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3.3 Mesures inélastiques de la dispersion des phonons longitudinaux

3.3.2 Résultats

Ligne ML

Figure3.5 –2H-NbS2, spectres IXS à 100 K de (2.5,0,0) à (2.5,0,1). L’énergie du pic de phonon à basse énergie (≈10meV) varie peu selon l’axe~c.

Parmi les trois coordonnées dans l’espace réciproque, notre plus grande incertitude était selon la direction~c: environ 7%. Mais nous avons constaté que la position selon l’axe~c a peu d’influence sur la position en énergie des phonons. Autrement dit, les branches de phonons sont peu dispersives selon l’axe ~c, au moins à basse énergie (Fig.3.5). Ceci est très certainement dû à la structure bidimensionnelle de 2H-NbS2.

(a) (b)

(c) (d)

Figure 3.6 – Exemples de spectres d’énergie acquis en configuration (9,9,9) le long de l’axe ΓK. Les points correspondent aux mesures IXS. La ligne rouge représente la régression par : deux Oscillateurs Harmoniques Amortis (OHA) pour les phonons, une lorentzienne pour le pic élastique, et un fond continu constant. Les lignes bleues indiquent les excitations individuellement. L’énergie des phonons est identique à 300 K et 2 K, aux incertitudes près.

Ligne ΓK

La Fig. 3.6 présente des spectres d’énergie typiques où les pics de deux phonons sont bien visibles. Nous avons mesuré la dispersion de ces deux modes sur toute la ligne ΓK (Fig. 3.7) sauf au voisinage de Γ où l’intensité du pic de Bragg empêche la détection des phonons. La régression des paramètres des phonons sur les spectres expérimentaux a été faite en utilisant la fonction standard [32] de l’oscillateur harmonique amorti (OHA) avec facteur de Bose. La position des phonons est déterminée au mieux à 0.2 meV près, d’après la matrice de covariance de la régression. Leurs largeurs sont limitées par la

résolution expérimentale, aux incertitudes près.

Au milieu de ΓK, l’énergie de chacun des phonons est déterminée avec une incertitude plus grande car les deux pics de phonons se chevauchent. Ceci explique sans doute aussi la petite augmentation apparente de la largeur des phonons. Enfin, je constate que l’énergie des phonons est identique à 300 K et 2 K, aux incertitudes près. Nous ne détectons pas de phonons mous selon cette ligne de symétrie et dans cette gamme de température. Ceci est en bon accord avec l’absence de diffusion diffuse dans cette direction, comme nous l’avons vu dans la section précédente.

Figure 3.7 – Dispersion et demi-largeur à mi-hauteur intrinsèque (déconvoluée de la résolution

expé-rimentale) des deux modes de phonons mesurés selon ΓK. L’incertitude sur le résultat de la régression augmente au milieu de ΓK, car les deux pics de phonons se chevauchent.

Ligne ΓM

La Fig.3.8présente les deux types de spectres mesurés le long de la ligne ΓM. Exceptionnellement, le long de cette ligne de symétrie et uniquement à 300 K, nous avons effectué des mesures jusqu’à 60 meV.

En (3.15,0,0), nous détectons un pic à 12 meV limité par la résolution. La position de ce pic semble quasi indépendante de la température. À plus haute énergie, nous mesurons un deuxième pic peu intense autour de 32 meV, ce pic est très large (≈5 meV FWHM déconvoluée) et pourrait corres-pondre à plusieurs phonons. Enfin un troisième pic très peu intense est probablement présent à 47 meV.

En (3.45,0,0), nous mesurons un pic large (3 meV FWHM déconvoluée) à basse énergie (14 mev). À plus haute énergie, nous observons une deuxième excitation bien visible et limitée par la résolution autour de 40 meV. Enfin, de nouveau, une troisième excitation très peu intense est probablement présente autour de 47 meV. Nous constatons que la position du pic à basse énergie dépend fortement de la température : passant de 14 meV à 300 K, à 7 meV à 2 K, tandis que sa largeur intrinsèque semble doubler. Ceci est la signature d’un mode de phonon mou.

J’ai aussi cherché si un pic élastique caractéristique d’une CDW émergeait à basse température. Mais j’ai constaté qu’il ne se dégage aucune tendance dans l’évolution de l’amplitude du pic élastique, ou dans l’évolution du ratio entre l’amplitude du pic élastique et l’amplitude du phonon. Ces deux quantités semblent varier de façon aléatoire selon la température et la position dans l’espace réciproque. Ainsi, la présence d’un pic élastique est sans doute plutôt lié aux phénomènes de diffusion élastique variés rencontrés sur le trajet du faisceau.

