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2. Mise en application des lois et règlements en valeurs mobilières

2.2 Aspects perfectibles de la régulation actuelle

2.2.1 Division des pouvoirs

2.3.1.2 Automatisation

Outre les améliorations organisationnelles, les outils de détection pourraient également être repensés. En particulier, comme les ordinateurs dépassent la capacité humaine au niveau de la recherche, du traitement d’un grand volume d’information, de la mémorisation et de la rapidité, les outils électroniques sont nécessaires aux régulateurs pour faire appliquer la loi dans le cyberespace. Effectivement, par les codes informatiques intégrant les manquements à la réglementation, les machines intelligentes peuvent repérer les comportements reprochables à l’insu des usagers de l’internet. Pour ce faire, les régulateurs doivent engager des informaticiens afin de programmer l’information à rechercher et les corrélations à faire par la cybernétique. De plus, ils peuvent constituer des banques de données gigantesques et les traiter de sorte à analyser les comportements des utilisateurs454 pour éventuellement les prédire et ainsi prévenir des contraventions. Par exemple, des chercheurs ont déterminé que l’analyse des comptes Twitter permet la détection préventive de certains délits455. Ainsi, les régulateurs devraient embaucher davantage d’ingénieurs informatiques comme le font désormais les banques, car le secteur financier est désormais informatisé.

a) Comité international pour la sécurité en ligne

Vu les perspectives novatrices de la technologie, celle-ci doit servir pour combattre à armes égales les abus en ligne étant donné l’absence de frontières de l’internet permettant aux contrevenants de passer sous le radar des régulateurs. Or, pour plus d’efficacité, la cybersurveillance nécessiterait la création d’un comité international pour la sécurité en ligne ayant pour fonction d’avertir les régulateurs lorsqu’un cas douteux est susceptible d’affecter des investisseurs situés sur leur territoire en leur transmettant l’information obtenue afin qu’ils enquêtent plus en profondeur. Pour ce faire, le comité disposerait de solutions technologiques facilitant le repérage des infractions en ligne, comme un système de déclenchement d’alertes

454 Kenneth CUKIER et Viktor MAYER-SCHÖNBERGER, « Données de masse, tyrannie numérique », (2014)

133 Manière de voir 60, 64.

455 AGENCE FRANCE PRESSE, « Twitter, nouvel outil de détection de la criminalité », Les affaires, 21 avril

2014, en ligne : <http://www.lesaffaires.com/techno/internet/twitter-nouvel-outil-de-detection-de-la- criminalite/568215> (consulté le 27 octobre 2014).

en cas d’infractions à la loi, dont les coûts seraient partagés entre les régulateurs. Par exemple, l’ISG, regroupant certaines bourses avec des OAR, joue un rôle similaire au comité proposé en partageant de l’information et des documents par une base de données commune en plus d’offrir une surveillance technologique des marchés des membres en croisant leurs données pour repérer des stratégies frauduleuses impliquant divers marchés, dont les délits d’initiés456. Ainsi, un tel comité permettant d’abord une coopération informatique interprovinciale pour les ACVM, puis globale avec les régulateurs étrangers serait une amélioration au régime actuel pour découvrir les schèmes s’étendant hors du territoire des régulateurs provinciaux.

b) Sceaux de fiabilité et hyperliens vers le registre des inscrits

De plus, ce comité pourrait être mandaté pour apposer des sceaux de certification sur les sites Web jugés fiables457 pour les investisseurs lorsque les personnes sont inscrites et que les services offerts respectent leur inscription. Une fois le sceau de fiabilité du régulateur obtenu, la réglementation des inscrits pourrait être modifiée pour leur imposer l’obligation de soumettre au préalable toute modification à leur site Web consistant en l’offre de nouveaux produits ou services à une nouvelle approbation. Une difficulté de cette solution se trouve au niveau de l’éducation des investisseurs afin de leur faire reconnaitre l’importance de s’assurer que les intermédiaires avec lesquels ils font affaire en ligne possèdent le sceau de fiabilité. Une autre est la possibilité d’apposer un faux sceau.

