mérites du 27 avril 1652 106 A.G.I., Indif. Gen., 117, N. 21, Relation de mérites du 25/01/1658

Ulloa107 (chanoine de la cathédrale de Santo Domingo), capitaine don Balthasar

Calderón (capitaine d’artillerie du Préside de Santo Domingo108), Simon Calderón (« hermano de v.m. »), frère Pedro de San Joseph (procureur général de la province de Santa Cruz de l’île de l’Española), Francisco de Valdes (trésorier de l’église), Juan Flaneel (à Séville), don Gonçalo de Castro y Aguilar (prêtre, vecino de Santo Domingo109), doña Micaela de Spinosa (à Madrid), Manuel Gonçales (chanoine du chapitre de Santo Domingo).

En somme, une bonne partie de l’élite espagnole de Santo Domingo est ici nommée et fait l’objet de l’attention de Bernardo de Aparicio. Quels liens cet agent entretient-il avec le destinataire inconnu de la lettre ? Bernardo de Aparicio écrit :

« J’estime grandement votre attention et votre sollicitude en ce qui concerne mes affaires. Je vous prie de continuer à donner des nouvelles à tous mes amis ainsi que des lettres. »110

Tout d’abord, apparaît une série de comptes-rendus sur l’avancement de demande de promotion de divers personnages ecclésiastiques et militaires de Santo Domingo. Par exemple, à propos du chantre Juan Bautista Olivares, clerc de la cathédrale, Bernardo Aparicio écrit :

« J’ai reçu le pli du seigneur chantre Juan Baaptista (sic) de Olivares avec le témoignage de vacance de l’archidiaconat qui reste disponible ainsi que le rapport du seigneur président en sa faveur ; je prie Notre Seigneur afin d’obtenir cette prébende pour ledit seigneur. Vous lui direz que les 10 réaux d’argent qu’il dit avoir remis à Carthagène n’ont pas été transmis à don Gonçalo de Herrera (...) et qu’il vous les donne et que lorsque cette affaire sera conclue il m’offre 200 pesos (...). »111

Dans la seconde partie de la lettre, datée du 15 décembre, il affirme que « l’archidiaconat de cette église a été donné au Seigneur don Juan Bauptista de Olivares (...). » Ce dernier ne

107 A.G.I., Contratación, 5431, N. 1, R. 14, Licence de passager aux Indes de 1654 108 A.G.I., Indif. Gen., 116, N. 17, Relation de mérites du 15/03/1655

109 A.G.I, Indif. Gen., 115, N. 4, Relation de mérites de 1652

110 BIRCH, op. cit., « Mucho estimo el cuidado y solicitud de v[uestra] m[erced] en orden a mis particulares

y las noticias que da de haber ablado a todos los amigos y dado mis cartas y le suplico lo continue (...) »

111 Ibid., « Recivi el pliego del señor chantre Juan Baaptista (sic) de Olivares y testimonio de la bacante del

arzedianato lo qual queda presentado yel informe del señor pressidente en su abono y espero en nuestro señor conseguir esta preuda para dicho señor y le dira vm. que 10 Rs de platta que dice hauer remitido, a

Cartaxega no se an entregado a don Gonçalo de Herrera (…) y que selo entregue a v. m. y para quando se consiga este negocio me ofrece 200 pessos (…). »

semble pas être très à cheval sur la légalité puisqu’il est gravement impliqué dans une affaire de contrebande de tissus en 1659-1660112.

En 1652, le docteur Gonzalo de Castro y Aguilar envoie une relation de mérites accompagnée de témoignages afin d’obtenir une prébende de la cathédrale de Santo Domingo113. Bernardo de Aparicio est chargé d’appuyer cette demande : « il est prétendant à une prébende et il m’a délégué son pouvoir. Je désire le servir et je crois pouvoir obtenir quelques résultats. »114 En 1683, on retrouve le docteur Gonzalo chantre de la cathé- drale115.

Il est également question, à plusieurs reprises, de la transmission des lettres et de sommes d’argent par des intermédiaires. Difficile de démêler toutes les affaires évoquées : « Je suis surpris que Geronimo de Aliaga n’ait rien donné à Pedro de la Rosa »116. Bernardo demande à son correspondant de relancer des paiements117.

