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PARTICIPANTS PAR TYPE DE FORMATION (en %)

POUR FORMATEURS FAIBLEMENT QUALIFIES

Christine Bourdet

Au départ, on nous a demandé de former des formateurs qui n'avaient aucune formation dans l'éducation des adultes et qui désiraient une sensibilisation dans ce domaine, ces formateurs pouvant être débu­

tants, bénévoles ou rémunérés.

Nous avons rapidement constaté qu'il y avait une relative superposition entre ces formateurs et le public auquel ils s'adressaient. Nous avons donc cherché à répondre à ce double aspect : premièrement, former des formateurs peu qualifiés dans le domaine de l'éducation des adultes, deuxièmement les sensibiliser à la formation des adultes fai­

blement qualifiés.

La stratégie pédagogique et les contenus de la formation de forma­

teurs ont donc été conçus de façon à ce qu'ils apprennent les bases de leur métier à propos d'une formation destinée à un public proche du leur.

Une formation pour des formateurs entraîne obligatoirement le méca­

nisme suivant : au delà des contenus pédagogiques, les formateurs participants observent le travail pédagogique d'autres formateurs , a savoir les animateurs du cours. L'effet formateur attendu se situe à deux niveaux : au niveau des contenus et au niveau de la stratégie em­

ployée dans l'animation ou dans l'exemple donné "en vrai" par les for­

mateurs qui animent le cours. Nous avons essayé d'utiliser ce méca­

nisme; nous avons ainsi tenté de dire et de dire en faisant.

Notre cours est de 36 heures, donné à raison de deux soirs par se­

maine pendant 6 semaines, au début de l'année scolaire.

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Les objectifs pédagogiques de ce cours sont les suivants : première­

ment acquérir le langage permettant de définir et d'évaluer une action de formation; deuxièmement, identifier les étapes successives interve­

nant dans la préparation d'une action de formation; troisièmement, construire en groupe l'ensemble d'une action de formation, et quatriè­

mement, échanger son expérience avec d'autres formateurs.

Le programme suit les différentes phases de la construction d'un pro­

gramme de formation, depuis l'analyse de la demande jusqu'au projet final. Une étude de cas, tirée d'une formation ayant eu lieu à !'Hôpital de Genève, permet aux participants de parcourir toutes les étapes. Il s'agit de la formation des standardistes au 144 (numéro d'appel d'urgence) qui a été réalisée lors de la création de la centrale d'urgence.

La formation que nous avons construite vise une sensibilisation des participants au métier de formateur :

- Repérer les attentes, analyser les besoins. A ce stade, nous présen­

tons la demande telle qu'elle a été formulée au service de formation de !'Hôpital. Nous faisons l'inventaire des sources d'information né­

cessaires (cahier des charges, fiches de poste, etc), et les remettons aux participants;

- définir les buts de la formation;

- définir de façon opérationnelle les objectifs pédagogiques;

- définir des sous-objectifs ou groupes de contenus;

- choisir une stratégie, c'est-à-dire méthodes et techniques, qui tien-nent compte des caractéristiques du public (les standardistes du 144) ;

- élaborer des supports didactiques;

- évaluer une action de formation; prévoir dans le projet qui évaluera, qu'est-ce qui sera évalué, dans quel but et comment;

- présenter le projet de formation; chaque groupe présente un projet qui est critiqué;

- animer une séquence de formation tirée de ce projet : un participant, voire plusieurs, prennent en charge l'animation d'une séquence. Leur travail est apprécié collectivement.

En quoi les options pédagogiques et la stratégie que nous utilisons ré­

pondent-elles aux caractéristiques d'un public faiblement qualifié ? Il s'agit de former à un métier plutôt qu'à un ensemble de tâches ou plutôt qu'à une tâche d'enseignement stricto sensu. Nous avons fait le choix de dépasser le cadre de la salle de classe, de travailler avec les formateurs l'ensemble de l'action de formation, depuis la demande jusqu'à l'animation de ces cours.

Etre formateur suppose une connaissance complexe du terrain et du public, la capacité d'organiser, la préoccupation d'évaluer le travail pé­

dagogique et les progrès des participants. Tout formateur doit se poser les mêmes questions que se pose un responsable de formation, et par ailleurs tout formateur pourrait être appelé un jour ou l'autre à être res­

ponsable de programme. Il s'agit de retrouver une vision globale du métier au lieu d'une vision antérieure souvent parcellaire, de contribuer à qualifier ou à re-qualifier les formateurs dans leur domaine. Ne peut­

on pas étendre ces principes au public de ces formateurs, n'y a-t-il pas qualification, dès que ces adultes peu qualifiés s'approprient un en­

semble de connaissances et de compétences ?

Deuxièmement, la stratégie de formation repose sur l'étude d'un cas réel. L'étude de cas comme méthode active d'apprentissage n'est plus à démontrer, elle doit être choisie de façon à ce que les participants soient motivés par le cas, retrouvent certains problèmes rencontrés dans leur travail, expérimentent des concepts et outils appris en forma­

tion. On apprend en faisant. Cette option est aussi valable pour IEJ pu­

blic faiblement qualifié.

Troisièmement, le cas auquel il a été fait appc�I s'adrossait à une caté ­ gorie de personnel moyennement qualifié (standardistes), niveau CFC.

