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6.4 Mesures de H c2

6.4.2 Mesures de chaleur spécifique AC

Dispositif expérimental

Le dispositif de mesure de la chaleur spécifique alternative est présenté Fig.6.19. L’échantillon est disposé au centre d’une croix constituant un thermocouple. Ce thermocouple est fixé sur un

porte-Figure6.19 –Partie basse température du dispositif de mesure de chaleur spécifique AC.

échantillon formé d’un bloc de cuivre massif. Afin d’homogénéiser la température, le chauffage du bloc est disposé sur la même extrémité que le point froid relié au bain de4He. La température du bloc (Tbase) est régulé à 103–104K près à l’aide d’un thermomètre Cernox disposé de l’autre côté. Le signal du thermocouple passe d’abord dans un transformateur ×100, puis dans un préamplificateur ×100 et est finalement mesuré par un lock-in Stanford Research SRS830. Ces rapports d’amplification ont été choisis afin que le bruit de la chaîne de mesure soit dominé par le bruit thermique au niveau de l’échantillon, tout en tenant compte des contraintes liées au volume occupé par le transformateur. Le préamplificateur a un gain suffisamment grand pour pouvoir négliger le bruit d’entrée du lock-in, et de même, le gain du transformateur est suffisamment élevé pour pouvoir négliger le bruit du préamplificateur.

D’autre part un nanovoltmètre peut être relié en parallèle sur le thermocouple afin de mesurer le petit écart de température (TDC=TTbase) entre l’échantillon et le porte-échantillon en régime stationnaire. Principe

L’évolution de la température de l’échantillon est régie par l’équation standard de diffusion thermique CdT

dt +K(TTb) =P0+P1ejωt (6.60) Cest la chaleur spécifique de l’échantillon,Kla conductivité de la fuite thermique via le thermocouple, et Pn est l’amplitude de la n-ième harmonique de la puissance thermique imposée, de pulsation ω. La solution de cette équation est

T =Tb+TDC+TACejωt (6.61) TAC= P1 K+jCω et TDC= P0 K (6.62)

La Fig. 6.20schématise ces trois composantes.

La tension V mesurée aux bornes du thermocouple est reliée à la température via le coefficient de SeebeckS(T, H) V = Z Tb+TDC+TAC Tb S(T, H) dT = Z Tb+TDC Tb S(T, H) dT | {z } VDC + Z Tb+TDC+TAC Tb+TDC S(T, H) dT | {z } VAC 158

Figure 6.20 –La variation de température de l’échantillon en fonction du temps se décompose en trois parties : T =Tb+TDC+TACejωt.

En développant la première intégrale au second ordre avec l’approximation du point milieu, il vient : VDC≈S(Tb+TDC

2 , H)TDC (6.63)

et commeTACTDC, le développement deVAC conduit à

VAC≈S(Tb+TDC, H)TAC (6.64) L’amplitudeVACde la tension mesurée par le lock-in est ainsi reliée à l’amplitude deTACvia le coefficient de SeebeckS(T, H) du thermocouple. La dépendance en champ et en température du coefficient Seebeck a été calibrée. Pour déduire la chaleur spécifique au moins deux méthodes sont possibles.

1. La première possibilité est d’utiliser directement l’amplitude deTAC

|TAC|= P0 q 1 + K 2 (6.65)

Au-dessus de la pulsation de coupure τ1

ext = KC, cette expression devient équivalente à P0

i.e.

inversement proportionnelle à la chaleur spécifique. À cause du temps de réponse de l’électronique et du couplage thermique entre l’échantillon et le thermocouple, il existe aussi une seconde pulsa-tion de coupure, τ1

int, au delà de laquelle l’amplitude de TAC diminue plus rapidement que ω1. Le comportement fréquentiel est résumé Fig.6.21.

On choisit donc une fréquence de travail proche de KC dans la fenêtre KC ω 1

τint, afin de maximiser l’amplitude deTAC. Évidemment, ceci impose a minima que le couplage thermique entre l’échantillon et le support soit suffisamment bon pour que τ1

int soit supérieur à KC. Réciproquement, si le couplage thermique est bon, il faut aussi que la chaleur spécifique C de l’échantillon soit suffisamment grande, et la fuite thermique K suffisamment petite, pour que KC soit petit devant

1

τint.

