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Chapitre introductif Typologie des normes privées

A. Normes nationales

Dans le contexte des normes privées, le terme national n’est pas à comprendre au sens d’étatique mais de territorial, même si ce terme doit lui aussi être nuancé. Le champ d’application territorial d’une norme privée n’est en effet jamais expressément défini par la norme elle-même. Le caractère territorial de son application découle de la sphère des relations commerciales de l’entreprise ou plus généralement de l’acteur civil qui en est l’auteur. En réalité, le terme « national » permet plutôt de distinguer les normes privées dont le champ d’application est réduit du domaine des normes d’application internationale.

La nature nationale ou internationale d’une norme ne dépend donc pas uniquement de son auteur. Une norme peut être nationale ou internationale aussi bien par sa nature (regroupement d’ONG ou d’entreprises au niveau international) que par sa portée (norme d’une seule entreprise produisant des effets internationaux, en général sur des exportateurs ou producteurs étrangers).

158 Cependant, à la lecture des listes, les représentants des gouvernements semblent peu nombreux par rapports aux

Il existe certaines exceptions à l’absence de rattachement territorial exprès des normes privées ; ainsi on a vu récemment se multiplier, essentiellement dans le domaine des bonnes pratiques agricoles, des initiatives soutenant la création de normes privées ou mixtes au niveau national, en vue de prendre en compte et de préserver les spécificités locales. Les normes KenyaGAP, lancées en 2007 et issues d’un partenariat public-privé159, sont une adaptation aux conditions locales de la norme EurepGAP, aujourd’hui GlobalGAP : des lignes directrices pour une interprétation nationale y ont été inclues afin de prendre en compte les conditions de travail des producteurs locaux160. Considérée équivalente161 aux normes EurepGAP,

la norme KenyaGAP facilite la conformité des produits locaux aux conditions exigées par les entreprises européennes, notamment les limites de résidus, et partant les exportations kenyanes. D’autres pays, tels que le Chili, la Thaïlande et la Chine ont mis en place des normes similaires (voir Partie 2 Titre 2).

D’autres normes sont nationales par leur portée, car conçues à l’intention des producteurs nationaux. C’est le cas du « label Rouge » français ou de l’ « ange bleu » allemand, toutes deux faisant référence à des conditions de production spécifiques liées à une image de « grande qualité ».

Certaines normes, à l’image de celles du British Retail Consortium BRC, conçues d’abord pour l’industrie nationale, acquièrent avec le temps une portée plus globale

159 Soucieux de permettre l’accès des entreprises nationales aux marchés internationaux, notamment européens, et de

promouvoir les bonnes pratiques sociales et environnementales, le gouvernement kenyan a activement soutenu la création de la norme KenyaGAP. Ce soutien s’est traduit notamment par la mise en place d’une ‘National Task Force on Horticulture’, organisme mixte composé d’acteurs publics, d’exportateurs, d’associations de producteurs et des organisations internationales impliquées dans le financement de l’opération. Voir Ch. CAREY, “Kenya and the KenyaGAP Standard for Good Agricultural Practices”, Governmental Use of Voluntary Standards Case Study 6, 2008, p. 16, étude menée dans le cadre d’un projet conjoint entre l’alliance ISEAL et le Trade Standards Practitioners Network, disponible sur le site d’ISEAL, http://www.isealalliance.org/sites/default/files/E051_Kenya_KenyaGAP.pdf Cet auteur souligne le rôle positif joué par la participation de l’Etat dans l’élaboration de la norme, en ce qu’elle a facilité le regroupement des acteurs et amélioré la collaboration avec le secteur privé, notamment en raison de la structure de la ‘Task Force’, fondée sur la consultation et le consensus (p. 19).

160 Voir la présentation de N. GARBUTT, Chairman EurepGAP, “Food Quality Schemes in the International Context:

KenyaGAP Experiences and Lessons learnt”, Conference on Food Quality Certification, Bruxelles, 5-6 février 2007, http://ec.europa.eu/agriculture/events/qualityconference/garbutt_en.pdf

161 C’est-à-dire reconnue dans le cadre du processus de ‘benchmarking’ de GlobalGAP. Les producteurs kenyans ont

désormais le choix faire certifier leurs produits en fonction de la norme KenyaGAP (bien que cette option soit réservée aux producteurs membre de FPEAK – Fresh Produce Exporters Association of Kenya, l’association des producteurs de produits frais, qui a été l’un des acteurs déterminants dans l’élaboration de la norme) ou bien directement auprès de GlobalGAP. Dans les deux cas, une certification de groupe est possible, ce qui permet de réduire les frais de certification supportés par les entreprises. Trois organismes de certification sont accrédités auprès de KenyaGAP et peuvent délivrer les certificats de conformité : AfriCert, Bureau Veritas Kenya Limited et Société générale de surveillance.

Il est cependant important de noter que KenyaGAP fait partie des normes approuvées « de manière conditionnelle » (‘provisionnally approved’). Cette distinction opérée par GlobalGAP avec les normes « pleinement approuvées » (‘fully

approved’) réside dans l’accréditation des organismes de certification : celle-ci n’a pas encore été établie pour les

dans la mesure où elles sont non seulement imposées à des fournisseurs étrangers mais aussi appliquées par des distributeurs dans d’autres pays que le pays d’origine. Les ‘BRC Global Standards’ comprennent aujourd’hui quatre schémas normatifs relatifs aux produits alimentaires, aux produits non-alimentaires, à l’emballage et au stockage des produits, et enfin à leur distribution. Ces normes s’accompagnent de lignes directrices (‘guidelines’) relatives aux bonnes pratiques de mise en œuvre. Créées en 1996, les normes du BRC sont sans doute une réponse des distributeurs à la politique législative consistant à faire peser sur le distributeur la responsabilité de la sécurité sanitaire des produite162. Elles ont été les premières normes reconnues

équivalentes par l’évaluation comparative effectuée dans le cadre de la Global Food Safety Initiative (GFSI, voir infra). Ceci a sans doute contribué à leur reconnaissance internationale et à leur diffusion à des acteurs hors du Royaume-Uni. Elles comptent aujourd’hui plus de 17000 fournisseurs certifiés dans 90 pays163.