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Le mariage des filles

Juan Fernández de Madrigal eut deux filles qu’il maria. D’une part, Doña Ana (1610- 1632) fut mariée à Don Gerónimo de Léón y Ocampo y Sandoval (1612-1637), originaire de Guadalupe en Estrémadure. La dot s’élève nous l’avons dit à 4 500 ducats. De Gerónimo, nous savons qu’il est le fils de Don Gaspar León de Livera, familier et notaire du Saint-Office de Tolède. Les familiers sont des bénévoles payés à la tâche, issus des élites locales ; ils jouissent de privilèges : ils sont dispensés de certaines taxes et ils ne relèvent que de la justice inquisitoriale167. Bien qu’originaire de Guadalupe, la famille s’installe à Oropesa (Castille- La Manche), où don Gerónimo est alcalde de la Hermandad

de hijos de algo en 1628, 1631, 1634 et 1637. Il apparaît également dans les padrones168.

La ville, située entre Castille et Estrémadure, maintient des liens étroits avec le continent

164 LABORDE Alexandre (de), Itinéraire descriptif de l'Espagne, et tableau élémentaire des différentes

branches de l'administration et de l'industrie de ce royaume, tome V, Paris, Nicolle, 1809, p. 56

165 A.H.N., O.M., Caballeros de Santiago, Exp. 2972

166 A.H.P., T. 11053, f. 568, Testamento otorgado por José Fernández de Madrigal, caballero de la Orden de

Santiago, secretario del rey y oficial mayor de la Secretaría de la Junta de Obras y Bosques, en 12 de diciembre de 1694.

167 CASSAN (dir.), op. cit., p. 152 ; PÉREZ, op.cit., p. 366 168 A.H.N.,O.M., Caballeros de Santiago, Exp. 2974, f. 76-77

américain : plusieurs conquistadores sont originaires d’Oropesa et Francisco Toledo, comte d’Oropesa, occupa la fonction de vice-roi du Pérou de 1569 à 1581. Ainsi, la chapelle San Bernardo, de style baroque, fut construite pour l’enterrement de Francisco de Toledo en 1605 ; le collège jésuite fut fondé par Francisco de Toledo.

D’autre part, Doña Angela (1615-1649) épousa Juan Díez de la Calle, commis du secrétariat de Nouvelle Espagne du Conseil des Indes. Cela nous le savons déjà.

Les petits-enfants et arrière petits enfants

La lignée de Juan Fernández de Madrigal compte dix-huit petits-enfants nés entre 1626 et 1687. Les premiers sont les trois garçons du licenciado Lucas : du premier, Francisco III, nous savons qu’il était licenciado et qu’il est décédé prématurément en 1655 ; il apparaît dans les sources comme avocat dans les Conseils royaux et auprès du Saint Office169. Le second fils, Gabriel (1626-1710) est échevin (regidor) de Madrid avec le titre de secrétaire de Sa Majesté, il obtient très tôt l’habit de chevalier de Santiago (1663)170, avant même son oncle Francisco Fernández de Madrigal. Rappelons, l’impor- tance des regidores qui concentre au sein de leur conseil un pourvoir considérable à l’échelle municipale171. Dans le contexte de contexte politique de la cour, cette voie ne permet pas d’évoluer vers des postes de l’administration centrale172.

Le troisième, Gerónimo, né en 1635, fait sa carrière au secrétariat du Pérou toujours en gravissant les échelons un à un173, il obtient également l’habit de Santiago en 1666174. Il marque la présence d’une troisième génération, avec Juan Ambrosio Díez de la Calle y Madrigal, des Fernández de Madrigal au Conseil des Indes. Il est marié à Catalina de Ocampo dont il a deux filles, doña Maria Gregoria et doña Tomasa. Il meurt en 1709 et est

169 A.H.P., T. 6772, f. 84-85, Testamento otorgado por Francisco Fernández de Madrigal, en 2 de marzo de

1656.

170 A.H.N., O.M.-Expedientillos, N. 3902, 1663, Expediente para la concesión del título de caballero de la

orden de Santiago a Gabriel Fernández de Madrigal.