2. La seconde possibilité est d’utiliser l’amplitude et la phase du signal. On choisit alors une pulsation proche de τ1

ext, car à cette pulsation les parties réelles et imaginaires ont la même valeur, ce qui permet d’avoir une bonne sensibilité sur la phase. Le déphasage introduit par la chaîne de mesure est connu. On peut alors utiliser l’expression deVAC où les parties réelles (in-phase, X) et imaginaires (out-of-phase, Y) du signal apparaissent explicitement

Figure 6.21 – Au delà d’une pulsation τ1

ext = KC l’amplitude de ω×TAC atteint un plateau de valeur

P

C. Au delà de la pulsation de coupure τ1

int, due au temps de réponse de l’électronique et au couplage thermique entre l’échantillon et le thermocouple, l’amplitude de TAC diminue de nouveau.

|VAC|=S×TAC=S×√ P0 K2+C2ω2 X=|VAC|cos(φ) =|VAC|√ K K2+C2ω2 Y =|VAC|sin(φ) =−|VAC|√ K2+C2ω2

La mesure deVAC permet d’en déduire la chaleur spécifique de deux façons. On peut d’une part travailler avec les valeurs tabulées de la fuite thermique K(T)

Y X = sin(φ) cos(φ) = K(T) ∝ −C T (6.66)

en effet, la valeur de K est proportionnelle à la température T d’après la loi de Wiedemann–Franz, pourvu que sa résistivité soit constante (ce qui est le cas à basse température). D’autre part, on peut aussi travailler avec les valeurs tabulées du pouvoir thermoélectrique S(H,T)

S(H, T)

|VAC| sin(φ) =

P C (6.67)

La puissance P apportée est inconnue. En revanche cette puissance est très stable grâce à la régu-lation fine de la température de la diode IR. On peut ainsi mesurer les variations relatives de la chaleur spécifique. La comparaison des deux résultats permet de vérifier la fiabilité de la mesure. Pour chaque valeur de l’angle (entre l’excitation magnétique de la bobine supraconductrice et l’axe ~c de l’échantillon), nous avons fixé successivement plusieurs valeurs de l’excitation magnétique. Et pour chaque valeur de l’excitation nous avons fait une rampe descendante en température. Une courbe typique de rampe en température est présentée Fig.6.22. La transition est relativement élargie, pour déterminer la température de transition, nous avons pris comme critère : 50% du saut à la transition. Nous obtenons ainsi une valeur de Hc2 similaire à la valeur obtenue par les mesures de susceptibilité magnétique AC avec micro-sondes Hall.

Figure 6.22 – Mesures relatives de chaleur spécifique AC sous champ, dans l’échantillon 13-C5 de

2H-NbS2, pour un angle de 83˚entre l’excitation magnétique et l’axe~c. Les points rouges indiquent 50% du saut à la transition supraconductrice : nous utilisons ce critère pour déterminerHc2(T, θ).

Chapitre 7

2H-NbS

2

: Propriétés

supraconductrices

Dans 2H-NbSe2, une CDW se développe en dessous deTCDW= 33 K, et coexiste avec la supraconduc-tivité en dessous deTc = 7.1 K. Les mesures de chaleur spécifique [36, 105], de spectroscopie tunnel [40, 46], d’oscillations quantiques [23] et de longueur de pénétration magnétique [33] montrent toutes que ce composé est caractérisé par la présence de deux gaps supraconducteurs : ∆1 = 1.0±0.1kBTc et ∆2= 2.0±0.3kBTc. Il a été suggéré que la CDW pourrait être à l’origine de l’une ou l’autre de ces deux échelles d’énergie [8,17,33,58].

Afin de discriminer l’influence de la CDW sur l’état supraconducteur dans les TMD nous nous sommes intéressés au composé 2H-NbS2. Il est le seul, parmi les quatre composés supraconducteurs 2H-MX2 (M=Nb,Ta ; X=S, Se), à ne pas présenter de CDW [35]. Ce composé iso-structural, iso-électronique mais sans CDW, peut donc servir de « composé témoin ». Les mesures de spectroscopie tunnel (STS) [41] et de chaleur spécifique [55] ont justement montré qu’il existait aussi un gap supraconducteur réduit ∆1 = 1.1±0.1kBTc dans le composé 2H-NbS2. La signature d’un gap réduit a aussi été observée par notre équipe via des mesures relatives de la longueur de pénétration magnétique [26].

Cependant, dans la littérature, il n’existait jusqu’à présent qu’une seule valeur publiée de la longueur de pénétration magnétique de 2H-NbS2 à température nulle. Elle provenait d’une mesure d’aimanta-tion [122], qui peut éventuellement être affectée par les hétérogénéités de champ et l’effet démagnétisant. Dans ce chapitre, je présente des mesures de premier champ critique à basse température jusqu’à 0.3 K, par la technique des micro-sondes Hall sur des monocristaux de 2H-NbS2. J’en déduis d’abord l’anisotropie et la dépendance en température du premier champ critiqueHc1, ce qui me permet d’estimer la longueur de pénétration magnétique à température nulle dans les deux directions cristallographiques. Ensuite, je présente le résultat de l’analyse conjointe avec les mesures relatives de longueur de pénétration magnétique. Finalement, je présente la dépendance angulaire du second champ critique mesurée par chaleur spécifique AC et par susceptibilité magnétique AC. Cette dépendance est globalement en accord avec les mesures déjà publiées [55,87], mais l’analyse détaillée suggère la présence de supraconductivité de surface.