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Centre réglementaire national d’information sur le risque systémique

3. Encadrement du risque systémique

3.1 Modèle actuel d’encadrement du risque systémique

3.2.3 Institutions étrangères manquantes au Canada

3.3.1.2 Centre réglementaire national d’information sur le risque systémique

Dans un autre ordre d’idée, des auteurs ont proposé un modèle alternatif, soit le Centre d’information sur le risque systémique, pouvant influer sur la régulation des valeurs mobilières sans que ses actions mènent à des chevauchements à débattre au niveau

732 E. J. PAN, préc., note 10, 809.

733 A. ANAND, M. TREBILCOCK et M. ROSENSTOCK, préc., note 491, p. 32 et 33. 734 C. FORD et H. GILL, préc., note 495, aux pages 168 et 169.

constitutionnel et sans directement créer un quatorzième régulateur pour les marchés des capitaux puisqu’il s’agirait plutôt d’un régulateur chapeautant les autres régulateurs735. Plus précisément, celui-ci aurait le pouvoir d’exiger des informations sur les marchés des régulateurs provinciaux dans une forme prédéfinie permettant leur comparaison en plus d’établir des objectifs ainsi que des exigences réglementaires comme standards minimaux que les régulateurs incorporeraient à leur réglementation736. Ainsi, les objectifs et l’information seraient centralisés, mais l’application se ferait localement, laissant alors aux régulateurs la possibilité d’expérimenter diverses façons d’atteindre les objectifs requis737.

Le Centre d’information évaluerait le respect des objectifs par les régulateurs provinciaux tout en les comparant pour déterminer ceux dont les stratégies ont produit les meilleurs résultats par l’analyse de l’information acheminée par ceux-ci sur les chambres de compensation, les bourses, les référentiels centraux, les titres, les émetteurs, les produits d’investissements, les inscrits, etc.738 Il vérifierait aussi quels régulateurs n’atteignent pas les standards déterminés. Ce modèle a pour avantage d’éviter une déréglementation par ses standards minimaux applicables à tous, tout en instaurant une compétition entre les régulateurs pour déterminer les meilleurs moyens d’atteindre les objectifs fixés. Par contre, les bénéfices de la concertation sont absents de ce modèle. Il s’agit d’une approche où le fédéral aurait le pouvoir décisionnel et le défi de traiter les données de manière efficace pour une prévention et une détection réelles du risque systémique sans que les régulateurs financiers canadiens soient nécessairement consultés alors que des objectifs, créant de la compétition, leur seraient imposés, ce qui nuirait à la coopération et à l’harmonisation.

En résumé, ces deux modèles proposent une nouvelle entité surveillant l’ensemble des marchés financiers canadiens en coordonnant la régulation du risque systémique émergeant des opérations quotidiennes des marchés des capitaux et des institutions d’importance systémique. Toutefois, dans le cas du Centre d’information, le rôle de la banque centrale, en

735 D. JOHNSTON, K. DOYLE ROCKWELL et C. FORD, préc., note 25, p. 688. 736 C. FORD et H. GILL, préc., note 495, à la page 177.

737 Id., à la page 180. 738 Id.

tant que surveillant de la stabilité du système financier, pourrait être diminué, car ses informations seraient envoyées au Centre d’information, mais son expertise pour l’analyse macroéconomique et son expérience des marchés ne serait pas utilisée par celui-ci. De plus, cette solution n’est que partielle, car bien qu’elle permette la compréhension des interrelations entre les participants et l’identification du risque systémique, elle ne procure pas un forum pour formuler des recommandations et prendre des décisions conjointement, par le partage des connaissances spécialisées, en cas de réalisation d’un risque. En outre, dans les deux modèles, la détermination de standards minimums à imposer à l’ensemble des marchés améliorerait leur efficience si les politiques sont axées sur la transparence, la dissémination de l’information, la solidité des infrastructures de marchés, la liquidité et la diminution des chocs739.

