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Nous avons vu que la figure de diffraction de TDS présente une multitude de petits pics satellites à basse température, Fig.4.2a. Ils peuvent être répartis en trois groupes : le pic au point M, les quatre pics autour du point M, et les douze pics autour de chaque pic de Bragg.

Point M

Figure4.12 –2H-NbS2 : le pic satellite observé au point M (~q= (0.5,0,0)) est bien de nature élastique.

La diffusion inélastique confirme que le pic satellite observé au point M (~q= (0.5,0,0)) contient une contribution élastique importante, cf. Fig. 4.12. En revanche l’intensité intégré de ce pic est similaire à celle des phonons de plus basse énergie au même point. Il est donc difficile de qualifier ce phénomène d’onde de densité de charge. Comme l’intensité est si faible, cela semble indiquer que les déplacements des atomes sont extrêmement petits, ou qu’une très faible fraction des atomes seulement contribuent. De plus nous avons vu au chapitre3, que les phonons mous apparaissaient plutôt autour de 2/3 de ΓM, bien que les calculs ab initioprédisent une susceptibilité électronique maximale au point M. Nous proposons donc deux explications possibles pour ce pic satellite :

les contraintes dans le matériau pourraient induire localement une faible modulation de charge

autour des impuretés, l’existence d’un vecteur de nesting de la surface de Fermi pourrait induire une modulation de charge : les oscillations de Friedel

Les deux autres groupes de pics

La Fig.4.13a met en évidence les douze pics satellites apparaissant autour de chaque pic de Bragg, de part et d’autre de la direction ΓM. La Fig.4.13bmontre que les pics autour du point M peuvent être décrits par les réflexions secondaires des douze pics autour du pic de Bragg.

La diffusion inélastique confirme que ces pics satellites sont bien de nature élastique, mais, de même qu’au point M, l’intensité intégrée de ces pics est similaire à celle des phonons de plus basse énergie.

L’intensité de ces douze pics suit les mêmes variations que la diffusion diffuse selon ΓM, ce qui semble indiquer une modulation longitudinale, cf. chapitre3.

Enfin la position de ces douze pics est très similaire à celle de la phase CDW commensurée de 1T-TaSe2. Dans ce composé, une onde de densité de charge incommensurée apparaît avec un vecteur d’onde triplement dégénéré proche de 1/3 de~a. En dessous de 473 K, l’onde de densité de charge se commensure avec le réseau en tournant de 13˚540 par rapport à~a, afin de se commensurer selon 3q~1−q~2=~a [76]. Les taches que nous observons dans 2H-NbS2 sont justement en accord avec ces deux faits, comme le montre la Fig. 4.14. Ceci semble donc suggérer qu’une petite fraction du cristal présente une onde de

densité de charge commensurée, similaire à 1T-TaSe2. Mais cette rotation se rencontre plutôt dans les polytypes 1T, tandis que dans les 2H l’onde de densité de charge se commensure plutôt avec 1/3 de~a. Or, à notre connaissance, seuls les polytypes 2H et 3R de NbS2sont connus. Peut être que les contraintes permettent localement de stabiliser quelques feuillets de type 1T dans la structure de 2H-NbS2. Je ne me suis rendu compte de cette similarité que très récemment, ce qui ne m’a pas laissé le temps d’entreprendre des simulations de la figure de diffraction produites par un cristal de 2H-NbS2 intercalé avec quelques feuillets de type 1T.

4.4 Conclusion

La synthèse des cristaux de 2H-NbS2est une des plus délicates parmi les TMD [30]. Dans ce chapitre dédié à l’analyse de la structure de nos cristaux de 2H-NbS2, nous avons mis en évidence leur haute qualité. La mosaïcité est de 0.13˚dans le plan (~a,~b) et de 0.6˚dans le plan (~a, ~c). Les pics de Bragg sont tout à fait indexables et indiquent bien un polytype 2H.

Cependant, nous avons montré que les pics de Bragg étaient anormalement larges, au delà d’un simple effet de mosaïcité, selon certaines lignes dans l’espace réciproque. J’ai proposé et testé numériquement un modèle de fautes d’empilement localement de type 3R. J’ai trouvé un bon accord avec la simulation pour 18% de fautes d’empilement de type 3R, en tenant compte de la mosaïcité. A posteriori, j’ai été informé qu’une étude similaire avait déjà été publiée [57]. Elle considère le même modèle de fautes d’empilement, mais travaille par simulation des figures de diffraction sur poudre. Elle conclut que le taux de fautes est d’environ 16%. Nous obtenons ainsi deux valeurs très proches, cela pourrait suggérer que ce taux de fautes est inhérent à la synthèse, soulignant de nouveau sa difficulté.

Finalement nous avons identifié des traces rémanentes d’une onde de densité de charge commensurée qui ressemble fortement à celle de 1T-TaSe2. Cette commensuration très particulière suggère la pré-sence éventuelle de feuillets de type 1T-NbS2, qui à notre connaissance n’ont jamais été observé dans la littérature.

(a) (b)

Figure4.13 –Zoom sur le plan (H,K,0) de 2H-NbS2 à 77 K. (a) Douze petits pics satellites apparaissent autour de chaque pic de Bragg. (b) L’ensemble des pics satellites peut être décrit en considérant les réflexions secondaires.

(a) (b)

Figure4.14 –Zoom sur le plan (H,K,0) de 2H-NbS2à 77 K. (a) Les douze petits pics satellites autour de chaque pic de Bragg, forment chacun un angle d’environ13˚540avec la directionΓM. (b) Si l’on prolonge le vecteur d’onde du pic satellite on constate que l’on peut relier deux pics de Bragg selon :3q~1q~2=~a.

