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LE LYCÉE COMME MICROCOSME

2. LES OPTIONS RARES À DOISNEAU : UNE ALTERITÉ FORTE ALTERITÉ FORTE

2.2.1.3. Un rejet total

Le de ie as de figu e o se est sa s doute le plus lateu de l’i po ta e de l’alt it qui peut être vécue par certains lycéens. Les adolescents dont il est question ici sont scolarisés en filière STIDD, dans laquelle les circassiens et les footeuses ne sont pas présents. Le seul cadre qui pourrait favoriser les contacts entre Anis, Elmas et les circassiens (ou les footeuses) est les espaces communs du lycée, cela ne semble pas suffisant pour dépasser les préjugés.

« Elmas : Moi je o pte a oi u g os salai e. Moi j’ai esoi de pe so e. Je ne vais pas à l’ ole pou g atte le salai e de uel u’u d’aut e.135

Anis : T’as le d oit. Mais… C’est u peu te de ta pa t, ais… t’as le d oit.

Elmas : C’est o e si ue je te disais ue tu g attais les foot alleuses136 ici. Bon elles se e t à ie et o …

Elles e se ve t à ie ’est-à-dire ?

Elmas : Elles so t à l’ a t. Et puis ’est : o fait du foot. O est à l’OL137. Anis : Ouais elles traînent ensemble.

C’est v ai elles so t v ai e t o e ça ?

Elmas : Certaines. Moi, je les avais en seconde138, et elles étaient comme ça quand même.

Anis : Elles restent tout le temps entre elles.

Elmas : Toujours entre-elle. Elles ne parlent à personne. Anis : Ça ne sert à rien de suivre des filles comme ça. Elmas : voilà.

[…]

Et pourquoi elles restent entre-elle ? Elmas : Je sais pas.

135 A is o uait p de e t l’oppo tu it ue ep se te ait pou El as le fait de se a ie a e uel u’u ui a des o e s fi a ie s i po ta ts. El as to ue i i u’elle p f e a oi u o salai e et assurer elle-même ses esoi s plutôt ue de o pte su les e e us d’u e aut e pe so e.

136 Dans ce sens, « g atte uel u’u » sig ifie ti e p ofit de uel u’u .

137 Olympique lyonnais

138 E lasse de se o de, les l e s ’o t pas e o e hoisi leu fili e, ils so t do langés dans les classes. Da s le as d’El as, sa lasse de se o de o ptait uel ues footeuses.

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Anis : Elles ne sont pas dans les mêmes délires tout simplement. D’a o d. Et eu ui fo t du i ue. Il a l’optio i ue aussi. Anis : ah eu ’est …

Ils sont comment eux ?

Anis : C’est pas ous… E fait ’est pas eu ui se e t pas… ui restent pas avec nous, c’est ous, o ne les laisse pas rester avec nous. Arrachez- ous de là. C’est… Bo . Bah

’est o . F a he e t ils so t ge tils. Elmas : Elles sont gentilles. Ouais.

Elmas : Oui ils sont gentils, mais je pourrais pas rester avec des gens comme ça moi. Elmas : Pa e u’e fait ils so t da s u aut e o de. Ils so t da s u o de d’a tistes…

Anis : Ah je e suis pas a iste. Je e suis pas a iste. Je ’e fous du ph si ue… Elmas : Ils s’assoie t pa te e à la . Ils fo t du o o le pe da t la . O comprend rien.

Anis : Mais il a des… Il a des li ites ua d e. C’est uoi les li ites ?

Anis : Pa e e ple le ph si ue oi je ’e fous. Il peut t e g os, o he. La p eu e. C’ tait u e petite a e. Mais pa e e ple si tu a i es a e u t u asé, ou un truc o e ça, pe so elle e t j’au ais pas e ie u’o e oit a e toi. C’est l giti e, je pense.

[…]

Et du oup ça, ’est g al u peu ? Vous les ettez u peu de ôt , o va di e. Anis : Oui… Bah ouais ’est atu el. C’est i sti tif. C’est un réflexe. »

Anis et Elmas, TSITDD, lycée Doisneau, habitants de Vaulx-en-Velin (Vaulx La Soie et Mas du Taureau)

Cet e t etie a t e su u to o e fa t, a e u e g a de pla e laiss e à l’hu ou . Cependant, le vocabulaire mobilisé est directement issu du champ lexical du racisme. Sur ette pa tie de l’e t etie , le olu e so o e aug e te, A is po d de a i e t s spontanée, toujours sur un ton amusé, mais avec une sincérité apparente non négligeable. Co e ous l’a o s o u p de e t, e lycéen était déjà scolarisé à Doisneau lo s ue l’optio A ts du Ci ue a t ise e pla e. Cet aspe t, et l’effet de su p ise ui semble y être lié, ont sans doute joué un rôle dans la forte distance qui est évoquée par Anis

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et Elmas. Deux univers se renco t e t, il e s’agit pas i i d’u e si ple di e ge e de e t es d’i t t. Le ejet apparaît inéluctable, non pas parce que les personnalités des individus de ha u des g oupes so t fo da e tale e t i o pati les, ais pa e ue l’u i e s so io-culturel du groupe des circassiens, ici perçu par Anis, est trop différent de son propre univers. Il est i t essa t de o state u’i i, la ise à dista e pei e à t e justifiée. Si la tenue esti e tai e est o u e à la fi de l’e t ait, et aspe t a t a t en amont. La réaction des deux lycéens, et la virulence de celle-ci, nous amène à la considérer à travers le cadre théorique développé autour de la thématique de la stigmatisation, de la discrimination et du racisme. Appartenant à la même communauté, celle des lycéens de Doisneau, les circassiens deviennent « autres » dans la mesure où la différence perçue engendre une forte distance sociale et une exclusion non négociable du groupe de pairs. Les termes employés par Anis : « je ne suis pas raciste mais… », typiques de la dénégation, montrent l’i po ta e d’u

ejet ui s’appa e te à u e fo e de a is e.

Pa ailleu s, les footeuses et les i assie s ’e t ai e t pas le e ejet de la pa t d’A is et Elmas. Les contacts avec les footeuses pourraient être acceptés par Anis et Elmas. La manière dont ils évoquent les footeuses peut laisser penser que les deux adolescents regrettent la fermeture de jeunes sportives, en effet, le seul reproche qui leur est fait est de rester entre elles. Dans le cas des circassie s, ’est diff e t, e so t A is et El as ui e veulent pas avoir le moindre contact avec eux : « ’est atu el. C’est i sti tif. C’est u réflexe. ».

Seul Anis et Elmas exprimeront aussi violemment un rejet des circassiens, en effet, les autres adolescents rencontrés se contenteront souvent de dire que les circassiens « ’o t pas le même délire » u’eu .

Ai si, la a i e do t se o stitue i i l’alt it ’est pas sa s appele la fo e de so ia ilit proposée par Simmel à t a e s la figu e de l’ t anger (Simmel, 2009 [1979]) E effet, si l’o stipule ue l’u e des a a t isti ues du groupe des lycéens de Dois eau est l’ide tit audaise, les i assie s o stitue t auta t de figu es de l’ t a ge car ils partagent le fait d’ t e l e à Dois eau aractéristique générale du groupe) sans pour autant être vaudais e ui diff e du g oupe . À t a e s le fait d’ t e audais, ’est u e se le d’ l e ts culturels qui diffère.

Avant de poursuivre, il parait important de caractériser la notion de « délire ». Cette expression est commune à tous les jeunes rencontrés, aussi bien les lycéens vaudais de Doisneau que les circassiens, les footeuses, mais aussi les lycéens de Récamier.

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