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La propriété volumique ou la propriété foncière du Code civil allant de l’unité à la division

Dans le document De la propriété du sol en volume (Page 52-55)

B. Le droit de superficie et la propriété civiliste

III. La propriété volumique ou la propriété foncière du Code civil allant de l’unité à la division

(39.) Propriété et droit de superficie sont indissociables, et entretiennent une relation faite de conflits, de rapports de force, de défiance. Le droit de superficie perturbe la propriété du code en déjouant sa quête absolue d’unité et d’exclusivité. La cause de cette perturbation est simple. Le droit de superficie réintroduit une discussion sur le lien unissant les hommes aux

choses, dans des termes assez semblables à ceux obser vés lors du débat fondateur sur les rentes foncières, ou, dans une moindre mesure, sur l’article 553 du Code civil. Or, la propriété civiliste a été construite sur la certitude d’être l’unique modèle de propriété, une propriété parfaite, relevant de la nature des choses, ayant combattu, et vaincu, l’imperfection de la division incarnée par le droit de superficie. Ce postulat a conduit la propriété vers une forme de radicalité, une liberté inconditionnelle, vouée à l’échec. Le Code civil à l’article 553 organise lui-même, au moins le principe, d’une alternative à une propriété strictement individuelle ou unitaire, tout simplement pour répondre aux besoins de division du sol, du corps social. La crainte d’un retour de la féodalité ou celle d’une collectivisati on de la propriété qu’entraînerait le droit de superficie n’y peuvent rien changer. L’unité ne peut totalement exclure la division.

La question qui se pose au modèle de propriété civiliste peut donc être formulée comme suit : la théorie de la propriété du Code civil fondée sur l’unité, est-elle en capacité d’accepter la division, sans se renier ?

Répondre positivement suppose l’abandon d’un modèle absolu de propriété. Le dogme d’une propriété inconditionnelle régissant sans partage les relations entre l’homme et les choses, doit être écarté au profit d’une théorie reposant sur un équilibre entre liberté et responsabilité. Cette hypothèse est celle de la propriété systémique, brièvement développée ci-dessus. Avec cette théorie, l’accent est mis sur la dynamiq ue de la propriété civiliste, révélant le système qui la constitue. L’unité demeure, sans être un donné figé, immuable, mais un point de départ vers la division, elle-même capable de revenir à l’unité originale. Cette ouverture du droit des biens ne s’explique pas, ou pas seulement, par des raisons internes à la science juridique. C’est le premier grand apport de la théorie du volume immobilier du doyen Savatier. Le phénomène d’urbanisation représente un changement social majeur et durable dans la façon dont l’homme vit sa relation au sol, à la ressource foncière, appelant inéluctablement un changement du droit. Les travaux du doyen Savatier sont porteurs d’un autre enseignement fondamental, plus juridique cette fois. L’auteur, renouant avec ce qu’aurait été le droit de superficie à Rome (cf. supra §20 et s.), envisage la division sur la base de la chose, le volume. Suivant le corps social, le juriste se trouve alors en position d’appréhender le sol non plus seulement dans le sens horizontal, mais aussi vertical. Le sol, élément du monde tangible est conceptualisé en trois dimensions sur le modèle du sol surface, doté seulement de deux dimensions, créant les conditions d’une propriété civiliste foncière volumique.

Cette propriété volumique emprunte le sillon tracé par le doyen Savatier ; elle crée des liens, des ponts, favorise l’approche des petits pas, plutôt que celle de la tabula rasa. Ce choix est plus celui de l’évolution que de la révolution, tout en portant un vrai changement. L’heure n’est plus au passage de l’enfance à l’âge adulte, mais à accepter la maturité. Ainsi, le sol en

volume se veut responsable, s’efforce de maintenir le contact avec des théories voisines, cherche des complémentarités. Conforme à la propriété du Code civil, la propriété volu mique se rattache à la thèse dite moniste du volume immobilier, voyant dans cette chose un bien, immeuble par nature, susceptible d’être appropriée exclusivement par un individu. La propriété volumique s’inscrit dans la suite de l’avant-projet de réforme du droit des biens porté par l'Association Henri Capitant des Amis de la Culture Juridique Française.

Néanmoins, cette théorie, qui reste avant tout centrée sur le fonds de terre, ne constitue pas une théorie générale de la propriété. À ce titre, elle n’aborde pas la problématique de la propriété des choses idéelles. De même, traitant de la division foncière sur la base du sol, la propriété volumique dans son processus de conception est exclusive du statut de la copropriété de la loi de 1965. Celui-ci est perçu comme une forme de division sectorielle, légitimée par une loi spéciale, compatible avec la propriété volumique, mais dont cette dernière ne procède pas.

(40.) Établir la propriété du sol en volume rend nécessaire de se livrer à une introspection du rapport de droit noué entre l’individu et le sol dans le cadre du Code civil, introspection constituée de trois étapes.

La première consiste à examiner comment le droit des biens appréhende la chose « sol », qu’il dénomme fonds de terre, soit dire ce qu’est cette chose sol aux yeux de la science juridique. Cet examen qui dévoilera la propension initiale du code à percevoir le sol comme une surface, invitera à étudier quelques situations d’un sol volume, en opposition avec ce format originel (Partie I).

La deuxième étape sera consacrée aux thèses alternatives à la propriété volumique. Après examen, ces thèses seront écartées, soit parce qu’elles refusent le principe d’un sol se développant verticalement, soit parce que ces théories proposent une division de l a ressource foncière, dérogeant directement ou indirectement, au modèle de propriété du Code civil (Partie II).

Enfin, la troisième et dernière étape servira à fonder la propriété volumique. La démarche comprendra plusieurs séquences. L’une d’elles se traduira par une définition, ou plus exactement une non-définition, du volume immobilier. Une autre sera l’occasion de proposer un fondement textuel à la propriété du sol en volume, qui n’est autre que l’article 552 du Code civil (Partie III).

Dans le document De la propriété du sol en volume (Page 52-55)