Nous préférons toutefois la création d’un Conseil canadien qui semble une solution plus adéquate, car il bénéficierait de la consultation de chacun des régulateurs, permettant ainsi une prise de décision concertée échappant aux risques d’erreurs et de capture d’un régulateur unique. Idéalement, les activités du Centre d’information pourraient être intégrées au Conseil canadien qui le chapeauterait afin que les deux solutions puissent coexister. De plus, nous croyons que le Conseil canadien permettrait une meilleure représentativité internationale puisqu’il pourrait coopérer avec ses homologues étrangers et être représenté au sein des comités internationaux par les régulateurs financiers canadiens le composant. En effet, la gestion du risque systémique implique de collecter et de partager l’information pertinente avec ses homologues pour cerner le marché interconnecté740. Dans ce contexte, le Conseil canadien est une option pour assurer à la fois les bénéfices de la décentralisation tout en permettant la coordination entre les régulateurs financiers canadiens, mais il doit être peaufiné par des relations internationales et nationales avec d’autres régulateurs non inclus à ce forum.

En effet, la participation des régulateurs financiers canadiens aux comités internationaux ainsi qu’à la conclusion de protocole d’entente est essentielle pour établir des procédures communes limitant la duplication et les engageant à une responsabilité partagée pour certaines

739 M. T. CAPPUCCI, préc., note 664, 32. 740 A. ANAND, préc., note 505, 980.

fonctions741. Cela touche notamment la surveillance d’infrastructures de marché situées à l’étranger, mais reconnues par les régulateurs provinciaux et le partage d’information sur des participants locaux qui sont en la possession des régulateurs étrangers ou d’infrastructures sous leur juridiction. À ce jour, les régulateurs provinciaux ont démontré leur dynamisme par la conclusion de protocoles d’entente nationaux et internationaux de même que par leur participation à de nombreux groupes de travail internationaux pour une meilleure compréhension du marché et un renforcement de l’encadrement. Peu d’améliorations seraient alors nécessaires à cet égard outre, peut-être, un rôle pour le Conseil canadien à l’échelle internationale, comme suggéré pour les ACVM inc., en favorisant l’échange des points de vue des régulateurs le composant sur les enjeux afin qu’ils représentent davantage la position canadienne et permettent le partage de l’information provenant des comités auxquels chacun participe. Autrement, une vigie internationale réglementaire pourrait être créée, par le biais du Centre d’information annexé au Conseil canadien, pour colliger et assurer le partage de l’information notamment sur les développements internationaux. Ainsi, il serait possible pour les régulateurs financiers du Canada d’être unis dans leur diversité.

Pour terminer sur le sujet du régulateur du risque systémique opportun pour la stabilité des marchés financiers canadiens, l’important est de favoriser la coopération entre les régulateurs financiers canadiens pour une surveillance globale des risques et une gestion concertée de ceux-ci, ce qui serait supérieur à une action unilatérale du gouvernement fédéral742. Nous avons alors proposé d’instituer un Conseil canadien ayant la responsabilité formelle pour l’élaboration de politiques macroprudentielles visant à contrer le risque systémique grâce aux outils et aux connaissances spécialisées des régulateurs qui le composeraient. Par l’alliance des régulateurs provinciaux, de la banque centrale et des régulateurs prudentiels des institutions financières, le Conseil canadien détiendrait suffisamment d’information pour détecter le risque systémique et y répondre de manière coordonnée avant qu’il n’en résulte une crise. Avec l’ajout d’un Centre d’information pour la collecte des données des régulateurs, le Conseil canadien pourrait se pencher sur les risques potentiels issus des connexions entre les

741 J. FREEMAN et J. ROSSI, préc., note 660, 1161.

742 Stéphane ROUSSEAU, « Endgame: the Impact of the Supreme Court’s Decision on the Project to Create a

divers acteurs du système financier. Finalement, une combinaison de l’approche macroprudentielle pour agréger les données et les analyser à des fins de compréhension des facteurs de risque ainsi que l’établissement de standards minimums pour l’ensemble des marchés en plus de la régulation actuelle macroéconomique, microprudentielle et de la conduite des affaires, assurerait la confiance dans les marchés financiers.