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Le registre médiatique audiovisuel

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 128-134)

IDENTIFIER LES MARQUEURS POSSIBLES DU STATUT D’OBJET DE PATRIMOINE DANS L’EXPOSITION

3. Le registre médiatique audiovisuel

Lorsqu’on parle d’audiovisuel, on considère en réalité deux dimensions intimement liées d’un même objet : un support technique et un contenu. On retrouve ces deux facettes dans la définition proposée par le Dictionnaire du multimédia publié par l’Afnor, qui explique qu’un audiovisuel est un « programme ou produit composé de sons et d’images » et « par extension […] des processus et des dispositifs techniques […] mis en œuvre pour la réalisation de produits audiovisuels » (Notaise et al., 1995 : 77). Si ce terme qualifie le plus souvent l’association de l’image et du son, nous considérons aussi, dans le registre de l’audiovisuel, des programmes qui sont seulement sonores ou seulement visuels. Dans ces conditions, le registre de l’Audiovisuel permet de prendre en compte les programmes sonores, les programmes constitués de l’articulation d’images fixes ou animées, accompagnés de son ou non, diffusés par l’intermédiaire d’un dispositif sonore et / ou d’un dispositif visuel tel qu’un écran, celui-ci pouvant prendre différentes formes et dimensions. Pour plus de clarté, le terme sera employé dans son sens le plus général avec une majuscule, tandis que les programmes audiovisuels, qui associent le son à l’image, garderont un « a » minuscule.

3.1 L’Audiovisuel, un registre autonome dans la production du sens ?

Considérer les programmes sonores et les programmes visuels au sein du registre de l’Audiovisuel présente, pour notre étude, un intérêt certain. Cela permet de mettre en avant la question de l’interaction entre les registres probablement mieux que ne le ferait la seule considération des programmes audiovisuels. Comme le remarque Davallon, et si l’on accepte de considérer ici que le film représente les audiovisuels le temps de la démonstration, « l’objet film […] constitue un ensemble signifiant dense, fortement sémiotisé, dans lequel les niveaux sont intégrés et les éléments articulés » (Davallon, 1999 : 13). La mention de cette homogénéité de l’audiovisuel peut laisser penser que les programmes audiovisuels fonctionnent de façon autonome au sein du dispositif d’exposition, alors que les programmes sonores ou visuels permettent d’envisager, avec plus d’évidence, des interactions avec les éléments extérieurs au programme lui-même. Or les dispositifs audiovisuels sont autant

susceptibles d’interagir avec les autres registres médiatiques de l’exposition. Considérer ces trois types de programme dans un même registre, c’est donc mettre en avant leur capacité, à tous, d’interagir avec les autres éléments constitutifs de l’exposition.

Disons, enfin, que ce qui réunit le sonore, le visuel et l’audiovisuel c’est aussi la forme programme, forme inscrite dans une durée qui permet de distinguer l’Audiovisuel des autres éléments constitutifs de l’exposition, cette durée étant déterminée au moment de la conception du programme. Cette caractéristique nous permet, d’ailleurs, d’introduire une dernière distinction en différenciant les programmes interactifs de ceux qui ne le sont pas, tout en soulignant que, dans les deux cas, la durée reste tributaire des usages dans l’exposition. En effet, elle dépend, pour les programmes interactifs, des manipulations et des choix d’un usager, et pour ceux qui ne le sont pas, de la consultation partielle ou non, unique ou répétée du programme. Il convient d’ailleurs de souligner, à l’instar du Dictionnaire du multimédia, que « le terme multimédia est de plus en plus utilisé pour désigner l’audiovisuel couplé à l’informatique, c’est-à-dire l’audiovisuel interactif » (Notaise et al., 1995 : 78). C’est effectivement, encore aujourd’hui, le terme employé le plus souvent dans le champ muséal pour désigner les audiovisuels interactifs. Cependant, nous conserverons cette dernière appellation pour plus de clarté. Par ailleurs, il n’est pas question ici de discuter la pertinence de la notion d’interactivité, remise en cause notamment pour sa portée idéologique (Le Marec, 2001) et interrogée en différents contextes (Guéneau, 2005). Elle sert seulement ici à désigner tout programme audiovisuel qui prévoit une manipulation et permet ainsi de considérer un critère supplémentaire pour différencier les catégories du registre de l’Audiovisuel.

La description du registre médiatique de l’Audiovisuel sur le plateau des collections a permis de constituer plusieurs catégories. Celles-ci ont été établies en fonction de leurs composants techniques (écran, projection, etc.), du type de programme – sonore, visuel ou audiovisuel – qui y est lié et de leur caractère interactif ou non. Elles rassemblent d’abord les dispositifs sonores, les dispositifs de projection visuels et audiovisuels, puis les écrans sonores, visuels et audiovisuels et enfin les écrans tactiles qui diffusent des programmes visuels et audiovisuels interactifs. Ces deux derniers dispositifs sont d’ailleurs les plus nombreux sur le plateau des collections. L’objectif, pour chacune de ces catégories, consiste à décrire les dispositifs, en fonction de leurs spécificités, afin d’en comprendre la logique et d’en analyser le fonctionnement. Dans ce sens, le contenu des programmes est seulement un des aspects de la description des dispositifs. Il a permis de comprendre leur fonctionnement dans la mesure où les caractéristiques du contenu participent au fonctionnement et à la logique des programmes,

mais il ne s’agit pas ici de produire une analyse esthétique, plan par plan, ou de commenter la pertinence des sources mobilisées dans les différents programmes. Ceci dit, la catégorie sans doute la plus délicate à analyser reste celle des dispositifs sonores.