Une variante de cette solution serait d’imposer aux inscrits d’inclure un hyperlien vers le site de leur régulateur afin qu’ils puissent vérifier le registre des inscrits458. Ils seraient ainsi informés du régulateur responsable vers qui se tourner et développeraient le réflexe de douter lorsqu’ils visitent des sites Web qui ne contiennent pas cet hyperlien. De telles solutions seraient envisageables internationalement.

456 H. CHITIMIRA, préc., note 367, p. 151.

457 OBSERVATOIRE DU DROIT QUÉBÉCOIS DES VALEURS MOBILIÈRES, La protection des

investisseurs dans la distribution de produits et services financiers sur l’internet, février 2013, p. 67, en ligne : <http://www.lautorite.qc.ca/files/pdf/fonds-education-saine-gouvernance/projets-recherche/p-recherche-valmob- umtl-protection-internet.pdf> (consulté le 7 février 2015).

c) Système de plaintes centralisé

Outre la nécessité de repérer les infractions à la loi en ligne créée par la révolution numérique, des moyens facilitant l’efficacité des régulateurs découlent aussi des améliorations technologiques. Plus particulièrement, le fait que pour un même service offert aux investisseurs, tel que les fonds mutuels, les intermédiaires, selon leur inscription, ne sont « pas soumis aux mêmes règles (Règlement 31-103, Règles des courtiers membres de l’OCRCVM, Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, etc.), ni aux mêmes autorités d’encadrement (Autorité des marchés financiers, OCRCVM, CSF, [ACCFM], etc.) »459, et conséquemment que les manquements professionnels ne donnent pas ouverture aux mêmes services « comme les fonds d’indemnisation et les mécanismes alternatifs de règlement des différends (Fonds indemnisation des services financiers, Ombudsman des services bancaires et d’investissement, Fonds canadien de protection des épargnants, etc.), selon le professionnel visé par la plainte »460, crée de la confusion chez les consommateurs et même parfois chez les intermédiaires. Il se trouve alors que les plaintes envoyées aux régulateurs provinciaux sont souvent redirigées vers ces autres régulateurs et inversement461, ce qui utilise beaucoup de ressources inefficacement.

En guise de solution, un système informatique centralisé suffisamment sophistiqué permettrait de classer les plaintes selon leur catégorie, leur juridiction et leur priorité grâce à un formulaire électronique uniforme rempli par les clients indiquant l’information pertinente pour son classement automatique. Cette solution serait d’autant plus envisageable qu’elle servirait également à dissiper la confusion des consommateurs quant au rôle de chacun des régulateurs462, faisant en sorte qu’ils ne savent pas vers qui se référer en cas de besoin, puisque les plaintes seraient toutes acheminées à une centrale et reliées à un service d’information à cet effet.

459 R. CRÊTE et al., préc., note 254, à la page 583. 460 Id.

461 D’avril 2009 à mars 2010, l’Autorité a dû rediriger 67 plaintes à l’OCRCVM et 289 plaintes à la CSF ; C.

DUCLOS, R. CRÊTE et A. LÉTOURNEAU, préc., note 248, à la page 136.

Bref, il y a beaucoup de possibilités créées par la technologie et donc de réflexion nécessaire quant aux moyens à prendre pour mieux réguler le monde en ligne tout en se servant de celui- ci afin d’obtenir une plus grande efficacité dans la réalisation des fonctions générales de surveillance des marchés et de mise en application des régulateurs. Il en résulte que la création d’une agence de mise en application pancanadienne nécessite également de considérer un nouveau virage technologique par l’élaboration d’un système centralisé d’information et de repérage des plaintes en plus de l’adhésion à un comité international sur les activités financières en ligne ou la création de celui-ci.