• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE II : ENTRÉES THÉORIQUES ET LIENS ENTRE LES DIVERSES RÉ FLEXIONS.

Le 3 ème niveau est le « choc », qui provient de la confrontation à la réalité Le sujet (« le Moi »)

1.3. Projet pédagogique et pédagogie du projet

BOUTINET évoque le passage du projet pédagogique à la pédagogie du projet en dévoilant ce que veut dire chacun d’eux. Il considère que « la pédagogie du projet qui n’est ni la figure similaire ni la figure inverse du projet pédagogique […] a un caractère délibérément global qu’elle peut se justifier et se voir reconnaître le statut de méthodologie » (2012 : 225).

Il considère que « ce détournement du langage qui transforme le projet pédagogique en pédagogie du/par projet est pour nous l’occasion d’opérer une distinction instructive entre la description opératoire d’une intention, consignée dans l’un ou l’autre des projets éducatif, pédagogique ou d’établissement, et la référence à une méthodologie basée sur le projet : la pédagogie du ou par le projet initiée depuis déjà près d’un siècle par l’Ecole pragmatiste nord- américaine (Kilpatrick, 1918 et 1926) » (2012 : 225). Ce jeu de langage nous amène à distinguer, selon BOUTINET « le projet-objet du projet-méthode (LE GRAIN, 1980, BOUTINET, 1988). Le premier renvoie, entre autres, au projet pédagogique, le second à la pédagogie du projet » (BOUTINET, 2012 : 225).

Parmi les caractéristiques de cette méthodologie, c’est-à-dire de la pédagogie du/par projet selon (BOUTINET, 2012) nous pouvons noter le fait que :

Cette méthodologie amène les apprenants à être immergés dans l’expérience où théorie et pratique se trouvent au même niveau et à partir de là, les apprenants deviennent des acteurs sociaux en réalisant une action par le biais des outils théoriques.

Elle est « de type appropriatif », qui correspond à l’insertion sociale de l’apprenant et elle est opposée au type transmissif du savoir.

D’après BOUTINET (2011), entre projet pédagogique et pédagogie du projet, il existe une relation étroite qui les associe l’un à l’autre. Selon lui, le projet pédagogique fixe les buts et les objectifs à atteindre grâce au projet, mais il n’assure pas la démarche qui nous amène à le

189

réaliser, voilà pourquoi le projet pédagogique fait appel à la pédagogie du projet qui, elle, précise le processus à suivre pour réaliser le projet.

En d’autres termes, le projet pédagogique se base sur deux acteurs, d’un côté l’enseignant avec son rôle d’enseigner, de l’autre côté l’apprenant avec son rôle d’apprendre. Pour se réaliser, il fait appel à la pédagogie du projet « qui met dans le moment présent les acteurs en situation de choisir, de décider, d’agir ; et c’est en agissant que ces acteurs se construisent ; le projet devient donc l’instance même d’apprentissage » (BOUTINET, 2011 : 48). Autrement dit, l’apprenant acquiert des outils et des compétences nouvelles tout au long de la réalisation du projet. Pour résumer, associer le projet pédagogique à la pédagogie du projet, signifie articuler les objectifs fixés et le processus qui conduit l’apprenant à construire ces objectifs par et pour le projet.

Ces explications avancées par BOUTINET nous rappellent la différence qui existe entre l’éducation, la didactique et la pédagogie. L’éducation, comme le projet pédagogique, tracent les objectifs à atteindre, alors que la pédagogie du projet, qui ressemble à la didactique et à la pédagogie, est la conduite à suivre pour pouvoir résoudre des situations-problème tout au long de la réalisation du projet et par conséquent, pour assimiler des objectifs. Ce sont des outils, des compétences pédagogiques, une démarche, une méthodologie et un déroulement à suivre que l’apprenant met en œuvre. Ils sont nécessaires pour résoudre les situations-problème et par la suite, pour construire ses connaissances et mettre en œuvre le projet.

Grâce à ces explications, nous avons démontré que notre projet s’est monté en suivant la méthodologie de la pédagogie du projet. En effet, nous avons visé des objectifs à atteindre et avons eu recours à un processus conducteur, qui nous (moi et les étudiants) a guidés dans la réalisation de ces objectifs. Et surtout, il nous a aidée à amener les étudiants à réaliser différentes tâches et actions et par la suite à réaliser le projet à proprement parler. Pour rappel, ce dernier était de monter un spectacle de chant en français devant un public extérieur à la classe mais aussi, de réaliser un livret de projet « Chanter pour voyager » à distribuer au public.