3.2 Difficultés particulières de la description du registre médiatique Audiovisuel

Précisons, enfin, que le format programme qui inscrit les composants du registre Audiovisuel dans une durée rend leur manipulation complexe et leur observation fastidieuse.

Toutefois, un grand nombre de programmes diffusés sur le plateau des collections, ceux présents sur les écrans sonores, visuels et audiovisuels, les écrans tactiles interactifs et les dispositifs sonores, sont accessibles sur des postes d’ordinateur sur une des mezzanines, la

« mezzanine multimédia », qui surplombe le plateau des collections. Sur ces postes, les programmes, classés par continent mais pas par type de programme, peuvent être lancés et interrompus à la demande, ce qui n’est pas le cas pour les écrans non tactiles sur le plateau.

Les dispositifs de projection visuels et audiovisuels, eux, ne sont accessibles que sur le plateau des collections, mais ce sont les moins nombreux.

Pour les audiovisuels les plus nombreux, ceux diffusés sur les écrans sonores, visuels et audiovisuels et les écrans tactiles, une partie seulement des programmes a été analysée. Ainsi, parmi les quarante-deux programmes diffusés sur les écrans sonores, visuels et audiovisuels, quinze ont été étudiés en détail. Ils ont été sélectionnés de manière raisonnée : trois dans la séquence océanienne, trois dans la séquence asiatique, quatre en Afrique et cinq en Amériques. Cette disparité dans la répartition des programmes par séquence est due à l’homogénéité des programmes dans les deux premières séquences et à l’hétérogénéité relative en Afrique, et plus importante en Amériques, qui oblige à considérer davantage de programmes pour réunir un échantillon représentatif. La représentativité des programmes sélectionnés repose principalement sur leur caractère visuel ou audiovisuel (par exemple, il y a plus de programmes visuels en Océanie, davantage de programmes audiovisuels en Asie, beaucoup d’animations virtuelles en Amériques), et dans un second temps sur leurs traits distinctifs, comme la présence de la couleur ou du noir et blanc, de photographies ou de gravures, la présence ou l’absence de certaines animations, etc.

Enfin, l’addition de la durée estimée des vingt programmes proposés, une ou plusieurs fois, sur les écrans tactiles du plateau des collections totalise huit heures et quarante-cinq minutes de consultation. La moyenne de consultation par poste, elle, atteint une heure quarante. Dans

ces conditions, et étant donné l’objectif de la recherche, seul un programme, « La chambre des écorces », a été analysé en profondeur, parce qu’il correspond à la durée de consultation moyenne des programmes des écrans tactiles (25 minutes), parce qu’il est présenté isolé ou avec d’autres programmes sur différents postes et, enfin, parce qu’il comporte tous les onglets disponibles à l’intérieur des différents programmes.

Conclusion du cinquième chapitre

Ainsi, l’analyse séparée des registres médiatiques de l’exposition vise à identifier les marqueurs du statut des objets et constitue une étape nécessaire pour permettre, ensuite, d’analyser les interactions productrices du sens des objets sur le plateau. En procédant à l’analyse séparée des registres médiatiques, nous nous positionnons à l’encontre des théories sémiotiques de l’exposition, mais cette étape nous a paru nécessaire, avant de passer à l’identification des interprétants, pour considérer sur un pied d’égalité, et en fonction de leurs spécificités médiatiques, les différents éléments qui composent l’exposition, et non principalement le registre scriptovisuel puis, très rapidement, la mise en espace – donc l’interaction des registres – comme c’est le cas généralement.

L’élaboration de différents protocoles de description et d’analyse pour chacun des registres médiatiques, et même pour chacun des types de composants de chaque registre médiatique, a permis de rendre compte de la difficulté qu’il y avait à décrire des registres qui, malgré leurs spécificités médiatiques, sont étroitement liés dans le dispositif d’exposition. La difficulté est d’autant plus grande pour le registre de l’espace qu’il est le support des autres registres.

Toutefois, nous avons pu définir une approche de chacun des registres médiatiques qui permet de les analyser indépendamment et d’identifier les marqueurs pertinents pour répondre à la question du statut patrimonial des objets extra-occidentaux.

Ainsi, la description et l’analyse du registre de l’espace passeront par l’identification des niveaux emboîtés de construction du sens par l’espace, donc par l’identification des seuils et des limites spatiales, du rôle des couleurs et des lumières. La description et l’analyse du registre scriptovisuel seront organisées autour de l’aspect formel des éléments du registre, et notamment en fonction de l’association ou non d’éléments iconographiques et textuels, des types d’image et de la construction des textes. Une fois les catégories d’éléments distinguées, les éléments iconographiques seront analysés sémiotiquement et les éléments textuels feront l’objet d’une analyse de discours qui vise à étudier les plans d’énonciation, donc à identifier

les embrayeurs et les temps verbaux. Ce sont ensuite les relations entre les différents composants, entre les textes, entre les images, entre les images et les textes au sein des catégories d’éléments, et entre les éléments, qui seront analysées. Enfin, la description et l’analyse des éléments du registre audiovisuel seront guidées à la fois par les caractéristiques techniques et par le contenu des programmes, c’est-à-dire en fonction de la présence, ou non, de messages langagiers sonores ou visuels, de la mobilisation des images, des caractéristiques techniques et du type d’images. Comme pour le registre scriptovisuel, l’analyse du registre audiovisuel donnera lieu à des études sémiotiques des images et de la relation entre les images et les messages langagiers, et, dans une moindre mesure, à une analyse des messages langagiers en eux-mêmes.

CHAPITRE 6

LE DEGRÉ ZÉRO DE L’ESPACE

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