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Chapitre introductif Typologie des normes privées

Section 1. Le débat sur les effets commerciau

C. Questions juridiques

Alors que les deux premiers points du débat (aspects positifs et négatifs des effets commerciaux des normes privées, impact en termes de développement) relèvent surtout de l’étude empirique, c’est sur la question du statut et traitement juridique des normes privées dans le cadre de l’OMC qu’ont achoppé – et achoppent encore – les discussions au sein du comité OMC. Dès les premières séances s’est en effet posée la question de la compétence de l’OMC (institution purement interétatique) pour traiter de normes et instruments normatifs d’origine purement privée. Alors que certains Etats membres pensent qu’il s’agit d’une activité privée légitime avec laquelle les gouvernements ne devraient pas interférer, d’autres sont d’avis que l’accord SPS – et notamment son article 13 – rend les Etats membres responsables pour les normes

491Le rapport d’origine utilise le terme « proactif ». Issu de la psychologie et repris par le domaine de la gestion, le terme

proactif signifie agir sur des faits ou des processus à venir, faire en sorte que quelque chose se produise afin de pouvoir intervenir activement. Nous pensons que l’usage de ce néologisme est ici justifié en raison de la démarche anticipative qui est demandée aux PED – faire en sorte de donner aux entreprises locales les capacités techniques et financières nécessaires afin que les conditions requises par les normes privées soient déjà en place (ou, du moins, faciles à mettre en œuvre).

492J. SWINNENS, M. MAERTENS, “Standards, Trade and Developing Countries”, Note prepared for the World Bank, Trade and

imposées par leur secteur privé493. Cette question n’est pas résolue à ce jour, malgré certaines avancées en matière de coopération et d’échange d’information entre organisations internationales494.

La question de l’opportunité du choix de l’OMC comme tribune du débat international sur les normes privées se présente donc comme l’une des principales difficultés à résoudre. Les incertitudes sur sa compétence, les obstacles juridiques, le désaccord entre Etats membres ainsi que l’impossibilité (pour le moment ?) d’une action directe sur les normes privées semblent faire de l’OMC un forum inapproprié. Cependant, l’importance d’un lieu de dialogue rassemblant la majorité des Etats sur un pied d’égalité n’est pas négligeable. L’OMC est, à l’heure actuelle, la seule organisation internationale devant laquelle les PED peuvent faire valoir leurs intérêts commerciaux afin d’assurer à leurs positions et à leurs arguments une visibilité au niveau international. Ainsi que l’exprime Gretchen STANTON, conseillère principale

sur l’agriculture et les produits de base à l’OMC, qui a participé aux négociations au sein du Comité SPS :

“While one may question whether a strictly inter-governmental forum such as the SPS Committee is the most appropriate place to address the issue of private standards, it is apparent from the outpouring of concerns by

developing countries that a forum for discussion was needed495”.

Parmi les autres forums proposés496 (le comité OTC, la CNUCED, l’OCDE, le Trade Standards Practitioners Network de la Banque mondiale), aucun n’a été retenu comme tribune du débat, bien que plusieurs de ces organisations se soient penchées sur la question des normes privées et aient produit des études et documents internes à ce sujet.

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493G. H. STANTON, “Private (Commercial) Standards and the SPS Agreement”, Remarks at the Round Table on The Role of

Standards in International Food Trade, The World Food Law Institute, 2007, p. 5.

494 Voir le communiqué de l’OMC sur la reunion du Comité SPS des 30 et 31 mars 2011, “Memberstake first steps on private

standards in foodsafety, animal-plant health”, http://www.wto.org/english/news_e/news11_e/sps_30mar11_e.htm Pour une discussion plus approfondie des cinq « mesures » adoptées lors de cette réunion, voir PARTIE 2.

495 G. H. STANTON, “Private (Commercial) Standards and the SPS Agreement”, Remarks at the Round Table on The Role of

Standards in International Food Trade, The World Food Law Institute, 2007, p. 5. Nous soulignons.

496 Voir Ch. WOLFF et M. SCANNELL, « Conséquences de la mise en œuvre des normes privées dans le commerce

international des animaux et des produits d’origine animale », document publié à l’occasion de la 76e session général de

L’abondance des travaux consacrés aux normes privés dans un nombre important d’organisations internationales témoigne de l’intérêt des Etats pour la question des normes privées. Ces travaux restent cependant pour l’essentiel descriptifs et ont pour fonction principale l’information. La seule organisation ayant abordé des questions de fond est l’OMC, qui s’interroge depuis 2005 sur la possibilité de soumettre les normes privées aux règles qu’elle édicte. La difficulté qu’ont ses Membres à déterminer ne serait-ce que de la compétence de l’OMC laisse présager des obstacles auxquels devra faire face la clarification des questions de droit substantiel.

Du point de vue de la reconnaissance, l’absence de consensus parmi les membres d’une organisation (l’OMC) et le caractère descriptif des rapports émis par les autres n’affectent pas la nature de la prise en compte des normes. Celle-ci est fondée sur leurs effets, il s’agit donc d’une prise en compte « formelle » des normes privées en tant que phénomène affectant les relations commerciales entre Etats ; la question de leur valeur juridique n’y a pas encore été abordée, bien qu’elle soit inévitable notamment dans le cadre de l’OMC. Nous verrons que d’autres organisations ont d’emblée adopté une vision plus juridique des normes privées, en s’inquiétant du rapport de concurrence qu’elles pourraient instaurer avec leurs normes propres.

Section 2. Le débat sur la relation avec les normes commerciales