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Les régulateurs étatiques, des régulateurs généralistes

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 149-153)

Les trois « paquets énergies »

C. Les régulateurs de l’énergie à l’échelle nationale

1. Les régulateurs étatiques, des régulateurs généralistes

Il existe trois régulateurs dépendants directement de l’État qui sont le ministère en charge de l’énergie, le Conseil supérieur de l’énergie et la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes.

Le Ministère en charge de l’Energie – dont l’appellation a varié ces dernières années au gré des alternances politiques et des remaniements – possède un rôle essentiel dans la définition et la mise en œuvre de la politique énergétique. En fonction des gouvernements, ce ministère peut dépendre ou non du ministère de l’Economie (troisième gouvernement FILLON du 14 novembre 2010) ou du ministère de l’Écologie et du Développement durable (premier et deuxième gouvernement FILLON, gouvernement AYRAULT). L’exécutif gouvernemental est secondé par les services de la direction de l’administration centrale chargée de l’énergie, la DGEC (Direction générale de l’énergie et du Climat), ancienne DGEMP (Direction générale de l’énergie et des matières premières), qui organise l’approvisionnement en matière premières et surtout définit et met en œuvre la politique énergétique du pays. Son action est répercutée sur tout le territoire par les services déconcentrés, c’est-à-dire en particulier la DREAL pour l’énergie416.

Ces Directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement les (DREAL) sont issues de la réforme de l’État entamée lors de la révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée par le Gouvernement en 2007. La réorganisation de l’administration territoriale de l’Etat (RéATE) qui en est issue a pour objectif de réorganiser les administrations centrales et les services déconcentrés (ex. fusion des directions régionales, regroupements des services départementaux), d’alléger les procédures administratives et de simplifier la gestion des administrations. Les DREAL sont nées de cette première vague de réforme dans l’objectif de piloter les politiques de développement durable issues du Grenelle de l’Environnement ainsi que celles du logement et de la ville. La simplification et le regroupement à l’origine de leur création en font aujourd’hui des acteurs de poids qui

415 RIFFAULT-SILK, 2011/1, La régulation de l'énergie : bilan et réforme. L’Autorité de sureté nucléaire (ASN), est également une AAI mais n’est pas un régulateur. Elle assure, au nom de l’État, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

416 Le rôle de ces services déconcentrés, notamment la DREAL, est évoqué dans le chapitre 3.

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concentrent au niveau régional les actions de l’État en matière d’aménagement du territoire, de logement, de nature, de prévention des pollutions et des risques, de transport, de climat et d’énergie417. Ce faisant, les DREAL possèdent dans leur champ de compétence la co-élaboration des SRCAE, l’instruction des schémas régionaux éoliens et le renouvellement des concessions hydrauliques.

La Direction générale de l’énergie et du climat a de son côté remplacé la DGEMP (Direction générale de l’énergie et des matières premières) qui dépendait du ministère chargé de l’industrie. Le glissement vers le ministère en charge de l’écologie s’est traduit par la réunion des problématiques énergétiques, de lutte contre le changement climatique et la qualité de l’air. La DGEC est officiellement :

« chargée de la définition et de la mise en œuvre de la politique nationale en matière de lutte contre les changements climatiques. Sous la double tutelle du ministère du développement durable et du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, elle prépare et met en œuvre la politique en matière d’énergies renouvelables, notamment en matière tarifaire, du développement et de la promotion des énergies vertes »418.

Organe central de l’État en lien avec l’exécutif ministériel, elle est souvent considérée comme la gardienne du modèle centralisée en matière d’énergie. La DGEC agit dans le cadre d’une politique territorialisée régionalement au sein des DREAL. Elle a donc été à ce titre chargée de penser la mise en œuvre des SRCAE selon un mode d’intervention spécifique associant les conseils régionaux. La première vague de ces schémas incitant à considérer l’implication de ces derniers sur un pied d’égalité avec celui des services de l’État est toutefois à prendre avec prudence. François-Mathieu POUPEAU a montré comment l’État, via la DGEC, a contenu les aspirations décentralisatrices régionales419. D’une part à l’occasion de la « traduction » législative des conclusions du Grenelle I. Ensuite par des effets de procédures (ex. publication tardive des décrets d’application) ou de situation (ex. personnel disponible pour l’élaboration au sein des conseils régionaux). Enfin, en raison de l’intégration de cette évolution dans un contexte politique spécifique (élections présidentielles, fermeté de l’État sur le mix énergétique, etc.). François-Mathieu POUPEAU identifie une :

« […] dynamique de cadrage particulièrement puissant, par lequel l’État, pris ici au sens large (une administration adossée à un exécutif gouvernemental lui-même soumis à

417 Elles remplacent les DIREN (directions régionales de l’Environnement), DRE (directions régionales de l’Equipement) et les DRIRE (Direction régionales de l’Industrie et de la Recherche).

418 Ministère de l'Écologie, 2014c, L'organisation au niveau central [En ligne].

419 POUPEAU, 2013b, Quand l'Etat territorialise la politique énergétique. L'expérience des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie. Voir aussi sur cette question l’étude de Marie DÉGREMONT-DORVILLE sur le SRCAE de la région Nord-Pas-de-Calais (DÉGREMONT-DORVILLE, 2014, La territorialisation des politiques énergétiques. Une articulation entre le local et le national).

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la compétition électorale), a su maintenir sa suprématie dans un domaine d’action non régalien (l’énergie) particulièrement stratégique, et qui reste l’un des rares sur lequel son rôle est faiblement contesté420. Ce cadrage a puisé dans les registres législatif et réglementaire (capacité à formater en amont les schémas), procédural (capacité à piloter la mise en œuvre) et politique (capacité à neutraliser la contestation partisane) »421.

