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Research and Development (R+D/GDP, %)

2. Que faire ? Propositions concrètes

Rappelons-le, notre étude a pour premier objectif de permettre une formulation de propositions concrètes de formation, adaptées aux conditions structurelles des entreprises, susceptibles de pallier aux in­

suffisances recensées et de satisfaire les besoins à moyen terme; des propositions utiles donc pour la prévention du chômage.

L'utilisation de la formation continue comme instrument de prévention du chômage est largement subordonnée à la politique de l'emploi ré­

gionale, voire locale, et, dans chaque entreprise, à la politique de ges­

tion des ressources humaines. Ces deux politiques, fruits d'une conjoncture économique et d'une transformation des mentalités, ne doivent cependant pas être considérées comme un préalable à la for­

mation. Au contraire, l'emploi, les ressources humaines et la formation doivent faire l'objet de politiques combinées et complémentaires.

Nous formulerons ici quelques propositions concrètes.

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-Trois dispositifs complémentaires de formation continue nous parais­

sent à même de contribuer tant à la prévention du chômage qu'à la sa­

tisfaction des besoins exprimés par les entreprises.

Le premier dispositif est composé d'équipes "volantes" de conseillers en formation continue. Ces équipes, composées de deux à trois per­

sonnes au maximum, devraient être compétentes en matière de ges­

tion de la formation en entreprise (dont l'analyse des besoins en for­

mation), de construction et évaluation de programme et de méthodes d'apprentissage adaptées au personnel faiblement qualifié.

Ces équipes seraient formées de personnes mises à disposition tant par les pouvoirs publics (Economie et/ou Instruction publique), par les entreprises elles-mêmes (partenaires sociaux, regroupements d'entreprises, .. ), que par des partenaires spécialisés dans la formation (centres de formation publics ou privés, universités).

Leur activité pourrait aller de l'expertise d'une situation à la mise en contact (interface) avec un partenaire extérieur, en passant par une participation à des actions conduites avec les ressources propres de l'entreprise.

Le deuxième dispositif est composé de plusieurs unités de formation et services, extérieurs aux entreprises, mais rapidement mobilisables par elles :

- une unité de vigie qui mesure l'évolution des compétences profes­

siûnnelles rnquises paï les entïepïises. Cette unité ûevmit proionger de manière permanente le travail d'enquête mené dans notre étude mais cette fois sur l'ensemble des entreprises du canton.

Logée, par exemple, au Service Cantonal de l'Emploi, elle constitue­

rait une stimulation constante à la pratique de gestion prévisionnelle des qualifications techniques et non techniques.

- Une unité de bilan ou de vérification des acquis expérientiels, dans lequel les travailleurs, peu, anciennement ou pas du tout qualifiés, peuvent prendre conscience de leurs acquis et par là même plus ai­

sément développer leur compétence professionnelle. Cette recon­

naissance des acquis est aussi utile au travailleur pour sa mobilité, sa

confiance en soi ou son perfectionnement, que pour l'entreprise qui embauche ou tout simplement gère au mieux ses ressources hu­

maines.

- Une unité d'orientation, couplée à la précédente, permettrait diriger les personnes intéressées vers des dispositifs de formation déjà existants (formations initiales, Universités Populaires, CPLN, Centre Point, ... ). On serait étonné de la richesse des offres déjà existantes mais mal connues ou mal adaptées au public qui nous intéresse ici.

- Une unité de formation à la réinsertion, perfectionnement ou recon­

version, composée d'éléments d'orientation, de préparation au pla­

cement ou à la mobilité, de mise à niveau des connaissances.

Cette unité pourrait développer aussi une série d'actions de formation plus directement centrées sur les compétences non techniques re­

censées.

Le troisième dispositif, un centre de formation, de documentation et de recherche en matière de formation continue. Un tel centre procèderait à la formation des formateurs en entreprise, à la capitalisation des in­

formations et technologies (logiciels, ... ) de formation, à la réalisation d'études ou de recherches commandées notamment par les entre­

prises elles-mêmes.

Il peut être régional (cantonal, romand, interfrontalier) , et devrait pour le moins bénéficier d'un important appui universitaire.

3. Perspectives

Nous prévoyons deux extensions à notre démarct1e : la première dans

1 (-) même espace régional neuchâtelois, la seconde sur l'ensemble de la

Suisse romande.

Dans le canton de f\Jeuchâtel, il s'agit avant tout de mettre en place les dispositifs susmentionné!; et d'y raccorder un maximum d'entreprises.

Travail de longue haleine : il faudra sans doute plusieurs années pour paMmir à une échelle d'action significative pour la région.

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En Suisse romande, il est prévu de procéder à un prolongement de notre enquête sur l'ensemble du territoire romand et d'y développer le même type de dispositifs.

Nous espérons vivement que ce travail permettra la mise en place d'un outil de formation utile au développement économique de notre région, et plus particulièrement utile dans l'action préventive contre le chô­

mage, moins important que dans d'autres pays, mais non pour autant plus supportable.

