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ses ressources documentaires en histoire de l’environnement

3. Quel intérêt pour l’histoire de l’environnement ?

En 1971, le géographe français Pierre George (1909-2006), définit l’environnement comme « un milieu et un système de relations », ressortissant en premier lieu à la biologie, plus

8 Parmi ces documents récupérés, citons les Annales de Roville, 1829-1837 ; Le Journal

d’horticulture pratique de la Belgique, 1850-1861 ; MORREN Ch., La Belgique horticole, 1851-1885 ; Le Journal des haras, des chasses et des courses de chevaux, 1851-1861 ; Le bulletin de la

fédération des sociétés d’horticulture de Belgique, 1868-1874 ; etc.

9 Voir DE LAMOTTE R., Histoire de la conquête spatiale : catalogue des monographies du fonds Théo

Pirard conservé au Centre d’Histoire des sciences et des techniques, Seraing, 2008-2009 (Haute

École de la province de Liège, travail de fin d’études).

10 Archives de l’État dans les provinces, rue du Chéra, 79, 4000 Liège. Le transfert des archives industrielles collectées par le CHST aux archives de l’État a fait l’objet d’une convention entre ces deux organismes. Les archives industrielles qui y sont conservées sont actuellement en cours d’inventaire.

précisément, à l’écologie11. Le dictionnaire Robert de la langue française le décrit comme « l’ensemble des conditions naturelles (physiques, chimiques, biologiques) et culturelles (sociologiques) susceptibles d’agir sur les organismes vivants et les activités humaines ». C’est donc avant tout une donnée scientifique bien précise. Mais la notion d’environnement comprend tout autant l’idée que l’homme se fait de son environnement, avec en corollaire diverses exigences quant à sa qualité. C’est donc une problématique complexe, à la fois objective et subjective.

Comme l’énumération des différentes ressources du Centre invite à le penser, la documentation du CHST ne porte pas explicitement sur les problématiques environnementales. Elle l’impose pourtant comme un partenaire obligé, en particulier pour l’époque contemporaine. La révolution industrielle a en effet consacré les sciences et les techniques (particulièrement les sciences de l’ingénieur) comme un puissant levier d’action sur les conditions environnementales, que cette action résulte d’une volonté délibérée (aménagement ou équipement du territoire, constitution d’un tissu industriel, etc.) ou apparaisse comme un contrecoup des activités humaines. Ce qui est le cas de la plupart des problèmes de pollution. En construisant des usines, en aménageant des réseaux routiers, en rendant des voies d’eau navigables, en équipant ses villes (électricité, adduction d’eau, etc.), on voit comment l’homme, depuis l’époque industrielle agit sur son environnement, le modèle, le modifie et, il est vrai aussi, le malmène fort souvent. La documentation nous éclaire d’ailleurs aussi sur les chocs subis en retour, en termes d’impact sur la santé et de pollutions. Un regard sur certaines collections du CHST permet de mieux en cerner les ressources.

3.1. Images et plans

Le Centre conserve d’importants ensembles d’images provenant de divers fonds universitaire et industriels. Ces collections iconographiques, et particulièrement les représentations de sites, sont de précieux témoignages de l’impact de l’industrie sur le paysage. Ainsi la superbe collection iconographique commandée par la société des mines et fonderies de zinc de la Vieille Montagne au lithographe

Adolphe Maugendre pour ses différents établissements montre l’impact paysager de l’industrialisation au 19e siècle12. Pour le 20e

siècle, on mentionnera les dossiers photographiques établis par la Société Franki sur chaque chantier et l’éclairage qu’ils apportent sur les ouvrages d’art, l’aménagement des villes ou celui des cours d’eaux. La cartothèque du CHST rassemble quant à elle un fonds considérable de cartes et plans anciens d’implantations minières, sidérurgiques et chimiques. Leur importance est grande pour la localisation des sites industriels anciens.

3.2. La « BAST » ou bibliothèque ancienne de sciences et de techniques Sous l’acronyme « BAST » se dissimule la plus grande part de nos collections livresques, en l’occurrence le fonds d’ouvrages anciens et de périodiques, du 19e siècle aux années 1980. Cette dernière décennie est en effet tout à la fois marquée par la crise de l’industrie lourde et par l’avènement de la microinformatique. L’emploi de l’ordinateur personnel qui se généralise alors révolutionne le rapport des personnes à l’information, et affecte aussi les modes de conservation de cette dernière. Sur le plan géographique, la BAST couvre principalement un espace industriel correspondant aux bassins de la sidérurgie belge, luxembourgeoise, française et allemande. Mais sa portée va bien au-delà. Les ouvrages traitent également des espaces coloniaux, partie intégrante du champ d’action des diverses entreprises jusqu’aux indépendances. Beaucoup de sociétés industrielles ont en outre une envergure internationale perceptible dans leurs propres publications et dans celles qu’elles acquièrent. La revue d’entreprise éditée par la société Franki évoque en janvier 1931 ses travaux dans le tunnel sous l’Escaut à Anvers et en avril suivant sur le Canal Albert, à Lixhe et à Haccourt. Mais le fascicule paru en janvier 1931 rend également compte des interventions de la firme liégeoise dans le port de Marseille et dans des terrains inondés par le Danube à Belgrade13. Cette documentation illustre ainsi diverses facettes de l’histoire de l’environnement, en particulier dans ce cas