Nous demandons aux formateurs de concevoir um} formation relative--1 29

ment complexe, tenant compte des différents aspects de la fonction -médicaux, géographiques, psychologiques, juridiques. Ce travail d'élaboration comporte la contrainte suivante : concevoir une forma­

tion ouvrant à un champ large de connaissances dans les limites des responsabilités liées à la fonction. Là où les formateurs voulaient offrir des connaissances médicales ou psychologiques assez poussées, la réalité du cas les stoppe dans leurs envolées. Concevoir un projet complexe, oui, mais aussi réaliste. La formation donne la configuration de ce que sera la fonction exercée. Les formations pour public faible­

ment qualifié doivent avoir cet aspect : développer des connaissances et élargir les compétences au-delà de la fonction visée, tout en prépa­

rant à l'exercice de cette fonction.

Quatrième aspect : il y a alternance théorie-pratique. La majorité des séances sont organisées en deux parties : introduction des concepts puis construction progressive du projet de formation et insertion de la thématique abordée. Cette alternance nous paraît une stratégie favo­

rable au public faiblement qualifié. Mais il peut être préférable de l'inverser, de partir de la pratique pour arriver à la formalisation.

Enfin, travailler collectivement. L'étude de cas est travaillée en groupes encadrés chacun par un formateur, divisés ensuite éventuellement en sous-groupe. Cela permet la mise en confiance, le soutien mutuel, les échanges, l'argumentation de différents points de vue. Ce travail en groupe nous paraît également être une stratégie favorable pour les pu­

blics faiblement qualifiés et marque autrement la place des animateurs qui doivent être présents, mais laisser le gmupe avancer, veiller à ce que le groupe ne s'égare pas, restituer les étapes du travail, veiller au travail collectif, fournir un feed-back sur le travail réalisé. Une formation de formateurs pour public faiblement qualifié doit comprendre le dé­

veloppement des compétences d'animation de groupe.

DEBAT

Ne manque-t-il pas un maillon dans le programme proposé, qui serait constitué de formations destinées à des formateurs qui inteNiendraient en entreprises pour former les salariés aux capacités sociales dont on a largement parlé précédemment, mais que l'on ne sait pas encore très bien comment aborder en formation ?

Dans la formation de base évoquée ici, on trouve peu de personnes is­

sues des entreprises, d'abord parce qu'on ne tait pas beaucoup de formation dans les entreprises en Suisse et ensuite parce que, lorsqu'on en fait, on se situe au niveau des cadres intermédiaires et supérieurs. Donc les cadres en entreprises entrent en général dans le niveau supérieur du dispositif, au niveau du CEFA. L'idée est ce­

pendant que les gens passent de la formation de base à la formation CEFA et deviennent des formateurs avec un statut de cadres intermé­

diaires dans l'entreprise. C'est également que les formateurs de "haut vol" viennent aussi au niveau du CEFA pour ensuite se diriger vers les formations spécialisées. Il y a là une question de crédibilité vis-à-vis de ces entreprises. Pour elles, il faut que toute la gamme soit présente, sans quoi ils ne sont pas intéressés. Ces formateurs, avec l'objectif d'une polyvalence, devraient être susceptibles d'améliorer les perfor­

mances d'une formation aux qualifications sociales dans l'entreprise, puisqu'ils sont formés en simultanéité avec des gens qui travaillent sur la culture générale et que l'on travaille sur des programmes qui recou­

pent les deux. Il y a donc un effort dans ce sens.

La part de ressources attribuées à la formation continue, en regard de l'éducation en général, a des répercussions sur le statut et la qualifica··

tian des formateurs. Si le budget est petit, si l'on accorde peu d'importance à la formation continue, il est très difficile de profession­

naliser les formateurs. Il faut donc renforcer le principe de la formation continue comme un pilier indispensable du système éducatif.

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L'amélioration du statut de la formation des adultes et la professionna­

lisation vont de pair.

En ce qui concerne le statut de la formation des personnes faiblement qualifiées, deux éléments militent en faveur de son élévation : le coût de la formation et son développement. Ceci amène des demandes de type budgétaires (programmes d'évaluation de l'efficacité de ce type de formation). L'expérience du GREOP (Groupe Eduction Permanente de l'Université de Genève) montre que le fait de lier l'Université à ce type d'actions de formation peut amener une contribution, modeste mais néanmoins importante. Par le fait que l'Université prend en charge ce type de programme, elle contribue à donner un statut tant au formateur qu'au public faiblement qualifié.

Chacun admet que le contenu de cette formation est très important pour le groupe cible, mais la façon dont ce savoir est transmis est également très importante. Il faut une approche souple, en particulier des méthodes pédagogiques souples, parce que le public faiblement qualifié a des besoins très spécifiques dont l'un des aspects est que le participant doit prendre part au processus. Il ne faut pas seulement transmettre un savoir. Il faut que le formateur apprenne à créer un envi­

ronnement d'apprentissage. Comment peut-on faire participer les ap­

prenants à l'analyse de leurs besoins ?

En ce qui concerne la participation des apprenants, dans la mesure où une partie énorme du temps de formation est consacrée, dans le pro­

gramme évoqué, à l'application et à l'analyse des situations de for­

mation de chacun et que celle-ci constitue un terme de l'échange entre les formateurs, on a nécessairement un processus dans lequel les par­

ticipants sont très actifs. Ils sont donc sensibilisés au fait que ce type de présence est très important.