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Régulation transcriptionnelle des acteurs de l’homéostasie du fer, zinc et cuivre

La plante a développé une batterie de mécanismes de régulations transcriptionnelles pour répondre aux variations (carence, excès) de la concentration des métaux dans l’environnement, pour lutter contre certains stress (oxydatifs, lumineux, ...). Ces mécanismes sont aussi impliqués dans la régulation de la compartimentation des métaux dans la plante ou la cellule végétale, ou encore dans le développement.

1. Régulation transcriptionnelle des protéines impliquées dans l’homéostasie du cuivre Les plantes nécessitent des mécanismes pour réguler l’import du cuivre et sa distribution à cause de la variabilité de la disponibilité de ce métal dans la nature. Les besoins en cuivre dans un tissu dépendent aussi des conditions de lumière et du stade de développement.

Les transporteurs COPT1 et COPT2 sont réprimés en réponse à une forte concentration en cuivre, ce qui n’est pas le cas des transporteurs COPT3-5 (Sancenon et al., 2003). Inversement, l’expression de HMA5 augmente lors d’un excès de cuivre (Andrés-Colás et al., 2006). Une étude transcriptomique effectuée sur 8300 gènes d’Arabidopsis a révélé que

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17 plusieurs gènes potentiellement impliqués dans l’homéostasie du cuivre sont co-régulés par une carence en cuivre (Wintz et al., 2003).

L’expression de la métallochaperone CCS chloroplastique est régulée par la concentration en cuivre de la même manière que les SOD à cuivre CSD1 et CSD2. Pour de faibles concentrations en cuivre, la SOD à fer est active tandis que l’expression de CCS et des SOD à cuivre CSD1 et CSD2 est très faible, peut être pour concentrer les flux de cuivre vers la plastocyanine. A de plus fortes concentrations en cuivre, la SOD à fer n’est plus exprimée et les SOD à cuivre sont activées. L’analyse de l’expression des gènes codant ces protéines dans les mutants paa1 et paa2 suggère fortement que la concentration en cuivre dans le stroma régule l’expression de ces gènes nucléaires. Ceci suggère l’existence, entre le chloroplaste et le noyau, d’une voie de signalisation sensible à la concentration en cuivre chloroplastique (Abdel-Ghany et al., 2005).

Récemment, un nouveau système de régulation des protéines à cuivre a été mis en évidence, système qui met en jeu des micro-ARNs. Ces micro-ARNs, miR397, miR398, miR408, et miR857 ciblent les transcrits de CCS, CSD1, CSD2, COX5b ainsi que ceux des lactases et de la plantacyanine. Tous les gènes cibles codant des protéines à cuivre, ce groupe de micro- ARNs a été appelé "micro-ARNs à cuivre" (Cu-miRNA) (Abdel-Ghany & Pilon, 2008). Lorsque le cuivre devient limitant, ces micro-ARNs à cuivre sont transcrits et viennent interférer avec l’expression des gènes cités précédemment. Ceci entraîne une baisse du niveau de production des protéines cibles, permettant de redistribuer le cuivre vers des protéines et des processus vitaux pour la plante comme la plastocyanine et la photosynthèse. Ces micro- ARNs à cuivre ne seraient donc utilisés que pour contrôler l’expression de protéines à cuivre non essentielles (ou dispensables, comme les SOD à cuivre, voir plus haut). L'expression de COPT1, COPT2 et des micro-ARN à cuivre serait contrôlée par le facteur de transcription SPL7, un régulateur global de l’homéostasie du cuivre (Yamasaki et al., 2009).

2. Régulation transcriptionnelle des protéines impliquées dans l’homéostasie du fer

La réponse primaire des plantes en réponse à une déficience en fer est régulée par une activation transcriptionnelle contrôlée. Chez la tomate, le facteur de transcription LeFER contrôle la transcription de la Fe3+ réductase et du transporteur LeIRT1 lorsque le fer est limitant (Ling et al., 2002). L’orthologue de LeFER chez Arabidopsis est le facteur de transcription FIT1 (Fe-deficiency-Induced Transcription factor 1) (Colangelo & Guerinot, 2004). Cependant, d’autres facteurs de transcription doivent être impliqués dans cette régulation car FIT1 ne contrôle l’expression que de 71 des 179 gènes dont l’expression varie dans la racine suite à une carence en fer (Colangelo & Guerinot 2004). Lors d’une carence en fer, l’expression du transporteur de cuivre COPT2 est activée alors que l’expression des protéines de stockage du fer comme la ferritine ne l’est pas (Lescure et al., 1991).

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18 3. Régulation transcriptionnelle des protéines impliquées dans l’homéostasie du zinc

Contrairement à ce qui a été déjà identifié pour le cuivre et le fer, aucun régulateur global contrôlant l’homéostasie du zinc n’a été caractérisé à ce jour.

Cependant, l’étude du transcriptome de deux espèces qui sur-accumulent du zinc et du plomb, Arabidopsis halleri et Thlaspi caerulescens, a permis d’identifier des variations de niveaux de transcrits à l’échelle du génome permettant ainsi de mieux comprendre les réponses transcriptionnelles mises en jeu dans ces plantes (Talke et al., 2006 ; Van de Mortel et al., 2006). Notamment, ces données montrent l’existence de liens entre l’homéostasie du zinc et celle du fer : lorsqu’une plante est placée sur un milieu riche en zinc, l’expression du transporteur de fer IRT1 augmente (Van de Mortel et al., 2006).