Nous avons réalisé des mesures selon ΓM à de nombreuses températures intermédiaires. Sur la Fig.3.9b, une sélection de quelques courbes en (3.375,0,0), i.e.3/4 de ΓM, montre très clairement l’amollissement progressif du pic associé à un ou des phonons mous. Cet amollissement très fort se retrouve sur une grande gamme de vecteurs d’onde : environ un tiers de ΓM (Fig.3.9a). À notre connaissance, et d’après la littérature, ceci est la première preuve expérimentale de la présence de phonons mous dans le composé 2H-NbS2. Les mesures inélastiques le long de l’axe ΓM montrent ainsi que la diffusion diffuse, observée précédemment, est due à la présence de phonons mous.

(a) (b)

(c) (d)

Figure 3.8 – Exemples de spectres d’énergie acquis en configuration (9,9,9) le long de l’axe ΓM. Les

points correspondent aux mesures IXS. La ligne rouge représente la régression par : un ou deux OHA pour les phonons, une lorentzienne pour le pic élastique, et un fond continu constant. Les lignes bleues indiquent les excitations individuellement. En (3.15,0,0), on observe un pic dont la largeur correspond à la résolution et dont la position en énergie est quasi indépendante de la température. En (3.45,0,0), on observe un pic environ deux fois plus large que la résolution, et dont l’énergie baisse fortement quand la température diminue.

(a)

(b)

Figure3.9 –(a) Dispersion des phonons selonΓM, et demi-largeur à mi-hauteur intrinsèque (déconvoluée de la résolution expérimentale) de la branche à basse énergie.

(b) Spectres d’énergie à (3.375,0,0) en fonction de la température. La position en énergie du pic diminue fortement quand la température baisse. Nous constatons que l’amollissement est maximum en ce point de la ligne ΓM. Ce comportement est caractéristique des phonons mous. La largeur de ce pic correspond à environ deux fois la résolution en énergie à 300 K, et à environ quatre fois à 2 K.

Deux phonons mous ?

Figure 3.10 – Comparaison des spectres obtenus en ~q = 0.75ΓM avec une résolution en énergie de 2.6 meV FWHM en configuration (9,9,9), et avec une résolution de 1.8 meV FWHM en configuration (11,11,11). Le spectre (11,11,11) a été décalé vers le haut pour plus de clarté.

Nous constatons que le pic présentant un fort amollissement est relativement asymétrique et, surtout, excessivement large : environ 4 meV FWHM après déconvolution en configuration (9,9,9) à 300 K, et jusqu’à 6 meV FWHM à 2 K. Ces deux faits semblent indiquer que ce pic est plutôt une superposition de deux phonons mous, bien que l’usage d’une plus haute résolution (1.8 meV FWHM avec la réflexion (11,11,11), Fig.3.10) ne permet pas de distinguer deux phonons. Notez aussi que la juxtaposition de deux phonons limités par la résolution ne suffit pas à reproduire ces spectres expérimentaux.

Une conclusion possible est donc que deux modes de phonons mous sont présents, mais qu’ils sont tous les deux intrinsèquement élargis. Comme nous allons le voir dans la section suivante, les calculsab initio

prédisent effectivement un tel phénomène. D’après les calculs de facteur de structure, nous devons observer près du pic de Bragg (3,0,0) les deux branches longitudinale optique (LO) et longitudinale acoustique (LA), qui sont les deux modes de phonons mous prédits par les calculs. La présence simultanée de ces deux branches semble donc confirmée expérimentalement par le profil large et asymétrique du pic de phonon. Cependant, ces données ne permettent pas de conclure si l’augmentation de la largeur du pic à basse température, de 4 meV à 6 meV FWHM, est due : à une augmentation de la largeur de chacun des phonons, ou à une augmentation du décalage entre les deux phonons à mesure qu’ils s’amollissent, ou les deux à la fois.

3.3.3 Conclusion

Dans cette partie, nous avons ainsi mis en évidence la présence de modes de phonons mous dans le composé 2H-NbS2. Le fort amollissement observé est un signal précurseur d’une instabilité CDW, ce qui montre qualitativement à quel point 2H-NbS2est proche d’une instabilité CDW. Ceci constitue le premier et principal résultat de ce chapitre. Afin d’effectuer une analyse plus détaillée et examiner le rôle des mécanismes physiques responsables de l’amollissement, nous avons comparé nos données expérimentales avec les prédictions des simulations numériques.