La différence entre projet pédagogique et pédagogie du projet étant clarifiée, nous pouvons à présent affiner le positionnement de notre projet. Il a donc pris la forme d’un projet

pédagogique ayant comme méthodologie la pédagogie du projet. Parallèlement au projet

pédagogique, il a inclus d’autres formes de projets individuels ou collectifs, telles que nous les avions évoqués ci-dessus, pour rappel : le projet personnel (vu que les étudiants vont améliorer leurs compétences dans une langue étrangère, ce qui leur sera profitable pour leur avenir social et professionnel), le projet professionnel (ce projet servira leur future insertion professionnelle), le projet d’apprentissage (étant donné que les apprenants vont acquérir des

190

connaissances nouvelles tout en étant en contact avec des situations-problème) ou encore le

projet d’action éducative (il s’agit d’une action traduite par un spectacle).

Si utiliser la pédagogie du projet comme méthodologie, pour remédier aux lacunes repérées dans notre classe de FLE, s’est imposé de manière presque naturelle et évidente, c’est parce que nous sommes au XXIe siècle. Monter des projets en classe de FLE en particulier, ou dans l’enseignement en général, n’a pas toujours été quelque chose d’admis et continue de rebuter certains enseignants. La pédagogie du projet est le fruit d’une évolution générale du monde de l’enseignement et de l’éducation qui part des pédagogies dites nouvelles ou actives. Comprendre le processus qui a permis l’avènement de la pédagogie du projet nous permettra de mieux la comprendre et la définir. Nous aurons ainsi des éléments plus précis pour expliciter les apports et les enjeux de notre projet pédagogique.

Ainsi, dans les lignes qui suivent, nous mettrons l’accent sur les origines de la pédagogie du projet. Pour ce faire, nous débuterons par l’avènement des pédagogies nouvelles ou actives, puis nous présenterons un aperçu historique de la pédagogie du projet dans le but de récapituler ses objectifs ainsi que ses caractéristiques pour en venir ensuite à sa définition. Nous développerons cette dernière en précisant le rôle qu’occupent l’enseignant et la pratique de l’enseignement au sein de cette pédagogie ainsi que la place destinée à l’apprenant. Nous soulignerons ensuite les étapes et les démarches à suivre pour la mise en œuvre d’une telle pédagogie. Nous aborderons un peu plus loin l’évaluation et la socialisation au sein de cette pédagogie, ainsi que ses apports.

1.4. L’avènement des pédagogies nouvelles (actives)

L’avènement des méthodes actives ou nouvelles s’est fait en réaction à la pédagogie traditionnelle. Cette dernière était centrée sur la transmission des savoirs et sur le contenu, voilà pourquoi l’apprenant y était passif se contentant de recevoir le savoir de l’enseignant. Ce dernier était le détenteur de la communication et lui seul transmettait le savoir, sans donner l’opportunité aux apprenants d’interagir. L’enseignement était frontal, l’enseignant se plaçait face à la classe. Cette dernière était alignée en rangs. Les moyens d’enseignement étaient limités. L’évaluation était basée sur le système de notation chiffrée, des questions/réponses et sur l’écrit. Il s’agissait d’un enseignement basé sur la mémorisation, sur l’autorité de l’enseignant, sur les sanctions, et sur l’obéissance de l’apprenant.

La pédagogie active est apparue vers la fin du XIXème siècle mais a pris de la valeur ultérieurement. L’apprentissage est ici centré sur l’apprenant, celui-ci devient actif et construit lui-même sa connaissance. L’objectif principal de l’enseignant est alors de comprendre les

191

besoins de l’apprenant pour pouvoir l’aider, le guider dans son apprentissage. Cela nous amène à comprendre que c’est l’apprenant qui construit ses connaissances en étant en contact avec des situations-problème et en réalisant différents types de tâches adaptées à ses besoins. Ce faisant, il acquiert les outils et les connaissances dont il a besoin. L’enseignant quant à lui, joue le rôle d’organisateur, de facilitateur dans la situation d’apprentissage.

Les méthodes actives mettent en avant deux postulats : « - la connaissance doit être construite et non apprise ; - on va de l’action à la réflexion, du global à l’analyse » (BEAUTE, 2004 : 60).