Comme nous le présente ce chapitre, les transporteurs jouent un très grand rôle dans l’homéostasie des métaux. Parmi eux, les ATPases de type P1B jouent un rôle primordial chez

la plante dans l’homéostasie du cuivre et du zinc.

III. LES ATPASES DE TYPE P

La superfamille des pompes ioniques de type P regroupe des transporteurs utilisant l’énergie fournie par l’hydrolyse de l’ATP pour permettre le transport de petits cations ainsi que d'aminophospholipides (Axelsen et al., 1998 ; Folmer et al., 2009) contre un gradient de concentration. Les ATPases de type P sont présentes dans tous les organismes vivants étudiés et séquencés jusqu’à présent sauf dans quatre bactéries et une archéobactérie. Elles possèdent toutes la séquence consensus DKTGT, 6 à 12 hélices transmembranaires prédites, ainsi que des domaines solubles très conservés. Elles sont caractérisées par la formation d'un intermédiaire phosphorylé covalent au cours de leur cycle catalytique. Contrairement aux autres ATPases, les ATPases de type P sont constituées d’une sous-unité catalytique unique et accessoirement d’une ou deux sous-unités additionnelles régulatrices (Axelsen et al., 1998). Ces ATPases sont impliquées dans de nombreux processus biologiques fondamentaux comme la génération de gradients électrochimiques utilisés ensuite comme source d’énergie pour les transporteurs secondaires, la signalisation cellulaire, le transport de micronutriments essentiels, la détoxification d'ions toxiques dans la cellule.

En général, les ATPases de type P sont plus répandues et plus variées chez les eucaryotes que chez les bactéries et les archéobactéries. Arabidopsis a la particularité de posséder, dans son génome, 46 gènes codant des ATPases de type P. C'est le seul organisme séquencé qui possède autant de protéines de cette famille soulignant ainsi leur importance chez les plantes vasculaires.

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A. Classification

Les ATPases de type P sont divisées en 5 groupes référencés de 1 à 5 en fonction de leurs homologies de séquences. Au sein de ces groupes, plusieurs sous-groupes peuvent être distingués en fonction de la spécificité de substrats.

Les ATPases de type P1 sont les pompes les plus simples et probablement les plus anciennes. Le type 1A est la classe la plus petite contenant seulement des pompes ioniques bactériennes comme la pompe à potassium Kdp. Aucun gène homologue n'a été trouvé chez Arabidopsis. Le type 1B comprend des ATPases impliquées dans le transport des métaux de transition. Huit gènes ont été identifiés chez Arabidopsis (voir description complète de cette sous-famille paragraphe III, D.).

Les ATPases de type P2 et P3 ont été très largement étudiées. Elles sont impliquées dans le transport des ions H+, K+, Na+ et Ca2+. Les types 2A sont similaires aux pompes SERCA animales du réticulum endo- et sarco-plasmique. Quatre ATPases de type 2A ont été identifiées chez Arabidopsis dont une (ECA1) est localisée dans les membranes du réticulum endoplasmique (Liang et al., 1997). Les ATPases de type 2B transportent aussi du calcium mais sont similaires aux pompes animales de la membrane plasmique et de l'ATPase de levure PCA1. Dix membres de cette classe ont été identifiés chez Arabidopsis dont quatre ont été partiellement caractérisés. Tous possèdent un domaine de liaison à la calmoduline prédit en N-terminal, qui serait un domaine de régulation auto-inhibiteur. Les types 2C et 2D regroupent respectivement les ATPases Na+/K+ et les ATPases Na+. Aucun homologue n'a été identifié pour l'instant chez Arabidopsis.

Les ATPases de type 3A sont des pompes à protons qui sont localisées presque exclusivement à la membrane plasmique des plantes et des champignons. Elles permettent de maintenir un gradient de pH de part et d'autre de la membrane, créant ainsi un potentiel de membrane. Dans les cellules animales, le potentiel de membrane résulte de l'activité des pompes Na+/K+, pompes absentes chez les végétaux. Le type 3B regroupe des pompes Mg2+ bactériennes. Onze protéines de type 3A ont été identifiées chez Arabidopsis dont AHA1 et AHA2 qui sont les deux ATPases de type P les plus exprimées dans la plante.

Les ATPases de type P4 n'ont été identifiées pour l'instant que chez les eucaryotes chez lesquels elles sont impliquées dans le transport des lipides et dans le maintien de l'asymétrie des bicouches lipidiques. Le génome d'Arabidopsis comprend douze ATPases de type 4 dont la protéine ALA1 qui serait impliquée dans le "flipping" des aminophospholipides.

La spécificité des substrats des ATPases de type P5 n'est pas connue car aucun des membres de cette famille n'a été caractérisé à ce jour. Arabidopsis possède une ATPase de ce type. L'ensemble des ATPases de type P identifiées dans le génome d'Arabidopsis est récapitulé dans le tableau 2 ci-dessous (Axelsen & Palmgren, 2001 ; Kühlbrandt, 2004).

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Famille Sous-famille Spécificité Nombre trouvé

chez A. thaliana P1A K+ 0 P1 P1B Cu+, Ag+, Cu2+, Cd2+, Zn2+, Pb2+, Co2+ 8 P2A Ca2+ 4 P2B Ca2+ 10 P2C Na+/K+, H+/K+ 0 P2 P2D Na+ 0 P3A H+ 11 P3 P3B Mg2+ 0 P4 Lipides 12 P5 Inconnue 1

Tableau 2 : Classification des ATPases de type P selon leur spécificité et présence de ces ATPases chez A. thaliana.