• Aucun résultat trouvé

environnementales à Namur au

2. Déchets dans les maisons : les « lieux privés » et leur vidange

2.1. La gadoue dans la ville

Dès le début du 18e siècle, le Magistrat de la ville enjoint aux habitants de construire des lieux privés dans les maisons qui n'en renferment pas et de vider ceux qui sont déjà remplis27. Tout ce qui provient du nettoyage de ces lieux doit par ailleurs être déversé dans la Meuse ou la Sambre28. Sur ordre des autorités namuroises, les sergents effectuent des visites dans les maisons de la ville pour constater la présence ou non de latrines et déterminer leur état. Par la suite, une liste de maisons devant s'équiper est établie29. Cependant,

23 JACQUET-LADRIER Fr., Les services publics à Namur au XVIIIe siècle dans L'initiative publique des communes…, p. 149-197, p. 205.

24 Les rues de la ville ne seraient pas toujours nettes à cause notamment de la cupidité et de la

négligence des Fermiers ou de leurs employés (AÉN, Ville de Namur, n° 360).

25 Consulter à ce propos les articles de CLEMENS-DENYS C., Les activités des sergents de ville de

Namur au XVIIIe siècle, dans Annales de la Société archéologique de Namur, t. LXX, 1996, p.

187-226. et de D'ARRAS D'HAUDRECY, L., Une enquête en cours : la délinquance namuroise au

XVIIIe siècle, dans D’ARRAS D’HAUDRECY L.,DORBAN M.etDUPONT-BOUCHAT M.-S., La

criminalité en Wallonie sous l’Ancien Régime : trois essais, Louvain-Leiden, 1976, p. 19-27 (Travaux de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Université catholique de Louvain, XVII, Section d'histoire, II).

26 Ainsi, en 1719, les rues de la ville seraient a present plus sales qu'aucunnes desdites villes du paÿs

bas (AÉN, Ville de Namur, n° 116).

27 BROUWERS D.-D., Cartulaire…, p. 40. 28 GRANDGAGNAGE J., Coutumes…, p. 341.

certains Namurois utilisent d'autres moyens30 pour se débarrasser de leurs excréments : ils les déversent dans les fossés ou canaux de la ville, les vident par les fenêtres des maisons, creusent des fosses dans leurs cours ou jardins, bouchent leurs lieux privés et en construisent de nouveaux… La ville de Nivelles n'est pas non plus épargnée par ce genre de manœuvre de détournement. À défaut de réaliser un recensement des lieux privés, les édiles nivellois construisent des latrines publiques dont ils rendent l'usage obligatoire pour toutes les personnes ne disposant pas de lieux privés31.

2.2. Modes d'action des autorités namuroises : la vidange des lieux privés Avant 1779, la vidange des lieux privés est assurée par des

gadouards qui obtiennent le marché par adjudication publique. Elle se

réalise durant la nuit. Plusieurs gadouards se font passer des seaux remplis de la matière extraite, de mains en mains, jusqu'à la Sambre, la Meuse ou encore le Hoyoux32. Cependant, leur travail fait l'objet de nombreuses critiques notamment au niveau qualitatif 33. Il apparaît d'ailleurs que ces personnes seraient peu respectées par la population.

Ce système étant peu apprécié et entraînant des pertes pour l'agriculture (le contenu des latrines n'étant pas réutilisé comme engrais), les édiles namurois ont décidé d'associer l'entreprise d'enlèvement des immondices à celle de la vidange des latrines. Ainsi, dès 1779, l'entrepreneur des boues est également responsable de cette tâche. Il travaillera désormais en collaboration avec un maitre gadouard seul autorisé, avec ses ouvriers, à vider les lieux d'aisance. La gadoue récoltée, appartenant à l'entrepreneur de manière exclusive, sera déposée dans un réservoir et mélangée aux autres boues pour former de l'engrais34.

2.3. Bilan des modes d'action

Finalement il apparaît, suite aux visites des sergents de la ville, que les tentatives pour que chaque maison dispose d'un lieu privé ne

30 AÉN, Ville de Namur, n° 360.

31 PARMENTIER I., La pollution à Nivelles…, p. 276. 32 AÉN, Ville de Namur, n° 360.

33 AÉN, Ville de Namur, n° 359. 34 AÉN, Ville de Namur, n° 360.

donnent guère de résultats35. Quant au nouveau système de vidange des latrines, quelques années après sa mise en place, une grande quantité d'engrais, apparemment de bonne qualité, a été vendue aux cultivateurs des villages environnants36.

3. Conclusion

Au 18e siècle, l'intérêt porté à l'environnement, au cadre de vie s'avère variable du point de vue de la population namuroise ou de ses édiles. À l'instar d'autres villes des Pays-Bas autrichiens, Namur n'est pas épargnée par l'insalubrité. Son assainissement constituait dès lors une entreprise nécessaire.

Nous avons analysé un facteur d'insalubrité en particulier : les déchets. En ce qui concerne leur gestion, nous pouvons donc envisager le point de vue de la population namuroise et celui de ses édiles.

D'une part, nous avons remarqué un certain mépris de la part des Namurois pour la propreté et l'hygiène. Plusieurs indices l'attestent : certains ne respectent pas leurs obligations de balayage, évacuent leurs ordures à même la rue, mettent en œuvre différents moyens pour éviter de faire évacuer leurs fosses d'aisance lorsqu'ils en disposent.

D'autre part, le Magistrat semble accorder davantage d'attention à la propreté de la ville. La publication de nombreuses réglementations de même que l'organisation de services publics spécifiques en témoignent. Cependant, les textes de loi non respectés sont sans cesse republiés sans véritables modifications. Quant au service public, il semble qu'il n'ait pas toujours donné satisfaction. Plusieurs raisons sont à prendre en compte : un manque d'assiduité de la part des entrepreneurs mais également de la part de la population namuroise à rassembler ses immondices afin d'en faciliter le ramassage.

Le constat s'impose de lui-même : la ville reste insalubre. Son sol est souillé de multiples déchets qui encombrent les rues. Face aux atteintes quotidiennes à l'environnement urbain, les moyens déployés par les édiles étaient nécessaires mais guère efficaces.

35 D'ARRAS D'HAUDRECY L., Une enquête…, p. 23. 36 AÉN, Ville de Namur, n° 360.

Les villes de Huy, Virton37 ou encore Nivelles connaissent une situation similaire : les rues sont sales, souillées, malpropres, jonchées de boues et d'ordures… Parmi les autres villes des Pays-Bas autrichiens à la même époque, Namur ne semble donc pas faire exception.

Bibliographie de l’auteur sur la thématique

COQUIART, H., Les préoccupations environnementales à Namur au XVIIIe

siècle, Louvain-la-Neuve, 2005 (UCL, mémoire de licence inédit).

37 DORBAN M., Problèmes d'environnement et de qualité de la vie à Virton au XVIIIe siècle, dans Le pays Gaumais, t. XXXVIII-XIX, 1977-1978, p. 267.

Préoccupations sanitaires et