La DGEC est enfin l’organisme qui exerce, pour le ministère en charge de l’énergie, la participation ou la tutelle sur les entreprises concernées (EDF, RTE, ErDF, Engie, GRT gaz, GrDF) ou les établissements publics comme le CEA ou l’ADEME. Cette dernière est un établissement public industriel et commercial sous tutelle du Gouvernement ne disposant pas d’une indépendance. Si par le passé « les crédits accordés à l’ADEME suivent les cours du baril de pétrole » constate Aurore TOULON, l’Agence s’est imposée comme l’un des bras armés de l’État en matière d’énergie depuis quelques années 422. Son rôle auprès des acteurs locaux est nous l’avons vu prépondérant423. Elle a en particulier œuvré depuis les années 1990 à la promotion des EnR par des financements et une activité dont les résultats peuvent s’apprécier sur le long terme424. L’agence a longtemps eu la réputation d’être très autonome vis-à-vis des services déconcentrés et même d’être plus proche des conseils régionaux425. L’ADEME est pourtant sous tutelle du MEDDE via la DGEC et à ce titre chargée d’aider à la mise en œuvre des directives du Gouvernement en matière d’énergie. La question de leur fusion avec les DREAL a d’ailleurs été évoquée par un rapport de la Cour des comptes en 2013426. Si cette mesure n’a pas été rendue effective, un décret de 2009 introduit une modification dans son organisation en faisant des préfets les délégués régionaux de l’ADEME pour son action en région427. Cette mesure ne semble pas avoir eu d’impact. L’idée du

420 L’énergie n’est pas un secteur régalien mais l’expression est souvent utilisée dans le contexte français pour monter combien l’État français lui a attaché d’importance.

421 POUPEAU, 2013b, Quand l'Etat territorialise la politique énergétique. L'expérience des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie.

422 TOULON, 2009, La sensibilisation de l'opinion publique aux économies d'énergie 1974-1986, p.185.

423 L’ADEME dispose d’un budget d’environ 700 millions d’euros et près de 1 000 agents. Les évènements organisés par l’agence possèdent une grande ampleur au niveau national. Cf. le succès du 3ème colloque PCET des 30 septembre et 1er octobre à Strasbourg ou des dernières Assises nationales de l'énergie qui se sont déroulées à Dunkerque les 26, 27 et 28 janvier 2016.

424 EVRARD, 2013, Contre vents et marées. Politiques des énergies renouvelables en Europe, p.238.

425 Cour des comptes, 2010, Communication à la commission des finances du Sénat. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, p.19.

426 Cour des comptes, 2013, L'organisation territoriale de l'Etat.

427 Art. 131-16 du Code de l’Environnement : « Le préfet de région est le délégué de l'agence pour ce qui est de son action dans la région. A ce titre, il préside le comité régional d'orientation et la commission régionale des aides. Il veille à la cohérence et à la coordination des actions de l'agence avec celles conduites par les administrations et les autres établissements publics de l'État en région, conformément au contrat d'objectifs à caractère pluriannuel signé avec le président de l'agence ».

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scénario « 100% renouvelable » pourra en effet apparaître comme une marque d’indépendance. « Fortuitement » dévoilé en avril 2015, ce document a alimenté les discussions en raison notamment d’un objectif éloigné de celui que l’on prête habituellement à l’État en matière de mix énergétique.

Le second régulateur dépendant directement de l’État est le Conseil supérieur de l’Energie a été créé par la loi du 13 juillet 2005 en remplacement de l’ancien Conseil supérieur de l’électricité et du gaz (sous tutelle du MEDDE)428. Il s’agit d’un organisme consultatif qui rend des avis sur les questions relatives au gaz, à l’électricité, aux enjeux de maîtrise de l’énergie ou aux énergies renouvelables (tarifs, transpositions de directives, etc.).

Le CSE est notamment obligatoirement consulté par la CRE pour les sujets pouvant « avoir une incidence importante sur les objectifs de politique énergétique » dont la liste est définie par le Conseil d’État429.

Enfin, l’autre organisme d’État impliqué dans la régulation de l’électricité est la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) qui est le service du Ministère de l’Économie ayant pour mission de réguler et de sécuriser les échanges de biens et services (respect de la concurrence, protection des consommateurs). A ce titre, la DGCCRF aide à traiter les litiges entre consommateurs et fournisseurs.

De ces trois régulateurs, le ministère joue le rôle le plus important : définition des tarifs de vente de l’électricité, fixation du mix énergétique, tutelle sur les énergéticiens dont l’État est actionnaire, contrôle des organismes de recherche publics, etc. Il doit néanmoins compter depuis la libéralisation avec des nouveaux venus dans le monde de l’énergie depuis la libéralisation et dont le rôle est difficile à cerner avec précision : les agences administratives indépendantes.

428 Il est composé de 3 députés et 2 sénateurs, 1 membre du Conseil d’État, 3 représentants des ministères concernés (Economie, Finance et Industrie), 5 représentants des collectivités territoriales, 5 représentants des consommateurs d’énergie, 13 représentants des entreprises de l’énergie, 5 représentants des personnels des industries électriques et gazières (décret n° 2006-366 du 27 mars 2006 relatif à la composition et au fonctionnement du Conseil supérieur de l'énergie).

429 Art. L 134-9 du Code de l’énergie.

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2. Les autorités administratives indépendantes (AAI), des régulateurs

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