Le passage à la pédagogie dite nouvelle ou active n’a pas eu comme corollaire le rejet définitif de toute la théorie de la pédagogie dite traditionnelle, qui avait été utilisée pendant très longtemps dans l’enseignement-apprentissage. Adopter une nouvelle pédagogie ouvre de nouvelles pistes à l’enseignant pour qu’il puisse choisir, par la suite, une stratégie adaptée à son enseignement et permet à l’apprenant de s’investir et de se responsabiliser davantage dans son apprentissage. Adopter cette nouvelle pédagogie n’interdit pas à l’enseignant d’intégrer quelques aspects de l’ancienne pédagogie en fonction du contexte dans lequel il se trouve. Ainsi, « la méthode abstraite idéale n’existe pas : nous conseillons plutôt à l’enseignant d’épingler dans chacune des méthodes proposées les ingrédients qui l’intéressent afin qu’il puisse construire sa propre méthode. Ce choix sera déterminé par les objectifs de l’activité, la nature du sujet traité, la composition du groupe-classe, les ressources et outils disponibles et finalement les affinités personnelles de l’enseignant » (LEBRUN, 2007 : 124).

Différents points caractérisent cette pédagogie. LEBRUN en fait l’inventaire en soulignant les points suivants : «

ü Le caractère personnel de l’apprentissage ; ü Le rôle catalyseur des connaissances antérieures ; ü Les facteurs de motivation ;

ü L’importance des « ressources » à disposition ;

ü Le rôle du contexte, de l’environnement et de l’expérience concrète ; ü Les compétences de haut niveau à exercer ;

ü La « démarche de recherche » et de questionnement dans l’apprentissage ; ü Le changement conceptuel (prise de conscience, déséquilibre, reformulation) ; ü La nécessité d’un feed-back par rapport à ses activités ;

192

ü Le caractère interactif et coopératif de l’apprentissage ;

ü Le lien entre projet personnel, professionnel, d’études, de vie ; ü L’importance d’une construction, d’une production ;

ü Le rôle de la réflexion sur l’apprentissage qui se passe (le caractère méta) » (2007 : 126). Ces caractéristiques sont présentes dans trois méthodes actives, proposés par LEBRUN (2007 : 128) : «

l’apprentissage par résolution de problème (APP) et son éclairage particulier sur les tâches et les situations d’enseignement ;

l’apprentissage coopératif (AC) et son éclairage particulier sur les formes collaboratives de l’apprentissage et de l’enseignement ;

la pédagogie du projet ou par le projet (PP) et son éclairage particulier sur le développement complet de la personne de l’étudiant »

En ce qui nous concerne, l’étude de cas que nous décrirons dans le chapitre 3 était basée sur ces trois méthodes issues de la méthode active. Nous avons eu recours en effet, pour résoudre les problèmes repérés lors des enquêtes réalisées, à l’apprentissage par résolution de problème. Ce type d’apprentissage exige un travail en groupe, de collaboration entre les étudiants et par la suite une responsabilité partagée. Une émulation collective devait être créée pour favoriser les motivations individuelles, en particulier pour les étudiants les plus inhibés. Pour ce faire, nous avons choisi une méthodologie de réalisation, celle de la pédagogie du projet nous conduisant à la réalisation d’un projet. LEBRUN précise à cet égard que ces trois types de méthodes peuvent être réunis, autrement dit : « l’apprentissage par résolution de problèmes peut recourir à certaines formes collaboratives (travail en équipe) et déboucher sur la production d’un projet personnel ». (2007 : 128).

Voyons maintenant, avant d’aborder en détails la pédagogie du projet, les origines qui lui ont donné naissance.

- La pédagogie du projet : aperçu historique.

Selon BOUTINET (2012), la pédagogie du projet est d’apparition récente. Elle a pris davantage de valeur dans les années 1980, son père fondateur et son théoricien est John Dewey et elle est issue de la pédagogie active. Dewey a été précédé de pédagogues américains comme Kilpatrick et Hennes dans les années 1919, qui avaient recommandé la pédagogie du projet dans le domaine didactique. Dans les années 1930, Dewey parle du projet comme d’une intention puis

193

comme d’un but. Il précise qu’ « on identifie la liberté au pouvoir de concevoir des projets, de les traduire en actes…Un authentique projet trouve toujours son point de départ, dans l’impulsion de l’élève…Le projet suppose la vision d’un but » (Dewey [1947], p. 75, cité par TILMAN, 2004 : 28).

Dewey ne se contente pas de cette vision de la pédagogie du projet, limitée à l’intention et au

but. Il cherche les moyens nécessaires à la réalisation du projet et attribue alors à la pédagogie

du projet la phase de « réalisation ». Grâce à celle-ci, le but et l’intention de départ deviennent concrets et prennent en considération la démarche et le plan à suivre pour une telle réalisation, ainsi que les actions à mettre en place.

