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La réglementation européenne

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 123-126)

Conclusion du chapitre 1

CHAPITRE 2 : Une configuration institutionnelle nouvelle nouvelle

B. La réglementation européenne

Lors de la libéralisation, l’émergence d’une régulation européenne constitue une sorte de

« fausse nouveauté », le marché commun du charbon et de l’acier datant de 1951 et

338 CHEVALLIER, 2001, La régulation juridique en question, p.842.

339 Cf. chapitre 1.

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représentant une première forme d’union340. Néanmoins, depuis la fin des années 1990, le développement de cette régulation constitue un tournant. La coordination entre États membres a tout d’abord été encouragée selon une organisation qui se voulait souple. La création de forums des régulateurs nationaux a été lancée dans cet objectif par la Commission européenne pour maîtriser un phénomène spontané de coopération sur le terrain341. Ce forum s’est déroulé la première fois à Florence en 1998 pour l’électricité et se réuni depuis une à deux fois par an autour de participants intéressés par la mise en place d’une régulation européenne de l’énergie. Un groupe des régulateurs européens pour l’électricité et le gaz (European Regulators’ Group for Electricity and Gas, ERGEG) a ensuite été créé en 2003 sans toutefois que des avancées significatives aient été constatées. Les autorités européennes ont donc ensuite souhaité structurer et renforcer un peu plus cette coordination. La Commission a en effet constaté en 2005 qu’après plusieurs années de libéralisation, les mécanismes du marché ne fonctionnaient pas bien : marchés encore fortement concentrés avec une portée nationale, peu de nouveaux fournisseurs, accès difficile aux infrastructures ou aux informations, etc.342 Une évolution peu conforme à la volonté de l’Europe d’inscrire l’énergie dans le modèle économique européen en accord avec l’Acte Unique de 1987 et les conclusions du Sommet de Lisbonne de 2000 durant lequel la libéralisation du secteur de l’électricité et du gaz a été actée. Quelques années après, en 2007, le traité de Lisbonne consacre la naissance d’une politique énergétique européenne. L’énergie devient donc une compétence partagée qui dépend du principe de subsidiarité. Dès l’application du traité, « les États membres exercent leur compétence dans la mesure où l'Union n'a pas exercé la sienne. Les États membres exercent à nouveau leur compétence dans la mesure où l'Union a décidé de cesser d'exercer la sienne »343. Toutefois, les mesures prises « n'affectent pas le droit d'un État membre de déterminer les conditions d'exploitation de ses ressources énergétiques, son choix entre différentes sources d'énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique ».

Ce virage s’est concrétisé par des mesures prises en 2011 dans le cadre du troisième paquet énergie qui visait à achever la libéralisation du secteur344. Cela est également confirmé par le fait que les régulateurs européens ont été dotés de davantage de compétences ces dernières années.

Qui sont ces régulateurs européens ? Nous allons les présenter brièvement et voir quelles sont leurs prérogatives. Il s’agit de la Commission européenne (a) ; de l’Agence de

340 Pour l’histoire de la construction européenne de l’énergie avant 1987 voir DERDEVET, 2009, L'Europe en panne d'énergie : pour une politique énergétique commune, p.25 et suivantes.

341 RODRIGUES, 2010, La coordination entre régulateurs au sein de l'Union européenne.

342 ANDOURA, et al., 2010, Vers une communauté européenne de l'énergie : un projet politique, p.29-30.

343 Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, titre 1, article 2, et titre 22, article 194.

344 Le premier paquet rassemble les directives de 1996 pour l’électricité et de 1998 pour le gaz, et le second les deux directives de 2003 (2003/54/CE et 2003/55/CE).

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coopération des régulateurs de l’énergie, organe officiel dépendant de cette même Commission, et du Conseil des régulateurs énergétiques européens, organe non-officiel, qui agit en tant que conseiller auprès de ces institutions (b) ; et la Cour de justice de l’Union européenne (c).

1. Les acteurs de la réglementation européenne

Le système électrique dépend des territoires fonctionnels extra-étatiques qu’il est possible de schématiser de la façon suivante.

Il existe d’un côté un cadre physique et technique. Le cadre physique est un espace déterminé essentiellement par l’interconnexion des réseaux. Nous retrouvons à ce niveau, qui peut être qualifié d’international, l’European Network of Transmission System Operators for Electricity (ENTSO-E), créé en 2008 par un règlement européen et regroupant 41 gestionnaires de réseau de transport de 34 pays – essentiellement membres de l’Union européenne345. L’objectif de cette association est d’assurer une gestion optimale du développement de l’interconnexion entre ses membres dans l’objectif de construire le marché européen. Parallèlement, le cadre technique vise à assurer de manière opérationnelle l’équilibre et la sécurité des échanges. La France fait à ce titre partie de CORESO, un centre de coordination technique né à la suite du black-out du 4 novembre 2006, dont sont actionnaires cinq gestionnaires de réseau de transport de l’ouest de l’Europe346. Son rôle est de leur fournir des informations et des services d’optimisation pour l’exploitation du réseau concerné.

Le second cadre est économique. Il est formé en particulier par les acteurs du secteur de la production, du négoce et de la commercialisation (activité boursière, fourniture, etc.) dont l’action peut être territorialisée au-delà du périmètre physique et technique (ex.

multinationales).

Enfin, le troisième cadre est régulatoire. Il concerne l’ensemble des pays membres de l’Union européenne et correspond à l’activité de régulation institutionnelle telle que nous l’avons décrite précédemment. C’est précisément de ce dernier cadre que nous souhaitons traiter ici à travers l’analyse de l’action des régulateurs de l’énergie.

345 Il existe aussi un ENTSO-G.

346 RTE, Elia (Belgique), National Grid (Royaume-Uni), TERNA (Italie) et 50 Hertz Transmission (est de l’Allemagne). Ce black-out est évoqué par DERDEVET, 2009, L'Europe en panne d'énergie : pour une politique énergétique commune, p.67.

- 125 - a. La Commission européenne

La Commission européenne ne dispose pas de compétence propre en matière d’énergie mais a vu ses prérogatives étendues par l’intermédiaire de compétences relatives au marché intérieur et de la concurrence347. Les moyens dont elle dispose appartiennent au domaine de la régulation réglementation sectorielle et de la politique de la concurrence (contrôle et action sur la configuration du marché). Via la Direction générale Transport et Énergie (DG

« Tren »), elle met tout d’abord au point les politiques communautaires qui prennent la forme de directives et de règlements, mais aussi d’une doctrine qui émane de l’interprétation de ces documents. Ensuite, elle intervient dans la gestion de l’innovation et du développement technologique par l’intermédiaire du financement de projets (fonds structurels comme le fonds européen de développement régional, FEDER ou le fonds européen agricole pour le développement rural, FEADER) ou la gestion de programmes d’expérimentation (ex. via le programme CONCERTO destiné à promouvoir l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables).

Les grandes directives, qui donnent des objectifs à atteindre, et les règlements, dont le contenu est applicable dès sa publication, sont présentées par la Commission et adoptées par le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen. Ils sont assez nombreux concernant l’énergie348 mais il est de coutume de distinguer trois paquets énergie-climat promulgués en 1996/1998, 2003 et 2009 (cf. encadré).

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