171 « Patronage, par l’attribution des emplois municipaux (gardes champêtres, agents et autres), ainsi que par

le choix des fondations religieuses qui gèrent la municipalité ; possibilité d’enrichissement, par la manipulation des fonds municipaux (…) ; pouvoir de commandement. » in DEDIEU, op.cit., p. 98

172 « por su misma estructura el ser regidor de Madrid era ya un término de llegada para las ambiciones

personales y políticas » in BRAVO LOZANO, art. cit., p. 235

173 A.G.I., Indif. Gen., 438, L. 39, f. 343, 29/09/1658, Titulo de oficial entretenido de la Sec. del Perú ;

A.G.I., Indif. Gen., 439, L. 21, f. 265, 05/11/1662, Titulo de oficial tercero de la Sec. del Perú ; A.G.I., Indif. Gen., 441, L. 27, f. 33, 04/02/1674, Titulo de oficial segundo de la Sec. del Perú ; A.G.I., Contaduría 206, N. 2, L. 8, 1679, oficial mayor

174 A.H.N., O.M.- Expedientillos, N. 4107, 1666, Expediente para la concesión del título de caballero de la

enterré dans l’oratoire de San Felipe Neri, sur la plazuela del Angel175. Sa fille Maria Gregoria était mariée au comptable du Conseil des Indes, don Luis de Astorga y Miranda176.

Francisco II Fernández de Madrigal eut deux fils de sa nièce doña Catalina de León y Madrigal : Luis Francisco (1654-1710) et Francisco Antonio (1670-1724). Pour le premier, nous savons qu’il fut Gentilhomme de la Maison du roi et aussi chevalier de l’habit de Santiago177. Cet office de gentilhomme permet l’accès (à distance) à la personne du roi puisqu’il fait partie des 1 700 personnes de la suite permanente178. L’auteur de la

Auracana, don Alonso de Ercilla, était lui aussi gentilhombre de la Casa de Su Majestad. Il

est nommé commis aspirant du secrétariat du Pérou le 22 avril 1676, et troisième commis en 1679. Il prend sa retraite le 17 juillet 1691 et continue de toucher une pension jusqu’à sa disparition, le 13 février 1701.179 Sa veuve, Doña Luisa de Casso Navarrete demande 150

ducats par an. Le second fils, Francisco Antonio est également troisième commis du secrétariat du Pérou obtint l’habit de Santiago en 1682180. Il se maria deux fois, d’abord

avec doña Mariana de Monleón qui décéda puis, en 1723, avec Isabel Cerrato Garcia181. Enfin, José Fernández de Madrigal eut trois enfants de doña Maria de Ledesma : Don José Francisco, Don Juan Pablo et doña Ana Maria. Nous connaissons uniquement cette dernière. Elle se maria avec le fils d’un comptable du Conseil des Indes, Don Alonso Muñiz, qui confirme la persistance de l’endogamie professionnelle dans la troisème génération. De plus, l’enfant de cette union José Muñiz y Fernández de Madrigal Espinosa y Ledesma (1726-ap. 1788), nous est connu par l’enquête qui fut menée sur lui et ses ancêtres, pour l’obtention du titre de chevalier de l’ordre de Carlos III en 1788182. On apprend à cette occasion que l’arrière petit-fils de Juan Fernández de Madrigal, commis du Conseil des Indes, était devenu le chapelain d’honneur de Charles III.

175 A.H.P., T. 11068, f. 52-53, Testamento otorgado por Jerónimo Fernández de Madrigal, caballero de la

Orden de Santiago, secretario y oficial mayor de la Secretaría del Consejo y Junta de Guerra de Indias, en 7 de diciembre de 1708.

176 A.H.P., T. 11074, f. 637, Testamento otorgado por María Gregoria Fernández de Madrigal, en 28 de

abril de 1714.

