• Aucun résultat trouvé

Propositions découlant des données sur la GRH des gestionnaires de projets

CHAPITRE 5 – INTERPRÉTATION ET DISCUSSION

5.1 Propositions de la recherche

5.1.1 Propositions découlant des données sur la GRH des gestionnaires de projets

L’analyse des données au sujet de la GRH des GPJ, soit par le biais de l’exercice des pratiques de GRH à l’endroit des GPJ, suggère une proposition principale à partir de laquelle découlent des propositions complémentaires. Ainsi, l’interprétation des données propose la présence d’une GRH «hybride» dans les organisations à la source de laquelle trois approches de la GRH des GPJ émanent, soit une GRH conventionnelle, d’élite et de proximité. C'est tout d’abord la GRH «hybride» qui retient l’attention.

5.1.1.1 GRH «hybride» au sein des organisations

Les données montrent que la GRH qui s’effectue dans les organisations, par l’intermédiaire de l’application des pratiques de GRH, est à la fois collective et individualisée, d’où la qualification d’«hybride».

5.1.1.1.1 GRH collective

L’application universelle des politiques et pratiques de GRH constitue la GRH collective dans les organisations. C'est-à-dire que l’ensemble de leurs politiques et pratiques de GRH s’appliquent sans distinction particulière à l’ensemble des personnels des organisations. Ainsi, comme les GPJ ne représentent pas une catégorie distincte de personnel dans les organisations, leur prise en charge s’effectue à ce niveau au même titre que pour d’autres catégories de ressources humaines. Alors que des travaux, tel ceux de Baron et Couvreur (1992) et Baron (2003), soulignent l’inadaptation des pratiques de GRH traditionnelles, les données de cette recherche vont dans le sens opposé. D’ailleurs, en comparaison avec les GPJ des travaux de Harnois et Fabi (1994) et Pettersen et al. (2000), les GPJ qui évoluent dans ces organisations qualifiées de «stables» par Huemann et al. (2007) retirent visiblement des bénéfices de ce contexte parce que non seulement s’avère-t-il bien structuré mais les inclut-il à part entière. C'est notamment le cas au niveau du programme de formation destiné aux hauts potentiels. Ce dernier favorise les GPJ puisqu’ils présentent un profil professionnel qui correspond aux exigences de ce programme (ex. : qualités de leader, intérêt pour la gestion à un plus haut niveau organisationnel).

5.1.1.1.2 GRH individualisée

Malgré l’aspect collectif de la GRH dans les organisations, les données permettent d’identifier la présence d’une GRH individualisée. Cette GRH individualisée est rendue possible par la délégation de l’exercice des pratiques de GRH de la fonction RH aux gestionnaires (managers) immédiats (Purcell et Hutchison, 2007).

Comme d’autres employés des organisations, les GPJ relèvent d’un gestionnaire immédiat, soit le GdeGPJ. C'est par l’intermédiaire de ce dernier que s’effectue une GRH au jour le jour. Cette GRH individualisée permet de pallier des lacunes de la fonction RH tel que pointées dans la littérature. À savoir, notamment, la difficulté de la fonction RH à identifier chez les individus qui participent aux projets les compétences essentielles, à gérer leurs malaises en cours et à l’issue des projets (ex. : perte d’identité professionnelle, deuil à l’issue de la participation à un projet) ainsi qu’à reconnaître leurs nouveaux savoirs, leurs habiletés et expériences nouvelles dans un but de bien-être des individus et de capitalisation des acquis (Huemann et al., 2004 ; Garel et al., 2006 ; Asquin et al., 2007). En ce sens, la délégation des pratiques de GRH aux GdeGPJ se rapproche de la décentralisation que suggère Garel (1998) et Garel et al. (2003) selon l’objectif

d’une GRH individualisée des acteurs projets. En ce sens, la fonction RH joue davantage un rôle de soutien et de guide auprès de ces gestionnaires immédiats qui eux, parce qu’ils connaissent leur ressources humaines, sont plus à même de les prendre en charge (McConville, 2006).

Dans ce contexte de GRH «hybride», les GPJ bénéficient ainsi à la fois des avantages que leur procurent le filet collectif et le suivi individualisé. Cette situation s’apparente à celle que rapporte Hervouet et al. (2008) au sujet de la GRH des Forces spéciales françaises.

Les données permettent également d’identifier à l’intérieur de cette GRH «hybride» trois types de GRH des GPJ. Il s’agit de ce qui peut être appelé de GRH conventionnelle, d’élite et de proximité.

5.1.1.2 Typologie de la GRH des gestionnaires de projets

L’analyse des données sur la GRH des GPJ permet d’identifier, à l’intérieur de la GRH «hybride», trois approches ou types de GRH qui, de façon complémentaire, s’exercent à leur endroit. Il s’agit d’une GRH conventionnelle, d’élite et de proximité.

5.1.1.2.1 GRH conventionnelle

Le fait que les GPJ soient, au même titre que les autres employés des organisations, touchés par l’application des politiques de GRH en vigueur et par l’exercice des pratiques de GRH, permet d’établir que les GPJ sont gérés de façon conventionnelle dans les organisations. Par comparaison avec la littérature en gestion de projets, ce constat détonne puisque des travaux tendent à critiquer une telle approche pour la gestion des acteurs projets (Baron, 2003). Pourtant, les données indiquent que ce type de GRH semble convenir aux GPJ des organisations de la recherche. Par ailleurs, les données indiquent la présence de deux autres types de GRH qui, d’après leurs manifestations, permettent d’assurer l’adéquation entre une GRH conventionnelle et la gestion de projets et ainsi contribuer au bien-être professionnel des GPJ et assurer leur stabilité ou rétention dans les organisations.

