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3. Encadrement du risque systémique

3.1 Modèle actuel d’encadrement du risque systémique

3.1.1 Champs de compétence des régulateurs financiers et répartition des pouvoirs

3.1.1.2 Régulateurs provinciaux

L’interdépendance des marchés bancaires et des capitaux fait en sorte que le risque systémique n’est pas confiné à l’un ou à l’autre. Ayant étudié la régulation des institutions financières, nous allons maintenant voir l’importance de la régulation du risque systémique en valeurs mobilières qui est incluse, depuis 1998, aux trois objectifs de l’OICV regroupant plus de 90 % des régulateurs de ce secteur588. Par ailleurs, deux nouveaux principes de régulation de l’OICV ont été ajoutés en 2010 sur le risque systémique, soit l’utilisation d’un processus de gestion, de mitigation et de contrôle du risque systémique ainsi que d’un processus de révision de la régulation589. Cela s’explique par la menace d’un risque systémique lié aux opérations quotidiennes des marchés des capitaux causé par les innovations financières faisant en sorte que la régulation des participants et des nouveaux produits doit être conséquente. La professeure Anand croit également que la mission des régulateurs provinciaux nécessite la surveillance des transactions pouvant affecter la volatilité du marché et résulter en un risque systémique590. Néanmoins, peu de régulateurs ont intégré l’objectif de gestion du risque systémique dans leur loi sur les valeurs mobilières quoi qu’il soit dans la Loi sur les

instruments dérivés du Québec591.

L’Autorité a tout de même reconnu le Mouvement Desjardins comme étant une institution financière d’importance systémique interne selon les critères établis par le Comité de Bâle592. En conséquence, il est régulé de manière prudentielle selon les directives fondées sur des principes de saines pratiques commerciales et de gestion prudente, ce qui inclut des exigences supérieures au niveau de la capitalisation et de la divulgation593 pour le respect des normes

588 A. ANAND, préc., note 505, 980 et 981. 589 OICV, préc., note 516, p. 2.

590 A. ANAND, préc., note 505, 944. 591 Id., 941 ; RLRQ, c. I-14.01, art. 2(5).

592 AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS, L’Autorité identifie le Mouvement Desjardins comme étant une

institution financière d’importance systémique pour le Québec, 2013, en ligne :

<http://www.lautorite.qc.ca/fr/communiques-2013-autre.html_2013_desjardins-importance-systemique.html> (consulté le 17 novembre 2014).

593 AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS, Avis relatif à la désignation du Mouvement Desjardins à titre

internationales. La surveillance du Mouvement Desjardins par l’Autorité se fait par l’élaboration du profil de risque global de l’institution, l’élaboration du plan de surveillance triennal et la réalisation des travaux de surveillance ainsi que leur suivi594.

Outre leur rôle de régulateur prudentiel des institutions financières d’importance systémique interne sur lesquelles ils ont compétence, les régulateurs provinciaux gèrent indirectement le risque systémique par leur régulation des valeurs mobilières comprenant l’émission de titres, la divulgation d’information matérielle, l’inscription des intermédiaires et leur conduite des affaires notamment. Par exemple, le Règlement 31-103 sur les obligations et dispenses

d’inscription et les obligations continues des personnes inscrites595 des ACVM sert à prévenir le risque systémique par des exigences de capital et de gestion des risques, car ces derniers peuvent se propager par les intermédiaires vu leurs liens avec les émetteurs et les investisseurs de même que par leurs pratiques de vente596. Considérant le rôle de l’intermédiaire dans la transmission des risques, l’OICV est d’avis que la supervision de la conduite des affaires par les régulateurs en valeurs mobilières est essentielle pour éviter que les intermédiaires reçoivent des avantages incitant la vente de produits risqués et pour gérer les conflits d’intérêts597. L’OICV prône également la supervision des innovations financières pour évaluer leurs répercussions sur la stabilité financière et les réglementer conséquemment lorsqu’elles impliquent un manque de transparence ou de contrôle des risques598.

Pour aller plus loin, puisque la « prévention des risques systémiques par les autorités de valeurs mobilières n’est atteint[e] qu’indirectement, par la poursuite de leur rôle traditionnel de réglementation des transactions particulières »599, le professeur Choi propose que la réduction de ces risques nécessite seulement qu’elles entreprennent une approche plus forte <http://www.lautorite.qc.ca/files/pdf/reglementation/assurances-inst-depot/avis-ifis-d-cq_desjardins.pdf>

(consulté le 17 novembre 2014).

594 AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS, Cadre de surveillance des institutions financières, 2011, p. 6,

en ligne : <https://www.lautorite.qc.ca/files/pdf/reglementation/assurances-inst-depot/cadre-surveillance-2011- fr.pdf> (consulté le 17 novembre 2014).

595 RLRQ, c. V-1.1, r. 10.

596 C. FORD et H. GILL, préc., note 495, à la page 160. 597 OICV, préc., note 516, p. 2.

598 Id., p. 3.

pour atteindre leur mission600. C’est-à-dire que si tous les régulateurs provinciaux réglementaient leurs marchés locaux de sorte que les investisseurs aient l’information suffisante sur les risques de leurs investissements, que les transactions soient transparentes et compensées, que les évaluations des agences de notation soient appropriées, etc., alors les marchés seraient efficients et le risque systémique mitigé sans qu’une perspective nationale soit nécessaire601. Il ajoute que les régulateurs provinciaux offrent déjà une réponse provinciale aux enjeux systémiques par les politiques réglementaires développées et leur harmonisation pancanadienne par les ACVM, dont l’élaboration d’un cadre commun de réglementation pour les dérivés de gré à gré, en plus du partage d’information entre eux et avec le BSIF602. De plus, les régulateurs provinciaux sont impliqués dans la régulation des systèmes de compensation et de règlement puisqu’ils les reconnaissent, ce qui leur permet d’approuver leurs règles603.

Comme la gestion du risque systémique est une hybridation de la régulation locale et nationale, donc provinciale et fédérale, auprès de tous les participants de marché, la réflexion sur la connexion à instaurer entre ces deux paliers est nécessaire, notamment pour permettre la circulation de l’information. À plus haut niveau, les régulateurs sont impliqués auprès d’organisations internationales visant la détermination d’un cadre minimum pour la gestion du risque systémique. En effet, l’OICV indique que les régulateurs en valeurs mobilières doivent entretenir des relations étroites avec les régulateurs nationaux ou internationaux, les banques centrales et les OAR pour suivre les changements apportés par ceux-ci à leur encadrement et bénéficier de leurs initiatives604.