En somme, cette lettre rend compte du métier d’agente de negocio, c’est-à-dire représentant, ou fondé de pouvoir voire démarcheur, pour d’autres personnes à la cour, à Madrid. Le mot agente n’apparaît pas dans le Covarrubias, pour negocio : « l’occupation à des choses particulières qui oblige l’homme à y mettre un soin particulier. »118 Ces agentes de negocios sont des figures des lieux de pouvoir de la Monarchie. Ils arpentent les

couloirs des institutions royales – comme l’audience de Mexico étudiée par Victor Gayol – afin d’obtenir pour leurs clients charges, faveurs et autres victoires judiciaires119. Contrairement aux procuradores qui sont des personnages importants représentant une communauté (chapitre, ville, etc.), les agentes de negocios sont des individus plus douteux. Bernardo de Aparicio est un représentant légal car il est notaire et fondé de pouvoir. Toutefois, les évocations d’échanges de sommes d’argent permettent de douter de sa totale intégrité. En effet, parmi les méthodes employées pour favoriser la nomination d’un client, un homme comme Juan Díez de la Calle était précieux : celui-ci voit passer dans le secrétariat les annonces de vacance de postes et les cédules de nomination. Dans sa lettre

112 A.G.I., Santo-Domingo, 58, R. 6, N. 78

113 A.G.I., Indif. Gen., 115, N. 4, relation de mérite de 1652

114 BIRCH, op. cit., « es predentiente de preuenda y me a remetido su poder y deseo servirle y creo se a de

acomodar en alguna resulta. »

115 A.G.I., Indif. Gen., 130, N. 17

116 BIRCH, op. cit., « me espanto que Geronimo de Aliaga no aya dado nada a Pedro de la Rosa »

117 Ibid., « Vuelvo a suplicar a v[uestra] m[erced] haga recuerdos a los racioneros madera y escoto sobre mi

agencia y lo mismo a los demas que v.m. sabe les he servido aviseme de ello » ; « De todos los amigos que residen en esa çiudad y que di a v[uestra] m[erced] cartas en la ocasion que se sabe, hasta oy no an llegado a mis manos repuestas (...) »

118 Cov., « la ocupación de cosa particular, que obliga al hombre a poner en ella solicitud. »

119 GAYOL Victor, Laberintos de justicia. Procuradores, escribanos y oficiales de la Real Audiencia de

Bernardo écrit : « Le sieur Juan Díez de la Calle et son fils demeurent en bonne santé et je leur ai donné votre message, ils n’ont pas reçu de lettre de Vous »120.

Juan Díez de la Calle, à sa mesure, fait l’objet de sollicitations d’agents comme Bernardo de Aparicio. C’est la manifestation du fonctionnement de la Monarchie hispanique mais également d’autres lieux de pouvoir, comme Rome à la même époque121 :

« En l’absence d’un fonctionnement purement administratif, les solliciteurs devaient recourir, d’après ce que nous avons vu, à de nombreuses tactiques : en s’insérant dans des réseaux clientélistes de ministres, en soudoyant purement et simplement, ou encore en tirant parti de la sympathie d’un fonctionnaire. Il s’agissait des tactiques variables dans un espace instable. »122

Il convient maintenant de poursuivre notre analyse du « monde de Díez de la Calle » de l’autre côté de l’Atlantique. Qui sont les personnages avec lesquels il a des contacts au Nouveau Monde ? Quelle est la nature de ces relations ?

120 « El señor Juan Diez de la Calle y su hijo quedan buenos y les he dado sus recaudos de V.M. no han

tenido cartas de V.M. (...) »

121 DANDELET Thomas J., La Roma española (1500-1700), Barcelona, Crítica, 2002, p. 184

122 MAZÍN, op.cit., p. 35 « Ante la falta de un funcionamiento puramente administrativo, los suplicantes

debían echar mano, según vimos, de numerosas tácticas: desde insertarse en las redes clientelares de los ministros, pasando por el simple soborno, hasta aprovechar de la simpatía de un funcionario. Eran tácticas variables en un espacio muy inestable »

CHAPITRE III

Le monde socioprofessionnel de Juan Díez de la Calle :

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