5.1.1.2.2 GRH d’élite

Les données révèlent que les GPJ dans les organisations font l’objet d’une GRH d’élite. C'est particulièrement le cas lorsqu’ils sont repérés pour faire partie des cohortes d’individus à haut potentiel. La GRH d’élite se veut ainsi stratégique pour les organisations qui souhaitent non

seulement former un bassin de futurs hauts dirigeants mais aussi conserver des ressources humaines qui, par leurs talents, sont créatrices de valeur. Les GPJ représentent en ce sens des candidats de choix pour les organisations. Cela notamment parce qu’ils sont des professionnels de niveau senior, qu’ils cumulent plusieurs années d’expérience au sein de la même organisation, en plus d’en connaître les rouages, les acteurs-clés, les technologies, les produits et les clients. Également, parce que les GPJ sont réputés démontrer des qualités exceptionnelles en matière de leadership.

La GRH d’élite permet ainsi aux GPJ qui se qualifient à titre de hauts potentiels, et qui manifestent un intérêt à faire officiellement partie de ce groupe d’élite, de sortir de la spirale de la gestion de projets tel que définie par Huemann et al. (2004) et d’envisager une carrière en montée au niveau du management. Cette opportunité se présente toutefois au sein des organisations dont les capacités (ex. : taille, chiffres d’affaires) permettent une telle possibilité de carrière pour ses employés, incluant le GPJ.

Malgré le fait que les GPJ soient décrits comme une population d’employés stables au sein des organisations, la GRH d’élite permet aux organisations de s’assurer l’engagement des GPJ, de rentabiliser leurs investissements (ex. : en formation), de capitaliser les expériences acquises au fil des années et, même si encore une fois le risque est faible, de minimiser le départ de compétences qu’elles estiment «à valeur ajoutée» vers des organisations concurrentes. La GRH d’élite consiste aussi en une stratégie pour assurer la pérennité des organisations. Cette approche à l’endroit des GPJ s’inscrit donc en ligne droite avec la théorie des ressources. Cela notamment parce qu’elle illustre de façon éloquente comment les organisations gèrent les GPJ, soit à titre de «core value» (Amit et Belcourt, 1999; Lepak et Snell, 2002).

5.1.1.2.3 GRH de proximité

Les données mettent en relief une troisième approche de GRH des GPJ, soit la gestion de proximité (Peretti, 2006 ; Thévenêt, 2009). Celle-ci s’effectue par l’intermédiaire du GdeGPJ. Ainsi, la gestion de proximité à l’endroit des GPJ permet le passage d'une gestion collective et discontinue à une gestion individuelle et continue (Peretti, 2006).

À l’instar des autres gestionnaires dans l’organisation, le GdeGPJ a la responsabilité d’exercer les différentes pratiques de GRH à l’endroit de chacun de ses GPJ. Selon la définition de Thévenêt (2009), le GdeGPJ, par la gestion de proximité, est engagé dans une mission de coordination des

GPJ où il intervient de manière à ce que ceux-ci réussissent leurs projets et demeurent dans l’organisation. À ce propos, pour Peretti (2006), les gestionnaires de proximité sont les mieux placés dans l’organisation pour surveiller l'adaptation actuelle et future de leurs collaborateurs, pour aménager leurs temps de travail, suivre l'évolution de leurs emplois et prévenir les risques d'inadéquation en s'appuyant sur l'expertise des conseillers de la fonction RH.

Dans les cas étudiés, les GdeGPJ reçoivent effectivement l’appui de la fonction RH. D’ailleurs, celle-ci se positionne avant tout comme une fonction support à l’organisation. L’appui de la fonction RH se manifeste par la sensibilisation de tous les gestionnaires immédiats dans l’organisation à l’importance de jouer leur rôle de GRH, par le suivi de leur application des différentes pratiques de GRH propres à l’organisation, par l’offre de formation sur la GRH ainsi que par le soutien en cas de problèmes avec un GPJ (ex. : baisse de rendement, conflit, désir de quitter l’organisation).

Les GdeGPJ dépassent toutefois la simple application des pratiques de GRH. Cela notamment par le biais de leurs comportements et attitudes à l’égard des GPJ (Thévenêt, 2009). Outre les obligations formelles, les GdeGPJ jouent plusieurs rôles qui les amènent à être à l’écoute des GPJ, à les motiver, à les «coacher», à les rendre visibles auprès des plus hautes instances de l’organisation ainsi qu’à les ramener sur les besoins des clients.

Cette gestion de proximité dont font preuve les GdeGPJ se veut également personnalisée, individualisée. En ce sens, ils pratiquent une approche appropriée pour la gestion de professionnels qui présentent des caractéristiques des travailleurs du savoir (ex. : davantage formés, informés, autonomes et évoluent dans un contexte qui a la particularité d'être dynamique) (Peretti, 2006).

5.1.2 Propositions découlant des données sur les acteurs de la GRH des gestionnaires de