Dewey attribue une grande importance au « plan d’action » (TILMAN, 2004 : 29), nécessaire pour la réalisation du projet : « la question des moyens d’action se substitue donc à celle des fins souhaitées » (Dewey, 1947, p. 78, cité par TILMAN, 2004 : 29). C’est grâce à la pensée de Dewey, précurseur de la pédagogie active ou ce qui est appelé également « des méthodes actives en pédagogie et notamment de la méthode des projets » (HUBER, 2005a : 23) que la pédagogie du projet trouve sa place actuelle. Dewey n’était pas le seul chercheur à construire les bases de cette pédagogie, il était accompagné de différents précurseurs qui ont également participé à la mise en valeur des piliers de cette pédagogie, que nous évoquons un peu plus loin.

La pédagogie du projet a eu une cessation d’usage durant un laps de temps. C’est à partir des années 1970-1980 qu’elle a de nouveau été utilisée grâce à Hameline13 (1979), cette fois-ci sous forme d’une pédagogie par objectifs en y ajoutant de nouveaux critères qui lui manquaient, comme l’évaluation et la motivation.

Cette pédagogie par objectifs a été jugée rationaliste, car la place occupée par les imprévus et la complexité est très réduite. Pour ces raisons, cette pédagogie a été limitée et par conséquent a fini par échouer.

À la suite de cet échec, la pédagogie du projet a fait sa réapparition, un demi-siècle après sa première apparition des années 1915-1920. À cette époque, la plupart des pays européens souffrent d’échec scolaire. Comme l’affirme BOUTINET, (2012 : 206) le système éducatif « s’est bureaucratisé et rigidifié à tel point qu’il a éprouvé lui-même le besoin d’instaurer des contre-feux. »

13 Daniel Hameline (né en 1931) est un pédagogue français. https://fr.wikipedia.org/wiki/Daniel_Hameline (Consulté le 11/05/2017).

194

L’apparition de la pédagogie du projet est liée à cet échec des systèmes scolaires. D’où la nécessité d’innovation et de créativité qui est apparue et par la suite, la nécessité d’intégrer différentes formes de projets pédagogiques.

À partir de ce constat on a décidé, en France, de réformer le système scolaire autour de l’année 1973. Cette réforme, nommée « 10% pédagogiques »14 veut qu’ « un dixième du temps scolaire [soit] laissé à la libre gestion créative des enseignants et des élèves. » (BOUTINET, 2012 : 206). À partir de cette réforme, la pédagogie du projet a trouvé sa place là où il existait « des expérimentations pédagogiques soit à travers les classes expérimentales, qui donneront naissance aux projets d’activités éducatives et culturelles (PACTE), soit à travers les établissements expérimentaux qui furent à l’origine des projets d’établissement. » (BOUTINET, 2012 : 206). Ces projets (PACTE), au fil du temps, cèdent leur place aux PAE « Projets d’action éducative » (BOUTINET, 2012 : 207). Finalement, la pédagogie du projet est devenue un outil pédagogique qui a pour but de changer les conditions d’enseignement- apprentissage dans le système scolaire.

Gaston MIALARET, pour sa part, avait participé au développement des « méthodes pédagogiques qui utilisent ou qui provoquent l’activité de l’élève », et il « a introduit l’idée de « projet » » (ALTET, 2006 : 30). Il s’agit, selon MIALARET, de prendre conscience de l’activité de l’apprenant, en tant qu’individu, de ses centres d’intérêt, de sa motivation, de son engagement, de la planification de l’action, de ses démarches et de prendre en compte tous ces éléments. Il considère qu’ils représentent le noyau du projet et contribuent au développement d’une pédagogie de projet.

En principe, l’idée d’introduire des projets pédagogiques dans le système scolaire a été mise en place afin de le rénover et de donner une place à la créativité et à l’imagination des apprenants dans leurs réalisations.

Selon BOUTINET, les premiers travaux sur la pédagogie du projet (d’ailleurs BOUTINET a choisi d’utiliser cette expression parmi dix 15 qui les désigne toutes), ont été réalisés grâce à la

14 Deux circulaires ministérielles du ministre de l’Education nationale sont à l’origine de la mise en place des « 10% pédagogiques » :

-la circulaire C. 73-162 du 27 mars 1973 portant sur : la mise à la disposition des établissements d’enseignement secondaire d’un contingent horaire de 10% ;

-la circulaire C. 73-240 du 23 mai 1973 pourtant sur : la détermination du contingent horaire des 10%.