177 A.H.N., O.M., Caballeros de Santiago, Exp. 2974 ; Cov., « Gentiles hombres de la Cámara o de la boca,

son criados de los reyes constituydos en la una y la otra dignidad. »

178 COSANDEY Fanny, POUTRIN Isabelle, Monarchies espagnoles et française, Neuilly, Atlande, 2001, p. 270 179 A.G.I., Contaduría 206, N. 2, L. 26

180 A.H.N., O.M., Caballeros de Santiago, Exp. 2973 181 A.H.N., O.M., Caballeros de Santiago, Exp. 10080 182A.H.N., Estado-Carlos_III, Exp. 271

C

OHÉRENCES INTERNES ORIENTANT LES COMPORTEMENTS DES MEMBRES DU GROUPE

Au départ, il y a le choix des pères, Juan Fernández de Madrigal puis Juan Díez de la Calle, de s’orienter vers une carrière très valorisée depuis les Rois catholiques : l’adminis- tration183. En d’autres temps, ils auraient opté pour la voie militaire mais l’impôt des lanzas illustre la désaffection des hidalgos pour le service aux armées. Un paysan s’adressant à Don Quichotte déclare : « (…) tout est pour de rire, à part étudier et encore étudier, avec des protections et de la chance ; et le jour où moins l’on y pense, on se retrouve avec une baguette à la main ou une mitre sur la tête »184. La voie des bureaux offrait, avant tout aux

letrados, des avantages variés et une perspective d’ascension sociale185.

Seulement, dans notre cas, il s’agit d’une petite noblesse provinciale, prise dans la tourmente des crises et des mouvements migratoires qui frappent souvent l’Espagne des années 1550-1650, incapable de s’offrir dans un premier temps des études universitaires menant au statut de letrado tant recherché : « Les carrières de juristes dans le service royal demandent des ressources »186 confirme J.-M. Pelorson. L’historiographie a pris l’habitude

de nommer ce personnel subalterne les infra-letrados. Le terme est bien choisi car on constate chez eux une volonté de reproduire à moindre échelle le mode de vie et les aspirations du monde des letrados.

Le choix de Madrid et de l’administration étant fait, cette famille dut œuvrer à son installation et à son intégration dans leur nouveau milieu socioprofessionnel. On décèle une véritable stratégie de développement et de cohésion du lignage qui s’exprime tout au long du XVIIe siècle et au-delà. La famille étudiée confirme l’importance de l’horizontalité du système familial instituée par Juan Fernández de Madrigal. En effet, J.P. Dedieu insiste à plusieurs occasions sur ce fait majeur : « Ce sont les liens de collatéralité et d’alliance qui assurent son extension : les beaux-frères et les cousins, voire les cousins des cousins et les

183 BENNASSAR, op.cit., p. 46 et JOVER ZAMORA (dir.), op.cit., t.XXIII, p. 475

184 CERVANTÈS Miguel de, Don Quichotte, II, LXVI, édition de la Pléiade. Cité dans JOVER ZAMORA (dir.),

op.cit., p. 475

185 JOVER ZAMORA José María (dir.), op.cit., p. 475, « Les émoluments de cette haute bureaucratie n’étaient

pas très élevés mais l’accumulation de charges et la multitude de gratifications dont ils jouissaient leur permettaient de mener une vie fastueuse, de fonder des majorats, d’acheter des propriétés, de les meubles, de doter avec générosité leurs filles et (autre signe d’ascension sociale) obtenir dans une église ou un couvent une sépulture avec chapellenie ou mémoire pour s’assurer le repos éternel de son âme. » / « Los emolumentos

de esta alta burocracia no eran muy altos ; pero la acumulación de cargos y la multitud de gratificaciones de que gozaban, les permitía llevar una vida fastuosa, fundar mayorazgos, comprar fincas, alhajarlas, dotar con largueza a las hijas y (otro signo de ascenso social) procurarse en una iglesia o convento una sepultura dotada de capellanía o memoria que asegurase perennes sufragios por su alma. »

beaux-frères des beaux-frères, sont membres de la famille »187. Dans un autre ouvrage, il remarque « la force de la notion de lignage, tant dans son extension horizontale, entre parents d’une même génération, comme à travers le temps, de génération en génération. »188 La famille de l’époque moderne a comme fonction, en plus de la reproduc- tion biologique, la transmission du patrimoine familial. Dans notre cas, la transmission est également celle d’un patrimoine immatériel et professionnel (dans un système excluant la vénalité des charges). Quelle cohérence des stratégies a-t-elle prévalu dans l’ascension sociale et dans la transmission du patrimoine des Fernández de Madrigal-Díez de la Calle ? Comment ces familles forment-elles une « communauté de destin » ?

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