12 Voir LEPONCE I., L’art au service de l’industrie liégeoise : Adolphe Maugendre et la S.A.

Vieille-Montagne : essai de catalogue raisonné, Seraing, 1994-1995 (ISIS [auj. Haute École de la

province de Liège], travail de fin d’études).

13 Franki-Revue. Publication trimestrielle destinée au personnel de la Compagnie internationale des pieux

l’aménagement du territoire et la modification du milieu naturel qui s’ensuit.

Elle permet aussi d’envisager les questions environnementales sous d’autres angles, insoupçonnables de prime abord. Restons parmi les périodiques anciens. Un article paru dans la Revue universelle des

mines de l’année 1909 traite du dragage des alluvions aurifères en

Guyane française. La finalité de cet article est technique. Au fil de la lecture pourtant, le contexte économique, social, environnemental de cet orpaillage industriel se révèle de même. Sur ce dernier plan, il est question de déforestation en milieu tropical et de paludisme14. En 1946, cette même Revue universelle des mines publie les Actes de journées de

l’hygiène industrielle tenues à Liège deux ans plus tôt. Des interventions

concernant notamment « le milieu professionnel et son influence sur l’organisme humain » ou encore « le médecin d’usine » abordent des aspects sanitaires de l’environnement de travail15. Enfin, en octobre 1971, sous le titre « Pour le respect de l’environnement », un encart publicitaire louant un nouveau procédé de dépoussiérage industriel paraît dans la revue Industrie minérale. Son insertion dans une revue destinée au monde industriel français touche à l’histoire même de la prise de conscience environnementale16.

3.3. L’environnement et le passé plus lointain

Depuis sa fondation, grâce surtout aux recherches de Robert Halleux sur la métallurgie ancienne et l’alchimie, le CHST s’affirme aussi en pointe pour la recherche sur les techniques et les savoirs préindustriels. Or, en filigrane de ces savoirs apparaît souvent une indéniable connivence de l’homme et du monde qui l’entoure, animal, végétal, ou minéral. Prenons l’exemple des recettes médicales anciennes. La plupart concernent la santé humaine : les maladies, les blessures mais aussi l’hygiène. Les traitements antiparasitaires internes ou externes, pour les hommes ou le bétail, qui y abondent témoignent d’un état sanitaire précaire, et d’un environnement quotidien globalement insalubre. Égarées parmi les remèdes, figurent aussi des recettes non médicales, censées agir sur les intempéries ou affranchir

14 BORDEAUX A., Le dragage en Guyane, dans Revue universelle des mines, de la métallurgie, des

travaux publics, des sciences, et des arts appliqués à l’industrie, 4e série, t. 25, 1909, p. 189-213. 15 Revue universelle des mines, 89e année, 1946, p. 35-41, 41-50.

les personnes de diverses craintes. Au-delà d’un strict intérêt sanitaire, nombre de ces textes intègrent l’homme et sa santé dans un cadre plus large, identifiable à l’environnement naturel ou à sa représentation mentale17.

L’exploration de ces domaines conduit parfois à la lisière de l’histoire et d’autres sciences humaines. Le linguiste et ethnologue Roger Pinon a offert au CHST une très belle bibliothèque qui étoffe significativement les ressources du Centre sur les savoirs traditionnels d’Europe. Ce fonds de plusieurs milliers de volumes aborde en effet les relations de l’homme à son milieu sous de multiples facettes : terminologies propres à différentes régions ou professions, croyances, types d’activités, de loisirs, etc. Il constitue assurément une nouvelle opportunité d’orientation pour la recherche au CHST dans les années à venir, dans différents domaines, dont l’environnement.

Imaginer dans ces quelques pages, rendre compte des diverses facettes de la documentation du CHST s’avère illusoire. On ne conserve pas une documentation dans le seul but de la préserver de la perte ou de la destruction mais pour la valoriser, notamment en la mettant à la disposition d’un public. Il conviendra dès lors de considérer cet article comme une invitation à venir Place Delcour voir les collections, et consulter ces documents patiemment rassemblés pour certains depuis un quart de siècle déjà.

17 Sur les recettes médicales, on se reportera à XHAYET G., Médecine et arts divinatoires dans le

monde bénédictin médiéval à travers les réceptaires de Saint-Jacques de Liège, Paris, 2010 (coll.

The methodology worked out