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1. Harmonisation de la réglementation et coordination des processus réglementaires

1.1.2 Régime de passeport canadien

Au-delà des ACVM, le Conseil provincial, rassemblant les ministres provinciaux et

76 FRASER MILNER CASGRAIN LLP, « Les défis de l’intégration de l’économie québécoise aux marchés des

capitaux canadiens et américains », 11 février 2013, p. 6, en ligne :

<http://acjt.ca/medias/63/Memoire_FMC_Examen_du%20projet_de_loi_14.pdf> (consulté le 1 décembre 2014).

77 Québec (Procureur général) c. Canada (Procureur général), préc., note 3, par. 444. 78 L.V.M.

territoriaux responsables, établit les orientations à prendre en approuvant « les stratégies et les plans d’action pour améliorer le cadre réglementaire des valeurs mobilières »80. Constitué en 2004 par le Protocole d’entente provincial – territorial sur la réglementation des valeurs

mobilières81 (ci-après « Protocole d’entente provincial »), il a pris plusieurs résolutions pour une réforme pancanadienne des valeurs mobilières dont la plus importante a été la création du régime de passeport. Dans le cadre de ses rencontres annuelles, le Conseil provincial assume sa responsabilité de discuter des enjeux en matière de politiques réglementaires pour orienter les régulateurs provinciaux dans l’établissement de leurs priorités. À cet effet, il prépare un échéancier de mise en œuvre de l’élaboration de la réglementation harmonisée qu’il surveille et révise82. De plus, le Conseil provincial surveille le fonctionnement du régime de passeport, analyse l’efficacité des règlements harmonisés et révise le Protocole d’entente provincial83. Ce dernier lie les provinces et territoires quant au respect de certains principes tels :

« [d]es normes les plus rigoureuses de protection des investisseurs appliquées efficacement et de façon cohérente; [l]'accès efficace au capital; [l]a mise en œuvre d’une réglementation efficace, efficiente et simplifiée; [l]a capacité d’adaptation à l’évolution des marchés; [l]a transparence, l’accessibilité et la fiabilité du cadre réglementaire pour les parties intéressées, dans une structure clairement établie de reddition de comptes auprès des autorités publiques; [d]es lois régissant les valeurs mobilières hautement harmonisées et la définition de paramètres encadrant les exceptions reflétant les particularités locales et régionales »84.

Ce Protocole d’entente provincial signé par les ministres responsables, reconnaissant l’importance de la participation des régulateurs provinciaux aux ACVM, procure une certitude et une pérennité aux efforts d’harmonisation pancanadienne et de coopération interprovinciale. Par ailleurs, il permet que des règles locales soient adoptées pour que les régulateurs provinciaux innovent et expérimentent de nouvelles avenues. Pour ce faire, tout projet de loi

80 CONSEIL PROVINCIAL-TERRITORIAL DES MINISTRES RESPONSABLES DE LA

RÉGLEMENTATION DES VALEURS MOBILIÈRES, Protocole d’entente provincial – territorial sur la

réglementation des valeurs mobilières, 2004, art. 3.1, en ligne :

<http://www.valeursmobilieres.org/2004_0930_mou_francais.pdf> (consulté le 16 décembre 2014) (ci-après « Protocole d’entente provincial »).

81 Id.

82 Id., art. 3.1 et 3.2. 83 Id., art. 3.1. 84 Id., art. 2.1.

non harmonisé doit d’abord être justifié en fonction des politiques gouvernementales, puis les moyens de minimiser les incidences de ces règles locales sur les autres juridictions et sur l’efficacité du régime de passeport pour assurer son intégrité sont présentés85.

Plus particulièrement, le Protocole d’entente provincial a pour objectif principal la reconnaissance des compétences provinciales en valeurs mobilières par la mise en œuvre du régime de passeport86 puisqu’il permet à chaque régulateur provincial d’exercer seul la compétence sur les entités dont il est le régulateur principal. Entré en vigueur en 2008, le régime de passeport est utilisé depuis par les ACVM, sauf l’Ontario, qui ont adopté le

Règlement 11-102 sur le régime de passeport87 (ci-après « Règlement 11-102 »), pour l’amélioration du système de régulation, car il permet d’éviter les dédoublements entre les régulateurs dont les responsabilités de régulation de certains participants, produits, entités ou activités se chevauchent88. Le régime de passeport vise donc l’harmonisation des procédures à travers les provinces et territoires canadiens afin que les assujettis puissent bénéficier d’un guichet unique d’accès pour déposer leurs demandes. Il offre ainsi davantage de cohérence et d’efficacité dans leurs activités impliquant plusieurs régulateurs provinciaux.

