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Chapitre introductif Typologie des normes privées

Section 1. Le débat sur les effets commerciau

A. Accès au marché

En 2007, une Note du Secrétariat483 de la CNUCED intitulée « Commerce, environnement et développement » fait expressément référence à la problématique des normes privées. Elle mentionne les travaux effectués au sein du Groupe consultatif sur les prescriptions environnementales et l’accès des pays en développement aux marchés484. Après avoir décrit les principaux problèmes posés par

les normes privées (elles sont souvent plus strictes que les normes publiques, sont un facteur-clé de la participation aux chaînes de valeur mondiales et ne sont pas soumises aux règles du commerce international) et les avantages de la mise en conformité, la note fait une constatation intéressante en ce qui concerne les rapports entre les normes publiques et les normes privées : ces deux types de normes seraient les deux faces d’une stratégie de gestion des risques, les normes publiques étant axées sur le résultat et les normes privées sur le processus485. Le fait que les normes privées

portent sur les processus serait alors un avantage considérable pour les pouvoirs publics, qui seraient en quelque sorte dispensés de toute supervision des méthodes de production (à l’exception de tests limités à l’entrée), tout en ayant la quasi-certitude

481 Voir G. STANTON, Ch. WOLFF, “Private voluntary standards and the World Trade Organisation (WTO) Committee on

Sanitary and Phytosanitary Measures”,

http://www.agrifoodstandards.net/en/filemanager/active?fid=134.

482 Ces trois axes de la discussion sont également présentés comme les trois “justifications” du débat au sein du comité SPS.

Voir R. FERNANDES, « Normes privées et accord SPS », Présentation à l’occasion du Briefing de Bruxelles sur le développement rural intitulé « Respect des normes de sécurité alimentaire : Implications sur les exportations agricoles ACP », 11 mai 2009.

http://briefingsbruxelles.files.wordpress.com/2009/05/robson_fernandes_fr.ppt

483 TD/B/COM.1/86, 16 février 2007.

484 Pour le secteur des fruits et légumes, voir par exemple la note « Food safety and environmental requirements, market

access and export competitiveness: Turning challenges into opportunities for developing countries: The horticultural sector» (UNCTAD/DITC/TED/2006/2), note thématique établie pour la session annuelle du Groupe consultatif de la CNUCED, tenue à Genève, les 3 et 4 juillet 2006.

que, grâce aux normes privées (souvent plus strictes), les processus de production, même à l’étranger, respectent les conditions de la loi nationale486.

Un autre document souligne également l’influence réciproque entre normes privées et publiques : d’un côté les normes privées influencent certaines législations nationales qui les « légitimisent » en les incorporant487 ou en y faisant directement référence, ou

encore en fournissant une assistance technique à leur mise en œuvre (ce qui, pour les auteurs, est un pas supplémentaire dans le processus de légitimisation) ; d’autre part, on peut considérer que ce sont les normes privées qui contribuent à faire respecter la législation nationale, devenant en quelque sorte un « outil » pour les fournisseurs les aidant à respecter la réglementation en vigueur488.

Une tendance commune à l’ensemble des organisations ayant débattu de la question est que les discussions ont porté avant tout sur les normes du domaine agro- alimentaire, en particulier le secteur des fruits et légumes frais .On se souvient que le débat à l’OMC a vu le jour à l’occasion de normes EurepGAP relatives au taux de pesticides contenus dans les bananes. De même, dans le cadre des travaux du Comité SPS, il apparaît que ce sont surtout les normes de sécurité sanitaire qui font l’objet des plaintes des Etats. Le questionnaire distribué par le comité en 2008 a fait apparaître que les normes désignées comme les plus restrictives au commerce sont celles portant sur les « produits frais » (fruits, légumes, viande).

Cependant, en réalité, la grande majorité des normes ne concerne pas le domaine SPS mais porte sur des questions telles que la protection de l’environnement ou les conditions de travail. Ces questions tombent en principe dans le champ de l’accord OTC (qui est applicable à toutes les normes qui ne sont pas « SPS »). On peut par

486 Le même point de vue est adopté dans un document consacré exclusivement au secteur agro-alimentaire, « Food Safety

and EnvironmentalRequirements in Export Markets – Friend or Foe for Producers of Fruit and Vegetables in Asiandeveloping Countries ? »,UNCTAD/DITC/TED/2006/8, 2007, p. 23 : “The detailed monitoring and certification required by private sector standards could therefore benefit

governmentsby shifting the burden of monitoring and testing from governments to producers and exporters.

Rather than spending large amounts of money on extensive and costly testing of imports, governments can rely on the certification and assurance processes laid down by private sector bodies. In addition, private standards free governments from any need to interfere with overseas production processes. If an importing government sought to ensure high levels of compliance with its regulations through the detailed policing of production and supply methods, it would be accused of illegitimate extra-territorial interference. The process-oriented approach of private sector standards obviates any need for such supervision, and thus makes it possible for governments to conduct limited, inexpensive testing of import samples at the point of entry”.(Nous soulignons).

487 Par exemple par l’élaboration d’un code national de “bonnes pratiques” (« GAP Code »), comme ce fut le cas en Chine,

UNCTAD/DITC/TED/2006/8, 2007, p. 20.

488 « Food Safety and Environmental Requirements in Export Markets – Friend or Foe for Producers of Fruit and Vegetables

in Asian Developing Countries ? »,UNCTAD/DITC/TED/2006/8, 2007, p. 23 s.Le rapport note cependant que les normes privées sont souvent plus larges et plus strictes que les normes nationales.

conséquent reprocher au débat au sein de l’OMC et d’autres organisations un certain « biais » agro-alimentaire, au détriment des normes « purement » environnementales ou sociales489. Du moins peut-on dire qu’en se concentrant sur le domaine agro- alimentaire, le débat international néglige d’autres aspects fondamentaux des normes privées.