DEBAT

Le débat a été nourri de deux types d'interrogation. Tout d'abord des questions précises et ponctuelles liées à la réalité helvétique - congé­

formation, salaires sociaux, rôle de l'immigration sur le chômage - puis des interrogations ou réflexions plus générales directement issues du projet présenté - relation formation technique-formation générale, par­

tenaires et lieux de la formation, transférabilité des méthodes et solu­

tions proposées.

Les frontaliers et saisonniers jouent effectivement un rôle important de régulateurs du marché du travail en Suisse et contribuent certainement pour beaucoup à y affaiblir le taux de chômage.

Le patronat de la plupart des branches de l'industrie et du commerce y étant opposé, le congé-formation - lié au résultat des conventions né­

gociées entre les partenaires sociaux et non à un dispositif législatif -est peu développé en Suisse. Par ailleurs, la majorité parlementaire fé­

dérale actuelle n'y est guère favorable non plus, or une loi ne peut être promulguée que sur le plan fédéral. Cependant, certains cantons ont effectué des percées dans cette direction : ainsi Genève où s'est constitué un Fonds, prélevé sur la masse salariale et géré par les par­

tenaires sociaux, qui permet de promouvoir la formation continue des travailleurs en emploi. On assiste donc aujourd'hui à une avancée pru­

dente dans ce sens, et il paraît raisonnable de penser que la Suisse sera dotée, d'ici quelques années, d'une législation en ce domaine.

Malgré l'importance en Suisse de la conception duale de la formation professionnelle, le rôle de l'entreprise dans ce domaine est surtout re-, connu pour la formation initiale.

Le développement de la formation continue en entreprise se heurte en­

core à de nombreuses résistances, tant du côté des employeurs que

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-des salariés. L'enquête du Groupe Emploi a bien mis en évidence la difficulté de mobiliser les travailleurs les moins qualifiés pour la forma­

tion; il revient donc aux syndicats de sensibiliser leurs adhérents aux enjeux, essentiels pour eux aussi, de la formation.

Les compétences sociales, non techniques, prennent dans les entre­

prises une importance beaucoup plus grande aujourd'hui qu'hier; et elles se traitent, du point de vue de la formation, par des formations générales. Il faut d'une part que la formation se déroule là où se trou­

vent les gens, et d'autre part que la formation et ses objectifs soient compréhensibles pour les personnes concernées. Or les personnes faiblement qualifiées ne peuvent que péniblement être amenées à en­

trer dans un processus de formation continue : elles ne le feront que si elles se rendent compte du bénéfice direct qu'elles pourront en tirer pour leur situation de travail. La crédibilité de la formation, pour ces personnes, est donc beaucoup plus forte si elles la font en liaison avec leur entreprise plutôt qu'à l'extérieur. Il est essentiel que les travailleurs comprennent que la formation générale aussi bien que technique joue un rôle déterminant pour leur stabilisation ou leur promotion, et il est non moins important que cela se passe dans l'entreprise ou au moins en concertation très étroite avec elle. L'entreprise ne peut donc rester extérieure ou indifférente à ce problème.

La formation des personnes précarisées - qui ne sont ni au chômage ni au bénéfice d'un emploi stable - est une particularité qui mérite ré­

flexion. Car il est vrai qu'entre emploi stabilisé et chômage, il existe des situations précaires, de plus en plus fréquentes.

La question de l'accès à la formation se pose dans des termes diffé­

rents selon la situation : pour les chômeurs, il y a la loi sur le chômage;

pour les personnes qui sont en emploi stable, il y a la pratique du congé-formation contractuel, et donc des possibilités d'améliorer leur situation. Mais pour ceux, de plus en plus nombreux, qui sont dans une position précaire, il se pose un problème grave, puisque le dispositif de formation continue en Suisse n'a rien prévu pour eux.

Cependant, sans nier l'importance de chacun de ces aspect précis, une approche holistique de la question de la formation est indispen­

sable : il faut considérer ces problèmes dans un contexte global de

po-litique de formation. Cette approche, chère à plus d'un membre du groupe du Conseil de l'Europe, reste ici encore utopique. Il est vrai qu'en Suisse nous ne répondons pas encore à cette exigence, la sépa­

ration entre formation générale et formation professionnelle des adultes étant encore très nette. Plus encore - et cela pose problème à l'étranger - la formation première, ou de base, et la formation continue sont elles aussi distinctes. Cette double séparation est dramatique pour la formation dont on a aujourd'hui besoin.

Enfin, relevons un dernier point important concernant la transférabilité des propositions avancées dans la recherche du Groupe Emploi. Une transférabilité à d'autres régions helvétiques semble ne pas présenter de difficultés particulières. La transférabilité à d'autres régions euro­

péennes est plus difficile à estimer, elle est nécessairement tributaire des particularités culturelles, sociales et législatives de chaque pays.

Un partenariat fort entre entreprises et centres de formation, privés ou d'Etat, est aujourd'hui pratique courante dans bien des pays; reste donc à savoir si une prévention du chômage telle que proposée ici est applicable dans d'autres régions européennes. C'est à ce groupe du Conseil de l'Europe d'en juger.

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-DECLIN, TRANSITION ET RELANCE