Concrètement, par le régime de passeport, un émetteur peut émettre ses titres à travers le Canada en ayant son prospectus visé que par son régulateur principal puisqu’il sera automatiquement réputé visé par tous les autres régulateurs provinciaux où il a payé des frais89. De même, les personnes désirant être inscrites dans plusieurs territoires n’ont qu’à faire leur inscription auprès de leur régulateur principal. Finalement, le régime de passeport inclut aussi les demandes de dispenses discrétionnaires et les dépôts d’information continue90 qui, suite à l’examen de leur régulateur principal, sont valides auprès de tous les régulateurs provinciaux sauf en Ontario.

85 Id., art. 5.10. 86 Id., p. 1.

87 Règlement 11-102, préc., note 34. 88 E. J. PAN, préc., note 10, 808.

89 Protocole d’entente provincial, préc., note 80, art. 5.3. 90 Id.

La logique du régime de passeport est que les régulateurs provinciaux se vouent une confiance réciproque dans leur examen des documents et pour les décisions rendues, par reconnaissance mutuelle ou délégation de pouvoirs décisionnels91, vu leur réglementation harmonisée. Ainsi, la décision prise par le régulateur principal est « réputée prise par les autres régulateurs sans qu’ils aient à intervenir »92. En plus de pouvoir déposer leurs demandes et obtenir des approbations auprès de leur régulateur principal seulement, les assujettis n’ont qu’à respecter sa réglementation pour être réputés en conformité avec les exigences des autres juridictions canadiennes où ils font affaire quant aux sujets visés par le passeport93. Ce régime favorise donc ceux qui mènent des activités assujetties à la réglementation de plusieurs régulateurs provinciaux en diminuant les procédures administratives nécessaires. Un accomplissement du régime de passeport est d’avoir su concilier le droit civil et la Common law ainsi qu’inclure les obligations relatives à la langue française pour ceux assujettis aux lois québécoises94.

Pour l’Ontario, qui n’a pas adhéré au régime de passeport ni au Conseil provincial, lorsque la CVMO est le régulateur principal, les autres régulateurs provinciaux s’en remettent à sa décision selon le régime de passeport95. Dans le cas contraire, le déposant doit faire affaire avec deux régulateurs, car la CVMO n’a pas l’obligation de suivre la décision rendue par le régulateur principal, mais elle peut choisir d’y adhérer96.

Pour résumer, depuis les engagements de 2004, le Conseil provincial et les ACVM travaillent à l’amélioration de la réglementation des valeurs mobilières, notamment par la mise en place du régime de passeport rendu possible par l’harmonisation réglementaire.

Ainsi, « une structure décentralisée ne constitue aucunement un frein à la coordination et à

91 Id., art. 5.1.

92 AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS, préc., note 19, p. 12. 93 Protocole d’entente provincial, préc., note 80, art. 5.1.

94 Jonathan MACEY, An Analysis of the Canadian Federal Government’s Initiative to Create a National

Securities Regulator, P.P.G.Q., vol. XII, S.C.C. No 33718, juin 2010, p. 12.

95 Id.

96 ACVM, Échelle pancanadienne, en ligne : <http://www.autorites-valeurs-

l’efficacité, tout en assurant la protection des investisseurs et l’efficacité des marchés »97. Au contraire, le régime de passeport a permis la réduction des dédoublements des activités administratives des régulateurs provinciaux et leurs variations ou incohérences, ce qui a corrélativement diminué les délais de traitement des demandes et contribué grandement à la volonté d’harmonisation de la réglementation98. De plus, l’engagement des régulateurs provinciaux à travailler constamment à l’amélioration de l’encadrement des valeurs mobilières stimule leur collaboration dans la recherche d’innovations et de réformes selon l’évolution des marchés des capitaux pour maintenir une réglementation efficace et compétitive99.