Chapitre 5

Phonon mou dans 2H-NbSe

2

Le dichalcogénure 2H-NbSe2 présente une CDW en dessous de TCDW = 33 K à pression ambiante. Au-dessus deTCDW, les mesures inélastiques, aux neutrons [3] et aux rayons X [132], montrent qu’il existe deux phonons mous précurseurs de la CDW, et que l’énergie d’au moins un de ces deux phonons tend vers zéro àTCDW. Sous pression, les mesures de résistivité [5] montrent queTCDWdiminue progressivement, et que la CDW disparaît entre 3.5 et 5 GPa. De récentes mesures de diffraction des rayons X [29] indiquent que la pression critique PCDW est de 4.6 GPa.

Au delà de 4.6 GPa, la disparition de la CDW n’est pas corrélée à un changement abrupt des propriétés supraconductrices : la Tc varie de 1.5 K entre 0 à 20 GPa, et elle présente un maximum de 8.5 K à 10 GPa [115]. De nombreuses mesures (cf. Chap. 1) montre que le gap supraconducteur de 2H-NbSe2 à pression ambiante est soit anisotrope soit multiple. Suite aux mesures effectuées sur 2H-NbS2, nous avons montré que les propriétés supraconductrices particulières de 2H-NbS2 et 2H-NbSe2 ne sont pas directement liées à la CDW. En revanche, des phonons mous sont présents dans les deux composés, et ceux-ci contribuent de façon majeure à la constante de couplage électron-phonon d’après des calculs phénoménologiques [86]. Une question se pose alors : les propriétés supraconductrices des deux composés ne seraient-elles pas liées principalement aux phonons mous, plutôt qu’à la présence de la CDW ?

Dans l’affirmative, on s’attend, d’une part, à observer des phonons mous dans 2H-NbSe2sous pression, au delà de PCDW, de façon similaire à 2H-NbS2 (i.e. des phonons mous dont l’énergie extrapolée à température nulle reste positive). D’autre part, ces phonons mous devraient persister tant que la Tc reste élevée,i.e.au moins jusqu’à 10 GPa. Un article de Friedel [34] suggérait que ceci était relativement improbable. Nous avons donc voulu vérifier expérimentalement si des modes de phonon mous restaient ou non présents dans 2H-NbSe2 au delà dePCDW.

Pour cela, nous avons mesuré la dépendance en température et en pression de la dispersion des phonons de 2H-NbSe2, par diffusion inélastique des rayons X (IXS). De telles mesures représentent un véritable challenge expérimental, rendu possible grâce au flux important de la ligne ID28 à l’ESRF et au récent développement d’un cryostat 4He, optimisé pour cette ligne, pouvant accueillir une cellule à enclume diamant. Ce sont les premières mesures IXS réalisées avec succès dans de telles conditions.

Dans la première partie de ce chapitre, je caractérise les échantillons de 2H-NbSe2. Ensuite, je présente la configuration de la ligne de lumière pour l’IXS, puis les résultats des expériences sous pression et à basse température. Enfin je discute des effets de la pression et de la température sur les phonons.

5.1 Échantillons

Figure 5.1 – Maille primitive de 2H-NbSe2. Groupe d’espace P63/mmc (n˚194), a =b = 3.44Å c = 12.54Å, l’atome de Niobium occupe le site de Wyckoff 2b en (0,0,14), et le Sélénium est en 4f à (13,23,18).

Les échantillons de 2H-NbSe2ont été synthétisés par L. Cario de l’IMN Nantes. Il utilise la technique de croissance en phase vapeur dans des tubes scellés, en quartz, avec de l’iode comme agent de transport [79]. Les échantillons ont une forme d’hexagone de dimensions typiques comprises entre 100×100×20µm3et 1000×1000×100µm3 (~a×~b×~c).

Pour les mesures IXS nous avons utilisé deux échantillons hexagonaux d’environ 0.1×0.1×0.05 mm3. Préalablement j’ai caractérisé un autre échantillon du même lot, en mesurant sa résistivité dans le plan (~a,~b) par la méthode quatre-fils. Les contacts électriques ont été réalisés à la laque platine, et la dépendance en température a été étudiée de 2 K à 300 K dans un cryostat à4He pompé.

La Fig. 5.2a présente la dépendance en température de la résistivité. Le RRR est de 25, c’est un peu plus faible que les meilleurs échantillons rencontrés dans la littérature, mais la transition CDW est bien visible. Elle apparaît sous la forme d’une brisure de pente dans la résistivité autour de 33 K. La Fig. 5.2b montre que l’échantillon est supraconducteur en dessous de 6.95 K, avec une largeur de transition d’environ 50 mK ce qui souligne sa très bonne homogénéité. Dans la littérature on trouve une Tc très proche, typiquement : 7.1 K [36,83].

Les dimensions des échantillons font quelques centaines de micromètres et elles sont ainsi bien adaptées pour les mesures IXS. La diffusion inélastique des neutrons sous pression et à basse température est une technique déjà maîtrisée, qui était aussi envisageable, mais elle requiert des échantillons de taille centimétrique. En conséquence, des problèmes d’homogénéité peuvent surgir. De plus, des échantillons de cette taille nécessitent l’emploi de cellule piston-cylindre pour appliquer la pression, ce qui permet seulement d’atteindre des pressions de quelques gigapascals. Au contraire, avec l’IXS, la petite section du faisceau autorise l’emploi de cellules à enclume diamant, qui permettent actuellement d’atteindre 40 GPa, et les dimensions de l’échantillon peuvent être réduites à quelques dizaines de micromètres. Ces mesures ont été réalisées sur la ligne de lumière ID28 à l’ESRF.