Enfin une troisième circulaire fait un premier bilan de l’opération « 10% », la circulaire C. 74-210 du 24 mai 1974.

15

Plusieurs noms ont été attribués au projet dans le domaine éducatif dans les deux dernières décennies du XXème siècle, à titre d’exemple : « 1. Projet éducatif (PE) ; 2. Projet pédagogique (PP) concrétisé dans le projet

pédagogique innovant (PPI) ; 3. Pédagogie du projet ; 4. Projet d’établissement ; 5. Projet consultatif ; 6. Projet d’activités culturelle et éducatives (PACTE) plus récemment transformé en un projet d’action éducative (PAE) ; 7. Projet de formation ; 8. Projet de zone prioritaire ; 9. Projet pédagogique innovant (PPI) ; projet personnel de l’élève (PPE) » (BOUTINET, 2012 : 202).

195

pensée pragmatique nord-américaine dans les années 1915-1920. J. Dewey (1916) et W.H. Kilpatrick (1918) ont eu comme objectif de s’opposer à la pédagogie traditionnelle. La pédagogie de projet était appelée à cette époque : « pédagogie ouverte » (BOUTINET, 2012 : 205). Elle visait l’apprenant comme acteur de son apprentissage, par le biais de la réalisation d’actions correspondant à un apprentissage concret et significatif pour lui. Revenons maintenant un peu en arrière pour avoir une idée plus large sur les origines, les fondements théoriques et les précurseurs de la pédagogie du projet.

John Dewey (1859- 1952)

En même temps que son parcours universitaire en tant que professeur à l’université de Chicago, après avoir été instituteur, philosophe et psychologue, Dewey a eu à cœur de réaliser des expérimentations dans le domaine de l’éducation en testant ses propres idées. Voilà pourquoi il a ouvert en tant que pédagogue, une « école laboratoire » (BEAUTE, 2004 : 28), où les besoins des enfants étaient privilégiés. Il a pris en considération leur rôle social, grâce à une stratégie de participation et de collaboration des apprenants dans des actions, et grâce également aux « activités manuelles [qui sont considérées] comme support de l’activité intellectuelle ». (BEAUTE, 2004 : 29).

Les apprentissages, selon Dewey, doivent pouvoir répondre aux besoins des apprenants. Il utilisait l’expression « Learning by doing » (BOUTINET, 2012 : 205) qui signifie : « apprendre en faisant » (HUBER, 2005a : 23) pour caractériser cette pédagogie et son idéologie. D’après sa doctrine, l’apprenant apprend en agissant, en réalisant des actions, des projets. Ainsi, ‘’Learning by doing’’ « c’est l’apprentissage par l’action » (HUBER, 2005a : 23). Il s’oppose à l’ancienne pédagogie dite traditionnelle qui est, d’une part, devenue « coûteuse en regard des gains obtenus » (BOUTINET, 2012 : 205) et qui, d’autre part, est basée sur une idéologie « d’apprendre en écoutant » (HUBER, 2005a : 23) qui transforme l’apprenant en un être passif, subissant un système transmissif.

Dewey met en valeur le rôle social que remplit l’apprenant, et, pour cette raison, il réclame incessamment la valorisation de ce droit et de ce rôle au sein de l’école en réalisant des actions. Ces dernières peuvent être matérialisées par des projets basés sur des thématiques nécessitant l’appropriation d’outils voire de connaissances et la recherche de documentations. Cette réalisation des projets qui font écho à la vie sociale au sein de l’établissement scolaire, permet aux apprenants de se préparer à cette dernière, en étant en contact avec leurs camarades, mais aussi, avec leurs enseignants, et en ayant travaillé en groupe et partagé des responsabilités et

196

des conceptions communes pour et grâce au projet. L’idéologie de Dewey « est fondée sur les occupations de l’élève et sur la formation cognitive par l’expérience effectuée » (HUBER, 2005a : 23-24).

En Europe, l’idée de responsabiliser l’apprenant dans sa propre formation, autrement dit, de le rendre acteur, sujet de sa propre formation et non pas objet, par le fait de prendre en considération ses besoins et ses intérêts, a trouvé un écho favorable parmi les défenseurs de l’Éducation nouvelle, tels que C. Freinet, M. Montessori, O. Decroly et A. S. Makarenko, qui

Documents relatifs